Les maux ont un sens

Notes de l’auteur : Pour toi qui lis ces lignes, je suis passé par là.

Il n'y a que 4 mois, mais cela me semble une éternité.
Je ne sais pas de quoi mon avenir est fait. Et franchement, tu comprendras j'espère un jour que ce n'est pas important.
Petit retour d'expérience pour lâcher le passé et vivre le présent.

Un jour tout bascule.
Peut-être tu l'as découvert, encaissé comme une balle perdue.
Peut-être tu le sentais, et tu as investigué à en devenir fou.
Peut-être que l'autre te l'a annoncé, à un moment choisi comme pour te ménager.

La première réaction dépend de chacun. Moi, ce fut le soulagement d'enfin savoir, comme un point final à des mois de doutes et des semaines d'enquête.
Soulagement alors que je me sentais tomber dans la paranoïa, vivant comme elle une deuxième vie, mais en ce qui me concerne, dans un monde de peur et d'obsession. Un monde où l'inconcevable advient. Un monde de hurlement intérieur. Un monde nocturne que je masquais le jour par mon rôle de mari, de papa, d'associé.

Les premières heures sont les pires. Il faut tenir, pour les enfants, pour les amis... Les tremblements, les vertiges, comme vestiges de la nuit blanche.
On se demande ce qu'on a fait de mal... Ou si on le sait, on se dit "quand même, au point de faire ça !".

Toi et moi, nous ne sommes pas parfait, mais il faut tenir. C'est toi le pilier de la maison, en cela que tu peux tout maintenir ou tout détruire.
Ce qui fait le plus mal, ce n'est pas l'acte d'adultère, ce n'est pas le corps souillé que les plus bêtes d'entre nous veulent voir en premier, comme une excuse pour fuir.
Ce qui fait le plus mal, c'est le mépris. Ces moments où, toujours investi dans la "sécurisation" (la maison, les enfants, le quotidien), mes actes et mes paroles n'ont pas trouvé l'écho que j'attendais, n'ont pas touché comme ils devraient. Car en face, l'esprit était déjà ailleurs.
Je m'y suis pris trop tard, c'est sûr. Ce n'était que de belles paroles, un déclaratif impossible à transformer immédiatement en actes tant l'engagement dans notre projet était oppressant.

Et face à mon dévouement, total à mes yeux, la trahison, le sentiment d'humiliation et la manipulation ont été comme autant de balles au cœur. On ne s'en remet que trop doucement. Et la confiance laisse place à la méfiance.

Quand on a trop longtemps pensé que l'autre était fiable car fort, patient car aimant, les certitudes s'écroulent. Je sais ce qui n'allait pas, il y a eu des alarmes et mes réponses ont autrefois été trop lâches ou trop en deçà des enjeux. Incompatibles avec les besoins de l'autre.

Face à la nouvelle, certains décampent, certains repoussent. Rien de cela pour moi. Car même si je m'y prends tard, ma maturité, ma conscience de ce qui ne va plus et ma motivation à me dépasser et devenir la meilleure version de moi-même étaient déjà là. J'ai donc temporisé, le temps de contrôler mes émotions et retrouver mes valeurs.
Car il faut encaisser les "je ne t'aime plus". Ça a été un sacré travail.

Et un jour on comprend, à l'occasion d'une rencontre avec un copain à qui on a "lâché le morceau", comme un aveu que le mal-être qu'il perçoit est beaucoup plus profond. Il y a ces amis qui diraient que c'est grave, que c'est impardonnable. Et celui qui te donnera la clé, son témoignage, un livre ou une vidéo qui enfin te fera comprendre.

Comprendre, c'est avoir une longueur d'avance, une sagesse. Et ainsi, repasser devant celui ou celle qui traçait son propre chemin pour, si on le souhaite et l'on s'y prend bien, reprendre la route ensemble.

J'ai dit à un ami qui traverse un moment semblable, "Non, tu n'es pas cocu. Cocu, ce n'est pas cela, n'utilise plus ce terme !" Car il n'est pas de vaudeville ici.
Comme moi, tu t'es donné pour ton conjoint, tes enfants, ta maison. Tellement donné que tu as oublié, délaissé plus ou moins consciemment, tes envies, tes besoins. C'est sûr, il faut finir, faire, travailler, avancer… demain on sera bien. L'avenir s'annonce confortable.
Mais à trop s'oublier pour sa famille, on perd sa personnalité, on privilégie l'utile au futile, on est efficace, un automate, et on devient un objet de sa propre vie. Et ce petit noyau de famille, insidieusement, s'est replié sur lui-même. Les plaisirs s'espacent autant que la fatigue s'accumule, on est heureux et rassuré de parler avec des gens dans la même "galère".
Et les années passent. A tout faire ensemble, on n'a moins à se dire et l'autre n'est plus une découverte. On s'ennuie.
Les moments à deux sont rares. On cherche le gîte idéal, le meilleur resto... Pour rallumer la flamme, on souhaite ces instants volés au quotidien tellement parfait qu'on est toujours un peu déçu...

 

Un jour tout bascule.
Je reprends ces termes car elle est là la genèse de ton aventure, le début pour l'autre de sa nouvelle vie.
Un décès, un avortement, une maladie, un licenciement... Un événement qui touche ton conjoint plus que toi-même, car tu es égoïste, focalisé sur autre chose ou tout simplement plus solide. Mais pour l'autre, c'est le point de bascule.

Ton conjoint, ta femme, ton partenaire, ta compagne... peu importe son statut, se retrouve face à l'absurdité de son existence, et prends de l'avance, veut redevenir le sujet de sa vie, quand toi, empêtré dans ta quête de confort et le quotidien, tu fais du sur place.
Lui, elle, s'éloigne.

"Qu'est ce que je fous là ? C'est ça ma vie ? Qu'est ce que c'est que cette société de merde ? A quoi bon être en couple ? Où sont mes rêves ?" Et comme tu es la personne la plus proche, depuis 5, 10, 15 ou 20 ans, tu deviens la cause du mal-être présent.
Oh certes, toi comme moi, nous n'avons pas été parfait. Loin de là. Le passé est plein de passif qui te remonte à la figure : les lâchetés, les trahisons, les manipulations, les décisions unilatérales, les chantages. Autant de tromperies là aussi.
Et donc ressaisis-toi, tu n'es pas une victime, tu es co-responsable de la situation. Et si l'autre est parti voir si l'herbe était plus verte ailleurs, c'est que tu dois nettoyer tes mauvaises herbes.

 

Un jour tout bascule.
Et face à toi, tu verras une personne solide, qui assume, qui sait ce qu'elle veut et pourquoi elle a fait ça. Mais derrière cette certitude apparente, n'oublie jamais qu'elle souffre. Que tout ça lui coûte énormément. Forte dehors, faible dedans.
Face à sa souffrance, le pansement ne se trouve pratiquement jamais sur un site dédié, ce n'est pas une démarche, c'est une rencontre. Il parait que ça s'appelle le syndrome de l'enceinte close : l'élu(e) est dans un cercle proche et personnel (travail, sport...), on découvre une affinité, un jour on se confie, on trouve une écoute, on profite de ce que la maison ne permet plus. Voilà. C'est aussi simple que cela.

Les turpitudes, les doutes, les regrets n'arriveront pas jusqu'à toi.
Tu entendras une personne sûre d'elle.
Tu entendras parler d'âme sœur, de confident ou même de polyamour.

(A ce sujet, le polyamour, asséné comme un refus de l'ordre établie, l'exergue médiatique de ceux qui ne veulent pas choisir, n'est à mon sens qu'une impasse car malheureusement pour ceux qui voudraient s'y réfugier, il n'y a que les polyamoureux eux-mêmes qui peuvent le vivre. Je leur laisse.)

Et en ce qui te concerne, il n'est point lieu ici de jalousie surannée ou de procession, il s'agit simplement d'accepter l'amour comme un destin de vie, une disponibilité, une écoute, une protection. Peut-être ton couple ne l'a plus permis.
Pourtant ce "couple", qu'il est à la mode de conspuer quand on a quarante ans, est la plus petite "société" que l'on peut créer, avec ses lois, sa solidarité et, fatalement, ses devoirs. Une symbiose au sens biologique du terme : ensemble, distincts mais complémentaires pour vivre et s'épanouir plus facilement. Ce couple, tu dois le transformer.

Parenthèse : quand on discute avec des célibataires endurcis, des solitaires plus ou moins assumés, on les envirait presque. Alors qu'eux chantent à qui veut l'entendre la chance de leurs dernières rencontres, comme autant de furtifs partenaires, vantant le partage tout en restant isolés de ces individus idéalisés, mais sur lesquels on ne pourrait malheureusement compter. Amis d'un instant dont on n'a vu que les qualités.

Ne plus être un couple, mais deux individus "en couple", voilà un programme beaucoup plus séduisant. Il est une autre phase, il est un autre moment. Quand le passé n'a été que projets et recherche de confort, le présent peut désormais, offrir ce qu'il a de meilleur.
La crise de couple, c'est comme ferrailler les fondations, comme vibrer les piliers de béton, si on la traverse, tout peut être plus solide.

Pourtant, rien n'est jamais acquis. Un couple, c'est un contrat dont l'engagement est le premier chapitre. Et comme tout contrat, c'est une question d'équilibre:
Vie à deux et temps pour soi.
Partage des rôles et des tâches.
Respect des besoins et gratitude.

 

Un jour tu bascules.
D'abord, oublie la maison, les enfants, le couple. Pour toi.
Toutes ces alarmes, tous ces reproches, sert-en ! Qu'ils te servent de plan de route. En face de toi, l'autre souffre, comme toi. Alors, qu'est ce qu'on fait ?
Aujourd'hui, la honte c'est de rester apparemment, alors s'il faut briser les codes, remonter le niveau, pourquoi ne pas faire de tout cela un tremplin.

Tu n'es pas parfait, mais l'autre non plus. Alors travaillez, mettez tout à plat : les valeurs, l'éducation, la belle famille, le boulot, les besoins...
Sachez ce que vous êtes et ce que vous voulez, tous les deux !
Un accord de couple en lieu et place d'un poussiéreux contrat de mariage.
Donnez-vous du temps.
Évaluez. Pas sur le passé, seulement sur la période. Un mois, 3 mois, 6 mois... Décidez à deux. Notez les changements.
Et après, vous verrez bien.

Quoi de plus motivant que de se trouver enfin. Faire fi de son éducation, bâtir sur ses erreurs, retrouver ses valeurs. Cela prend du temps et du travail, devenir adulte, il faut le faire bien.
Se donner les moyens et le temps de te retrouver : Qu'est ce que tu aimes ? Qu’est ce que tu veux ? Qu’est ce que tu n'accepteras plus ?
Te redonner de la consistance, avoir toi aussi ton jardin secret, redevenir intéressant.
Et peut-être, celui ou celle que tu as séduit une fois, voudra continuer le chemin avec toi.

C'est ce que je souhaite. Et putain, qu'est ce que je serais fier qu'on y arrive. Ce serait notre plus beau projet : retrouver notre complicité.
Et puis au final, réussite ou échec ne seront qu'un nouveau départ pour nous. Un nouveau chapitre, quel qu’il soit.


Devenir la meilleure version de soi-même. D’abord.
Car pour pouvoir redire "Je t'aime", il faut d'abord savoir dire "Je".

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