Je sus que ce n'était pas une journée ordinaire lorsque mes pieds foulèrent le sol, ce matin là. Une jolie journée d'automne se dessinait devant moi, aussi colorée que le feu qui dansait dans la cheminée, et aussi fraîche que que la rivière qui serpentait sereinement au fond de la clairière. Une journée idéale pour aller récuperer ce vieux livre dont m'avait parlé ma douce Solal. Un ancien grimoire regorgeant de cultes sacrés et d'incantation païennes.
Dix-sept heures sonnèrent et je me rendis enfin chez le bouquiniste du village, dont l'échoppe se situait dans une ruelle peu fréquentée, mais pas si sombre que je ne le pensais. Le carillon de l'entrée tintillona à ma venue et le vieil homme m'accueillit aussi froidement que la nuit qui tomba soudainement.
« Je recherche un livre », fis-je intimidée par la grandeur du lieu.
« Cela va de soi, très chère. Quel livre veux-tu ? »
« Un ouvrage assez particulier, que je ne saurais reconnaître qu'en le voyant, recommandé par Solal. » assurai-je.
« Oh, si cette petite te l'a recommandé, alors, ma libraire est tienne. Ne te perds pas trop loin. »
S'il avait su ce qui allait se passer, il ne m'aurait pas donné de meilleur conseil. Je m'aventurai donc entre les étals de livres et les étagères qui montaient jusqu'au plafond. Cet endroit était si chaleureux, que je voulais y rester toute la nuit. Le parquet craquait sous mes pieds et l'atmosphère qui y régnait était magique. Je continuai mes recherches, parmi les anciens manuels d'astronomie et ceux de biologie, plus récent. Je touchai les reliures du bout des doigts, m’imprégnant du lieu.
Minuit sonna. Soudain, j'eus froid. Pas un simple frisson dû à un courant d'air, mais quelque chose me gelait de l'intérieur. Je retirai mes doigts du livre que j'étais en train d'effleurer et le retira de l'étagère. « Il grande libro della verità ». Forcément, le livre dont parlait Solal était un véritable grimoire ancestral. Je soufflai un peu la poussière dessus et admirai la couverture carmin. Je l'ouvris et me mit à trembler violemment. Je n'avais pas besoin de l'avoir écrit pour savoir qu'il était manuscrit en lettres de sang. Ma respiration se fit saccadée lorsque je lus la première ligne « Opus auxilium tuum » Elle m'était adressée. Je frôlai délicatement les mots, quand je sentis quelque chose me couper, et quelques gouttes de sang perlèrent au bout de mon index. Je m'approchai et vis que les lettres étaient aussi fines et coupantes que la lame d'un couteau. Etonnée, je pressai mon doigt sur « auxilium » et le froid spectral qui m'envahissait se transforma en une brûlure insupportable. Je voulais arracher ma peau pour faire sortir le feu qui me consumait de l'intérieur. Je me mis à scander Opus auxilium tuum, en boucle, priant pour que la douleur s'arrête. Ce qu'elle fit, instantanément.
Mais, je n'étais plus dans la bibliothèque, je ne sentais plus les odeurs boisées des étagères. Une autre odeur me parvint. Plus humide, plus froide, plus caverneuse. Je me trouvais dans une grotte,éclairée par de simples bougies. En m'approchant, je remarquai que les bougeoirs étaient constitués de crânes humains. J'avançai prudemment, en évitant les flaques qui se disséminaient ça et là. J'entendis des voix, qui scandaient assez vivement une litanie dont je ne saisissais pas encore les mots. Ma main suivaient les parois de la grotte et s'érafla sur un pic rocheux. Je portai la plaie à la bouche, pour ne pas que le sang coule plus, et tressailli en sentant ma langue sur la blessure.
Au fur et à mesure que je me rapprochai des voix, je sentis la caverne trembler, et les murs crépis de manganèse semblaient gronder. J'avais peur, j'étais même terrorisée à l'idée de ce que j'allai découvrir. Les sons mélodieux se firent de moins en moins lointains et j'aperçus la scène, qui me saisit d'effroi.
Un corps, nu et ensanglanté, était allongé sur une pierre ovale. Je pouvais voir les entailles faites par le poignard d'argent de la maîtresse de cérémonie, fraîches et profondes. L'appel à l'aide venait-il de cette victime ? Soudain, la femme se tourna vers moi, et je n'eus plus peur.
« Sélène, nous n'attendions . Enfin te voilà. »
J'avançais malgré moi vers cette femme, qui me tendit une main, le poignard étant toujours dans son autre main, frêle et pâle.
« Qui êtes-vous ? » demandai-je avec assurance
« Tu le sauras bien assez vite. En attendant, nous avons besoin de ton aide. Ceci est une cérémonie. Nous allons célébrer ta venue, ma chère » m'avoua t-elle en s'agenouillant devant moi.
Tout ceci allait trop vite pour moi. Pourquoi me parlait-elle avec autant de respect, qui était-elle, et qui étais-je ?
« Sélène, continua t-elle, prends ce poignard, il est à toi, désormais. Et ceci, dit-elle en montrant la victime, est ton offrande, ô future Reine. »
Je me mis à rire, d'un rire nerveux et incontrôlable. « Reine ? Moi ? Mais, de qui, ou de quoi ? »
« Tu es dotée d'une puissance incomparable, cachée au creux de la pierre, camouflée au fond des ténèbres. Libère ton pouvoir, Sélène, et sauve nous tous. » La femme se mit à reprendre sa litanie et une mélopée sourde sortit des entrailles de la roche. Des gargouilles sortirent de leurs cachettes et me portèrent vers mon offrande. Je plongeai la lame argentée et finement ciselée dans sa poitrine. Il ouvrit les yeux soudainement, mais je retirai la lame vivement, pour la planter au niveau de son plexus solaire. Sa peau devint livide et je me régalai du spectacle. Plus la vie s'échappait de ce corps, plus je me sentais forte. Je compris que la puissance venait du sang, et me mis à lécher la tranche de métal, pour y récupérer la moindre goutte de ce liquide divin. Soudain, tout le pouvoir en moi se mit à irradier, et j'en voulus plus. Cette soif de sang devenant inextinguible, je me mis à lacérer le corps de mon offrande, pour m'abreuver à même la source. Après la soif, vint la faim. La femme encapuchonnée m'apporta quelques plats, mais aucun ne me convinrent. Il me fallait plus que de la nourriture morte. J'avais besoin de chair fraîche et encore palpitante. Je me tournai vers ma servante, cette femme à cause de laquelle tout à commencé. Sans son appel, sans son rituel,je serais toujours Sélène, et non plus cette monstre affamée, et avide. Je me jetai sur elle, pour déchirer des morceaux de chair, tandis qu'elle se laissait faire en souriant. A croire que c'était un honneur pour elle, de se faire taillader en pièce et dévorer. Le sang coulait sur mes lèvres, que je léchais avec délectation, puis je finis de dévorer mon hôtesse. Il ne resta bientôt plus que sa carcasse, et je fus repue, et satisfaite.
Je me levai, pour regarder le carnage que j'avais causé. Je n'avais plus peur. J'étais la reine Sélène, une puissante mage Succube, maîtresse de la pierre et salvatrice des démons les plus enfouis.
Je sus que ce n'était pas une journée ordinaire lorsque mes pieds foulèrent le sol, ce matin là. Une jolie journée d'automne se dessinait devant moi, aussi colorée que le feu qui dansait dans la cheminée, et aussi fraîche que que la rivière qui serpentait sereinement au fond de la clairière. Une journée idéale devenir Moi.
Attention à quelques fautes '" ma libraire est tienne" => librairie et pour la dernière phrase "Une journée idéale devenir Moi." => il me semble qui manque le "pour", non ?
- Petit point sur cette phrase " et aussi fraîche que que la rivière qui serpentait sereinement au fond de la clairière. " → répétition du mot que
- Sinon, le rythme est saccadé; rapide; brutal. Cela ne m'a pas dérangé car ça vient avec la cohérence de la scène; on a assez d'éléments pour apprendre à faire connaissance avec Sélène.
- Une scène bien sanglante pour une mise en bouche qui promet !
- Oh et j'ai beaucoup aimé la redite de la toute première phrase en guise de phrase de fin !
Hâte de lire la suite, que je vais m'empresser de faire en tout cas ^-^
On peut dire que c'est un incipit mouvementé !
Ton écriture est très visuelle et on sent que ton imagination fourmille sous le clavier (ou le stylo si tu commences tes écritures à la main...). Mais je crois que cette richesse te joue des tours puisque j'ai eu du mal à te suivre. Trop d'informations, trop de changements, trop d'actions.
C'est certainement une affaire de goût et d'habitude ou encore de rythme organique. Je suis une petite tortue et j'aime que les choses se déplient les unes après les autres, quitte à ce que la cadence s'accélère soudainement. Mais là, tout surgit et on ne sait plus ce qu'il faut regarder (enfin lire). Après j'ai bien saisi que tu adoptais la perception de ton personnage. "Tout ceci allait trop vite pour moi" affirme ta narratrice.
Mais je crois tout de même que cette arrivée brutale de la surnature serait encore plus frappante si le passage dans la librairie s'allongeait un peu et que les apparitions fabuleuses se raréfiaient légèrement.
D'ailleurs, cette ballade dans les livres m'évoque l'ouverture de "L'Histoire sans fin"... C'est peut-être un biais psychologique, une résurgence de fan absolue de ce roman mais voilà, je voulais le dire parce que j'aime beaucoup relever des accointances. C'est un vrai plaisir de lectrice et merci de m'avoir remis la tête dans les bouquins en vrac du vieux Koreander !
Je suis tombée sur ton histoire en cherchant des bons récits d'horreur et pour l'instant l'intrigue que tu nous présentes... eh bien m'intrigue pas mal. Ce début me donne envie de connaître la suite, pour savoir ce que ton personnage va faire de cette curieuse nouvelle "identité"
Après, niveau forme, je trouve que ça va un peu trop vite. Les phrases sont pas mal hachées par endroits, ce qui fait qu'on a l'impression que ça ne s'arrête jamais et, en tant que lectrice, j'ai eu un peu de mal à absorber toutes les informations et à me mettre dans l'ambiance. Comme tu le dis à un moment dans le texte, j'imagine que c'est pour donner l'impression que tout va trop vite pour Selene, ce qui peut être intéressant, effectivement. Mais du coup, je l'aurais mis en parallèle d'une narration plus lente au début, avant qu'elle touche le livre, pour bien marquer la différence.
Merci d'avoir pris le temps de lire et de ton retour constructif.
Je viens de tomber sur ton histoire qui m'a l'air alors très agréable. On est totalement plongé dans ce lieu fantastique. Pour ma part j'aime particulièrement l'ambiance qu'il règne dans ce prologue, ça me captive et m'encourage à continuer.
Il y a parfois quelques incohérences aux niveaux des temps passé simple/imparfait. L'imparfait est fais pour la description et le passé simple pour les actions soudaines.
Ton vocabulaire est riche, ça rends la lecture plus facile, plus fluide et ça évite les répétitions.
Bon courage pour la suite de l'écriture et merci pour ce partage.
Merci à toi d'être venu me lire, la suite arrivera prochainement !