Bam bam bam.
Les coups qui ébranlent la porte d’entrée résonnent jusqu’au fond du placard. Je serre Elsa contre moi. Elle tremble. Je voudrais trembler aussi mais la peur me paralyse.
Je sens des gouttes sur mon bras. Elsa pleure. A moins que ce ne soit de la sueur. Dans cette fichue obscurité je n’arrive pas à voir son visage. Je tâtonne pour trouver ses joues sans lui crever un œil au passage.
— Police. Ouvrez.
Un frisson me parcourt le corps. Cette voix métallique me glace les os. Je transpire de partout. Le souffle brûlant d’Elsa dans mon cou n’aide pas, mais je refuse de m’éloigner d’elle d’un millimètre.
— Nous allons ouvrir par la force, monsieur Masaev. Vous avez été prévenu.
Un cliquetis, puis des bruits de pas.
— Merde. On est foutus, murmure Elsa.
Je plaque ma main sur sa bouche. Il ne faut pas qu’ils nous entendent. S’ils nous trouvent, tout sera fini.
J’ai l’impression que les battements de mon cœur vont nous trahir. Elsa s’agrippe à mon poignet, je réalise que je suis en train de l’étouffer. J’enlève ma main en priant pour qu’elle ne dise rien. J’aimerais la rassurer, lui murmurer que rien ne nous arrivera. Qu’ils finiront par partir. Mais je sais que c’est faux, ils vont nous trouver. Ce n’est qu’une question de secondes.
Les pas se rapprochent du placard. Elsa se dégage et je sens ses lèvres sur mon épaule, dans mon cou, sur mes joues. Nous nous embrassons une dernière fois avant… Avant quoi ? Avant de mourir, certainement. Je ne peux m’empêcher de lâcher un sanglot. Ce n’est vraiment pas juste. La porte s’ouvre et une lumière nous aveugle. Je n’ai le temps de voir qu’une paire de bottes cirées avant la décharge électrique.
***
L’homme en costume noir assis en face de moi ne me regarde pas. Il est rivé sur son téléphone portable depuis qu’il est entré il y a quelques minutes. J’ai l’impression que cela fait des heures. Je devrais être habitué pourtant, mais ça me fait bizarre d’être ignoré ainsi. Je voudrais hurler, me débattre, sortir de cette pièce toute blanche pour trouver Elsa. Mais ils m’ont menotté à la chaise et placé des électrodes sur les tempes et les bras. Ils m’ont prévenu : un seul mot et c’est la décharge. Je pense à Elsa. Comment va-t-elle ? Est-elle aussi menottée à une chaise dans une salle blanche, face à un homme en costume noir qui ne la regarde pas ? Elle doit avoir peur.
— Monsieur Masaev. Savez-vous pourquoi vous êtes ici ?
Je ne réponds pas. Pas tant qu’il regardera ce stupide portable. Il repose sa question, une fois, deux fois. Puis il soupire avant de poser l’objet sur la table et de redresser la tête. Une petite victoire pour moi.
— Je ne voudrais pas vous faire mal inutilement, dit-il en désignant les électrodes. Vous êtes quelqu’un de sensé, monsieur Masaev. Alors simplifiez-nous les choses. Savez-vous pourquoi vous êtes ici ?
— Non.
Il soupire avant de reprendre son portable et d’y pianoter quelque chose. Heureusement, cette fois, il ne le garde pas longtemps et son regard croise le mien à nouveau.
— Nous avons plusieurs plaintes contre vous, et contre mademoiselle Palatova. Sans compter une infraction grave au Code de Régulation des Naissances.
— Ah, ça… Alors oui.
Pourquoi nier? Ils ont tout, résister serait inutile. Je le sais, mieux que quiconque.
— Vous comprenez vite, monsieur Masaev. Vous comprenez également que vos actes ne seront pas sans conséquences. Vous avez déjà eu avec mademoiselle Palatova un impact négatif sur beaucoup de nos concitoyens.
— Je ne pense pas, monsieur.
Il lève un sourcil. J’ai piqué sa curiosité.
— Selon vous, vous n’avez rien fait de mal ?
Je ne réponds pas tout de suite. Je cherche les bons mots.
— Ce n’était pas mal, ni bien d’ailleurs. En fait, je ne suis pas bien placé pour juger. C’est votre travail à vous. Pour ma part, je trouve ce que j’ai vécu exaltant.
Maintenant, il hausse les deux sourcils. C’est drôle comme cette partie de son visage peut être expressive.
— J’aimerais comprendre, monsieur Masaev.
— Je ne pense pas que vous comprendriez. Même si vous connaissiez l’histoire depuis le début. Parce que vous êtes insensible. Et vous ne voyez que ce que vous voulez voir.
Pourquoi est-ce que je me permets de lui parler comme ça ? Je me serais donné des claques si j’avais pu. Il va me cracher dessus ou, pire, m’électrocuter.
Mais au lieu de s’offusquer, il sourit.
— J’ai tout mon temps. Racontez-moi.
Je découvre ta plume pour la 1ère fois. Tout d’abord, félicitations pour avoir été lauréate du PJE. Je n’ai pas lu de science-fiction depuis 2003 : « La nuit des temps » de René Barjavel. En toute honnêteté, je ne me souviens même plus de l'histoire (je vais sur mes 32 ans cette année, je te laisse faire le calcul...hahaha). Par conséquent, ma connaissance du genre SF se limite aux séries et aux films :)
Petite précision, j'ai d'abord lu toute la nouvelle pour avoir une vision d'ensemble avant de laisser mes commentaires. Je me pose du coup deux questions : est-ce que tu étais limitée par le nombre de mots ? Est-ce que tu as l'intention de reprendre cette histoire et d'en faire un roman ?
Pour ce qui est de ton récit, de manière générale, je suis toujours très fan de la narration à la 1ère personne et au présent. Même si beaucoup disent que c’est très limitant, moi j’adore l’immersion que ça apporte au lecteur. Si on y ajoute un incipit in medias res, pour moi c’est le combo gagnant. Donc, Partie I très réussie :)
"Je serre Elsa contre moi." : LIBERAAAY DELIVRAAAAAY. Aheum.
Je ne sais pas pourquoi (et ça n'a aucun sens, parce qu'il n'y a rien dans ce début pour m'induire en erreur), je pensais que les deux personnages étaient des femmes (mais juste dans l'intro)... Mon cerveau n'est apparemment pas à l'endroit, aujourd'hui *remet dans le bon sens*
C'est un bon incipit, qui permet facilement de se situer et d'appréhender l'atmosphère, sans trop en révéler non plus. On parvient à assembler quelques pièces du puzzle mais il reste plein de trous, donc on se retrouve avec un très bon horizon d'attente, pour la lecture.
Pas grand chose d'autre à dire : c'est propre et efficace (malgré quelques sonorités redondantes sur de très rares phrases).
A la suite **
Je suis intriguée avec la scène de début (Comment et pourquoi sont-ils dans cette situation ?).
Puis après j'ai trouvé ça super fluide, je suis rentrée direct dans l'ambiance.
Bon, je fonce lire la suite !
Un tout grand merci d'être passée lire ma nouvelle, ça me fait rudement plaisir ! J'espère que la suite te plaira x:
Cette nouvelle me fait tellement penser à 1984, avec ce chapitre annonciateur d'une société où la sexualité est strictement contrôlée par l'état, s'il y en a un encore. Mais la différence notable c'est que les forces de l'ordre ont l'air plus intéressées que dans 1984.
Ça fait plaisir d'être comparée à cette grande œuvre qu'est 1984 huhuhu. Il est clair que la milice de mon univers n'est pas du tout du tout sympa, on n'aimerait pas les croiser...
Mais je peux reprendre depuis le début. La tension et la fatalité du début, c'est… effrayant. Dans la deuxième partie, on est toujours un peu dans le flou mais la tension et la peur restent là. Surtout car Masaev prend des risques avec l'homme en costume noir. Le tout reste hyper rythmé, zéro temps mort et on en redemande !
Vivement qu'il raconte son histoire ! ;)
Avant toute chose, merci pour ton commentaire et ta relecture :) ton point de vue a toujours été important pour moi. J'avoue que j'ai un peu galéré à découper cette nouvelle en morceaux, quitte à ce qu'ils soient courts, mais qu'ils donnent envie de continuer la suite... :) J'espère que ta redécouverte des autres parties te plaira tout autant !
Me voilà donc lancée dans ton histoire d'arbre.
Je suis assez intriguée par ce code de régulation des naissances. M.Masaev et Mlle Palatova auraient-ils eu l'impudence d'avoir un enfant sans autorisation préalable ?
Tu as un choix des mots très précis, c'est vraiment chouette à lire.
C'est adorable de ta part d'être venue lire mon histoire pas si arboricole que ça :)
Héhé, seule la suite pourra confirmer ou infirmer ton hypothèse !
En tout cas, merci de ton passage et de ton commentaire :)
Ce début m'intrigue beaucoup et je me presse que tu publies pas suite et vite pas dans 50 ans !! Parceque j'ai besoin de lire la suite et vite
À bientôt ❤️
La suite est déja lààààà, j'espère qu'elle te plaira ! :x
Bref... Pourquoi il est prisonnier de cette chaise ? Où ? Par qui ? Quand ?
Ca soulève plein de questions !
La scène avec Elsa est touchante ^^
Je ne sais pas vraiment quoi te dire... J'ai adoré ce premier chapitre ^^
J'espère que la suite nous apportera les réponses :p Parce que oui, j'ai l'intention de la lire xD
Un tout petit truc.... (de rien du tout)
"Merde .On est foutus, murmure Elsa" → pitit problème au niveau des espaces autour du point ^^
En tout cas je te remercie d'être venue lire cette première partie et de l'avoir commentée :)
Je vais régler le souci de la mise en page, c'est le problème du copier/coller ><
J'essayerai de poster la deuxième partie demain, j'espère qu'elle continuera à te plaire <3