LES ANAMORPHOSES
A Caillou.
« On ne peut régner innocemment.
Tout roi est un rebelle et un conspirateur. »
Louis-Antoine de Saint-Just
« Quand elles ne savent plus quoi faire, elles se déshabillent,
et c'est sans doute ce qu'elles ont de mieux à faire. »
Samuel Beckett
« Avec le canon d’un flingue entre les dents,
on ne prononce que les voyelles. »
Fight Club
Prologue
Anamorphose (nom féminin, issu du grec anamorphûn : transformer) : « Œuvre, ou partie d'œuvre, graphique ou picturale, dont les formes sont distordues de telle manière qu'elle ne reprenne sa configuration véritable qu'en étant regardée soit, directement, sous un angle particulier (anamorphose par allongement), soit, indirectement, dans un miroir cylindrique, conique… »
Son sourire était aussi venimeux que candide, quelque chose de froid et d’acide enrobé par un suc savoureux, des yeux de serpent rehaussés de faux-cils enjôleurs, un poison qui sentait bon l’herbe fraichement coupée et qui se distillait paisiblement à la commissure de ses lèvres, à peine conscient de sa propre toxicité. La première fois qu’elle m’a souri, j’ai vu l’arsenic et le miel se confondre en une esquisse parfaite sur son visage, l’alchimie la plus dangereuse au monde. J’ai dit quelque chose pour la faire rire, et l’esquisse s’est agrandie, et l’alchimie mortelle s’est faite cascade, cascade scintillante et empoisonnée tandis qu’elle riait, fleuve étincelant qui m’aspergeait, le Styx aux arômes de glucose. Ce fut certainement ici que je scellai ma propre perte, traçant à l’or liquide l’enluminure qui devait marquer le commencement d’une histoire sordide.
Bien sûr, à l’époque, je ne savais rien de tout ça. Aujourd’hui encore, je me demande comment nous avons pu en arriver là. Comment j’ai pu en arriver là. Des milliers de choses m’échappent sans doute encore, c’est pourquoi je suis incapable de raconter ça à moi tout seul. Il faudrait rassembler les voix de chaque protagoniste, que chacun donne son point de vue et raconte à sa manière ce qu’il a vécu durant cet étrange été où le monstre qui sommeillait depuis si longtemps en nous s’est enfin réveillé. Ça ne réparerait rien, mais peut être que ça apporterait un semblant de réponse, si tant est qu’il existât une réponse à tout ce bordel. Tout est affaire de perception. Même l’amour que je lui porte n’est probablement qu’une histoire de perception. Je crois que je deviens fou.
Tu m'as eue à "meurtre d'enfant" et "histoire de perceptions" !
Ce prologue est très alléchant et, dès que j'ai un peu de temps, je compte bien pousser plus loin cette lecture... d'autant que tu as l'air d'avoir une sacrée plume !
A très vite !
Liné
J'espère que la suite te plaira! Je porte cette histoire en moi depuis longtemps, pour continuer dans les métaphores gestatives, c'est un peu mon bébé ^^ Donc ça me fait très plaisir d'avoir enfin des lecteurs pour me donner leur avis.
A bientôt!
Okey, cette nouvelle histoire, je la suis direct. Ton écriture est toujours aussi belle, peut-être encore plus maîtrisée et imagée. Ce prologue est intriguant. Si j'ai le temps, je lis la suite avant ce week-end !