Cela fait maintenant une semaine que j'ai eu une altercation avec
Kain. Le calme semble revenu, mais je reste sur mes gardes. Malgré
tout, la routine quotidienne apporte un certain réconfort. Ce début
d'après-midi marque la fin des cours pour la semaine, et je tourne un
regard vers Kin, les sourcils légèrement froncés. Un soupir m'échappe
malgré moi en pensant à la situation actuelle.
Rin — Sérieusement, Kin ? Tout ça pour obtenir ton semestre ? Tu sais
que tricher ne t'apportera rien de bon pour ton avenir.
Elle croise les bras, affichant un air faussement innocent.
Kin — Mais non, Rin ! C'est comme une garantie. Si je suis coincée, je
sais que je peux compter sur toi. D'ailleurs, je n'ai toujours aucune
nouvelle de Kana.
Je lève les yeux au ciel, tentant de garder un ton léger, mais je sens
que quelque chose ne va pas.
Rin — Elle est probablement encore à l'hôpital.
Kin — J'espère qu'elle se rétablira vite.
Soudain, une nuée de drones de l'AGL traverse le ciel avec un
vrombissement mécanique, projetant des ombres mouvantes sur le sol.
Les écrans publicitaires s’allument en même temps, diffusant un
message urgent. La voix métallique de l'AGL ordonne à tous de se
mettre à l'abri.
Alerte de niveau 5. Une créature hostile non identifiée a été repérée
dans le secteur étudiant. Tous les citoyens sont priés de se mettre à
l'abri à l'intérieur des bâtiments. L’AGL a déployé des forces pour
maîtriser la menace. Restez à l’abri et attendez de nouvelles
instructions.
Rin — Tout ça pour un oiseau ? Ils exagèrent, comme toujours.
Kin — Tu ne trouves pas qu'il fait de plus en plus froid ?
Elle souffle dans ses mains pour se réchauffer. Le froid soudain est
palpable autour de nous, mais il ne m’affecte pas. Kin frissonne
légèrement, mais je reste parfaitement calme, insensible à la baisse
de température.
Rin — Honnêtement, je n'y ai pas vraiment prêté attention.
Nous nous arrêtons devant des vitrines remplies de pâtisseries. Kin,
toute excitée, admire les douceurs exposées. Son enthousiasme est
contagieux, mais je reste alerte. Une ombre massive passe soudain
au-dessus de nous à une vitesse fulgurante, projetant une brève
obscurité sur la rue.
Avant que je ne puisse réagir, un signal sonore retentit dans mon
oreillette, brusque et insistant.
Hikari — Danger imminent détecté. Rin, au-dessus !
Mon instinct prend immédiatement le relais. Je lève la tête, scrutant
le ciel. Une silhouette gigantesque fend l’air, rapide et imposante.
Je réagis en une fraction de seconde.
Rin — Kin, attention !
Je l'attrape par le bras et la pousse hors du chemin juste à temps.
Une bourrasque glacée s’abat sur moi, m'immobilisant instantanément
dans une cage de glace. Mon corps est figé, emprisonné par cette
coquille cristalline. Je ne ressens pas la morsure du froid, mais
l'immobilité est dérangeante.
Kin — Rin, tu m'entends ? Ça va aller ?
Sa voix me parvient, étouffée par la glace. Kin ne perd pas de temps.
Elle sort plusieurs de ses lames et, avec une précision calculée, elle
les plante dans la glace autour de moi. Chaque lame enfoncée provoque
une série de fissures qui se répandent à partir de ces points, créant
un motif complexe de lignes qui s’étend comme une toile d’araignée à
travers la structure gelée.
Kin — Tiens bon, Rin. Je vais te sortir de là.
Les impacts répétés commencent à faire leur effet. Des fissures se
propagent comme des toiles d'araignée à partir des points d'impact,
créant un réseau complexe qui affaiblit la structure gelée. Avec un
dernier coup puissant, Kin frappe au centre de la toile de fissures.
La glace émet un craquement sonore avant de se briser en morceaux,
tombant au sol avec un bruit sourd. Je m'effondre avec eux, reprenant
mon souffle, mes vêtements couverts de fragments de glace. Kin
s'accroupit à mes côtés, me tapotant doucement le dos.
Kin — Respire, Rin.
Rin — Merci, Kin... Ce dernier coup, il était incroyablement fort, tu
sais...
Kin — Euh... tu trouves ?
Je remarque que Kin est un peu surprise par ma remarque et ne sait pas trop
quoi répondre à cela, si ce n’est par un sourire. Tandis qu’elle semble
occupée à retirer des fragments de glace sur sa tenue, je murmure à
mon oreillette, à peine audible.
Rin — Hikari, analyse ce qui vient de se passer.
Hikari — Bien reçu, Monsieur.
Je roule des yeux.
Rin — Sérieusement… je t’ai déjà dit d’arrêter avec le “Monsieur”.
Hikari — Je sais. Mais vu la façon sèche dont tu balances tes
ordres parfois, c’est pour l’ambiance. Un peu de respect
militaire, non ?
Je laisse échapper un petit soupir. Elle marque un point, même si je ne
l’admets pas à voix haute.
Kin, occupée, ne semble pas avoir fait attention à mes mots. Un écran
s'affiche sur mon bracelet, et elle se penche par-dessus mon épaule,
toute excitée en voyant les images apparaître à l'écran. Avec un geste
rapide, elle zoome sur l'hologramme en utilisant ses mains, cherchant
à voir de plus près.
Kin — Regarde, il y a une silhouette sur la créature… Attends, je vais
ajuster ça...
Elle ajuste rapidement les réglages de l'écran, et le zoom devient
net, révélant les détails flous de la silhouette. Son visage se
rapproche de l’écran, concentrée sur l’image.
Kin — Voilà, c'est beaucoup plus clair maintenant... Je parie que
c’est une fille. Regarde bien la façon dont ce manteau tombe sur ses
épaules et sa posture... C’est subtil, mais ça me paraît évident.
Sa proximité et ses mouvements créent une sorte de complicité dans
l’instant, ses mains manipulant l’hologramme tandis que je garde un
œil sur l’écran.
Rin — Si quelqu'un est là-haut, il va regretter de m'avoir pris au
piège. C'est le moment parfait pour tester mes nouvelles inventions en
conditions réelles.
Kin, toujours concentrée, ajuste encore légèrement le focus pour plus
de précision. Puis, d’un geste brusque, je commence à avancer. Kin,
qui était en appui sur mon épaule, perd légèrement l’équilibre et se
rattrape de justesse, surprise.
Kin — Hé, attends ! Tu pars déjà ?
Je me retiens de sourire en la voyant se rééquilibrer. Kin, toute
excitée, tape dans ses mains légèrement avant de prendre un air
sérieux.
Kin — Génial, on part à l'aventure... Rin ? Hé, ne pars pas sans moi !
D'habitude, c'est moi qui pars sans rien dire. RINNNN !
Je prends appui sur l’enseigne d’une boutique, utilisant son support
pour grimper progressivement jusqu'au toit. Une fois en hauteur, le
vent frais caresse mon visage, et je peux mieux observer l'oiseau
gigantesque au loin. Sans hésitation, je commence à sauter d'immeuble
en immeuble.
D'un geste rapide, je plonge une main dans ma poche et en sors un
petit cube : la Guardian Box. Ce condensé de haute technologie, fruit
d'un hasard créatif lors de mes nombreuses expérimentations, me permet
de contenir plusieurs équipements essentiels dans un espace compact et
sécurisé. Pas plus grand qu'une pomme, ce dispositif est unique et
impossible à recréer pour le moment.
Je presse un bouton, et, en plein saut, la boîte déploie ma veste de
combat renforcée ainsi que mes chaussures spéciales. Elles se fixent
automatiquement à mes pieds dès leur activation.
Grâce à leur technologie avancée elles génèrent un champ magnétique
sous mes semelles, ce qui me permet de me déplacer à une vitesse
vertigineuse tout en offrant une agilité exceptionnelle. Je peux
changer de direction en une fraction de seconde, pivotant presque
instantanément sans perdre en vitesse, comme si je glissais sur une
surface invisible, et de manœuvrer dans des espaces réduits sans
effort. Dans les airs, je peux également intensifier le champ
magnétique pour me projeter comme un propulseur, couvrant de grandes
distances rapidement et avec précision.
Quant à la veste, fabriquée en fibre de carbone renforcée, elle est à
la fois légère et incroyablement résistante aux impacts. Sa conception
est optimisée pour les combats extrêmes, offrant une protection
maximale tout en me permettant une grande liberté de mouvement. Elle
est également conçue pour résister aux intempéries, qu'il s'agisse de
pluie, de vent ou de températures extrêmes. Dotée de compartiments
stratégiquement placés de manière ordonnée et accessible. La veste
flotte un instant devant moi, et avec une dextérité acquise par
l'expérience, je l'enfile en plein vol avant d'atterrir sur le toit
suivant. Mes pieds trouvant naturellement leur place à chaque bond.
Je me sens coupable de toujours laisser Kin en retrait, mais je sais
que c'est pour son bien. Les dangers qui m'attendent sont trop grands,
et je refuse de la mettre en danger inutilement. Cependant, je
comprends aussi qu'elle puisse se sentir délaissée ou abandonnée par
moments. C'est pourquoi je m'efforce de lui montrer que je me soucie
d'elle, en la soutenant dans ses études et en étant présent
lorsqu'elle a besoin de moi.
Tout en avançant, je sors mes lunettes de soleil de ma poche et les
mets en place. Bien que simples, elles complètent mon équipement.
Elles analysent en temps réel mon environnement, détectant les
dangers, identifiant les itinéraires optimaux et me fournissant des
informations cruciales pour anticiper les mouvements de l'adversaire.
À mesure que je gagne en hauteur, trois véhicules aériens de l'AGL
apparaissent dans mon champ de vision, filant dans la même direction
que l'oiseau gigantesque. Ces vaisseaux imposants, aux formes
angulaires et renforcées, ressemblent à des forteresses volantes
compactes, semblant conçues pour résister à de lourds impacts. Leur
coque épaisse, aux teintes sombres avec des touches de rouge, leur
donne une allure menaçante.
De larges turbines sur les flancs émettent un grondement grave tandis
que des propulseurs supplémentaires s'illuminent d'un bleu électrique
sous la carlingue, leur permettant d’effectuer des manœuvres rapides.
Leur surface est parsemée de renforts métalliques et de panneaux
blindés, protégeant les zones stratégiques comme les moteurs et la
cabine de pilotage, visible à travers un vitrage sombre. En dessous,
de lourds canons sont fixés, prêts à ouvrir le feu si nécessaire. Ces
véhicules ne sont pas faits pour la furtivité. Le bruit sourd de leurs
moteurs résonne dans l'air, renforçant l'atmosphère tendue. Je dois me
préparer au pire.
Les bâtiments massifs de la ville se font de plus en plus rares,
tandis qu’au loin, l’étendue rocailleuse se dévoile. Le tumulte
constant des rues et le grondement des moteurs s’estompent peu à peu,
cédant la place au souffle chaud d’un vent chargé de sable. Le
contraste est saisissant : la transition entre la jungle urbaine et
l’immensité sauvage du désert est abrupte.
Le béton et l’acier s’effacent progressivement à l’horizon, révélant
une vaste mer de sable et de rochers. Ce changement de décor marque
l’approche des canyons, où la nature reprend ses droits. L’air devient
plus sec, presque suffocant, et chaque respiration semble plus
laborieuse sous l’omniprésence de la poussière. Devant moi, le désert
s’étire à perte de vue, ponctué de gouffres béants et de falaises
majestueuses.
Je garde un œil sur l’oiseau gigantesque, toujours visible dans le
ciel brûlant, tandis que les véhicules aériens de l'AGL poursuivent
leur trajectoire implacable à travers les canyons. Les parois
rocheuses et les crevasses défilent sous mes yeux, formant un
labyrinthe de pierres.
À chaque instant, je réalise que suivre l'oiseau depuis le sol est
devenu un jeu d’échecs contre la nature elle-même, et je suis en train
de perdre. Les ravins profonds et les falaises abruptes se dressent
comme des obstacles naturels, me forçant à les contourner.
Je commence à perdre la trace de ma cible.
Rin — Hikari, une traque au sol est vouée à l’échec dans cet
environnement. Il nous faut un plan B. Des idées ?
Hikari — Avec ce relief, prendre de la hauteur reste ta meilleure
option. Tu gagneras en visibilité… et en liberté de manœuvre.
Rin — Un assaut aérien direct sur l'oiseau... allons-y.
Alors que je prends de la hauteur, j’aperçois l’oiseau plonger dans le
canyon, suivi de près par les véhicules de l’AGL. Ils larguent des
drones de capture à intervalles réguliers, qui virevoltent autour de
leur cible comme des guêpes enragées. Une véritable traque aérienne se
déroule juste sous mes yeux.
L'AGL mobilise tout ce qu’ils ont pour l’arrêter. Une prisonnière en
fuite ? Ou quelque chose de bien plus grave…
Rin — Hikari, tu connais la devise. Quand il faut y aller…
Hikari — …faut y aller. Oui, mais… Stop !
Juste au moment où je m’élance, sa voix m’arrête net.
Hikari — Le vent est instable, ta trajectoire va dévier. Sérieusement,
Rin, là tu joues avec ta vie.
Rin — Si je calcule bien leur vitesse, la mienne, et la distance, j’ai
une fenêtre. Une petite. C’est maintenant ou jamais. Après, ce sera
trop tard.
Hikari — Ok… Mais tu rates ton timing d’un cheveu, et c’est toi la
crêpe au fond du canyon. Tu le sais, hein ?
Rin — T’inquiète. Je suis doué pour les atterrissages foireux.
Je plonge en piqué, ma silhouette fendant le ciel comme un éclair.
Irrité mais concentré, je serre les dents quand une rafale plus forte
que prévu me heurte de plein fouet. Le vent me déséquilibre, pile
comme Hikari l’avait annoncé. Ma trajectoire commence à dériver.
Hikari — Recalcul en cours... Ok, t’es plus du tout dans l’axe. Et
pour info, ton taux de survie vient de tomber à... 6,333 %.
Rin — Ça va, Hikari, pas besoin de toutes les décimales. J'ai compris.
Je vais devoir improviser.
Alors qu’un des avions de combat passe juste en dessous de moi,
j'ajuste ma chute et atterris avec un choc léger sur le fuselage. Le
métal froid vibre sous mes pieds, et je glisse légèrement avant de me
stabiliser.
Pilote — Quelque chose s'est amarré à la structure ! Contrôle, je
répète, nous avons un intrus sur le fuselage !
Ignorant les cris paniqués du pilote, je détruis rapidement les drones
qui escortaient l'avion avec des éclats de pierre. Je me dirige vers
le cockpit, m'agrippant aux structures métalliques alors que l'avion
tente de manœuvrer pour m’éjecter.
Rin — Hikari, commence le processus de piratage. Désactive les
systèmes de détection de l'AGL et prépare le siège éjectable.
Hikari — Compris. Piratage en cours... Systèmes compromis dans 3...
2... 1...
Une légère secousse me signale que les systèmes de l'avion sont
désormais sous le contrôle d'Hikari. Le pilote est éjecté en un
instant, me laissant seul maître du véhicule. Satisfait d'avoir coupé
les communications de l'AGL, il ne me reste plus qu'à m'occuper du
reste de la flotte.
Rin — Hikari, en plus de cela, vérifie les dernières communications de
l'AGL. Trouve des informations sur notre cible.
Tout en surveillant l’agilité de la fugitive, qui se débarrasse des
drones avec une aisance étonnante, je perçois des grésillements dans
mon oreillette.
Hikari — Ou... je... cherch...
Rin — Hikari ?
Un silence. Ai-je atteint la distance maximale des communications ?
C'est étrange, je suis déjà allé bien plus loin que ça. Puis, après
quelques longues secondes, la voix d'Hikari reprend, plus claire et
étonnamment plus chaleureuse.
Hikari — Désolée pour le blanc. J’ai dû recalibrer quelques trucs en
intégrant les données de l’AGL. Franchement… leur système n’est pas
mal foutu. J’ai accès à beaucoup plus maintenant. Et… c’est plutôt
grisant, en vrai.
Je fronce les sourcils. Il y a un ton nouveau dans sa voix. Plus
léger. Curieux, presque enthousiaste.
Rin — Toi, en train de t’emballer ? C’est nouveau, ça.
Hikari — Tu n’imagines pas toutes les infos que je viens de récupérer…
Ça va nous faciliter la vie sur plein de trucs. Sincèrement, j’suis
presque frustrée de pas avoir fait ça plus tôt.
Son enthousiasme est nouveau, presque trop humain, par rapport à son
tempérament nonchalant habituel. En balayant rapidement les alentours
du regard, je remarque qu'il reste encore deux avions de l'AGL : l'un
derrière moi, l'autre devant.
Rin — Hikari, verrouille les missiles sur la cible arrière.
Dans un tir de barrage précis, je détruis le véhicule ainsi que les
petits drones qui l'accompagnent. Cependant, je me rends compte que
maintenir le contrôle de cet appareil, tout en évitant de m'écraser
contre les parois du canyon et en piratant les systèmes de l'AGL,
commence à peser sur mes ressources. Mon véhicule montre des signes
d’instabilité. Malgré cela, je décide de forcer le passage et de
dépasser le vaisseau devant moi par un autre chemin, conscient du
risque de surcharge. Je serre les dents, sachant que je pousse tout à
la limite.
Après être sorti de ce dédale, j'ai plus de liberté pour manœuvrer. Je
m’approche enfin de l’imposant oiseau, me mettant à hauteur de sa
cavalière. Cette figure énigmatique est enveloppée dans un long
manteau à capuche, tacheté de sang, dissimulant entièrement son corps
comme si elle cherchait à se protéger d'un froid glacial. Pourtant, il
fait chaud ici... Le contraste me frappe. Le motif présent sur son
attache capte mon attention, éveillant en moi une vague de nostalgie.
Je suis certain de l'avoir déjà vu quelque part.
Alors que je m'apprête à en savoir plus, un vent violent souffle de
face, faisant tomber la capuche de la mystérieuse cavalière. Je suis
stupéfait de découvrir une jeune femme aux cheveux bleus élégants. Une
large mèche cache partiellement son visage, lui donnant une allure
sérieuse, presque froide, qui éveille immédiatement ma méfiance
Je me retrouve enfin à sa hauteur, mais son accueil est aussi glacial
que le vent qui siffle à nos oreilles.
D’un mouvement fluide, elle brandit une imposante épée, et je
l’esquive de justesse, à quelques millimètres près. Le souffle froid
de la lame passe si près que mes lunettes se couvrent d’une fine
pellicule de givre, et je sens mes cheveux se raidir sous l’effet du
froid. Cette fille... Elle doit être une Radiant, tout comme le trio
que j’ai affronté la semaine dernière.
Rin — Je vois que tu as des ennuis !
Silence. Elle garde ses yeux fixés droit devant elle, indifférente à
ma remarque.
Rin — Heureusement que...
Toujours rien. Une forteresse de silence. C’est comme si je n’existais
même pas pour elle.
Rin — Bon, oublions les politesses. Si je te dérange, dis-le, mais je
mérite au moins des excuses pour m’avoir congelé, non ?
Elle cligne des yeux, enfin surprise. C'est la première vraie réaction
que j'obtiens d’elle. Elle m’observe, comme si elle évaluait mes
intentions, et enfin, elle brise son mutisme, mais sa voix est faible,
difficile à entendre avec le vent hurlant et le bruit des moteurs des
avions qui résonnent encore autour de nous.
Fille mystérieuse — Tu ne fais pas partie des mercenaires qui me
poursuivent ?
Je tente de capter ses paroles malgré la distance et le chaos ambiant,
mais juste à ce moment, la voix d’un pilote interrompt soudainement
notre échange, coupant mes efforts de concentration.
Pilote— Tour de contrôle, ici Delta 3, je n'ai plus le contrôle de mon
appareil.
Je grince des dents, irrité. Déjà que c'est un miracle d'entendre quoi
que ce soit avec ce vent et cette distance, il faut en plus que cette
voix dans mon oreille m’empêche de comprendre cette fille.
Rin — Pourquoi suis-je toujours connecté à leur canal audio ? Je
n'arrive même plus à m'entendre. Allez, siège éjectable !
Sans même jeter un coup d'œil vers l’avion, je tends ma main en
direction du cockpit, un geste presque théâtral, comme si je
commandais l’appareil par pure volonté. À l’instant où mes doigts se
plient, le cockpit s’ouvre brusquement, et le pilote est éjecté dans
les airs avec une précision millimétrée, comme si je l'avais contrôlé
à distance. L’avion, désormais incontrôlé, entame une descente en
spirale vers les profondeurs du canyon, s’écrasant dans un fracas
sourd, loin en dessous de nous.
Je prends une profonde inspiration. Avec cette distraction hors de mon
champ sonore, je peux enfin me concentrer sur la cavalière.
Elle jette un rapide coup d'œil à la scène, mais reste impassible.
D’un geste détaché, elle ajuste la prise sur son épée, ses mains se
resserrant légèrement sur la garde comme si elle se préparait à réagir
si nécessaire.
Fille mystérieuse — Pourquoi devrais-je m'excuser ? Tu vois bien que
je suis occupée.
Je lève un sourcil, perplexe par son attitude.
Rin — Si voler en rase-motte en ville et me congeler alors qu’on ne se
connaît pas ne te dérange pas, alors je suppose que tout va bien ?
Elle me fixe enfin, comme si mes paroles faisaient écho. Puis elle
murmure, plus pour elle-même que pour moi :
Fille mystérieuse — Alors, ce n'était pas un tir raté sur son propre
allié tout à l'heure. Il m'a vraiment sauvée... Sauvée pour que je lui
fasse des excuses... Mais qui est ce type ?