En entrant dans la forêt, ses pieds étaient nus. Ses chaussures, elle les avait abandonnées sans même y penser. Les brindilles des conifères lui picotaient la peau mais elle continuait sa marche sans y accorder d'attention.
Elle marchait, droit devant elle, sans un regard en arrière.
Elle marchait, rapidement, s’enfonçant de plus en plus entre les méandres des troncs, les branches basses griffant sa peau, déchirant sa robe blanche.
Et elle pleurait.
Ses pas s’enchaînaient les uns après les autres, elle continuait, automate fantomatique, apparition nocturne écorchée, traversant la nuit et les arbres.
Soudain, du sang.
Une goutte tout d'abord, une unique goutte vacillante qui hésitait presque à se former, à grossir puis couler. Le mal était fait. La première à venir au monde en annonçait d'autres, plus nombreuses, plus douloureuses.
La perle rouge glissa lentement, creusant un sillon vermillon dans le flot des larmes.
Elle fuyait, elle aussi, elle coulait droit devant elle, sans un regard en arrière.
Elle coulait, rapidement, laissant derrière son passage une traînée sombre, sa trace s'imprégnant dans le tissu, marquant à jamais son chemin.
Les autres gouttes se joignirent aux larmes. Plus il y avait de larmes, plus il y avait de sang. Plus il y avait de sang, plus il y avait de larmes.
Elle marchait encore, mais elle savait maintenant qu'elle devrait bientôt s'arrêter.
Son corps, d'ailleurs, chevrotait, sa démarche se faisait gauche et instable.
Elle se laissa tomber brutalement.
Les pâles rayons de lune illuminèrent ses larmes.
Des larmes de verre s'échappaient désormais de ses yeux, sans retenue, lui incisaient la peau au fur et à mesure, intensifiant le ruissellement sanguinolent.
Sa vue brouillée ne l'était plus, la nuit noire et complète avait pris le dessus.
Le temps s'écoula autour d'elle sans qu'elle ne change de position ou ne bouge d'un pouce, recroquevillée comme un amas de chair, entourée d'un halo rouge.
Ses yeux n'étaient plus que deux ronds cristallisés : le verre avait mangé ses pupilles et colonisait ses globes oculaires.
Les craquelures de sa peau se firent plus visibles, de plus en plus intense.
Sa robe se morcelait sous l'assaut lancinant de l'envahisseur.
Les lambeaux rejoignaient d'autres horizons, flirtaient avec le vent, s'accrochaient de-ci de-là, flottaient en vestiges d'une vie interrompue, triomphaient d'être une trace dont l'avenir serait promis à la décrépitude.
Le soleil inonda la forêt d'une douce lumière. Peu à peu, le jour chassa la nuit et se diffusa dans les branchages. Dans un endroit secret et encore préservé, une myriade d'arc-en-ciel se reflétait à l'infini.
Déjà, super beau pseudo xD
Plus sérieusement, c'est très poétique, tu écris très bien. Je ne sais pas s'il y a du lien entre les différents textes, je vais regarder ça tout de suite (=
Une remarque :
" Ses chaussures, elle les avait abandonnées sans même y penser." J'ai pensé que mettre un point d'interrogation après chaussures pourrait rendre bien, après c'est toi qui voit ça ne change pas grand chose.
Bien à toi !
Il n'y a pas forcément de lien évident entre les textes si ce n'est qu'ils appartiennent à la même thématique plus ou moins lointaine ;)
je te remercie beaucoup de ta lecture et de ton commentaire !
bien à toi également :)
très joli pseudo au passage ! :)
Oh merci infiniment pour ce retour sur ce texte. Je ne sais pas si j'ai l'âme d'une magicienne, mais je suis ravie de l'effet qu'il a pu produire. Merci beaucoup.