Les cheveux de la danseuse

Notes de l’auteur : J'espère que ça va vous plaire... Si vous pouvez me laisser un avis positif ou négatif ça serait super !
Bonne lecture !

Je n’arrive pas à dormir. Mon souffle est saccadé et mes membres tremblent, j’ai les mains moites et je pourrais jurer avoir de la fièvre ! Mes pensées, elles, vagabondent dans ma tête comme des parasites, elles arrivent, repartent, se mélangent, s’entrecroisent et m’étouffent de toutes leurs masses. J’implose ! Je me dégage de ma couette et me lève. Demain ça sera mon jour, celui où je vais prouver au monde que je suis la meilleure. Demain, ça sera mon jour, je vais devenir petit rat de l’opéra ! Ça sera mon jour et je pourrais enfin satisfaire ma tante, elle qui a toujours fait tant pour moi ! Je m’approche de la commode et me penche devant le miroir. J’y vois une adolescente qui fait bien plus que son âge, une adulte. J’y vois une tête aseptisée, sans rien de travers, trop parfaite, mes cheveux sont consciencieusement attachés, lissés, plaqués en un chignon parfait. Mon visage est déjà adulte, tartiné de poudres, je suis devenu un filtre, un filtre Snapchat, Insta, où qu’importe. Un filtre. Un robot qui obéit aux ordres. Juste un détail, une petite étincelle au fond de mes yeux, une larme qui faillit, petite faiblesse cachée sous le mascara. Cette faiblesse, ce doute, c’est celle d’une petite fille paumée, complètement paumée dans ce monde trop grand pour elle.

Soudain on toque. Elle entre. Elle me sourit et pose sur mon épaule une main ferme qui se veut maternel : «  Va te coucher chérie, demain c’est ton jour !  » Elle ressort.

Je replonge dans mon reflet et je ne me reconnais toujours pas. À côté, une photo est accrochée avec de la pate à fixe. Une mini moi, à l’époque où les parents étaient toujours là. Grand sourire franc, chapeau de paille, yeux étincelants de vérité et souffle d’air chaud de l’été. Je soupire, j’ai tellement changé depuis. Tante m’a tant donné. Mais je ne peux m’empêcher, avec culpabilité, de penser qu’elle m’a aussi tant pris. Elle m’a prit mon sourire franc, mes yeux étincelants, et l’air chaud de l’été. 

J’ouvre un tiroir de ma commode et fouille entre les crèmes, les fonds de teint et produits de beauté, j’y ressors une grosse paire de ciseau orange. Je me regarde à nouveau dans la glace. Les ciseaux passent sur une mèche sans la couper. Et puis tant pis ! Demain mon grand jour ? Ou son grand jour ? Une mèche tombe. Peut-elle vraiment me choisir ma vie, aussi idéale qu’elle puisse l’être ? Une autre mèche tombe. Moi je ne veux pas de ça ! Je veux être comme tout le monde ! Aller au collège, collectionner les cartes Star Wars et les mauvaises notes ! Une troisième mèche tombe. Je commence à trembler sous la culpabilité. Une autre mèche. Avec les cheveux courts, je ne pourrai pas devenir ballerine. Encore une. Je pense que c’est trop tard. Une mèche tombe. Au pire je pourrai toujours retenter l’année prochaine. Une mèche tombe. Tante va être très en colère. Une mèche tombe. Et puis tant pis ! J’explose comme un feux d’artifice capillaire ! Une mèche tombe et encore une, deux, trois. Ivre de mon crime, j’éclate de rire. Je continue de couper encore plus rageusement. Mes épaules s’allègent d’un fardeau au même rythme que mon crâne. Un autre rire hystérique s’empare de moi. Les mèches continuent de tomber. Et puis je me mets à chanter comme je ne l’ai jamais fait depuis deux ans, je chante faux, très faux, mais de tout mon cœur. Je chante et les mèches tombent, tombent, tombent. Puis, prise d’une impulsion, je sors de l’appartement, je dévale les escaliers et m’engouffre dans le souffle chaud de l’été et de la ville. Je suis libre ! Plus de cheveux, plus de ballerine ! Libre ! Je me mets à courir dans l’avenue, courir en chantant, en dansant. Courir sans plus m’arrêter, courir jusqu’à en perdre l’haleine.

Dans la vitrine d’une boutique se reflète l’image d’une gamine. Heureuse. Ses cheveux courts, très courts laissent sont sourire franc et ses yeux étincelants rayonner.

C’est le bordel, c’est moche, mais c’est beau.

 

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Claraobscura
Posté le 27/08/2024
Hello,
Merci pour ton intérêt pour mon texte, en retour je viens de lire le tien.
(on se tutoie hein? Quand on est écrit on va au fond de soi, alors ne faisons pas de manières.)
Retour rapide et gébéral : elle est mimi cette non-ballerine. J'aime son côté rebelle. Et j'aime beaucoup la fluidité dans ton écriture, j'aime aussi comment tu nous entraînes dans ce moment d'intimité. On est vraiment à côté d'elle devant son miroir.

Voici quelques retours précis pour faire contre-point, attention je ne sais pas prendre de gants :
- laisse tomber les points d'exclamation à tout bout de champ, cela donne une impression de fausse joie !
- Une tête ne peut vraiment pas être aseptisée !
- une larme qui faillit? Je ne comprends pas! (je vais arrêter avec les points d'exclamation tu as compris maintenant)
- les yeux étincelants de vérité? C'est beaucoup trop d'étincelles.
- Un feu d'artifice capillaire? Vraiment ? Si c'est le cas, je veux voir ses cheveux dans toute sa chambre, et dans la bouche de sa Tante.
- J'aimerai détester la Tante autant que notre héroïne, mais je n'ai pas de matière pour le faire bien.

J'espère ne pas te paraître trop dure, mais je te promets que si ton texte ne m'avait pas interpellé ou paru intéressant je n'aurai rien dit du tout ;)
Bonne continuation 🌞
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