Amphidamas
Capitaine, ô mon capitaine, Odysseus… Voilà presque deux mois que nous avons échoué sur cette ile.
Politès
Nos vivres sont épuisés, nous avons raclés les fonds de cale. Pourquoi ne pouvons-nous pas tuer et manger ces beaux bœufs aux larges fronts ?
Euryloque
Et ces grasses brebis qui paissent par centaine ?
Ulysse
Parce qu’ils appartiennent au Dieu Hélios Hypérion et qu’il ne nous le pardonnerait jamais.
Euryloque
Nous lui ferons les plus belles offrandes !
Politès
De retour à Ithaque, nous bâtirons un riche sanctuaire à sa gloire.
Amphidamas
Nous dresserons de magnifiques statues.
Politès
On partagera et on fera des gros likes.
Euryloque
On ne les mangera pas tous. Un ou deux, seulement.
Politès
Oui, voilà trois, quatre, pas plus.
Amphidamas
Cinq, six au grand max.
Euryloque
Une petite douzaine, quoi !
Ulysse
Aucun ! Il y va de notre survie à tous. Laissez-moi prier les Dieux.
Il sort.
Euryloque
Si nous ne mangeons pas bientôt, nous mourrons de faim.
Amphidamas
Quand je vois tous ces steaks à portée de main, j’en salive comme un bouledogue.
Politès
Moi, je ne vois que des brochettes et des méchouis.
Euryloque
Je préfère perdre d’un coup la vie, en ouvrant la bouche aux flots, plutôt que de languir plus longtemps sur une ile déserte.
Amphidamas
Egorgeons et écorchons ces beaux bœufs à la robe luisante.
Politès
Que va dire, Ulysse ?
Euryloque
Quand il sentira le doux fumet des chairs grillées à point, il se joindra à notre festin.
Ils sortent. Ulysse entre peu après et s’agenouille pour prier. Une pluie d’or fine s’abat alors sur lui et il sombre dans le sommeil. Quand il se réveille, il fait nuit et l’on voit la lueur d’un feu au loin et on entend les cris joyeux des hommes qui festoient.
Ulysse
Ô Dieux bienheureux et éternels, c’est pour mon malheur que vous m’avez endormi d’un impitoyable sommeil, laissant mes hommes seuls avec leur ventre vide et leurs pensées dévorantes. Et maintenant, on se croirait chez Hippopotamus.
Noir.