Memories buried under the ice. Chapitre 5. Rin - Une Rencontre glaçante

Notes de l’auteur : N'hésitez pas à voir mon Instagram pour des illustrations et du contenu supplémentaire.

Cela fait maintenant une semaine que j'ai eu une altercation avec
         Kain. Le calme semble revenu, mais je reste sur mes gardes. Malgré
         tout, la routine quotidienne apporte un certain réconfort. Ce début
         d'après-midi marque la fin des cours pour la semaine, et je tourne un
         regard vers Kin, les sourcils légèrement froncés. Un soupir m'échappe
         malgré moi en pensant à la situation actuelle.

         Rin — Sérieusement, Kin ? Tout ça pour obtenir ton semestre ? Tu sais
                  que tricher ne t'apportera rien de bon pour ton avenir.

Elle croise les bras, affichant un air faussement innocent.

         Kin — Mais non, Rin ! C'est comme une garantie. Si je suis coincée, je
                  sais que je peux compter sur toi. D'ailleurs, je n'ai toujours aucune
                  nouvelle de Kana.

Je lève les yeux au ciel, tentant de garder un ton léger, mais je sens
         que quelque chose ne va pas.

         Rin — Elle est probablement encore à l'hôpital.
                  Kin — J'espère qu'elle se rétablira vite.

Soudain, une nuée de drones de l'AGL traverse le ciel avec un
         vrombissement mécanique, projetant des ombres mouvantes sur le sol.
         Les écrans publicitaires s’allument en même temps, diffusant un
         message urgent. La voix métallique de l'AGL ordonne à tous de se
         mettre à l'abri.

Alerte de niveau 5. Une créature hostile non identifiée a été repérée
         dans le secteur étudiant. Tous les citoyens sont priés de se mettre à
         l'abri à l'intérieur des bâtiments. L’AGL a déployé des forces pour
         maîtriser la menace. Restez à l’abri et attendez de nouvelles
         instructions.

         Rin — Tout ça pour un oiseau ? Ils exagèrent, comme toujours.
                  Kin — Tu ne trouves pas qu'il fait de plus en plus froid ?

Elle souffle dans ses mains pour se réchauffer. Le froid soudain est
         palpable autour de nous, mais il ne m’affecte pas. Kin frissonne
         légèrement, mais je reste parfaitement calme, insensible à la baisse
         de température.

         Rin — Honnêtement, je n'y ai pas vraiment prêté attention.

Nous nous arrêtons devant des vitrines remplies de pâtisseries. Kin,
         toute excitée, admire les douceurs exposées. Son enthousiasme est
         contagieux, mais je reste alerte. Une ombre massive passe soudain
         au-dessus de nous à une vitesse fulgurante, projetant une brève
         obscurité sur la rue.

Avant que je ne puisse réagir, un signal sonore retentit dans mon
         oreillette, brusque et insistant.

         Hikari — Danger imminent détecté. Rin, au-dessus !

Mon instinct prend immédiatement le relais. Je lève la tête, scrutant
         le ciel. Une silhouette gigantesque fend l’air, rapide et imposante.
         Je réagis en une fraction de seconde.

         Rin — Kin, attention !

Je l'attrape par le bras et la pousse hors du chemin juste à temps.
         Une bourrasque glacée s’abat sur moi, m'immobilisant instantanément
         dans une cage de glace. Mon corps est figé, emprisonné par cette
         coquille cristalline. Je ne ressens pas la morsure du froid, mais
         l'immobilité est dérangeante.

         Kin — Rin, tu m'entends ? Ça va aller ?

Sa voix me parvient, étouffée par la glace. Kin ne perd pas de temps.
         Elle sort plusieurs de ses lames et, avec une précision calculée, elle
         les plante dans la glace autour de moi. Chaque lame enfoncée provoque
         une série de fissures qui se répandent à partir de ces points, créant
         un motif complexe de lignes qui s’étend comme une toile d’araignée à
         travers la structure gelée.

         Kin — Tiens bon, Rin. Je vais te sortir de là.

Les impacts répétés commencent à faire leur effet. Des fissures se
         propagent comme des toiles d'araignée à partir des points d'impact,
         créant un réseau complexe qui affaiblit la structure gelée. Avec un
         dernier coup puissant, Kin frappe au centre de la toile de fissures.
         La glace émet un craquement sonore avant de se briser en morceaux,
         tombant au sol avec un bruit sourd. Je m'effondre avec eux, reprenant
         mon souffle, mes vêtements couverts de fragments de glace. Kin
         s'accroupit à mes côtés, me tapotant doucement le dos.

         Kin — Respire, Rin.
                  Rin — Merci, Kin... Ce dernier coup, il était incroyablement fort, tu
                  sais...
                  Kin — Euh... tu trouves ?

Je remarque que Kin est un peu surprise par ma remarque et ne sait pas trop
         quoi répondre à cela, si ce n’est par un sourire. Tandis qu’elle semble
         occupée à retirer des fragments de  glace sur sa tenue, je murmure à
         mon oreillette, à peine audible.

Rin — Hikari, analyse ce qui vient de se passer.
         Hikari — Bien reçu, Monsieur.

Je roule des yeux.

Rin — Sérieusement… je t’ai déjà dit d’arrêter avec le “Monsieur”.
         Hikari — Je sais. Mais vu la façon sèche dont tu balances tes
         ordres parfois, c’est pour l’ambiance. Un peu de respect
         militaire, non ?

Je laisse échapper un petit soupir. Elle marque un point, même si je ne
         l’admets pas à voix haute.

Kin, occupée, ne semble pas avoir fait attention à mes mots. Un écran
         s'affiche sur mon bracelet, et elle se penche par-dessus mon épaule,
         toute excitée en voyant les images apparaître à l'écran. Avec un geste
         rapide, elle zoome sur l'hologramme en utilisant ses mains, cherchant
         à voir de plus près.

         Kin — Regarde, il y a une silhouette sur la créature… Attends, je vais
                  ajuster ça...

Elle ajuste rapidement les réglages de l'écran, et le zoom devient
         net, révélant les détails flous de la silhouette. Son visage se
         rapproche de l’écran, concentrée sur l’image.

         Kin — Voilà, c'est beaucoup plus clair maintenant... Je parie que
                  c’est une fille. Regarde bien la façon dont ce manteau tombe sur ses
                  épaules et sa posture... C’est subtil, mais ça me paraît évident.

Sa proximité et ses mouvements créent une sorte de complicité dans
         l’instant, ses mains manipulant l’hologramme tandis que je garde un
         œil sur l’écran.

         Rin — Si quelqu'un est là-haut, il va regretter de m'avoir pris au
                  piège. C'est le moment parfait pour tester mes nouvelles inventions en
                  conditions réelles.

Kin, toujours concentrée, ajuste encore légèrement le focus pour plus
         de précision. Puis, d’un geste brusque, je commence à avancer. Kin,
         qui était en appui sur mon épaule, perd légèrement l’équilibre et se
         rattrape de justesse, surprise.

         Kin — Hé, attends ! Tu pars déjà ?

Je me retiens de sourire en la voyant se rééquilibrer. Kin, toute
         excitée, tape dans ses mains légèrement avant de prendre un air
         sérieux.

         Kin — Génial, on part à l'aventure... Rin ? Hé, ne pars pas sans moi !
                  D'habitude, c'est moi qui pars sans rien dire. RINNNN !

Je prends appui sur l’enseigne d’une boutique, utilisant son support
         pour grimper progressivement jusqu'au toit. Une fois en hauteur, le
         vent frais caresse mon visage, et je peux mieux observer l'oiseau
         gigantesque au loin. Sans hésitation, je commence à sauter d'immeuble
         en immeuble.

D'un geste rapide, je plonge une main dans ma poche et en sors un
         petit cube : la Guardian Box. Ce condensé de haute technologie, fruit
         d'un hasard créatif lors de mes nombreuses expérimentations, me permet
         de contenir plusieurs équipements essentiels dans un espace compact et
         sécurisé. Pas plus grand qu'une pomme, ce dispositif est unique et
         impossible à recréer pour le moment.

Je presse un bouton, et, en plein saut, la boîte déploie ma veste de
         combat renforcée ainsi que mes chaussures spéciales. Elles se fixent
         automatiquement à mes pieds dès leur activation.

Grâce à leur technologie avancée elles génèrent un champ magnétique
         sous mes semelles, ce qui me permet de me déplacer à une vitesse
         vertigineuse tout en offrant une agilité exceptionnelle. Je peux
         changer de direction en une fraction de seconde, pivotant presque
         instantanément sans perdre en vitesse, comme si je glissais sur une
         surface invisible, et de manœuvrer dans des espaces réduits sans
         effort. Dans les airs, je peux également intensifier le champ
         magnétique pour me projeter comme un propulseur, couvrant de grandes
         distances rapidement et avec précision.

Quant à la veste, fabriquée en fibre de carbone renforcée, elle est à
         la fois légère et incroyablement résistante aux impacts. Sa conception
         est optimisée pour les combats extrêmes, offrant une protection
         maximale tout en me permettant une grande liberté de mouvement. Elle
         est également conçue pour résister aux intempéries, qu'il s'agisse de
         pluie, de vent ou de températures extrêmes. Dotée de compartiments
         stratégiquement placés de manière ordonnée et accessible. La veste
         flotte un instant devant moi, et avec une dextérité acquise par
         l'expérience, je l'enfile en plein vol avant d'atterrir sur le toit
         suivant. Mes pieds trouvant naturellement leur place à chaque bond.

Je me sens coupable de toujours laisser Kin en retrait, mais je sais
         que c'est pour son bien. Les dangers qui m'attendent sont trop grands,
         et je refuse de la mettre en danger inutilement. Cependant, je
         comprends aussi qu'elle puisse se sentir délaissée ou abandonnée par
         moments. C'est pourquoi je m'efforce de lui montrer que je me soucie
         d'elle, en la soutenant dans ses études et en étant présent
         lorsqu'elle a besoin de moi.

Tout en avançant, je sors mes lunettes de soleil de ma poche et les
         mets en place. Bien que simples, elles complètent mon équipement.
         Elles analysent en temps réel mon environnement, détectant les
         dangers, identifiant les itinéraires optimaux et me fournissant des
         informations cruciales pour anticiper les mouvements de l'adversaire.

À mesure que je gagne en hauteur, trois véhicules aériens de l'AGL
         apparaissent dans mon champ de vision, filant dans la même direction
         que l'oiseau gigantesque. Ces vaisseaux imposants, aux formes
         angulaires et renforcées, ressemblent à des forteresses volantes
         compactes, semblant conçues pour résister à de lourds impacts. Leur
         coque épaisse, aux teintes sombres avec des touches de rouge, leur
         donne une allure menaçante.

De larges turbines sur les flancs émettent un grondement grave tandis
         que des propulseurs supplémentaires s'illuminent d'un bleu électrique
         sous la carlingue, leur permettant d’effectuer des manœuvres rapides.

Leur surface est parsemée de renforts métalliques et de panneaux
         blindés, protégeant les zones stratégiques comme les moteurs et la
         cabine de pilotage, visible à travers un vitrage sombre. En dessous,
         de lourds canons sont fixés, prêts à ouvrir le feu si nécessaire. Ces
         véhicules ne sont pas faits pour la furtivité. Le bruit sourd de leurs
         moteurs résonne dans l'air, renforçant l'atmosphère tendue. Je dois me
         préparer au pire.

Les bâtiments massifs de la ville se font de plus en plus rares,
         tandis qu’au loin, l’étendue rocailleuse se dévoile. Le tumulte
         constant des rues et le grondement des moteurs s’estompent peu à peu,
         cédant la place au souffle chaud d’un vent chargé de sable. Le
         contraste est saisissant : la transition entre la jungle urbaine et
         l’immensité sauvage du désert est abrupte.

Le béton et l’acier s’effacent progressivement à l’horizon, révélant
         une vaste mer de sable et de rochers. Ce changement de décor marque
         l’approche des canyons, où la nature reprend ses droits. L’air devient
         plus sec, presque suffocant, et chaque respiration semble plus
         laborieuse sous l’omniprésence de la poussière. Devant moi, le désert
         s’étire à perte de vue, ponctué de gouffres béants et de falaises
         majestueuses.

Je garde un œil sur l’oiseau gigantesque, toujours visible dans le
         ciel brûlant, tandis que les véhicules aériens de l'AGL poursuivent
         leur trajectoire implacable à travers les canyons. Les parois
         rocheuses et les crevasses défilent sous mes yeux, formant un
         labyrinthe de pierres.

À chaque instant, je réalise que suivre l'oiseau depuis le sol est
         devenu un jeu d’échecs contre la nature elle-même, et je suis en train
         de perdre. Les ravins profonds et les falaises abruptes se dressent
         comme des obstacles naturels, me forçant à les contourner.

Je commence à perdre la trace de ma cible.

         Rin — Hikari, une traque au sol est vouée à l’échec dans cet
                  environnement. Il nous faut un plan B. Des idées ?
                  Hikari — Avec ce relief, prendre de la hauteur reste ta meilleure
                  option. Tu gagneras en visibilité… et en liberté de manœuvre.
                  Rin — Un assaut aérien direct sur l'oiseau... allons-y.

Alors que je prends de la hauteur, j’aperçois l’oiseau plonger dans le
         canyon, suivi de près par les véhicules de l’AGL. Ils larguent des
         drones de capture à intervalles réguliers, qui virevoltent autour de
         leur cible comme des guêpes enragées. Une véritable traque aérienne se
         déroule juste sous mes yeux.

L'AGL mobilise tout ce qu’ils ont pour l’arrêter. Une prisonnière en
         fuite ? Ou quelque chose de bien plus grave…

         Rin — Hikari, tu connais la devise. Quand il faut y aller…
                  Hikari — …faut y aller. Oui, mais… Stop !

Juste au moment où je m’élance, sa voix m’arrête net.

         Hikari — Le vent est instable, ta trajectoire va dévier. Sérieusement,
                  Rin, là tu joues avec ta vie.
                  Rin — Si je calcule bien leur vitesse, la mienne, et la distance, j’ai
                  une fenêtre. Une petite. C’est maintenant ou jamais. Après, ce sera
                  trop tard.
                  Hikari — Ok… Mais tu rates ton timing d’un cheveu, et c’est toi la
                  crêpe au fond du canyon. Tu le sais, hein ?
                  Rin — T’inquiète. Je suis doué pour les atterrissages foireux.

Je plonge en piqué, ma silhouette fendant le ciel comme un éclair.
         Irrité mais concentré, je serre les dents quand une rafale plus forte
         que prévu me heurte de plein fouet. Le vent me déséquilibre, pile
         comme Hikari l’avait annoncé. Ma trajectoire commence à dériver.

         Hikari — Recalcul en cours... Ok, t’es plus du tout dans l’axe. Et
                  pour info, ton taux de survie vient de tomber à... 6,333 %.
                  Rin — Ça va, Hikari, pas besoin de toutes les décimales. J'ai compris.
                  Je vais devoir improviser.

Alors qu’un des avions de combat passe juste en dessous de moi,
         j'ajuste ma chute et atterris avec un choc léger sur le fuselage. Le
         métal froid vibre sous mes pieds, et je glisse légèrement avant de me
         stabiliser.

         Pilote — Quelque chose s'est amarré à la structure ! Contrôle, je
                  répète, nous avons un intrus sur le fuselage !

Ignorant les cris paniqués du pilote, je détruis rapidement les drones
         qui escortaient l'avion avec des éclats de pierre. Je me dirige vers
         le cockpit, m'agrippant aux structures métalliques alors que l'avion
         tente de manœuvrer pour m’éjecter.

         Rin — Hikari, commence le processus de piratage. Désactive les
                  systèmes de détection de l'AGL et prépare le siège éjectable.
                  Hikari — Compris. Piratage en cours... Systèmes compromis dans 3...
                  2... 1...

Une légère secousse me signale que les systèmes de l'avion sont
         désormais sous le contrôle d'Hikari. Le pilote est éjecté en un
         instant, me laissant seul maître du véhicule. Satisfait d'avoir coupé
         les communications de l'AGL, il ne me reste plus qu'à m'occuper du
         reste de la flotte.

         Rin — Hikari, en plus de cela, vérifie les dernières communications de
                  l'AGL. Trouve des informations sur notre cible.

Tout en surveillant l’agilité de la fugitive, qui se débarrasse des
         drones avec une aisance étonnante, je perçois des grésillements dans
         mon oreillette.

         Hikari — Ou... je... cherch...
                  Rin — Hikari ?

Un silence. Ai-je atteint la distance maximale des communications ?
         C'est étrange, je suis déjà allé bien plus loin que ça. Puis, après
         quelques longues secondes, la voix d'Hikari reprend, plus claire et
         étonnamment plus chaleureuse.

         Hikari — Désolée pour le blanc. J’ai dû recalibrer quelques trucs en
                  intégrant les données de l’AGL. Franchement… leur système n’est pas
                  mal foutu. J’ai accès à beaucoup plus maintenant. Et… c’est plutôt
                  grisant, en vrai.

Je fronce les sourcils. Il y a un ton nouveau dans sa voix. Plus
         léger. Curieux, presque enthousiaste.

         Rin — Toi, en train de t’emballer ? C’est nouveau, ça.
                  Hikari — Tu n’imagines pas toutes les infos que je viens de récupérer…
                  Ça va nous faciliter la vie sur plein de trucs. Sincèrement, j’suis
                  presque frustrée de pas avoir fait ça plus tôt.

Son enthousiasme est nouveau, presque trop humain, par rapport à son
         tempérament nonchalant habituel. En balayant rapidement les alentours
         du regard, je remarque qu'il reste encore deux avions de l'AGL : l'un
         derrière moi, l'autre devant.

         Rin — Hikari, verrouille les missiles sur la cible arrière.

Dans un tir de barrage précis, je détruis le véhicule ainsi que les
         petits drones qui l'accompagnent. Cependant, je me rends compte que
         maintenir le contrôle de cet appareil, tout en évitant de m'écraser
         contre les parois du canyon et en piratant les systèmes de l'AGL,
         commence à peser sur mes ressources. Mon véhicule montre des signes
         d’instabilité. Malgré cela, je décide de forcer le passage et de
         dépasser le vaisseau devant moi par un autre chemin, conscient du
         risque de surcharge. Je serre les dents, sachant que je pousse tout à
         la limite.

Après être sorti de ce dédale, j'ai plus de liberté pour manœuvrer. Je
         m’approche enfin de l’imposant oiseau, me mettant à hauteur de sa
         cavalière. Cette figure énigmatique est enveloppée dans un long
         manteau à capuche, tacheté de sang, dissimulant entièrement son corps
         comme si elle cherchait à se protéger d'un froid glacial. Pourtant, il
         fait chaud ici... Le contraste me frappe. Le motif présent sur son
         attache capte mon attention, éveillant en moi une vague de nostalgie.
         Je suis certain de l'avoir déjà vu quelque part.

Alors que je m'apprête à en savoir plus, un vent violent souffle de
         face, faisant tomber la capuche de la mystérieuse cavalière. Je suis
         stupéfait de découvrir une jeune femme aux cheveux bleus élégants. Une
         large mèche cache partiellement son visage, lui donnant une allure
         sérieuse, presque froide, qui éveille immédiatement ma méfiance

Je me retrouve enfin à sa hauteur, mais son accueil est aussi glacial
         que le vent qui siffle à nos oreilles.

D’un mouvement fluide, elle brandit une imposante épée, et je
         l’esquive de justesse, à quelques millimètres près. Le souffle froid
         de la lame passe si près que mes lunettes se couvrent d’une fine
         pellicule de givre, et je sens mes cheveux se raidir sous l’effet du
         froid. Cette fille... Elle doit être une Radiant, tout comme le trio
         que j’ai affronté la semaine dernière.

         Rin — Je vois que tu as des ennuis !

Silence. Elle garde ses yeux fixés droit devant elle, indifférente à
         ma remarque.

         Rin — Heureusement que...

Toujours rien. Une forteresse de silence. C’est comme si je n’existais
         même pas pour elle.

         Rin — Bon, oublions les politesses. Si je te dérange, dis-le, mais je
                  mérite au moins des excuses pour m’avoir congelé, non ?

Elle cligne des yeux, enfin surprise. C'est la première vraie réaction
         que j'obtiens d’elle. Elle m’observe, comme si elle évaluait mes
         intentions, et enfin, elle brise son mutisme, mais sa voix est faible,
         difficile à entendre avec le vent hurlant et le bruit des moteurs des
         avions qui résonnent encore autour de nous.

         Fille mystérieuse — Tu ne fais pas partie des mercenaires qui me
                  poursuivent ?

Je tente de capter ses paroles malgré la distance et le chaos ambiant,
         mais juste à ce moment, la voix d’un pilote interrompt soudainement
         notre échange, coupant mes efforts de concentration.

         Pilote— Tour de contrôle, ici Delta 3, je n'ai plus le contrôle de mon
                  appareil.

Je grince des dents, irrité. Déjà que c'est un miracle d'entendre quoi
         que ce soit avec ce vent et cette distance, il faut en plus que cette
         voix dans mon oreille m’empêche de comprendre cette fille.

         Rin — Pourquoi suis-je toujours connecté à leur canal audio ? Je
                  n'arrive même plus à m'entendre. Allez, siège éjectable !

Sans même jeter un coup d'œil vers l’avion, je tends ma main en
         direction du cockpit, un geste presque théâtral, comme si je
         commandais l’appareil par pure volonté. À l’instant où mes doigts se
         plient, le cockpit s’ouvre brusquement, et le pilote est éjecté dans
         les airs avec une précision millimétrée, comme si je l'avais contrôlé
         à distance. L’avion, désormais incontrôlé, entame une descente en
         spirale vers les profondeurs du canyon, s’écrasant dans un fracas
         sourd, loin en dessous de nous.

Je prends une profonde inspiration. Avec cette distraction hors de mon
         champ sonore, je peux enfin me concentrer sur la cavalière.

Elle jette un rapide coup d'œil à la scène, mais reste impassible.
         D’un geste détaché, elle ajuste la prise sur son épée, ses mains se
         resserrant légèrement sur la garde comme si elle se préparait à réagir
         si nécessaire.

         Fille mystérieuse — Pourquoi devrais-je m'excuser ? Tu vois bien que
                  je suis occupée.

Je lève un sourcil, perplexe par son attitude.

         Rin — Si voler en rase-motte en ville et me congeler alors qu’on ne se
                  connaît pas ne te dérange pas, alors je suppose que tout va bien ?

Elle me fixe enfin, comme si mes paroles faisaient écho. Puis elle
         murmure, plus pour elle-même que pour moi :

         Fille mystérieuse — Alors, ce n'était pas un tir raté sur son propre
                  allié tout à l'heure. Il m'a vraiment sauvée... Sauvée pour que je lui
                  fasse des excuses... Mais qui est ce type ?

 

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