Oreiller

Je rêve que l’écume de tes yeux vienne mourir dans mes draps.

Je rêve d’ombres qui dansent. Du bruit assourdi d’un tissu qui trace une ligne depuis tes épaules jusqu’au plancher.

Je rêve de lenteurs tendres et d’harmonies ensommeillées.

Et je me languis de tout. Du chagrin tendre des bruissements de couverture à l’émoi naïf des murmures douillets tapis dans les interstices. Du chuchotis langoureux d’une bouche contre mes cheveux à la rondeur orangée de ma lampe de chevet.

Je crèverais pour quelques inepties. Pour le souvenir simple de ces brises légères et inlassables. Pour le plaisir euphorique de la marée montante. Pour la misère heureuse de se perdre sur de vastes étendues de peau.

Je veux la ligne de tes épaules comme horizon vacillante. La courbure de tes cils comme unique poésie, et ton étreinte comme rempart ultime contre l’intolérance. Je veux le roulement de tes os comme seul langage. La musique de nos respirations comme univers indépendant.

Je voudrais te prendre dans toute ta globalité. M’étendre et te recouvrir. Attendre que nos corps cicatrisent l’un avec l’autre.

Je fantasme sur la fusion irrémédiable de nos plexus, l’entremêlement de nos mots, le mélange irréversible de mes doigts aux tiens.

Mais je sais que je m’enfuirais en courant si je te croisais par hasard sur la ligne de métro.