Lecture nocturne
Couchée dans son lit, Eleonara fixait inlassablement le plafond, où se réfléchissaient les lueurs lunaires en stries. C'était étrange ; bien qu'elle se considérât en sécurité, elle n'avait pas la conscience tranquille. Jetant sa quête de sommeil à l'eau, elle s'assit en tailleur et serra son coussin contre elle. Le labeur chassait le chagrin le jour, mais n'empêchait pas ses visites de nuit, lorsque les âmes sont à leur plus vulnérable état.
Un creux était là, en elle. À quoi ressemblait la pièce pour le combler, ça, Eleonara n'en savait rien. Peut-être avait-elle besoin d'être rassurée ? Il lui manquait un guide, quelqu'un pour valider ses décisions et lui pointer la bonne direction.
Les paupières lourdes, l'elfe sonda l'obscurité de sa cellule. Pourquoi faisait-il toujours si noir là où elle dormait ? Au cellier, en prison... c'était toujours pareil.
À l'aveuglette, elle ouvrit le coffre au pied de son lit, alluma une bougie et se rassit avec un grincement. Des ombres menaçantes se dressèrent sur les parois rugueuses, mais l'elfe ne quitta pas le feu des yeux. Malgré la chaleur et le réconfort qu'offrait l'éclat flamboyant, sa vue s'embuait.
Il était revenu. Le souvenir de la Dame lui broyait le cœur. « Tu iras, tu fuiras, tu retrouveras les tiens et tu comprendras. » Ça sonnait si facile, si évident. Elle avait essayé pour Hêtrefoux, mais... Un sanglot se coinça dans sa gorge ; elle déglutit. N'avait-elle pas fait son deuil ? Pourquoi la douleur tranchait-elle si vivement si les traits de la Dame s'effilochaient ? Eleonara haïssait sa vulnérabilité, ses regrets. Les vrais elfes s'économisaient toutes ces peines, elle en était certaine. Ils ne se tourmentaient pas pour ça. Elle n'était qu'une faiblarde.
Hélas, on n'ordonne pas à la tristesse de disparaître. Plus on la chasse, plus elle nous aime. Enlacée par le chagrin, Eleonara se sentit seule, terriblement seule et, à la place de le combattre, se laissa grignoter.
La flamme ondoyait. Le silence planait. Ses orteils découverts se crispaient de froid. À moitié dévorée, elle formuler : « Tu me manques. »
Longtemps, elle resta ainsi, à observer la bougie se consumer par échelons, les pensées dans le vide. Si les supérieures apprenaient comment elle gaspillait la précieuse cire...
Un crissement.
Derrière elle. Dans le couloir.
Le cœur lourd, les yeux enflés, l'elfe tendit une oreille avec un crissement de cartilage.
Des pas.
Quelqu'un avait quitté son dortoir après les complies, la dernière prière de la journée marquant l'heure du coucher. Ignorer les complies était enfreindre la loi du couvent : le repos était sacré et sortir de nuit sous-entendait forcément sales coups, secrets et traîtrises.
Ayant séché ses joues humides et ramassé sa bougie, Eleonara guigna par le trou de la serrure et, ne voyant rien, déverrouilla.
Il n'y avait personne dans le couloir, juste des cellules closes.
Confuse, Eleonara souffla la chandelle, ferma la porte, s'enfonça sous sa couette et se mit à compter les moutons pour évacuer la Dame de ses pensées. « Cent six, cent sept, cent huit... »
Un froissement d'habit.
Comme piquée par une abeille, Eleonara poussa sa couverture de côté et tira sur la poignée de la porte, qui gémit bruyamment. Quelques cellules plus loin, une silhouette sursauta.
Un bonnet blanc enfoncé sur sa tête, à pieds nus et en chemise de nuit, la Chouette plaquait un gros livre contre sa poitrine. Pour tout réflexe, elle tendit un bras en avant, scella ses paupières et poursuivit sa démarche d'un pas fantomatique.
Se doutant que la piètre imitation de somnambule servait à l'ignorer, Eleonara se glissa hors de sa chambre et lui arracha son livre. La fatigue lui avait retiré son sens de l'inhibition.
Son geste eut l'effet voulu : comme par magie, la dormeuse ambulante émergea de son sommeil factice, prête à se chamailler pour récupérer son bouquin qui pesait autant que du plomb.
— Rends-le moi ! ordonna-t-elle, pas plus haut qu'un murmure.
Eleonara se déroba et tâtonna la couverture pour deviner le titre de l'ouvrage, en relief et en majuscules : HISTOIRE ET PEUPLES DES TROYAUMES. Voilà qui expliquait son poids ; il devait recueillir des siècles et des siècles de savoir ! Qu'espérait tirer Melvine d'un tel pavé à une heure si tardive ?
Une révélation s'écrasa sur l'elfe telle une déjection de moineau : et si le pavé en question contenait des réponses sur Hêtrefoux, les Sylvains et les elfes ?
Un tant soit peu gênée, Sœur Melvine tordait sa bouche minuscule dans tous les sens.
— S'il te plaît, rends-le-moi. Je ressentais le besoin de me renseigner et je...
— Je croyais qu'emprunter des livres était interdit.
Melvine fixa Eleonara puis le sol.
— D'accord, j'assume, je te dois une explication.
Avant qu'Eleonara ne pût protester, la Chouette l’attrapa par le bras et la poussa dans un dortoir, une copie conforme du sien, sobre et simple.
Ayant clos la porte derrière elle, l'Einhendrienne sortit sa réserve de chandelles, dont il ne restait plus grand-chose. Elle devait réellement recourir à la lecture nocturne de manière abusive.
L'elfe fut toutefois moins choquée par sa consommation de bougies que par l'état de son coffre, du sol et des murs de sa cellule. La flamme que Melvine avait fixé sur un porte-chandelle chassait l'obscurité et pourtant, les parois gardaient la couleur de suie. En effet, tout dans la pièce semblait avoir vu un brasier de trop près. Eleonara se promit de déguerpir à la première occasion.
Sœur Melvine s’installa sur son vieux lit craquant, le document sur les genoux et invita Eleonara à prendre place à ses côtés. Enivrée de sommeil et engourdie par la mémoire de ses larmes, l'elfe obtempéra.
Sous la clarté du cierge, les coins et les nerfs dorés du livre resplendissaient, tout comme sa doublure sertie de pierres précieuses.
— N'est-ce pas divinement extraordinaire ? susurra la Chouette en caressant les gemmes. Et dire que le vrai trésor se trouve à l'intérieur...
Avec une délicatesse trahissant une tendresse passionnelle, Melvine fit défiler les pages jaunies, qui affichaient illustrations animales et végétales, icônes humaines et majuscules décorées. Les enluminures, par leurs torsades, leurs spirales et leurs arabesques, ensorcelaient le lecteur. Des pages entières, consacrées à des scènes de bataille, prenaient vie sous la magie et l'intensité des pigments. Rectos et versos avaient été rédigés et ornés avec soin, amour et minutie par des plumes oubliées des âges ; aucune fée n'aurait su les surpasser dans leur art. C'était un produit humain pur et dur et pourtant, Eleonara ne parvenait pas à en décoller les yeux.
Sœur Melvine fronça les sourcils.
— Non, ce n'est pas ça, le vrai trésor ! bougonna-t-elle. Enfin, ce n'est qu'une partie. (Elle martela le texte de son index.) Le bijou, c'est le contenu ! Il ne faut pas uniquement regarder les images, il faut lire. Comprendre.
L'elfe choisit cet instant-là pour se rappeler comment Dalisa lui avait enseigné la lecture : avec un alphabet gravé sur une tablette de cire, des phrases blessantes à déchiffrer, une cravache, des bleus et d'acides remontrances. Sa rêverie aigre-douce se brisa lorsque la Chouette tapota à nouveau sur le vélin.
— Allez, lis.
Réticente mais manquant l'énergie pour renâcler, Eleonara saisit l'ouvrage et se pencha lentement sur les pages beiges croquées dans les angles et foncées dans les bords. Elle y lut :
Chapitre III : le Mikilldys.
— J'avais envie de réviser l'histoire des Barbares et... Qu'est-ce que tu fais ? s'écria la Chouette en voyant sa consœur tourner les pages à la hâte.
Eleonara arriva à la fin de l'ouvrage et soupira, désappointée, avant de revenir à la page convoitée par l'Einhendrienne. Elle avait espéré tomber sur un chapitre consacré aux elfes. Il n'y en avait pas. Les elfes ne figuraient pas dans Histoire et peuples des Troyaumes.
Comme s'ils n'avaient jamais existé.
— Je voulais juste voir le nombre de pages, marmonna Eleonara. Pourquoi pouvez-vous emprunter des livres et moi pas ?
Melvine s'appuya sur ses coudes.
— En tant que responsable de la bibliothèque, je possède la clef pour séparer les livres de leurs étagères. Ne me regarde pas comme ça ; je ne prête pas ma clef. N'essaie pas le chantage non plus ; je suis incorruptible. Je lis la nuit parce que je n'en ai pas le temps pendant la journée. Sœur Louve le sait et m'a donné son autorisation. S'il y a une chose que je n'ai jamais abîmé, c'est un livre.
Pour Eleonara, la conversation était finie. Elle avait sa réponse ; elle pouvait aller ruminer et maudire les humains dans sa cellule en paix maintenant. La Chouette, en revanche, avait encore des mots sur la langue.
— Comme je te disais, j'avais envie de réviser l'histoire des Barbares. Surtout maintenant qu'ils se sont infiltrés jusqu'à nous. Dans les forges, les moulins, les prisons et même au Don'hill. Qui l'aurait cru ? Je ne vois pas l'intérêt de les amener jusqu'ici. À mon avis, la Confrérie est inutile. Pour autant que je sache, ce n'est qu'une armée d'intimidation. Les moines-soldats, s'ils ne sont pas occupés par un entraînement peu représentatif de la réalité, ne font que de fumer et de boire dans le dos de l'Abbé. Tu verras, c'est pitoyable. Quand je pense que ces types-là sont censés maintenir l'ordre ailleurs et qu'ils n'arrivent même pas à le faire dans leur mode de vie, je perds foi en l'humanité.
« On est deux », songea Eleonara sans se gêner de bâiller. Pourquoi cette humaine lui racontait-elle tout ça ? Elles se connaissaient à peine.
Sans que la fraîcheur de leur rencontre ne parût la déranger, Melvine poursuivit, son flux de paroles aussi fluide que l'écoulement d'une fontaine.
— L'Abbé devrait sérieusement songer à faire rapatrier les Barbares. Un jour, un sinistre adviendra ; ce sera de leur faute ; il y aura une guerre et tout le monde sera désolé de ne pas m'avoir écoutée. Savais-tu que les Mikildiennes sont si poilues que les chasseurs les méprennent pour des ours ? Que c'est grâce à leur peau épaisse comme le cuir que les Barbares résistent au froid ? Bon, j'avoue, l'anecdote des ours n'est qu'une rumeur. Pour la peau, en revanche, je peux t'assurer que non. Leur dentition serait admirablement costaude, aussi. Les racines de leurs molaires sont pareilles à celles des arbres, elles s'entremêlent. Il est impossible de leur arracher une dent sans leur briser la mâchoire. Tout est expliqué dans la section Anatomie, page trois-cent douze, si je ne m'abuse.
Des dents aux racines pareilles à celles des arbres. Eleonara se souvint de sa rencontre avec Agnan à l'écurie de Franc-Boise. Il n'avait eu qu'à mordiller ses liens pour la délivrer.
— On dit souvent que les Mikilldiens sont aussi assidus qu’exploitables, enchaîna la Chouette. De gros bêtas, en quelques sortes. Je n'y crois pas une seconde. Même avec leurs mines de soumis et de toute la peine qu'ils se donnent, ils n'auront jamais ma confiance. Historiquement, ce sont des têtes dures ; ils endureraient n'importe quoi pour nous poignarder dans le dos. Leur venue ici ne présage rien de bon, cassés ou non.
Elle se tut et, durant le long intervalle silencieux qui s'ensuivit, se contenta de transpercer l'elfe du regard.
— C'est plutôt l'Opyrienne qui m'inquiète, releva Eleonara en détournant les yeux.
— Ah. Celle-là. Je la vois parfaitement assassiner sa troupe à la première mission, faire un attentat sur le Don'hill ou charmer et ruiner un sergent. Tu as raison ; elle est bien pire.
Aussi probables qu'étaient ses hypothèses, aucune ne se basait sur des preuves concrètes, à l'instar des bruits répandus par le reste des nonnes. Sebasha n'avait encore rien commis que, quelques semaines après son arrivée, elle s'imposait déjà en tant que danger numéro un de l'abbaye. Elle se servait de sa réputation comme d'une carapace : plus on parlait d'elle, plus on la craignait, sans savoir de quoi l'accuser.
Sœur Melvine posa une main consolatrice sur l'épaule d'Eleonara.
— Tes yeux sont rouges... Tu as pleuré ?
L'elfe tressaillit et voulut se dégager. La Chouette s'empressa de la retenir.
— Non, non, ne sois pas embarrassée. Ta famille te manque, c'est ça ? Ne t'inquiète pas, c'est normal. Moi aussi je pense à ma famille. Regarde.
Elle se mit à palper le mur derrière elle et appuya ses doigts dans la paroi. En s'aidant de ses ongles, elle retira une brique branlante dissimulant un trou de profondeur moyenne.
Une cachette personnelle.
Melvine y introduit son bras et en ressortit un petit tas de vêtements, qu'elle déplia un à un.
— Ne dis à personne que j'ai excavé le mur avec une cuillère. On me creuserait les orbites. Avec ma cuillère.
Eleonara contempla les habits étendus sur le lit : des braies noires renforcées aux mollets et à l'entre-jambe, un bliaud aux manches longues et un veston.
— Ils appartenaient à mon frère jumeau quand ils étaient encore à sa taille. Je les conserve en mémoire de notre complicité, j'imagine. Je conserve également un loquet de ma défunte mère et les lettres de mes sœurs.
Le monastère exigeait le détachement total du monde matériel, or plus Eleonara venait à connaître ses consœurs, plus elle se rendait compte que chacune d'entre elles valorisait un objet à l'encontre des règles. Un peigne d'ivoire, un pendentif gravé d'initiales, un coffret plaqué d'émail, le fermail d'une grand-mère, une figurine sculptée... Les porte-bonheur provenaient d'enfances lointaines, de mains disparues, de joies ternies et renfermaient des espoirs, ainsi que des souvenirs précieux. Derrière les visages ridés, solennels ou puérils des nonnes se tapissaient des brins d'histoires, des existences secrètes. Des existences délaissées.
— Pourquoi vous appelle-t-on la Chouette ? voulut savoir Eleonara.
Sœur Melvine étira le cou et la dévisagea. Ses grands yeux noisette étaient globuleux et brillants et la brusque torsion de sa nuque rappelait le comportement des hiboux.
— Oh, je t'en prie, tutoie-moi, nous sommes toutes les deux novices ! Nous ne sommes pas censées parler de nous-mêmes, mais je le ferai à condition que tu me promettes de ne pas te moquer de moi. C'est capital. Promets-moi de ne pas partir en courant non plus.
Contente que Melvine eût déjà oublié ses yeux rouges, Eleonara lui donna sa parole – au fond, les mots ne valaient rien – avec un sourcillement méfiant. Elle reconsidéra les murs maculés par la fumée. La petitesse et l'allure de dame de la Chouette ne la bernaient pas : cette humaine était étrange.
En s'éclaircissant la voix, Melvine joignit les mains avec grâce comme pour prier, prête à faire sa leçon.
— Bien, je t'explique. Dans l'Ancien Temps, les chouettes signifiaient sagesse. Je m'accroche à cela pour apaiser mon orgueil... Enfin bon. La symbolique s'est altérée à l'apparition des présumés mages, à qui l'on associait les hiboux, les chats noirs et toutes les créatures nocturnes, en somme. Les ténèbres sont le terrain de chasse de ces animaux-là, car elles peuvent y voir, contrairement à leurs proies. Il est encore d'actualité d'accuser les chouettes de porter malheur, même s'il est aujourd'hui notoire que la sorcellerie n'a jamais existé. Certaines contrées reculées ont d'ailleurs la coutume de clouer les pauvres bêtes au-dessus des entrées pour contrer le mauvais sort.
Eleonara étouffa un bâillement. Si le sommeil ne la grisait pas, sans doute qu'elle aurait déjà filé à l'opyrienne.
— Je ne devrais pas te le dire, poursuivit la Chouette en baissant le ton, mais on m'a mariée plusieurs fois, tu sais ? Eh bien, ça ne s'est pas bien passé. Pour moi, si ; moins pour mes fiancés...
Flairant une anecdote, l'elfe laissa ses oreilles pointues se tendre sous son voile, sa guimpe et sa touaille. Sœur Melvine, mariée à plusieurs reprises ? Elle devait tout juste être l'aînée de Dalisa.
— Mon premier époux s'est étouffé avec une saucisse lors du repas de noces ; le deuxième s'est tordu la cheville en voulant échapper à un renard rabique et le troisième a récemment été porté disparu lors d'une campagne au Mikilldys. Autant dire que je suis triplement veuve.
Pour avoir récité ces tragédies comme s'il s'agissait des vers d'une chanson populaire, Melvine devait avoir joué un rôle dans les malheurs de ses maris à coup sûr, suspecta Eleonara. La suite l'en persuada :
— Mon troisième mari et moi, on se comprenait mutuellement. Il a essayé de m'étrangler pendant mes fiançailles et un lustre en acier lui est tombé sur la tête. C'est là qu'il a décidé de m'offrir une pension et de m'envoyer au monastère. Je ne pouvais pas être plus d'accord. On règle de nombreux contrats et une bonne poignée de disputes par les épousailles ; c'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles peu de filles chez nous sont contraintes au monastère. Le mariage est plus rentable, du moins pour les aînées. Tu ne verras ici que des cadettes ou celles dont l'alliance matrimoniale a raté. Bref. Je n'ai pas à me plaindre : j'y ai trouvé la paix intérieure que je recherchais, ainsi que ma vocation. Ma place est ici. Comprends-tu mieux comment je me suis valu mon surnom ?
— Parce que pendant que vos... tes proches avaient le dos tourné, tu préparais les obsèques de tes époux ?
— Absolument pas ! protesta Melvine en se renfrognant, avant de fièrement lever le menton. On m'appelle la Chouette parce que je porte la poisse et pas uniquement à mes conjoints. Sais-tu combien de candélabres j'ai renversé, combien de vitraux j'ai brisé ? J'ai accidentellement incendié ma propre cellule l'année passée et, deux semaines plus tard, l'herboristerie. Pourquoi crois-tu que l'aile nord de l'abbaye a été rénovée et qu'il y a des os de dindon au fond du puits ? Où que j'aille, les catastrophes pleuvent et les gens me fuient. La dernière fois que je me suis rendue à Terre-Semée pour le recrutement, une consœur s'est encoublée sur mon pied et s'est fendu le crâne sur un caillou.
Eleonara voulait courir. Loin. Très loin.
Melvine poussa un soupir et se massa les tempes.
— J'en ai trop dit. Tu sais quoi ? Je suis persuadée que nous serons de très bonnes camarades. Allons, nous sommes toutes deux à côté de la plaque ici, autant se tenir compagnie. C'est une complicité à tes risques et périls, mais je jure de faire mon possible pour t'éviter de trop grandes souffrances. Qu'en-dis-tu ?
Eleonara ne put s'empêcher de la toiser indélicatement. « Espèce de tarée », pensa l'elfe. Une humaine sur ses talons était une humaine de trop. Et une souscription à la malchance par-dessus le marché ? Non merci.
Ignorant royalement la proposition, Eleonara parcourut lentement les phrases du livre d'histoire pour se calmer. Elle parcourut quelques paragraphes, avant d'être traversée par une évidence.
Elle non plus n'avait pas beaucoup de chance en temps normal. Qui disait que la poisse de Melvine ne rebondirait pas sur la sienne ? La Chouette pouvait lui servir d'armure. Ça lui semblait logique, surtout que Sœur Louve l'avait dit en cours d'arithmétique :
— En multiplication, négatif et négatif donnent positif.
« Donc, poisse et poisse égalent chance, songea Eleonara. Si nous nous fréquentons assez, nous verrons notre aubaine augmenter : je serai de retour à Hêtrefoux plus tôt que prévu ! »
Ensemble, côte à côte sur un lit bancal, la Chouette et la « muette » dévorèrent le chapitre consacré aux Nordiques. Avant peu, sans s'en rendre compte, elles s'assoupirent sur la poussière des calligraphies.
Il n'y eut ni incendie, ni inondation, ni écroulement de plafond.
J'aime de plus en plus soeur Melvine, surtout après l'histoire de ses trois maris xD Son côté porte-malheur et son côté doux et innocent cohabitent bien, ce serait chouette (ha ha) de voir une complicité éclore entre elle et Eleonara.
La fin du chapître donne bon espoir, en plus d'être extrêmement drôle xD
Oooh c'est chouette que tu apprécies Melvine (impossible de ne pas placer ce jeu de mots partout xD). C'est un personnage important alors on la suivra longtemps ! AH oui, ils n'ont pas eu de chance, ses maris ! Comme quoi, le pouvoir de la poisse n'est pas à prendre à la légère héhéhé
Merci pour ton commentaire enthousiaste :) je te souhaite une bonne lecture de la suite !
Malheureusement, Sœur Melvine est gentille mais ce n'est pas le modèle d'ouverture d'esprit que j'espérais ! Ce qui n'est pas étonnant si elle croit les livres qu'elle a sous la main et qui présentent les Mikilldiens comme des... ours ? barbares ? Pas des égaux, en tout cas ! Mais c'est super que Soeur Melvine ne soit pas toute lisse ! Bien plus intéressante !
Quoi qu'il en soit, elle a accès à plein de livres (je ne suis pas convaincue qu'elle ait vraiment l'autorisation, d'ailleurs...), et ça, c'est très bien pour Elé !
Et la théorie sur la malchance qui s'annule : excellent !
Détail :
"À moitié dévorée, elle formuler : « Tu me manques. »" : elle formulait
A très vite !
Melvine a pas mal d'anecdotes à raconter (morale: ne pas sous-estimer la dangerosité des saucisses). Eh oui, même si elle a pas mal de qualité comparé à ses compatriotes, elle a tout de même grandi dans le même environnement et avec les mêmes a prioris. Je suis contente que tu ne la perçoives pas comme toute parfaite; ce petit côté "gris" rend les personnages plus réels et attachants, je trouve ^^
Eleonara, comme tu as pu le voir durant ta lecture, bénéficiera de toutes ces possibilités de lecture !
Merci pour la coquille !!
Pinaillage de lectrice pénible :"nous sommes toutes deux à côté de la plaque" => trop moderne ;)
Et alors, je ne sais pas à quel point la remarque que je vais faire est utile mais, pour un manuscrit, on ne parle pas de pages mais de folios (feuillets recto et verso). Souvent, il n'y a pas de numérotation comme on la connait dans nos livres contemporains ou bien les feuillets sont numérotés seulement sur le recto... Bref, l'allusion à la"page trois-cent douze" m'a sautée au nez parce que je connais un peu le sujet mais, je ne suis pas certaine que ce soit à proprement parler choquant.
C'était la minute "j'étale ma science" ;p
Oui, la Chouette est très spéciale :D "Le coup des mariages catastrophiques, c'est juste génial" Cette phrase m'a fait trop rire ! Hors contexte, ça ferait lever des sourcils xD
Mais moi j'aime les pinaillages ! Merci d'avoir souligné cette expression trop moderne, je l'ai remplacée par "nous sommes toutes deux des salsifis dans un nid de roses" Oui, d'accord, c'est étrange mais je me suis dit que Melvine serait du genre a dire cela. Si tu vois d'autres expressions qui te sautent au yeux, n'hésite pas à les signaler pour que je les pulvérise *met ses lunettes de pulvérisatrice *
Oh, je ne savais pas pour les folios et la numérotation, c'est fascinant! C'est typiquement le genre de détail que j'adore <3 Eh bien, j'aurais appris quelque chose aujourd'hui, héhé. Merci, je suis allée corriger tout ça dans le texte ! Est-ce que tu travailles dans un domaine lié à la littérature, à l'histoire, à l'archéologie ou au patrimoine culturel en général ?
Etale ta science tout ce que tu veux, je suis preneuse ;)
Merci pour ta lecture et tes remarques constructives !
à bientôt !
Jowie
Par contre, j'ai l'immpression d'avoir toujours un peu de mal avec le fil rouge. Jusque là, le fil c'était Hêtrefoux, mais maintenant, on dirait que le but c'est juste de rester caché, ce qui n'a rien d'excitant.
Ceci dit il y a cette histoire de secret dans l'abbaye et j'espère qu'on va vite en savoir plus.
Deux phrases qui m'ont fait bien rigoler:
"ur. Elle y chercha la représentation d'une pastèque mais n'en trouva point."<br /><br />"— Pourquoi tu me regardes comme ça, toi ? Tu veux ma gravure ?"<br />
Voilàààààààà! a tout vite <3
Je vois que tu t'es refait un petit marathon et voilà, maintenant tu es à jour comme une boss !
Je suis contente d'entendre que l'abbaye et la Chouette te plaisent. Comme tu l'as vu, il y a pas mal de chose cachées là-bas qui vont se révéler ;) C'est vrai que Eleonara, même si elle découvre des personnes plus gentilles (et moins malsaines xD) qu'avant, continue à s'accrocher à la Dame. Elle a un peu les fesses entre deux chaises pour l'instant on peut dire ^^
Concernant le fil rouge, j'avoue que c'est quelque chose que j'ai essayé de retravailler depuis la première version. J'ai essayé de renforcer l'idée que Eleonara pense souvent à Hêtrefoux et que l'abbaye n'est qu'une solution temporaire. Elle se rend compte qu'elle ne sait pas grand-chose sur le monde et sur Hêtrefoux et se dit que l'abbaye est une bonne occasion pour s'informer et mieux se préparer pour affronter les obstacles entre elle et la Forêt. Si le texte donne l'impression qu'elle est "juste" là pour se cacher, alors il faut que je me penche encore sur ce point. Je note ta remarque et si tu as des commentaires par rapport à ça par la suite, dis-moi ;)
Merci d'avoir relevé les phrases qui t'ont fait rire :D (J'avoue que j'aime bien le passage de la pastèque aussi haha)
Merci pour ta lecture et ton retour constructif!
à toute et bonne fin de PacNo ! <3
Jowie