Objectif Prométhée

Bonjour, cher lecteur,

J’espère que vous êtes confortablement installé et prêt à plonger dans une aventure qui pourrait changer votre perception du monde. Vous vous demandez peut-être pourquoi je m’adresse directement à vous, pourquoi je brise cette barrière entre nous. Eh bien, c’est parce que ce que je m’apprête à vous révéler ne peut être raconté de manière traditionnelle. Ce récit n'est pas une simple histoire – c'est une vérité oubliée, une saga qui transcende le temps, et je suis ici pour vous guider à travers ses méandres. Vous découvrirez des secrets qui ont échappé aux récits officiels, des fragments de notre passé qui ont été effacés, et qui, je le crains, pourraient bouleverser tout ce que vous croyez savoir.

Mais je m’égare. Allons droit au but. Êtes-vous prêt à explorer les mystères enfouis du passé ? À affronter des vérités qui défient l’imagination ? Je vous préviens, ce voyage n’est pas pour les cœurs faibles, car il mettra à l'épreuve non seulement votre intellect, mais aussi votre sens de la réalité.

 

Il y a des millénaires, lorsque notre planète n'était qu'une vaste étendue peuplée de créatures gigantesques, une civilisation d'une sophistication inimaginable pour nous existait. Comment le sais-je ? Pourquoi cette vérité a-t-elle été si souvent ignorée ? Vous pensez probablement que j’affabule, que tout cela n’est que fadaise, billevesée ! Après des décennies de recherche sur le sujet, je suis ici pour partager mes découvertes avec vous. Alors, écoutez attentivement…

Laissez-moi vous raconter leur histoire...

Leur civilisation était bien plus avancée que la nôtre. Ils maîtrisaient des technologies que nous ne pouvons qu’entrevoir dans nos rêves les plus fous. Des cités flottantes s’élevaient au-dessus des plaines, des vaisseaux interstellaires traversaient l’infini, et la science et la magie coexistaient, formant une harmonie parfaite. Mais, comme dans toute société, cette utopie n'était pas exempte de conflits. Les tensions entre les nations se creusaient, les alliances se fragilisaient, et bientôt, des guerres éclatèrent aux quatre coins du globe. La paix n’était plus qu’un souvenir lointain.

Et puis, un jour, une menace venue des cieux changea tout. Une météorite, de proportions colossales, fonçait droit vers la Terre. Une catastrophe d'une telle ampleur que même leurs armes et technologies avancées ne pouvaient la stopper. Vous connaissez bien cette météorite, n’est-ce pas ? C’est celle qui, selon vos livres d’histoire, a anéanti les dinosaures. Mais ce que vous ne savez pas, c’est qu’elle aurait également pu détruire cette civilisation humaine florissante.

Face à l'extinction imminente, les dirigeants des différentes nations se réunirent dans une tentative désespérée pour sauver ce qu'ils pouvaient. Ce fut l'un des rares moments d’unité dans leur histoire dans un dernier sursaut de solidarité. Après des délibérations qui durèrent des jours, les plus brillants esprits de la planète aboutirent à une seule conclusion : la Terre devait être abandonnée. Leur maison, leur berceau, ne pourrait bientôt plus les abriter.

Ils avaient un plan. Un projet titanesque, audacieux. Ils allaient voyager vers une autre planète, une terre promise qu’ils avaient baptisée Prométhée. Ce nom évoquait l’espoir, le renouveau. Et ainsi, pour la première fois dans l'histoire, tous les peuples s’allièrent. Ils mirent de côté leurs différences pour construire d'immenses arches spatiales, des vaisseaux d'une complexité inimaginable, conçus pour transporter l’ensemble de leur population à travers les étoiles. Mais il y avait un problème : ce voyage allait durer plus d'un million d'années.

Pour résoudre ce dilemme, ils développèrent une technologie de cryogénisation avancée, capable de maintenir la population endormie pendant toute la durée du périple. Chaque individu serait plongé dans un sommeil profond, protégé de l’usure du temps. Ces vaisseaux, véritables merveilles de la technologie, furent construits dans la hâte, mais avec une précision chirurgicale. Le jour fatidique arriva. Alors que la météorite s'approchait, ils quittèrent la Terre, abandonnant leur monde à son sort. Les dernières images que les colons gravèrent dans leur mémoire étaient celles de l’ancienne Terre, balayée par des vents violents, ses créatures géantes errant encore dans les plaines.

 

Prométhée, un joyau d'un autre système solaire, les attendait. Ce monde aux dimensions colossales, deux fois plus grand que la Terre, orbitait autour de deux soleils dans une trajectoire complexe en forme de huit. Cet équilibre précaire lui conférait des saisons contrastées, des climats extrêmes, mais également une beauté sans égale.

Lorsque les colons émergèrent de leur long sommeil, ils découvrirent un monde à couper le souffle. D'immenses chaînes de montagnes aux sommets enneigés s’étendaient à perte de vue. Les vallées verdoyantes en contrebas regorgeaient de fleurs d'une diversité éclatante, les forêts abritaient des arbres titanesques aux troncs noueux, et les lacs cristallins scintillaient sous le regard bienveillant des deux soleils. C'était un monde façonné par la grandeur et la majesté.

Mais ce qui rendait vraiment Prométhée unique, c’était la magie. Cette énergie mystique était partout. Elle flottait dans l'air comme une brume éthérée, imprégnant chaque pierre, chaque plante, chaque goutte d'eau. Cette force surnaturelle permettait aux habitants de réaliser des exploits qui défiaient la logique, les lois de la physique même. Mais comme toutes les forces puissantes, elle exigeait un profond respect et une maîtrise rigoureuse.

 

Les colons, séduits par la tranquillité apparente de Prométhée, pensaient avoir trouvé un refuge loin des tourments de la Terre. Mais la réalité se révéla plus complexe. Pendant leur long voyage, d'autres espèces avaient évolué sur cette planète. Des êtres, mi-humains, mi-animaux, y avaient élu domicile.

Les Harpies, ces créatures mi-humaines, mi-oiseaux, parcouraient le ciel avec une grâce inégalée. Elles vivaient dans les hauteurs des montagnes, loin des querelles terrestres, leur indépendance farouche les rendant insaisissables. Pourtant, une fois leur loyauté acquise, elles étaient des alliées inébranlables.

Les Garous, humanoïdes canidés, vivaient en meutes organisées par un code d’honneur strict. Leur force brute, combinée à leur sagesse ancestrale, faisait d’eux des protecteurs redoutables. Ils étaient à la fois guerriers et philosophes, farouchement loyaux envers leur clan, mais aussi capables d’une profondeur de réflexion surprenante.

Les Félis, créatures félines aux yeux perçants, évoluaient dans les ombres. Maîtres de l’infiltration et de la stratégie, ils étaient aussi habiles dans l'art de la traque que dans celui de l’intrigue. Discrets et solitaires, ils préféraient opérer en secret, maniant subtilement leurs pouvoirs pour obtenir ce qu’ils désiraient.

Les Lizardus, humanoïdes reptiliens, s’étaient adaptés aux environnements les plus inhospitaliers de Prométhée. Capables de régénérer leurs membres, ces créatures pragmatiques se méfiaient des autres.

Les Urs, humanoïdes à l'apparence d'ours massifs, incarnaient la force tranquille et la sagesse de la nature. Leur imposante stature cachait une profondeur spirituelle. Ils étaient les gardiens de l'équilibre naturel, préférant la paix à la guerre, mais n’hésitant pas à combattre lorsqu’ils devaient défendre leur terre.

 

Les siècles passèrent, et les descendants des premiers colons s’adaptèrent pleinement à leur nouvelle demeure. Sous l'influence de la magie omniprésente, les sociétés et les peuples évoluèrent, donnant naissance à des cultures et des civilisations complexes, marquées par la diversité des peuples et des territoires. Les premières alliances se formèrent, certaines solides et d’autres fragiles, tandis que l’Empire se dressait peu à peu comme la puissance dominante.

Souhaitant tirer des leçons du passé, ces différents peuples décidèrent de repartir sur de nouvelles bases. Ils s'accordèrent pour se partager les terres et établir un Conseil, dont la mission serait de veiller à la paix et à l'harmonie entre les espèces. Les sociétés primitives se trouvèrent ainsi sous la bienveillance des colons, qui s'installèrent à proximité de leurs habitats. Bien que le Conseil des Rois regroupât tous les peuples dans le but de maintenir la paix (l’équivalent de notre ONU), les premières alliances se formèrent, certaines solides et d’autres fragiles, Le temps poursuivit son cours, s'étendant sur plusieurs millions d'années. Les colons, autrefois de simples humains, subirent l'influence de la magie présente sur Prométhée, évoluant en de nouvelles espèces en fonction de leur environnement. Certaines de ces nouvelles formes de vie résonneront avec des créatures que vous connaissez peut-être, celles de vos légendes et de vos contes préférés. Il est désormais temps de plonger dans l'origine de nos contes enchanteurs.

 Le peuple des Hommes, qui s'était établi dans les vastes plaines, évolua en Sorciers capables d'inventer des sorts spectaculaires ; et en Magiciens maîtres des magies élémentaires. Leur longévité était directement liée à leur pouvoir magique, permettant à certains d'entre eux de vivre jusqu'à trois cents ans. Les Garous, déjà présents dans ces contrées, furent progressivement intégrés à cette nouvelle civilisation, apportant leur force indomptable et leur sens de la communauté.

Ceux qui choisirent de vivre sur des maisons sur pilotis et à bord de bateaux évoluèrent en Sirènes, des êtres fascinants, mi-humains, mi-poissons. Leur apparence était caractérisée par un haut du corps humain aux reflets bleu-vert et une queue de poisson scintillante et aux écailles colorées, agrémentée de petites nageoires délicates à la place des oreilles. Elles migrèrent lentement des rivages vers les profondeurs abyssales de l'océan. Leur pouvoir inné leur permettait de gouverner les créatures marines et de dominer les flots avec une aisance inégalée.

Dans les forêts luxuriantes, les Urs virent leur territoire envahi par les Elfes, des humanoïdes à la grâce exceptionnelle et aux longues oreilles, dont la longévité dépassait les mille ans. Dotés d'une agilité remarquable, les Elfes édifièrent leurs cités majestueuses dans les cimes des arbres, créant des refuges harmonieux en symbiose avec la nature. Ils possédaient la capacité de matérialiser les esprits de la nature, invoquant leurs pouvoirs pour préserver l'équilibre de leur environnement. Choisissant de vivre à l'écart des Urs, les Elfes s'établirent dans la canopée, tandis que les Urs demeurèrent à leurs pieds, chacun honorant l’espace et la culture de l’autre.

Un groupe de scientifiques afin de se concentrer sur leur recherche décida de s'élever au-dessus des préoccupations terrestres. Ils façonnèrent des aéronefs majestueux, qui lancèrent dans le ciel, les isolant du tumulte du monde. Après des années de recherche acharnée, ils parvinrent à créer un nuage éternel, dense et mystérieux, sur lequel ils bâtirent une cité suspendue, un laboratoire flottant où les mystères de l'univers se dévoilaient. Leur seule visite était celle des Harpies, créatures gracieuses qu'ils accueillirent avec bienveillance. En contact avec le ciel et la magie, les scientifiques se métamorphosèrent, déployant de longues ailes blanches d'une beauté éclatante. Ainsi, ils devinrent les Anges. Leur savoir, leur permit d’inventer une magie sacrée, capables de guérir et de protéger, utilisant leur pouvoir pour prolonger leur jeunesse, défiant ainsi le passage du temps.

Dans les profondeurs des montagnes, un autre peuple trouva refuge. Les Nains, robustes et trapus, aussi grands que larges, étaient le reflet d’un travail acharné dans les mines. Ils bâtirent de vastes cités souterraines, de véritables labyrinthes de pierre, ornés de gemmes scintillantes qui racontaient l’histoire des âges passés. Leur longévité, difficilement atteignant deux cents ans, ne pouvait éclipser l’éclat de leur héritage. Dépourvus de magie, ils se spécialisèrent dans l'art de la forge et de l’orfèvrerie, créant des objets enchantés à partir des cristaux qu’ils extrayaient. Leur art, d’une beauté et d’une puissance inégalées était vénérée pour son savoir-faire exceptionnel et son ingéniosité.

Dans une prairie infinie, parsemée de fleurs colorées dansant au gré du vent, un petit groupe de personnes s’épanouit en Fées. Leur apparence humaine dissimulait une essence magique. À l'âge de dix ans, elles éveillaient des ailes délicates, semblables à celles des papillons, leur conférant des pouvoirs extraordinaires et uniques à chaque fée. Bien que leur durée de vie ne changeât guère, dans cette harmonie florissante, les Fées représentaient l'esprit libre et l'émerveillement de l’existence.

Dans une région extrêmement nuageuse, humide et marécageuse s'installèrent les Vampires, une race mystérieuse et fascinante, drapés d'une élégance sombre. Leur silhouette élancée, leur longévité et leurs oreilles pointues les rapprochaient des Elfes, mais il était impossible de les confondre. Leur teint blafard, leurs yeux rougeoyants, leurs longues canines acérées et leur sang froid les distinguaient, les enveloppant d'une aura d'intrigue et de mystère. Dotés de pouvoirs terrifiants, ils pouvaient se métamorphoser en chauves-souris, contrôler le sang avec une habileté redoutable, et leur force physique décuplée, les rendant presque invincibles la nuit. Cette région marécageuse était également le domaine des Lizardus, créatures reptiliennes, vivant dans des marécages isolés, cachées aux yeux de ceux qui n'osaient s'aventurer dans cette terre d'ombres.

La dernière zone, en revanche, était d'une nature radicalement différente. Il s'agissait d'un vaste archipel désertique, où la lumière du soleil brûlant se mêlait à la chaleur âcre du sable. Les Félis, créatures félines aux mouvements agiles et aux yeux perçants, avaient élu domicile sur ces îles inhospitalières. Lorsque les différents peuples arrivèrent, désireux de repartir de zéro, ils décidèrent d'en faire une prison, un lieu d'exil où expédier les criminels qu'ils avaient amenés de la Terre. Tous les détenus furent parqués là, sur des îles séparées selon la gravité de leurs crimes, abandonnés à leur sort avec le minimum vital pour survivre. Pendant près de trois siècles, les nations continuèrent d'y envoyer leurs condamnés, transformant cet archipel en un royaume sans foi ni loi, où la loi du plus fort régnait en maître.

C'est dans ce cadre désolé que ces prisonniers évoluèrent, se transformant en Démons, des humanoïdes à la peau mate, ornés de cornes sinistres sur la tête et de griffes acérées comme des rasoirs. Ils développèrent la capacité de transformer leur corps, partiellement ou totalement, en animal, couplée à une force physique surhumaine et une longévité atteignant cent cinquante ans. Cette race féroce, marquée par la souffrance et la lutte pour la survie, réduisit leurs anciens geôliers, les Félis en esclavage, les plongeant dans un cycle de domination et de désespoir, faisant de cet archipel un royaume de ténèbres où les cris des opprimés se mêlaient au souffle du vent brûlant.

 

Sous la bienveillance de ce Conseil, un nouvel empire émergea. Chaque peuple prospéra, mais avec cette prospérité vinrent aussi les jalousies, les conflits latents, et les ambitions cachées. À la tête de cet empire se trouvait l’Empereur, élu parmi les rois des différentes nations. Pendant des siècles, le roi des Hommes fut celui qui présidait ce conseil, consolidant une tradition qui traversa les générations.

C'est dans cette époque d'équilibre fragile que naquit la dynastie impériale. L’actuel empereur, William le Juste, était un homme respecté et admiré, dont la sagesse et la force avaient permis à l’Empire de prospérer.

Mais comme dans toute histoire, la paix n'est jamais éternelle. Les ombres du passé, les rancunes accumulées et les ambitions dévorantes menaçaient de tout bouleverser. Et c'est là, cher lecteur, que notre histoire prend un tournant décisif...

 

Le palais impérial se dressait au sommet de la colline, dominant la capitale resplendissante d’Anthropolis. Ses murs de marbre blanc étincelaient sous les rayons dorés du soleil couchant, un monument à la gloire et à la sagesse des Empereurs d’antan. Les vastes jardins qui entouraient le palais, fleuris de mille couleurs, ressemblaient à un océan végétal paisible et ordonné, un reflet du règne harmonieux de l’Empereur actuel, William Le Juste. Anthropolis, capitale du royaume d'Humos, s'étendait en contrebas, animée et vibrante, mais toujours sous le regard bienveillant de son souverain.

William, maître des Hommes et paladin de la lumière, était un magicien redoutable. Il maniait l’épée avec une habileté que peu pouvaient égaler, son arme brillant d'une lumière éthérée, symbole de la justice qu’il portait en son cœur. Sa présence inspirait crainte et admiration, et son nom résonnait comme une promesse d’équité et de paix à travers les vastes étendues de son empire. Mais au-delà de ses pouvoirs et de sa sagesse, William n'était pas seul dans son règne. À ses côtés se tenait Solaria, sa reine, une fée diurne aux pouvoirs magiques émanant des forces lumineuses des soleils. Son aura lumineuse et bienveillante semblait envelopper tous ceux qui s'approchaient d'elle, et son sourire réchauffait même les cœurs les plus froids.

Leur union symbolisait l’harmonie entre les races, une alliance entre les Hommes et les Fées qui avait été consolidée par l’amour véritable. Ensemble, ils avaient donné naissance à quatre enfants, chacun portant en lui les espoirs et les rêves d’un empire uni et prospère. Lucius, l’aîné, portait le fardeau et les responsabilités de la succession, sa bravoure et son intelligence promettant déjà un futur glorieux. Mathilde et Mathieu, les jumeaux, partageaient un lien mystique unique, une connexion profonde qui défiait même les plus puissants sortilèges. Et enfin, la petite Aurore, la cadette, dont la douceur et la lumière annonçaient un destin singulier. Elle était la joie et la douceur incarnée, et ses grands yeux semblaient déjà capter des secrets que seuls les élus pouvaient comprendre. (Vous l’avez compris, il s’agit bien sûr de l’héroïne !)

Lorsque la petite Aurore naquit, William fit une proclamation solennelle, un serment aux quatre coins de l’Empire : lorsque ses enfants atteindraient la majorité, ils seraient soumis à une série d’épreuves, et celui qui se montrerait le plus digne de la couronne deviendrait l'héritier légitime. Ainsi, chaque enfant grandirait avec l'égalité des chances, soumis aux mêmes lois du destin.

Mais cinq ans plus tard, alors que Lucius fêtait tout juste ses quinze ans, une tragédie bouleversa à jamais l’équilibre de la famille impériale.

 

La nuit était tombée sur Anthropolis, mais une lueur rougeoyante déchirait les cieux. Des cris résonnaient dans les couloirs d’ivoire du palais, un hurlement bestial, sauvage. Une armée de Démons, aidée de leurs esclaves félins, les Félis, avait lancé une attaque d’une violence inouïe. Ils se frayaient un chemin à travers les défenses impériales, semant la destruction sur leur passage.

William, à la tête de ses gardes, combattait avec la force de cent hommes, son épée lumineuse tranchant l'obscurité comme un rayon d'espoir. Solaria, quant à elle, se battait aux côtés de ses enfants, ses pouvoirs solaires brillant comme un phare dans l’obscurité. Mais les ennemis étaient nombreux, trop nombreux. Les Démons, forts de leur rage et de leur haine, s’abattaient sur la famille impériale avec une brutalité dévastatrice, et leur cible principale était claire : les enfants du trône.

Lucius, malgré son jeune âge, fit preuve d’un courage hors du commun. Il se battit avec l’habileté d’un guerrier aguerri, repoussant les Félis qui tentaient de l'approcher. Ses coups étaient précis, son esprit alerte, mais face à cette marée d’ennemis, même son talent ne suffisait pas. C’est alors qu'un Félis, aux griffes acérées, fondit sur lui, lui infligeant une blessure terrible. Une balafre se dessina sur son visage, partant de son sourcil droit et descendant jusqu’à son cou. Son œil fut irrémédiablement perdu, et le sang coulait abondamment. Mais Lucius, malgré la douleur atroce, continua à se battre avec une fureur désespérée.

Pendant ce temps, les jumeaux, Mathilde et Mathieu, étaient séparés du reste de la famille dans le chaos de la bataille. Ils luttaient ensemble, comme ils l'avaient toujours fait, utilisant leur magie partagée pour tenter de se protéger. Mais les Démons, avec leur force surhumaine, étaient implacables. Mathilde tomba la première, poignardée dans le dos par une griffe Démoniaque. Mathieu hurla de douleur en sentant la vie quitter sa sœur jumelle, leur lien brisé en un instant. Il se jeta sur son agresseur dans un dernier élan de rage, mais fut à son tour abattu, laissant leurs corps sans vie sur le sol froid du palais.

Aurore, quant à elle, aurait subi le même sort si sa mère n’était pas intervenue. Solaria, sentant la fin approcher, fit appel à toute la magie lumineuse en elle, déployant une barrière protectrice autour de sa fille. Les assaillants reculèrent, aveuglés par l’éclat incandescent qui émanait de la fée. Solaria savait qu’elle n’avait plus beaucoup de temps. Elle regarda Aurore, une larme coulant sur sa joue, avant de tomber à genoux, épuisée. La dernière chose qu’Aurore vit avant que sa mère ne s’effondre, fut son sourire aimant, un sourire rempli de tristesse et de fierté.

Solaria donna sa vie, pour sauver celle de sa fille.

 

Les combats finirent par s’arrêter, et les Démons furent repoussés. Le palais, autrefois si majestueux, n'était plus qu'un champ de ruines fumantes. Mais la victoire ne ressemblait en rien à une victoire. Les pertes étaient immenses, et le cœur de l’Empereur était brisé.

William erra dans les couloirs détruits, ses vêtements maculés de sang et de poussière, son épée traînant au sol. Il se sentait vide, anéanti. Ses jumeaux, Mathilde et Mathieu, avaient été tués sous ses yeux. Sa bien-aimée Solaria, la lumière de sa vie, avait donné son dernier souffle pour protéger leur fille. Et même son fils Lucius, son précieux héritier, portait désormais les stigmates de cette nuit d’horreur, une cicatrice qui marquerait son visage à jamais. Mais au milieu de cette dévastation, deux lueurs persistaient encore : Lucius et Aurore étaient vivants. Ils étaient les derniers vestiges de son bonheur passé, les derniers survivants de cette lignée qu’il devait à tout prix protéger.

La peur le submergea alors. Les Démons n’en resteraient pas là. Ils reviendraient, encore plus forts, encore plus déterminés à achever ce qu’ils avaient commencé. Lucius et Aurore ne seraient jamais en sécurité tant qu’ils restaient à ses côtés.

Une décision s’imposa à lui, terrifiante et douloureuse. Pour leur sécurité, pour les protéger, il devait les faire disparaître. Aux yeux du monde, tous les enfants impériaux devaient être considérés comme morts. Il les enverrait loin, dans des lieux secrets où personne ne les trouverait.

Lucius, désormais marqué par le combat, fut confié à Isaac, l’ancien chef de la garde impériale, un vieil ami de William. Isaac vivait à Silva, le royaume des Elfes, et là-bas, Lucius pourrait grandir en sécurité, loin des dangers qui rôdaient. Quant à Aurore, si fragile et si précieuse, elle serait envoyée chez Luna, sa grand-mère maternelle, dans un coin reculé du royaume, loin des regards indiscrets.

William se tenait dans la grande salle du trône, vide et silencieuse. Il fixait le sol, ses poings serrés à en blanchir les jointures. Il pleurait, mais il ne pouvait pas laisser cette douleur le submerger. Ses enfants avaient encore une chance, et c'était à lui de les protéger.

Les lumières d'Anthropolis brillaient au loin, indifférentes à sa souffrance. Le monde ne savait pas, ne comprendrait jamais la douleur qui se jouait dans ce palais dévasté. "Ils doivent croire que mes enfants sont morts," murmura-t-il. "C'est la seule solution."

Son cœur était lourd, rempli de haine envers les Démons qui avaient arraché sa famille à lui. Il rêvait de vengeance, mais il savait que ce désir de revanche ne suffirait pas à ramener Solaria, Mathilde, et Mathieu. Leurs rires, leurs voix, leurs présences s'étaient éteints, et rien ne pourrait combler ce vide. Pourtant, au fond de lui, une flamme sombre s'était allumée. Il ne serait plus l’Empereur pacifique et conciliant qu’il avait été autrefois. Cette attaque avait non seulement brisé sa famille, mais aussi éteint ses espoirs d’unir les peuples dans la paix.

"Je les retrouverai, et je les ferai payer," dit-il d’une voix rauque, ses yeux fixant le lointain avec une détermination froide.

La haine grandissait en lui comme une marée noire, effaçant peu à peu ses idéaux de justice. Aux yeux du monde, il resterait William le Juste, l'Empereur sage et puissant, mais au fond de lui, il n'était plus cet homme. Une partie de son âme avait été consumée par le désespoir, remplacée par un besoin de rétribution implacable.

Lucius et Aurore devaient disparaître. C'était la seule manière de les protéger. Mais cette trahison, ce mensonge, serait un fardeau qu'il porterait seul, à jamais.

 

Peu de temps après, les funérailles de Solaria et des quatre héritiers furent organisées. Les dignitaires de tous les royaumes se rassemblèrent à Anthropolis pour rendre hommage à la famille impériale. William se tenait droit, impassible, portant le masque du souverain fort et inébranlable. Mais à l’intérieur, son cœur était en morceaux.

La cérémonie était splendide, emplie de fleurs et de chants en l'honneur des défunts. Mais malgré toute la grandeur de l'événement, une ombre planait sur les participants. Le choc de l’attaque était encore palpable, et les murmures d’incertitude se propageaient à travers l’Empire. Que se passerait-il maintenant ? L'Empire pouvait-il se remettre d'une telle tragédie ? Et surtout, qui resterait pour hériter du trône ?

Aux yeux de tous, Lucius et Aurore étaient morts aussi. Personne ne devait connaître la vérité. William serrait les dents tandis que les cercueils descendaient dans leurs tombes, emportant avec eux les corps de ceux qu’il avait aimés. Seule la nuit et ses cauchemars sauraient le rappeler à l’horreur de ce jour, encore et encore.

 

Les jours passèrent, et l’Empire, bien que profondément marqué, continua de fonctionner. William, de son côté, n’était plus l’homme d’avant. Autrefois connu pour ses idéaux de paix et d’unité, il commença à adopter des mesures de plus en plus répressives. Ses conseillers, choqués par ce changement brutal, n’osaient s’y opposer ouvertement. Les Démons et les Félis, qu’il avait un temps tenté d’intégrer dans l’Empire, étaient désormais surveillés et parqués sur leur archipel rougi par le sang de siècles de violence. La peur et la suspicion régnaient désormais sur l’Empire, et la ségrégation et la méfiance envers ces deux races de retour à leur paroxysme.

Mais au milieu de tout cela, William n’avait qu’un seul objectif en tête : la sécurité de ses enfants. Lucius, caché à Silva, devait devenir assez fort pour reprendre un jour ce trône qui lui revenait de droit. Et Aurore, douce et innocente, devait vivre loin de ce monde de violence et de trahison. Lui, l'Empereur déchu par le sort, prendrait soin de garder ce secret enfoui jusqu’au jour où ses enfants seraient prêts à affronter leur propre destin.

Et tandis que l'Empire se durcissait, une autre ombre grandissait dans le cœur de William. Plus les années passaient, plus il se laissait consumer par cette rage qui ne le quittait jamais et la tristesse de ne peut-être jamais revoir ses enfants.

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