L'Agence
Le Retour du Roi
Chapitre Final
- On a un soucis… fit Nila en reprenant sa position initiale.
Sans un mot, elle regardait Nubur, abasourdie. Arthur n'était pas plus loquace, malgré sa bouche grande ouverte qui lui donnait un air plus ahuri qu'à l'habitude. Jones s'impatienta face à la réaction saugrenue de ses deux collègues.
- Quoi encore ? C'est votre petite copine ?
- Pas la mienne, grommela Arthur.
En jaugeant le regard confus du colosse, Jones comprit le sérieux de la situation. Elle prit quelques secondes pour se remémorer la mission du temple maudit, et le destin tragique de Nubur.
- Nubur, c'est moi Nila, tu me reconnais ?
- …
- Peu importe qui il était, il ne semble plus très humain, ironisa Gene.
La Nuit lui lança un regard dédaigneux.
- C'est votre soucis, à vous les humains. À partir du moment où on ne vous ressemble pas, on devient une cible à abattre.
- Tout juste, c'est mon boulot et je suis payé pour, répondit-il froidement.
- Pourtant, j'ai été humain, autrefois. Il en va de même pour n'importe lequel des commandants du Sacramentum. Est-ce-que nos transformations nous condamnent à être traqués et exécutés ? Allez-vous froidement abattre votre ami Nubur ?
Sans un mot, Nubur regardait le sol, honteux. Nila balbutia.
- Je..
- Ce n'est plus « ton ami Nubur », s'emporta Gene. C'est un monstre qui tue des innocents, et c'est notre devoir de nous en débarrasser. Si tu n'es pas capable de le faire...
Saisissant le cimeterre de Nergal, il s’avança d'un pas décidé vers l'accusé. Il leva l'arme d'un geste vif et lui trancha la tête. Du moins, c'est ce qui serait arrivé sans une intervention insoupçonnée.
- Si, c'est bien « mon ami Nubur », affirma Arthur en parant l'arme avec sa propre hache. D'ailleurs, on va ramener « mon ami Nubur » dans la zone 51 pour le soigner. Et si t'es pas content, tu peux te fourrer ton avis dans le cul, avec ton cimeterre.
Jones fronça les sourcils.
- Qu'est ce que c'est que ce bordel ?
- J'ai bien peur d'être du côté d'Arthur, asséna Nila. On en doit une à Nubur, et on rentre avec lui, c'est non contestable.
- T'es barge Nila ? Tu aurais peut-être oublié qui est ton supérieur durant cette opération ?
- Sans Nubur on ne serait pas en train de participer à la dite opération, grogna Arthur.
Ils se jetèrent un regard mortel. La tension était à son comble, au pire moment de l'opération. Il n'en fallut pas plus pour que Le Sable et La Chair, qui étaient restés jusque là silencieux, profitent de l'altercation entre leurs geôliers.
- Charmantes retrouvailles.
- Gmblblh.
D'un bond, les deux commandants s’échappèrent à l'arrière de la salle, adoptant une pose de combat. Face à eux, Jones tenait encore en respect La Nuit tandis que Nila menaçait le Sang. Un peu plus loin, Arthur, Gene et Nubur formaient un triangle, source de tous les problèmes actuels. Nubur releva les yeux, et prenant conscience de la situation, murmura quelques mots.
- Non... ne vous entre-tuez pas pour moi.
- C'est un peu trop tard pour ça mon pote, rigola Arthur. Et puis je ne vais tuer personne. Je vais juste mettre la cimeterre de Gene dans son cul.
- Essaie donc pour voir.
Désespérée, Jones calcula les alternatives.
- On se regarde dans le blanc des yeux où on attend qu'Arthur enfonce la cimeterre de Gene dans son cul ?
- Si je peux me permettre, la stoppa La Nuit d'une voix aiguë.
Elle lui jeta un regard interrogateur.
- Cette situation malencontreuse n'aurait pas eu lieu si vous n'aviez pas tenté de nous trahir, en opposition totale avec le plan que nous vous avions bénévolement proposé.
- Garde ton venin serpent, vous attendiez probablement la première occasion d'en faire de même, on a simplement été plus rapides.
- Des accusations infondées et horribles. Voilà ce que je propose : vous me relâchez, ainsi que ma collègue, et nous discutons tous ensemble de la suite des événements. Si nécessaire, ce très cher Nubur pourra servir de médiateur.
- Pourquoi on aurait besoin d'un radiateur ? S'interrogea Arthur.
Jones, qui avait toujours Durendal dangereusement pointée sur la nuque de son adversaire, lui accorda un regard dédaigneux.
- Pourquoi je prendrais cette peine ?
- Parce que nous tuer ne servirait à rien, siffla Le Sang. Le Sable et La Chair s'enfuiront dans Camelot au moindre signe belliqueux, ce qui nous rendra de nouveau immortels.
- En effet, autant gagner du temps et éviter des efforts inutiles, poursuivit La Nuit. De plus, mourir est une sensation extrêmement désagréable, même lorsqu'on peut ressusciter.
Les membres de l'Agence s'échangèrent des regards rapides. La proposition faisait sens, et avait le mérite de désamorcer un futur conflit tout en permettant de traiter une bonne fois pour toute le cas Nubur. Jones soupira, ce qui eut pour effet de faire grimacer Nila.
- Je suis désolé qu'on en soit arrivé là, regretta la jeune femme.
- Ne t'excuse pas, on réglera nos affaires plus tard. Dans l'immédiat...
Elle déplaca la lame de Durendal, et Nila en fit de même avec ses sabres. Les deux vampires se relevèrent, mécontents d'avoir passé les précédentes minutes allongé au sol. En s'époussetant, Le Sang lâcha une de ses piques habituelles.
- Vous êtes de véritables rustres.
- Pas de folies, cracha Arthur. On vous a déjà foutu une raclée une fois.
- Et on aura aucune difficulté pour renouveler l'exploit, termina Gene.
L'ambiance semblait s'être légèrement améliorée. La Chair et Le Sable étaient toujours à proximité de la porte, prêts à fuir à la moindre menace. Toutefois, tous les autres acteurs s'étaient rassemblés en cercle, Nubur y compris.
- Ils t'ont fait quoi mon gars ? L'interrogea le colosse à sa gauche.
- Rien. Le Sacramentum m'a recueilli, et a donné un nouveau sens à mon existence.
- Détruire des mégalopoles ? Ironisa Gene.
- Je me contente de suivre sans poser de questions. Depuis que Nergal m'a transformé, je ne peux plus vivre parmi les humains. J'ai donc décidé d'aider les monstres qui m'ont accepté, peu importe leurs objectifs.
- Un peu simpliste comme raisonnement, trancha Jones.
Nila le regardait, abasourdie. Elle s'attendait à ne plus jamais le revoir. Pourtant, il était bien là, face à elle aujourd'hui.
- Tu aurais du nous contacter. Nous t'aurions aidé.
- Comment ? Regretta le télépathe. Je n'avais pas cette alternative.
- Du coup, il s'est tourné vers nous, siffla Le Sang, un sourire narquois au visage.
- Nous avons accueilli Nubur parmi nous, et lui avons appris à maîtriser ses pouvoirs. Il est donc devenu La Neige, expliqua La Nuit.
- La Neige ? Je pensais qu'il était devenu Le Radiateur, s'étonna Arthur.
L'ancien guide leva les yeux, et plongea son regard dans celui de Nila.
- Voilà, tu sais tout. Libre à toi de me juger pour mes crimes. J'accepte ta sanction, Nila.
- Mon avis n'a pas changé, on te ramène avec nous.
- Ce n'est peut-être pas la question à laquelle on devrait réfléchir, affirma Le Sable depuis le fond de la pièce.
Ils se tournèrent tous vers lui. À ses côtés, Le Sang répondit d'un Grmblourghmbl approbateur.
- Vous pouvez faire ce que bon vous semble de Nubur, personne ici ne s'y opposera. En échange, cela serait sympathique d'accorder un peu plus de considération à nos vies. Nos deux camps ont à y gagner.
- Tu sembles bien confiant, répondit Jones.
- Ce n'était pas une provocation. J'explique seulement que le cas de Nubur est une broutille, pas le vrai problème.
- Dans ce cas, quel est le vrai problème ? Grogna Gene.
Le Sable croisa ses doigts momifiés, songeur.
- Je suppose que vous avez un plan pour vous débarrasser du Roi Arthur ?
- En quoi ça te regarde, tête de nœud, rétorqua Arthur.
- J'ai senti le Maya Veda, j'ai déjà une idée relativement claire de ce qu'il est en train de se dérouler dans la dimension parallèle. Je demandais par politesse.
- Le Maya Quoi ?
- Laisse tomber, l'interrompit Gene.
Redford soupira, jetant un œil inquiet à son artefact.
- Ce que tu supposes doit s'approcher de la réalité. En ce moment même, quelqu'un affronte le Roi Arthur dans le Maya Veda. Mais le déferlement de puissance brouille ma vision, je ne sais pas vraiment ce qu'il se passe là-bas.
- Vous pensez que votre atout sera suffisant pour vaincre le roi ? Ironisa Le Sang.
- Il reçoit l'aide d'Helena, lui répondit l'autre vampire d'un ton sec.
- Croyez moi, il n'en aura pas besoin, affirma Nila.
- Je vois, donc Helena nous a bel et bien trahi. Je ne voulais pas y croire, mais nous en avons à présent la confirmation.
Nila grimaça. Les commandants du Sacramentum s'échangèrent des coups d'oeil songeurs, puis semblèrent accepter l'inévitable.
- Grmblel.
- Oui, cela devait bien arriver tôt ou tard, répondit Le Sable. Après tout, pour elle, on est des pions dispensables.
- Je suis attristé que le plus grand support de la cause des monstres nous accorde si peu de considération, regretta La Nuit.
- Cela dit, ce n'est pas comme si nous respections son autorité. On réfléchit à la renverser depuis qu'elle a déchaîné le Roi Arthur sur le monde.
- C'est bientôt fini vos petites discussions ? Questionna Jones.
Les commandants soupirèrent, et le Sable se décida à reprendre le cours de la conversation.
- Bien, à présent, nous avons toutes les pièces du puzzle. La question est de savoir si le Roi Arthur va être vaincu ou non par votre atout et Helena. Si c'est le cas, mes félicitations. Mais si ils échouent, nous serons tous dans une situation détestable, et il nous faudra collaborer autour d'une solution commune.
- Qu'est ce qui nous assure que vous n'allez pas vous barrer à la première occasion ? S'indigna Arthur.
- Probablement le destin de la planète, lâcha Le Sang d'un ton sarcastique. Peu importe nos divergences, personne ici n'a intérêt à voir le monde détruit par un tyran sociopathe.
- C'est plutôt convaincant, ironisa Gene.
La Nuit lui jeta un regard froid.
- Votre opinion sur les monstres semble affreusement manichéenne. Comme je l'ai expliqué, beaucoup d'entre nous étaient humains, autrefois. Notre condition est une malédiction à laquelle nous nous sommes adaptés. Aurions-nous dû nous laisser mourir ? Vous nous refusez le droit d'exister ? Quel orgueil. J'attends avec impatience le jour où vos collègues auront à vous abattre, le jour où vous serez devenu le nouveau Nubur. Là, peut-être, nous reparlerons.
- T'es bien éloquent, connard, s'énerva Gene en brandissant la cimeterre de Nergal.
- Il suffit, le stoppa Jones.
Elle s'attarda sur la situation avant de prendre une décision appropriée.
- Très bien, on attend tous bien sagement le résultat de l'affrontement contre le Roi Arthur. Pas de folies, je vous rappelle que pour l'instant, vous êtes coincés par la barrière d'Helena. J'ai pas vraiment envie de vous courir après dans tout Camelot.
- Évidemment, répondit La Nuit, un sourire moqueur au visage.
- Si tout se passe bien, et cela devrait être le cas, le Roi Arthur prend sa raclée, et on retourne tous à la base, vous compris. On a peut-être pas les moyens de briser le sortilège d'invincibilité pour l'instant, mais avec l'assistance d'Helena, cela ne devrait pas être très compliqué.
- Et donc ? Questionna Le Sable.
- Et donc, si vous êtes sages, on réfléchira à vous laisser la vie sauve. Par contre, à la moindre tentative foireuse, je me chargerai personnellement de vous démolir une fois le sort brisé.
- Très aimable, répondit-il.
La Nuit soupira.
- Comment avons-nous pu finir dans une telle situation ?
Quelques minutes plus tôt, dans le Maya Veda,
Zero fixait le Roi Arthur, qui était tétanisé par la peur. Incapable de bouger, il restait immobile, incapable de formuler un mot.
- C'est ça le fameux Roi Arthur qui fait peur à tout le monde ? Je me suis déplacé pour rien.
- V... vieillard, t-tiens ta langue !
- Tais-toi, je sens quelque chose...
Le vénérable guerrier fit taire son adversaire d'un geste vif de la main. Il fronça les sourcils, se concentrant sur son environnement à travers sa connexion privilégiée avec les arts mystiques. Ce qu'il y trouva sembla grandement lui déplaire.
- Cette aura... Belzek ? Tu viens de te faire laminer par Belzek ?
- Je... c'était...
- Qu'une tête de mule, il est venu tester son nouveau jouet en secret. À ce compte-là, il aurait du me prévenir depuis le début. Tous ces moyens mis en place pour rien.
- Si... silence !
- Bon, je suppose que cela aura permis d'entraîner un peu les jeunes. Rien de tel que le coup de la menace apocalyptique annuelle pour booster le moral des troupes.
- J'ai dit... SILENCE !
Le Roi Arthur hurla, déchaînant toute sa rage et son énergie. Les eaux d'Avalon se déchaînèrent, formant d'immenses vagues scélérates qui se brisaient à l'horizon. Il leva Excalibur, et bondissant à la vitesse du son, il détruisit le corps chétif du vieillard. Du moins, c'est ce qu'il crut faire. Quelques mètres plus loin, Zero se grattait le menton en jugeant l'arme antique, perplexe.
- Plutôt puissante comme arme.
- Par quelle sorcellerie ?
- Ah non, je suis très fort en sorcellerie, mais ce n'était pas de la sorcellerie. Je suis juste...
En moins d'un dixième de seconde, il s'avança jusqu'à son adversaire, se plaçant à quelques millimètres de son visage pour finir sa phrase.
- Je suis juste rapide.
- Qu'est ce que ?
- Très rapide.
Il fit volte-face, marchant sur l'eau qui s'était calmée, pour y chercher le reflet de son visage.
- L'idée, c'était d'utiliser le vieil enchanteur pour te faire revenir du côté lumineux de la force.
- Le vieil enchanteur ? Merlin !
- Tout juste, mais vu ton niveau actuel, cela n'aurait pas grand intérêt. Autant récupérer ton épée pour l'attribuer à quelqu'un de plus compétent.
- Excalibur ? Foutaises ! Je suis le seul maître de cette lame, elle m'a choisi !
- Bon, ça suffit maintenant, je peux pas en placer une avec toi.
Il jeta un regard noir au roi. Ce dernier recula instinctivement, commençant à grelotter dans sa grande armure de métal. Puis, se rendant compte de sa propre faiblesse, quelque chose s'éveilla en lui. Toute l'énergie qu'il avait accumulé éclata soudainement.
- Excalibur, prête moi ta force pour un ultime combat ! Ensemble, nous avons survécu à travers les périls d'innombrables champs de bataille ! Ensemble, nous avons forgé une légende qui transcende le temps pour incarner la toute puissance de la destinée ! Et aujourd'hui, ensemble, nous forgerons l'apogée de la qu-
- Chut.
Exaspéré, Zero s'avança en un clin d’œil vers le Roi Arthur et le fit exploser d'un uppercut bien placé.
- Merde, j'y suis allé un petit peu trop fort, l'épée s'est envolée.
En effet, au milieu des bouts de chair qui pleuvaient sur Avalon, l'épée magique avait disparu.
- Pour ma défense, il était vraiment insupportable, c'est dur de gérer sa force dans de telles conditions.
Un air coupable sur le visage, le vieil homme donna un coup de pied dans une des plaques d'armures maculées de sang qui jonchaient le sol. Après avoir passé quelques minutes à chercher le trésor convoité, il le trouva finalement englouti quelques mètres sous les eaux.
- Parfait, par contre je vais éviter de me mouiller, hop !
Utilisant quelques sortilèges dont il avait le secret, le sorcier fit jaillir l'épée hors de l'eau jusqu'à sa main. Il fit une macabre découverte.
- Eurk, écœurant.
Les doigts du Roi Arthur étaient encore fermement accrochés au pommeau, il n'avait probablement pas eu le temps de comprendre ce qui lui était arrivé. Tandis que Zero décrochait les doigts un par un, il sentit une présence familière approcher dans son dos. Helena semblait surprise, mais Merlin, les yeux écarquillés et sa bouche édentée grande ouverte, semblait encore plus sidéré.
- Il... il est... mort ?!
- Oui, je l'ai oblitéré sans vous.
- Alors tu n'avais pas besoin de mon aide, soupira Helena.
- Il faut dire qu'on l'avait tous un peu surestimé, désolé.
- Ce n'est pas très grave, au moins on va pouvoir se concentrer sur des sujets plus importants.
- Oui, il est grand temps d'avoir une véritable discussion.
- Attendez... murmura Merlin.
Ce dernier regardait le sol, inerte. Il s'agenouilla, puis récupéra le pied gauche du Roi Arthur qu'il secoua au dessus de sa tête, indigné.
- Tout ça pour ça ? Le Roi Arthur est MORT ?
- Oui, encore désolé, s'excusa Zero.
- Je... j'ai besoin d'alcool.
Le vieillard fit tomber lourdement son postérieur contre le sol, abasourdi. Il se gratta ensuite le dos avec le gros orteil du Roi Arthur.
- J'ai un très bon millésime dans mon bureau de New-york.
- Non, je veux de la 8.6, grogna l'enchanteur.
- Très bien, dans ce cas on s'arrêtera dans une épicerie en rentrant.
- Mais n'oublions pas le principal, les stoppa Helena.
Elle jeta un regard accusateur à son ex-compagnon.
- Certes, mais d'abord, récupérons les jeunes. Ils ont le droit de savoir ce qu'il s'est passé ici.
- Comme tu le souhaites.
- Tu n'as rien à dire à tes commandants ?
- Ils ont tenté de me trahir, dans l'immédiat, j'ai donc surtout envie de les tuer.
- Il faut dire que tu as déchaîné une sacrée menace sur le monde.
- Je le pensais contrôlable.
Merlin grommela.
- Personne ne contrôle le Roi Arthur.
- Et qu'en est-il de l'épée ? Le questionna Zero.
- Je suppose qu'elle pourrait être utilisée par une personne aux intentions honnêtes, avec l'entraînement adéquat.
- Très bien, je vais réfléchir à qui l'attribuer dans ce cas.
- Cependant, le pouvoir corrompt, ne l'oubliez pas, sorcier.
- Ne vous en faites pas, j'en suis déjà conscient, enchanteur.
Il jeta un regard plein de reproches à Helena, qu'elle fit mine d'ignorer. Superposant ses mains, il commença alors à entamer quelques rituels complexes pour rejoindre ses agents dans le flux véritable de la réalité.
Présent, au sein de Camelot, la citadelle volante,
- Empalement, déclara La Nuit.
- Mantra, répondit Nila.
- Rapiécer, cria Le Sable depuis le fond de la salle.
- Grmblel.
- Non, ce n'est pas encore ton tour, s'indigna Le Sable.
Cela faisait quelques minutes qu'ils attendaient le résultat de la confrontation contre le Roi Arthur. Mais le temps commençait déjà à se faire long.
- Séduisant, asséna Gene en lançant un clin d’œil à Jones, qui avait refusé de prendre part au jeu des mots. Elle lui renvoya un regard meurtrier.
- Enterra, siffla Le Sang d'un ton sadique.
- Radiateur, hurla Arthur.
- Bon, c'est pas fini vos conneries ? S'offusqua Jones.
Alors qu'elle se levait d'un bond, une distorsion de l'espace scinda la réalité, laissant apparaître Zero, Helena et Merlin à travers un portail trans-dimensionnel. Les membres du Sacramentum et de l'Agence restèrent stupéfaits face à cette apparition soudaine. Le vieil homme épousseta son pantalon, puis s'empressa de refermer la porte d'un claquement de doigt. Il s'adressa ensuite à l'assemblée.
- Bonjour à tous. Pour répondre à votre question, le Roi Arthur a été vaincu à la suite d'un combat d'anthologie, qui restera pour sûr gravé dans les mémoires.
La nouvelle sembla provoquer différentes réactions, mais la principale était bien évidemment la surprise, qui laissa place sous peu à un immense soulagement. Helena n'attendit pas que la pression retombe, elle commença à concentrer son énergie tout en adressant une grimace de dégoût à ses commandants.
- Votre trahison vous rend inutiles. J'ai annulé le sortilège d'invincibilité. Maintenant, disparaissez.
- Un instant, la stoppa Nila.
Elle s'interposa, pointant du doigt Nubur.
- C'est notre ami, je vous implore de le laisser en vie.
- Très bien, requête acceptée. À présent, je tue tous les autres.
La Chair et le Sable s'enfuirent par la porte, mais Le Sang et La Nuit n'eurent pas cette possibilité, ils étaient trop proches.
- Alors, c'est comme ça que ça finit, se lamenta La Nuit.
- Non, on peut toujours tenter ça !
Le Sang disparut dans un nuage de fumée noire. Helena, peu amusée, claqua des mains pour la faire réapparaître au sol, stupéfaite.
- Futile. Comme la fuite des deux autres. Ma barrière est toujours active, personne ne pourra s'opposer à moi.
- Moi, je le peux.
Zero posa sa main sur l'épaule d'Helena. Elle questionna son intervention.
- Ce sont mes affaires.
- Effectivement, mais j'ai mon mot à dire. Tu ne peux pas te contenter de supprimer tous les jouets qui ne te conviennent pas. Cela entraverait notre projet commun.
- Un projet commun ? Quel projet commun ?
- La zone de protection des monstres.
Tous furent étonnés par cette déclaration soudaine. Zero acquiesça d'un signe de tête.
- J'y ai réfléchi suite à notre conversation. Non... pour être franc, cela fait longtemps que j'y réfléchis. Cela m'a toujours semblé être la meilleure alternative, mais aujourd'hui, j'ai les moyens de la mettre en place.
- Comment ça ? Rétorqua Helena d'un ton inquisiteur.
- Je protège le monde des monstres, et tu protèges les monstres du monde. Mais pourquoi ne pas trouver un compromis ? Avec toutes les connaissances, tous les artefacts que l'Agence a réuni, il est possible de trouver une solution qui conviendra à tous.
La vieille femme lui jeta un sourire narquois.
- Une prison ? Comme c'est aimable.
- Non, pas une prison, expliqua Zero d'une voix très sérieuse. Un continent. Nous allons créer un continent caché pour protéger les monstres du monde. Et le monde des monstres, évidemment. Mais peut-être que la personne que j'ai chargé de ce projet insensé pourra vous le présenter mieux que moi.
D'un geste bref, il dégaina un vieux Nokia de sa poche, qu'il tapota avec difficulté sous le regard attentif de son audience.
- La technologie, mon seul point faible. Mince, comment je fais fonctionner ce truc ? C'est fâcheux, je risque de rater le timing de ma présentation. J'ai l'impression que ce bidule ne s'allume même pas !
Quelques minutes plus tôt, Zone 51,
- Toujours pas de nouvelles du vieillar, TT12 ?
- Négatif.
- Et le professeur Abigail ?
- Pas de nouvelles non plus, la connexion a été coupée.
- Eh bien, je suppose que cela nous laisse le temps de lire le dernier chapitre de One Piece.
Le scientifique se fraya un chemin à travers les collines de cartons de pizza qui habitaient son laboratoire. Enjambant les derniers obstacles, il ne s'arrêta dans sa course que pour récupérer une part qui avait miraculeusement survécu. Ce fut donc avec joie qu'il attaqua la lecture, sa tranche à la main.
- TT12, tu pourrais me servir un verre de coca frais ?
- Je crains de devoir refuser, Maître Samir.
- Et pourquoi donc ?
- Pour vous empêcher de devenir obèse, sans nul doute.
L'homme fronça les sourcils.
- Je n'ai pas le souvenir de t'avoir ajouté une fonction diététicienne.
- C'est probablement la graisse qui vous obstrue la mémoire.
- Connard de robot !
Il déchaussa une de ses babouches, qu'il jeta de toutes ses forces sur son acolyte. Ce dernier ne prit même pas la peine d'esquiver, se contentant de recevoir mollement la chaussure qui livra un « bong » sonore à la réception.
- Je suis fier de voir que vous vous mettez enfin au sport, Maître Samir.
- Je vais te...
- ALERTE, ALERTE, ALERTE, ALERTE, ALERTE-
- Qu'est ce que ?
L'alarme venait de s'activer, et la pièce était à présent baignée d'une lumière rouge. Pourtant, aucune menace n'était supposée émerger. Le Roi Arthur et le Sacramentum se trouvaient en ce moment-même en présence de l'homme le plus fort du monde, si ce n'est de l'univers : Zero. Alors, pourquoi une alerte si soudaine ? Le chef des gardiens s'affola, jetant un regard inquiet à son robot de compagnie.
- TT12, pourquoi l'alarme s'active ?
- Je ne sais pas, je suis actuellement en train de... j'ai trouvé, il semblerait que... non, impossible statistiquement, ce doit être une erreur dans mon système.
- J'ai personnellement codé ton système, il est sans faille.
- Dans ce cas, il semblerait... il semblerait qu'un énorme rayon d'énergie brute ait été tiré depuis l’Antarctique à l'instant.
- Pardon ? Affiche un visuel !
- Impossible, l'impulsion électromagnétique a paralysé tous les appareils électriques de la planète, nos systèmes sont actuellement en maintenance de secours.
- Combien de temps avant la fin de maintenance ?
- Approximativement 15 secondes.
Samir se jeta par dessus les cartons de pizza, fonçant à la rencontre de son ordinateur quantique qui redémarrait difficilement. Une attaque dont l'amplitude est suffisamment puissante pour atteindre les systèmes surprotégés de la zone 51... Quelle est donc sa source ? Non... Quel est donc sa cible ? Un sentiment de terreur s'empara du scientifique.
- TT12, combien de temps ?
- Redémarrage terminé !
- Tente de contacter Zero !
- Impossible, l'onde électromagnétique a probablement détruit ses moyens de communication.
- Dans ce cas, affiche le visuel de l'attaque, je veux savoir ce qu'elle vise !
L'écran s'illumina, montrant la cible du gigantesque rayon d'énergie tiré depuis l'Antarctique.
- Sainte mère de Dieu. TT12, impact estimé dans combien de temps ?
- Une seconde.
Au même moment, Camelot, la citadelle volante.
- J'ai l'impression que ce bidule ne s'allume même pas !
Soudain, Zero se retourna vers le Nord. Le gigantesque rayon d'énergie oblitéra Camelot, désintégrant jusqu'au dernier atome sur son chemin. Quand la poussière retomba, il ne restait plus rien de la citadelle volante, si ce n'est un nuage de poussière recouvrant l'océan impassible.
FIN DE L'ARC 4