Correspondance entre Sœur Melvine et le duc d'Ox
Le 29 février de l’an 510 post-Extinction
Cher père,
Vous sachant peu sentimental, je vous épargnerai les détails de la tragédie qui a dévasté le Don'hill ainsi que les tréfonds de ma tristesse. C'est à propos d'une toute autre affaire que je souhaite vous consulter.
On m'a communiqué la mort de mon troisième époux, porté disparu lors de sa dernière campagne au Mikilldys. D'après ce que j'ai pu entendre, cette nouvelle ne vous est pas inconnue. Le sergent Sergius de Blodmoore m'a annoncé ce matin que nous étions fiancés, lui et moi, depuis une semaine. Et ce, avec votre accord. Quelle déraison vous a poussé à arranger ces promesses à mon insu ? Ignorez-vous mon deuil ? Et le vôtre ? Comment pouvez-vous être si froid après ce qui est arrivé à Tomislav ?
Je pleure mes consœurs, mon frère jumeau et une amie qui m'était particulièrement chère. Je me demande parfois si ce n'est pas ma poisse qui les a emportés. L'idée d'une liaison aussi prompte avec un homme mal réputé m'est insupportable. Dissuadez le sergent une fois pour toutes. Quel avantage discernez-vous dans cette alliance ? Les Blodmoore ne sont-ils pas une famille rivale ? Ma place est à l'abbaye du Don'hill, auprès de sa bibliothèque, une des plus anciennes des Troyaumes. Je refuse de me séparer de ses livres ; il est en mon devoir de veiller à leur conservation, maintenant plus que jamais. Je vous implore de dissoudre ces honteuses fiançailles ; ma vocation est ailleurs. Je souhaite formuler mes vœux de perpétuité et me lier à ma foi pour l'éternité.
En espérant mériter votre bénédiction, je vous envoie, cher père, mes vœux de santé et de bonheur.
Tendrement,
Votre fille, Melvine.
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Le 29 mars de l’an 510 post-Extinction
Père,
Je sais pertinemment que vous avez reçu ma lettre : le messager m'a juré sur tous ses aïeux l'avoir déposée entre vos mains. Je vous en conjure, répondez-moi, ne serait-ce que par politesse. Avez-vous conscience de la folie de vos manigances matrimoniales ? Faut-il que je vous rappelle le sort de mes maris précédents ? Je suis maudite : si je me lie à Sergius de Blodmoore, il y a de fortes chances qu'il rende l'âme dans les heures qui suivront les noces.
Affectueusement,
Melvine.
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Le 5. 4. 510 p.-Ext.
Chère fille,
N'est-ce pas de quoi se réjouir ?
Salutations,
Votre géniteur.
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Le 11 avril de l’an 510 post-Ext.
Père,
Je vous réécris pour vous informer de ma situation actuelle. Étant donné qu'aucun soutien familial ne m'est parvenu pour repousser les avances du sergent de Blodmoore, j'ai pris l'initiative d’accélérer la procédure de ma prise des vœux éternels. Oui, honorable père, je suis dorénavant non plus une novice, mais une religieuse de profession.
Votre fille qui vous aime,
Melvine.
Post-scriptum : Si vous le pouvez, évitez de me déshériter.
Bien trop longtemps si tu veux mon humble avis.
La Chouette, Melvine, reste un de mes personnages favoris. Je suis content de la retrouver, malgré ces échanges épistolaires quelque peu... Froids ?
Moi aussi j'aime beaucoup Melvine; trop cool qu'elle soit un de tes perso favoris; elle évoluera. pas mal d'ici le tome 4 ;)
C'est clair, ces échanges ne sont pas les plus sympathiques, mais cruciaux pour Melvine, qui, mine de rien, assied son indépendance, yay !
à tout bientôt j'espère et merci d'être repassé !
Tout de bon dans tes aventures scribouillardes !
Bravo à la petite Chouette qui prend son avenir en main!
Une seule réserve : l'emploi du mot "poisse" m'a paru un peu décalé par rapport au reste du ton des lettres de Melvine. "Mauvaise fortune" à la place, peut-être? Ou carrément malédiction?
En effet, la Chouette en a eu ras le bol et a décidé d'affirmer son amour pour les livres et sa vocation ! On retrouve son point de vue tous les 4-5 chapitres environ et je ne te cache pas que je me suis beaucoup amusée à les écrire :)
C'est vrai que "poisse" peut sembler décalé dans la bouche de Melvine. Le truc c'est que j'utilise ce mot précisément depuis le tome I pour désigner un concept einhendrien : une malchance quasi permanente, un poids qu'une personne porte et qui s'annule quand elle est en présence d'une autre personne portant la poisse. Peut-être que je lui donne trop d'importance mais c'est la meilleure manière que j'ai trouvé pour différencier cette idée de la malchance ou des malédictions en général. Je me dis aussi que si j'utilise toujours le même mot, le lecteur s'en souviendra probablement mieux et comprendra qu'il s'agit d'un concept einhendrien. Dans tous les cas, je note ta remarque !
Merci d'être passée; j'espère que la suite te plaira ^^
Ceci dit, l'évocation des mariages arrangés et imposés me touche. Dire que c'était le cas pendant des siècles....
Quand je pense que c'était considéré comme "normal" ou la "bonne chose à faire", ça me donne froid dans le dos...
Ce chapitre est court, du coup j'ai pas grand chose a commenter, ça me fait plaisir de me replonger dans ton écriture et ton univers !
J'ai rigolé au père qui marie sa fille dans le but de tuer les époux grace à sa poisse xD ! Contente que Melvine se soit pas laissée faire !
Le duc d'Ox a bien compris que la poisse peut-être stratégiquement avantageux de temps à autre ;)
Hé oui, Melvine a décidé de prendre son destin en main dorénavant !
J'espère que la suite te plaira ;)
à touti !