Oubliés

Au travers de la vitre embuée, les perles d’étoiles tombent plus clairsemées. Comme toutes les nuits où elles chutent du ciel pour la première fois, je sais qu’elles finiront par s’effacer pour laisser place à leur reine.

J’ai toujours aimé cette nuit parmi toutes les autres.

Alors j’attends mon tour en suivant la danse des flocons emportés par le vent.

J’attends aussi, en silence, l’arrivée de mon gardien.

Il n’est pas encore là, et pourtant la nuit est tombée depuis longtemps. Mes sens le guettent avec un espoir faiblissant.

Peut-être ne viendra-t-il pas. En contrebas, par-delà le balcon qui délimite ma prison, je vois des petites lumières d’or piqueter l’ombre. Je sais que je ne suis pas le seul à veiller, cette nuit.

Mon inquiétude s’apaise en percevant enfin un mouvement, sous mes pieds. Une présence vers laquelle mon esprit se penche tout entier, pour la saluer sans bruit.

J’entends les pas qui glissent sur les marches de pierre.

Ce ne sont pas ceux de mon gardien.

Et pourtant, je les reconnais.

Un frisson parcourt ma peau.

Je les ai déjà entendus, une fois. Je ne les ai pas oubliés.