Moi je fais la vaisselle - Chanson plus Bifluorée

Par Pouiny
Notes de l’auteur : https://youtu.be/rU5QFXKnRds

Il y eut une époque dans ma vie, quelque part vers mes 7 ans, où mes parents écoutaient constamment les Chansons plus Bifluorée, et cette époque coïncidait avec celle où mon père n’arrivait plus à faire fonctionner correctement son lave-vaisselle. Il lavait mal, et il était pas rare de prendre le courant en voulant simplement poser une assiette à l’intérieur. Si l’on voulait le remplir sans se faire mal, c’était simple, il fallait porter des chaussures avec une bonne semelle. Ces deux faits, qui semblent pourtant assez éloigné l’un de l’autre, ont tant coïncidé qu’ils ont changé l’ambiance de mon enfance en le teintant de cet espèce de vieux slow dont je ne comprenais rien.

 

« Moi je fais la vaisselle » est très probablement la chanson la plus connue du groupe. Le ridicule du texte transformant une chanson d’amour très populaire en une parodie absurde mélangé à leur prouesse technique et vocale dans le chant en a fait un réel succès. Et mon père, qui aimait vraiment cette chanson, la mettait très régulièrement au volume maximal quand il se retrouvait à devoir faire la vaisselle à la main.

 

« Moi je fais la vaisselle, c'est bête mais je suis fait comme ça. Je la veux vraiment belle, sinon je ne la fais pas. » On ne connaissait pas la chanson originelle, mais le décalage entre le sérieux de l’instrumentation et les paroles suffisait pour nous faire rire quand nous observions la scène avec mon frère et ma sœur. Et la voix de notre père qui chantait plus ou moins volontairement mal, en criant presque quand venait l’envolée lyrique, nous faisait éclater de rire. Nos parents étaient très souvent très sérieux, ce n’était pas si évident de les voir des choses un peu étranges ou un peu drôles. Le chant à tue-tête de mon père qui nous jetait quelques regards en coin depuis la cuisine était une sorte d’exception.

 

Quand mon père ne chantait pas, on entendait le soir le chant bien maîtrisé des Xavier, Sylvain et Michel. Et quand ils ne mettaient pas la version audio, ils mettaient le DVD d’un concert où ces deux chansons se retrouvaient. Ces deux chansons ont bercé par leur absurdité tant de soirées de repas ou d’après repas du soir, qu’aujourd’hui elles sont une véritable facette de mon enfance. Mon frère et ma sœur étions les nouveaux petits chansons plus bifluorés et à force d’entendre mon père chanter ces deux chansons très fort et assez faux, on s’entraînait pour reproduire le chant du groupe.

 

On les chantait si souvent que la chef d’orchestre de notre enfance nous avait demandé plusieurs fois de chanter « Moi je fais la vaisselle » pour elle. Je m’occupais du contre chant avec ma sœur, pendant que mon grand frère chantait la première voix. Elle était un véritable exercice stimulant pour nous, car mine de rien très difficile à chanter pour des enfants. Puis, au remariage de ma grand-mère, ce fut cette chanson qui nous fut demandée d’interpréter, a la fin de la soirée, devant tous les invités. D’une sorte de petite blague familiale, elle était devenue un véritable morceau de notre identité. On la chantait tout le temps, que ce soit à la maison, dans la rue ou dans la voiture quand nous partions en vacance, nous allions l’écouter en concert tous les ans quand les Chansons plus bifluorée passaient sur la scène nationale de notre petite ville.

 

Depuis, mon père a réparé son lave-vaisselle, et en grandissant nos parents ont arrêtés de laisser tourner sur la chaîne familiale toujours les mêmes chansons des mêmes artistes pour nous ouvrir à d’autres horizons, parfois un peu plus adulte. Alors, progressivement, la chanson a disparu de nos vies et est devenue cette sorte de petite relique d’un autre temps. Son instrumentation assez ringarde contribue pour moi aujourd’hui à son aura représentant mon enfance. Cette chanson m’a pourtant posé des problèmes, quand j’entendais des amis parler de sa version d’origine et que je n’étais pas capable de chanter autre chose que des paroles centrées sur un égouttoir. Et pourtant, je ne pourrais jamais être plus reconnaissant à mes parents d’avoir tant écouté ce groupe quand nous étions jeune. Sans eux, il est clair que j’aurais beaucoup moins de bons souvenirs de mes premières années.

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