À quoi bon ne jamais exhiber ses couleurs ?
Quid du rose à nos lèvres ? Des yeux à la menthe ?
Et tout ce bleu des mots qui rougissent les cœurs,
Et tout l'or des cheveux des étoiles filantes !
Soudain tout paraît gris. Les femmes sont en deuil.
Le ciel a connu mieux que la teinte d'acier
Qui lui tient lieu de robe. Ici ce n'est qu'un seuil.
Le seuil des lendemains où fleurissent les blés !
Vite que juin vienne ! Avec son soleil pâle
Électrisant le ciel, moissonnant chaque nuit
De ces mauvais nuages qui font leur escale
Tout l'automne durant, et tout l'hiver aussi.
Vite que mai, qu'avril nous ouvrent leurs corolles.
Les hommes seront là plein de nuances folles !
La tenue du dimanche aura des airs de fête
Et à l'enterrement, on verra des paillettes.
Je le dis à ceux-là qui porteront du noir.
Il eût été plus gai d'être en chemise à fleurs
Car quel triste défunt n'aime pas les couleurs ?
S'il fait beau, qu'on m'enterre et sinon je veux voir
Une dernière fois la lumière d'un feu,
Qu'un vieux soleil immense irradie mon après.
Ne me fleurissez pas. Écrivez-moi du bleu,
Du vert, du vent, des vers, du vermeil. Écrivez.
Je me fous bien du bois. Peu m'importe la pierre.
C'est à l'Éternité qu'aujourd'hui je renonce.
Qui mettra sur ma tombe un bouquet de ces ronces
Dont vos fossés sont plein ? La fin n'est qu'un calvaire
Trop blanc, trop noir, trop gris
Pour qui en est victime, et qui en est témoin.
Égayez de vos vies
Ce lourd moment de joie sur l'ultime chemin.
Demain juin est là
Mais demain c'est demain.
Je ne serai plus là
Mais demain c'est juin.