Nuit en ville (7) - Promesse

Par Pouiny
Notes de l’auteur : Chanson citée dans le chapitre :

Johnny I Hardly Knew Yeh - Joan Baez
https://youtu.be/PRszba5m7iA

« Comment j’ai pu… savoir ? Que c’était là ?

– J’en sais rien, avoua Aïden. Je ne saurai pas te dire.

– J’ai reconnu l’endroit. Je te jure, je t’assure que je l’ai vraiment reconnu.

– Peut-être que tu as vraiment vu Béryl ? J’en sais rien, Alex. Ça dépasse mes connaissances. »

Aïden respira très fort, très lentement. Alexandre le sentait, il essayait de rester maître de ses moyens.

« Tu n’étais jamais retourné là ?

– Jamais. C’était trop… Compliqué, pour moi.

– Je comprends.

– Tu sais, Alex… Moi aussi, quand j’avais ton âge, j’avais l’impression de devenir fou. J’avais l’impression qu’autour de moi tout allait trop vite. Que le monde était trop hostile, trop monstrueux, trop différent. Moi aussi, j’ai fait des choses… Déraisonnables ? Je pense qu’on peut le dire comme ça.

– Comme les griffures de chat, sur ton bras ? »

Touché en plein cœur, Aïden eut un petit rire gêné.

« Je suis un très mauvais conteur et un très mauvais menteur. Rien ne va, dans mes histoires.

– Tu n’as pas besoin de ça… »

Alexandre, en parlant, s’était recroquevillé contre lui-même. Aïden, ne comprenant pas où il voulait en venir, ne répondit pas, attendant qu’il développe.

« A quoi ça sert, de raconter, quand ce que tu vis est déjà incroyable ?

– Comment ça ?

– J’en ai marre, d’entendre des histoires. »

En prononçant cette phrase, qu’il n’avait pas prévue, tout lui parut d’un seul coup très clair. Comme si le voile se levait dans la lumière ses pensées.

« J’en ai marre d’entendre des histoires, répéta-t-il, plus fort, comme pour apprécier l’effet que ça faisait. J’ai l’impression d’avoir passé ma vie à ça. J’ai écouté mes parents, j’ai écouté mes professeurs, j’ai lu des tonnes d’histoires, a tel point que je connais tout d’elles. Je sais comment on fait pour qu’une histoire soit intéressante. Je connais leurs genres, leurs structures, leur mécanique, leurs archétypes… Mais moi, dans tout ça ? Je ne suis rien. »

Il sentit des larmes monter alors qu’il perdait son regard dans le rouge des coquelicots.

« Je ne suis rien, répéta-t-il à nouveau. Je n’ai pas d’histoire. Je ne suis pas un acteur. Je ne suis pas un héros. Je connais ta vie, celle de Bastien, celle de mes parents… celle de Pama… Et je ne suis pas à la hauteur. Vous… Vous avez une belle histoire. Ton couple est admirable, vous vous aimez encore alors que vous vous êtes rencontré au lycée. Pama et papa, c’est encore mieux… Pama a changé de pays, changé d’identité, il a affronté sa famille et tous les jours, il se bat pour être lui-même. Vous êtes tous vraiment, vraiment incroyable.

– Alex…

– Laisse-moi finir, s’il te plaît ! »

Il l’avait interrompu plus fort qu’il ne le pensait. Mais Aïden ne s’en formalisa pas. Il resta silencieux, regardant le jeune homme avec un air désespérément désolé. Alexandre avait laissé tomber. Il pleurait, ne se souciant plus de si sa voix déraillait. Il ne se souciait plus d’être ridicule.

« Même Béryl, elle a fait mieux que moi ! Elle est morte alors qu’elle était plus jeune que moi, et pourtant… Je ressens, dans sa vie, dans son histoire, quelque chose d’incroyable ! Je l’ai pas connue, et pourtant… Je l’admire. C’est forcément qu’il y avait, en elle, quelque part, quelque chose…

Il ne termina pas sa phrase. Il n’avait aucune idée de comment la finir, alors il la laissa en suspens. Il sécha une larmes, et alors qu’une autre tombait, il continua.

« Moi, si j’étais mort à dix-sept ans, je n’aurai rien laissé. Personne n’aurait eu rien à dire de moi, à part que j’étais le fils de la personne la plus extravagante qu’ils aient pu rencontrer. Et très vite, on m’aurait oublié. Je suis invisible, je suis banal… J’ai rien d’exceptionnel. Je suis juste, juste moi, et personne ne me voit si pama n’est pas dans les alentours. C’est comme si tout dépendait de lui ! C’est comme si … J’étais un incapable. Mais de toute façon, je ne serai jamais mort a dix-sept ans ! Parce que je suis quelqu’un de banal. Je suis un garçon, j’aime les filles, je n’ai pas de maladie handicapante, je n’ai rien de bizarre. Ma vie, c’est la plus simple qu’on puisse avoir, et je le vois bien, parce que quand je la compare avec les autres, je me dis que je suis ridicule ! Je peux pas souffrir. J’ai pas de raison de souffrir. Si je souffre, c’est de ma faute, et pas de la faute du monde. C’est de ma faute… »

Il laissa tomber sa tête et se mit a pleurer. Aïden le prit dans ses bras, silencieusement. Il sorti de son sac les photos de l’ancien champ de tournesol, les premières photos qu’il avait prise et qu’il avait toujours soigné. Les posant à terre, il les comparait avec ce qu’il y avait devant ses yeux. L’endroit était encore reconnaissable, mais il n’avait en même temps plus rien a voir. Les coquelicot envahissaient tout l’espace. En a peine plus de vingt ans, le monde avait bien changé.

« Tu veux que je dise ce que je pense ? Murmura Aïden à Alexandre, doucement.

– Attends… J’ai pas… J’ai encore…

– D’accord, j’attends. Prend ton temps, Alex.

– Alex, renifla le jeune homme avec un sourire douloureux. Tu vois, même ça, c’est la preuve que je ne suis pas à la hauteur. Ils ont choisi ce nom exprès, pour que si jamais… Si par miracle, je devais être comme Pama, je ne souffre pas comme lui. Ça servait à rien, au final. Je suis un garçon, comme prévu, et c’est moi qui ait demandé à ce qu’on m’appelle Alexandre.

– Ça reste un beau prénom, répondit Aïden, refusant de laisser passer ça. »

Ne sachant pas comment y répondre, le jeune homme ne répondit pas. Mais il ne pouvait pas juste se taire. Se débattant dans ses larmes, il fini par reprendre :

« Moi, j’ai une vie normale, dont tout le monde se fiche. Tout m’est servi sur un plateau. J’ai pas besoin de me battre contre les autres. Et pourtant… J’arrive pas à faire mieux que vous. Vous, vous avez des couples stables et pérennes. Vous avez trouvé l’amour super jeune… Vous avez de vrais amis, qui vous soutiennent quoi qu’il se passe. Et moi… J’ai rien de tout ça. A mon âge, Pama, il me donnait naissance. Et moi… Je n’ai rien. Je vis seul. Je suis seul. Et… Et j’en ai marre, voilà ! »

Encore une fois, il se laissa tomber dans ses larmes. Il se sentait misérable et il était presque persuadé qu’Aïden allait se lever et partir sans rien lui dire. Qu’il serait abandonné, lui et sa stupidité, lui et sa folie. Pourtant, même en pleurant bruyamment, il continuait de sentir sur ses épaules l’étreinte d’Aïden qui refusait de le lâcher, même s’il restait silencieux. Prenant soudainement peur, il fini par murmurer entre deux hoquets :

« J’ai fini.

– Excuse-moi, lui répondit Aïden d’une voix douce. Je réfléchissais.

– A quoi ?

– A comment je peux formuler ce que je pense. Ça ne me vient pas facilement.

– D’accord. »

Alors il attendit, dans un silence seulement entrecoupé par le son du vent et par ses sanglots. Après un long moment, Aïden fini par inspirer :

« En fait… Je crois que tu ne réalises pas à quel point tu as impressionné ton monde, Alexandre. Je veux dire, tu te rends compte ? Tu es dans un conservatoire national. Tu danses dans les plus grandes salles de théâtre de la capitale. Pour y arriver, tu es parti tout seul, très loin d’ici, loin de tous les gens que tu pouvais connaître. Tu t’es débrouillé tout seul pour payer ton loyer. Tu as un rythme de travail et un régime de vie qui est purement draconien ! Tu es incroyable, Alex, crois moi. Bien plus que moi ou Bastien. Même si je suis touché que tu nous admire à ce point… On ne reste que de modeste artistes qui évoluons dans un cadre très privé, par rapport au tien. Moi, j’ai pas atteint un tel niveau de maîtrise dans ma pratique de la photo ou de la course, même quand je m’y étais entièrement consacré ! Je pense que, sur bien des points, tu nous a tous dépassé, déjà. Parce que parmi nous, tu es le seul qui a une vraie ambition, de faire mieux, de marquer. Nous, en tout cas Bastien et moi pour être sûr, on s’est toujours surtout considéré comme des oiseaux de passage. On avait pas envie de marquer l’histoire, de marquer les esprits. On avait juste envie de vivre heureux, comme on le pouvait. Toi, tu vois plus loin que ça. Tu es un peu… un peu comme Béryl, d’une certaine manière. Tu cherches à aller au-delà de tes capacités. Et pour ça, tu te donnes à fond…

– Mais… Je n’ai rien… encore rien fait ? Je veux dire… Le spectacle le plus important que je devais faire… Je sais même pas si… si j’y serais…

– Peu importe ! Ce que tu as accompli, déjà, pour arriver jusque là, c’est déjà énorme. Presque trop, même. Tu sais on s’inquiète souvent pour toi. William a beaucoup cherché, pour tes douleurs. On est loin, on est impuissant, mais… On est là. Tu n’es pas tout seul. »

Il serra le jeune homme davantage contre lui. Et dans cette étreinte, Alexandre ressenti toute l’affection, toute la tendresse que pouvait ressentir Aïden pour lui, malgré tout ce qu’il venait de lui faire endurer. Pour une raison qui lui échappa, ses larmes s’arrêtèrent.

« Et … Si Bastien et moi, si Charlie et William, on est des couples soudés qui se sont toujours soutenu, même très jeune, c’est en partie du a de la chance, mais aussi parce que nous avons toujours été contre le vent. Pour parler de moi, Bastien et moi on s’est véritablement construit après la mort de ma sœur. J’étais seul, j’étais détruit, j’étais persuadé de ne plus avoir de raison de vivre, et Bastien était le seul à m’accepter ainsi. Plus nous passions du temps ensemble, plus nous voyons les autres nous regarder avec incompréhension ou mépris et plus on s’attachait l’un à l’autre. C’était la seule chose qu’on avait pour nous soutenir, d’une certaine manière. Notre couple, il est forgé sur de la douleur et des traumatismes. Je pense que c’est la même chose pour Charlie et William. Charlie était seul, perdu dans un pays inconnu, il couchait dehors… William lui a tendu la main, et ils ont quitté l’Irlande à l’époque où la discrimination contre eux était encore légalement autorisée. Charlie est devenu la seule famille de William et William la seule famille de Charlie. Dans ces conditions, ils étaient presque obligé de rester ensemble et de se supporter… Mais tu imagines le nombre de douleur, de difficulté, de doute et de peur qui a du accompagner tout ça ? Nous ne sommes pas des couples extraordinaire, Alexandre, nous sommes simplement des personnes blessées, qui se sont raccrochés où elles ont pu. Et on a eu beaucoup de chance, que ça se passe aussi bien. »

Un silence lourd accompagna ses paroles. Alexandre avala sa salive, tendu. Il ne savait plus quoi penser.

« Tu as la chance, Alex, continua Aïden, de pouvoir faire autrement. Tu n’es pas obligé d’avoir une longue relation où l’on se partage le pire. Tu peux voir les gens autrement, de manière plus légère. Tu peux trouver une relation où son nœud sera le bonheur. Tu peux faire de manière différente que tes parents. Tu vis dans un monde qui est de plus en plus libre, où désormais les gens cherchent à entrevoir plus de possibilités, d’autres façon de faire, d’autre façon d’être. Alors, peut-être que oui, ça te prendra plus de temps que nous de trouver quelqu’un. Mais tu peux essayer, tu peux te tromper, tu peux recommencer, tu peux prendre ton temps. C’est un immense luxe, et ce n’est pas parce que tu prends cette liberté que tu as raté quoi que ce soit. Au contraire, si on regarde différemment, c’est nous qui n’avons pas eu la chance de vivre tout ce qu’on aurait potentiellement pu essayer.

– Comment ça ?

– C’est… un peu compliqué, mais… Bastien n’est pas attiré par les femmes et même sans avoir plus expérimenté, il en est certain. Ce n’est pas mon cas. Ce n’est pas très grave, mais… Je resterai toujours avec un petit doute dans ma tête. »

Choqué, Alexandre le regarda avec yeux ronds. Aïden avait l’air gêné, mais il avait quand même l’air d’être en paix avec cette pensée, qui l’avait sans doute plus travaillée que ce qu’il laissait entrevoir.

« Je… Je suis désolé…

– Ça va, Alex, je le vis bien. C’est le jour des confidences, aujourd’hui, manifestement.

– Tu vas… tu ne vas pas le quitter pour ça, hein ? »

Aïden éclata de rire, avec la même douceur et sincérité que tout ce qu’il avait pu dire auparavant.

« Si on avait du se séparer pour ça, ça ferait bien longtemps qu’on ne serait plus ensemble. Il est au courant, et je ne te l’aurai sûrement pas dit s’il ne le savait pas, donc ne t’inquiète pas pour moi. »

Soulagé, Alexandre se détacha légèrement de l’étreinte de l’homme. Ils continuèrent de regarder les fleurs rouges, à l’ombre du soleil de l’après-midi.

– J’ai beau voir tes photos, murmura Alexandre, j’ai du mal à croire qu’il y avait autre chose que des coquelicots. Quand je les regarde, j’ai l’impression qu’ils ont toujours été là.

– C’est impressionnant, le temps qui passe, hein ? Si tu m’avais dit à l’époque que ces tournesols pouvaient disparaître, je ne l’aurai pas cru.

– Aïden…

– Quoi ?

– J’aurais aimé connaître Béryl. Pour de vrai. »

Aïden jeta un regard à Alexandre. Il semblait plus calme, plus en paix avec tout ce qui l’assaillait. Malgré tout, il gardait sur son visage les traces des larmes séchées et un air infiniment triste.

« Moi aussi, j’aurais aimé que tu la connaisses… J’aurais tellement aimé qu’elle vive peut-être, juste un peu plus longtemps.

– Elle aurait pu, tu crois ?

– J’en sais rien. A quel prix, de toute façon ? Je suis sûr qu’elle a vécu autant qu’elle le souhaitait. Déjà, c’est une pensée qui me permet d’être en paix. Hé, Alex…

– Quoi ?

– Puisqu’on est dans les confidences, tu veux savoir ce qui me faisait le plus peur, avant de te connaître ?

– Quoi ?

– Je savais que Bastien et moi, on n’aurait pas d’enfant. J’ai toujours admiré Charlie pour avoir tenu a te donner la vie malgré tout ce qu’il a pu vivre comme enfer. Moi, du peu que j’ai vu, du monde, de mes parents, des galères de famille… Ça m’a toujours profondément fait peur. Mais il y avait qu’une seule pensée qui aurait pu me faire changer d’avis. »

Il fit silence. Il réfléchissait sûrement au meilleur moyen de la prononcer en étant clair. Alexandre, patient, attendait. Il avait un peu peur de la direction que prenait la discussion.

« J’avais peur qu’avec moi, le souvenir de Béryl sombre dans l’oubli. J’avais peur de l’emporter dans ma tombe. J’avais envie de savoir que je n’étais pas le seul à l’aimer et l’apprécier. Alors… Je sais que ça t’as fait sans doute beaucoup de mal, et j’en suis sincèrement désolé. Je me suis toujours demandé si j’avais bien fait de te parler de tout ça. Mais… Merci. Merci d’avoir fait vivre Béryl dans ta mémoire comme tu l’as pu. Tu n’as pas idée de ce que ça peut représenter, pour moi. »

Bien qu’il ne pleurait pas, il se frotta les yeux. Il laissa échapper un grand soupir suite à ses paroles. Pensif, Alexandre resta silencieux. Après un long moment, perdu dans les vagues rouges du soleil sur les fleurs, il répondit :

« Ne t’excuse pas. Je t’en voudrais jamais, pour ça. Je pense à elle, à chaque fois que je suis dans l’obscurité des coulisses. Et même si je l’ai jamais connue… elle m’a beaucoup apportée. Crois-moi.

– Je n’en doute pas. Elle adorait aider les autres. »

Un souffle de vent emporta leurs paroles, au loin. Alexandre se sentait moins fatigué, moins perdu, moins fou. Regardant l’horizon, y voyant désormais autre chose que du brouillard, il commença a taper sur son corps des rythme auxquels il ne pensait qu’à peine. Jouant entre les différents sons qui pouvaient sortir de ses mains, il claqua des doigts, avant de produire un son frotté contre ses cuisses. Le regardant faire, Aïden lui demanda d’une voix douce :

« Qu’est-ce que tu fais ?

– Essaie de me suivre, lui répondit-il simplement. »

Et sans plus de présentation, il laissa sa voix résonner dans la montagne.

 

With your guns and drums, and drums and guns, hurroo, hurroo

With your guns and drums, and drums and guns, hurroo, hurroo

With your guns and drums, and drums and guns, the enemy nearly slew ye

Oh my darling dear, ye look so queer

Johnny I hardly knew ye.

 

Du bout de ses doigts, comme un son qu’il aurait pu reproduire en une danse funèbre, il imitait le son d’un tambour. Doux, mais rythmé, a peine prononcé, il portait dans la percussion toute une mélancolie passée, qui n’était pas la sienne, mais qu’il connaissait que trop bien. Aïden chantonnait du mieux qu’il pouvait, de sa voix qu’il maîtrisait mal, les paroles qui lui disaient quelque chose. Mais la plupart du temps, il était seul, soutenant sa voix contre le vent, imaginant l’écho qu’elle pouvait produire à l’intérieur.

 

Where are your legs that used to run, hurroo, hurroo

Where are your legs that used to run, hurroo, hurroo

Where are your legs that used to run, before you left to carry a gun

I fear your dancing days are done

Johnny, I hardly knew ye.

 

Sans y réfléchir, il se souvenait des paroles. Ces paroles qui avaient traversé les âges, qui avaient changé en fonction des chanteurs qui s’étaient succédé depuis ce qu’il lui semblait être la nuit des temps. Désormais, c’était son tour, et leur douleur, leur chant se mélangeait avec ses sentiments pour ne créer qu’une seule entité, une entité capable de parler aux arbres.

 

Where are the eyes that were so mild, hurroo, hurroo

Where are the eyes that were so mild, hurroo, hurroo

Where are the eyes that were so mild, when my heart you did beguile

And why did ye run from me and the child

Johnny, I hardly knew ye.

 

Sa voix s’habituait au chant, se forgeait avec elle. En portant les mots, elle assumait sa force, elle donnait tout. Ses mains qui l’accompagnaient sans qu’il le réalise accentuait les mouvements, tapait plus fort, laissant sortir de lui-même davantage de son encore. Ses mouvements devenaient lentement de la danse, ses doigts rebondissant contre sa peau, ses vêtements. La musique, si pure, si crue, le transportait jusqu’en Irlande, et peut-être jusqu’au monde des morts.

 

They're rolling out the guns again, hurroo, hurroo

They're rolling out the guns again, hurroo, hurroo

They're rolling out the guns again, but they won't take back our sons again

No they'll never take back our sons again

Johnny, I'm swearing to ye.

 

Et dans sa promesse jurée en l’air, il s’adressa, quelque part dans sa tête, a cette fille qu’il n’avait jamais connu et qu’il avait tant aimé. Sa voix se tu sur ces dernières paroles, mais ses doigts continuèrent à danser, réduisant le son des tambours, petit à petit, se laissant avaler par le souffle du vent. Fermant les yeux, il n’avait pas besoin de les voir pour ressentir, le mouvement de ses mains, nageant dans l’air, créant la musique dans le silence. Imaginant, en écho, un son qui aurait pu lui répondre, il immobilisa son mouvement en l’air, le temps d’une seconde, juste pour poser le point final.

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