Alors qu’elle rentrait chez elle après sa journée de travail, Martha s’étonna de ne pas avoir relevé le courrier depuis si longtemps.
Elle n’avait pas l’habitude de s’informer de ce que devenait le monde, y compris ses proches , de fait, il lui semblait juste de ne rien recevoir.
Elle se reconnaissait dans cette humanité moderne, à la pensée humanoïde plus qu’humaniste, qui veut l’amour sans se donner la peine de prendre soin de ceux qui en donnent déjà et dont la relation à l’Autre n’est jamais stable d’une seconde à l’autre même en pleine nuit.
Si l’amour était une science, s’interrogea-t’elle, pourrait-il être invariable et prédictif, de même que son évolution ?
Ici comme ailleurs, les relations s’entrelaçaient autour de l’ambiguïté comme la laine autour du rouet.
Il pouvait être agréable de se retrouver comme repoussant de se revoir, même pour les amants.
Le manque d’intérêt de Martha pour tout autre sujet que l’amour l’abrutissait et la rendait ignorante de ce qui pouvait se produire de notable.
Elle déplorait que les évènements ne deviennent des faits éminents que lorsqu’ils faisaient la une des journaux de la même manière qu’une simple carotte sortie de terre devenait un objet de convoitise une fois affublée d’un message aguicheur.
Toute capitale flamboyante avait droit de vie ou de mort sur une information avec une incroyable force gravitationnelle mais du même coup, tout cela pouvait devenir grotesque.
Un lieu ignoré des cartes, plongé dans le noir, pouvait sans rien y comprendre, se retrouver sous les feux des projecteurs.
C’était, au demeurant, la raison pour laquelle elle provoquait l’information à la manière d’un torero face à son rival et par conséquent, qu’elle passait à côté de la boite aux lettres en la toisant.
Aussi, cela était absurde car ne serait-ce que pour recevoir l’information, il aurait été nécessaire de s’abonner, or Martha n’avait jamais rien payé.
C’était finalement l’obstination d’une tendance joyeusement assumée.