Prologue

Cela fait maintenant trois jours que je suis arrivé en France, à Paris. Malgré ces trois journées, je n’ai toujours pas fait évoluer mon affaire. Pourtant ce n’est pas faute d’avoir vraiment tout essayé. Je vais bientôt être à court de moyens financiers. Il me reste à peine de quoi tenir quatre jours, disons une semaine si je me débrouille bien et si je réduis un peu mes déplacements. Il faut croire que la vie parisienne est vraiment aussi chère que celle de Londres, si ce n’est pas pire…

Et encore heureux je n’ai pas d’hébergement à payer.

Ce minuscule studio situé au centre de la capitale est vraiment très pratique. Une pièce contenant un lit une place et une kitchenette, puis dans une sorte de placard une salle de bain microscopique, me suffisent amplement.

Mais je me demande constamment s’ils n’en connaissent pas l’existence. Après tout ils doivent bien savoir que je ne suis plus sur le territoire anglais, donc, s’ils connaissent l’existence de cet appartement, ils savent exactement où me trouver. Ce lieu est mon seul héritage, mais peut-être le savent-ils ? Après tout, qu’est ce qui me dit qu’ils ne savent pas que ce notaire français m’a contacté pour m’en donner la propriété à ma majorité…

Je n’aime définitivement pas cette situation…

De plus grandma est seule en ce moment. Je n’aime pas la savoir si loin de moi et si près d’eux. Il n’y a personne pour veiller sur elle. Peut-être devrait-elle envisager d’adopter un chien. On pourrait le dresser pour qu’il puisse la défendre si quelqu’un tente de s’en prendre à elle. Je serais déja plus serein lorsque je dois m’absenter. Dès mon retour j’en parlerais avec elle. Cela me rassurerait beaucoup et je suis sûr qu’elle adorerait plus de compagnie. J’essaie de passer le plus de temps possible avec elle, mais je crains que cela ne suffise. Nous avons tellement de temps à rattraper ensemble, et j’ai encore beaucoup à apprendre d’elle.

Revenons à mon problème actuel, niveau argent j’ai de quoi tenir aux environs d’une semaine, en prenant en compte mon billet de train pour le retour. Sachant, qu’en cas de besoin je n’ai même pas accès à mon compte en banque, enfin techniquement si, mais comme j’ai pris toutes les mesures nécessaires pour qu’ils ne trouvent pas ce compte, l’utiliser dans un autre pays présente un risque. Ils pourraient voir que mon nom apparaît dans les frais de change entre la livre sterling et l’euro. Enfin je ne sais pas réellement comment cela fonctionne ni de quels moyens informatiques ils disposent. Je suis pour ainsi dire assez nul en ce qui concerne le web. Mais comme je ne veux prendre aucun risque, je préfère m’en tenir à mon plan et utiliser les billets en euros que j’ai fait faire changer par des amis en Angleterre.

Ils en savent déjà bien assez sur moi et contrôlent de ce fait déjà bien des aspects de ma vie, alors si je peux leur échapper quelques temps… Je ne dis pas non. Surtout si cela prouve que leur puissance d’emprise n’est pas aussi importante qu’ils le laissent penser.

Moins ils en savent, moins ils peuvent contrôler et moins de moyens de pression ils ont. Et le plus de liberté grandma et moi-même avons.

En attendant tant que je n’ai pas trouvé de personne pour m’aider je suis coincé ici. Il faut que je trouve quelqu’un rapidement, allez, n’importe qui !

Cela ne peut pas être aussi difficile. Il y a forcément une âme charitable dans cette ville, qui acceptera d’aller à un rendez-vous professionnel avec moi !

Présenté comme ça, c’est vrai que cela sonne étrange. Surtout si on prend en compte tout le reste. Je comprends presque pourquoi toutes les personnes à qui j’ai déjà formulé ma requête l’ont refusé. Certains sont même partis sans se retourner voire sans se donner la peine de me répondre.

Qui accepterait d’accompagner un inconnu, rencontré dans la rue, à un prétendu rendez-vous professionnel très important…

Bon sang ! Comment puis-je être aussi bête, je n’aurais jamais dû accepter ! Je savais bien que je ne trouverai personne pour m’accompagner, sachant que je ne connais personne à des kilomètres à la ronde ! So dumb am I !

Quelle heure est-il ? Quinze heures, d’accord je vais continuer ma balade, peut-être croiserais-je une personne au visage accueillant qui sera assez gentille et ouverte d’esprit pour m’aider.

Je me lève du banc, sur lequel j’étais jusque-là assis, perdu dans mes pensées, pour reprendre mon chemin. Me voilà dans les rues de Paris ne sachant pas quelle direction prendre. Je regarde le ciel, qui aujourd’hui est assez nuageux. « Il fait gris », comme ils disent ici, si j’ai bien compris. Il ne fait pas si froid enfin de compte, la météo est même meilleure que celle de Londres. Huit degrés en plein mois de janvier c’est plutôt chaud. Le vent est assez frais, c’est vrai, mais il n’est pas aussi violent que dans la capitale Londonienne.

Je pensais avoir froid avec mon caban mais finalement j’ai fait le bon choix, et je ne me suis pas encombré de ma doudoune. Il suffit juste de mettre un gros pull en laine en dessous. Au moins sur cela je ne me suis pas trompé !

Voilà une preuve que je suis totalement capable de prendre les bonnes décisions et apte à maîtriser une situation complexe ! Je vais y arriver ! Depuis le temps que j’attends ce moment, ce n’est pas un petit truc de rien du tout qui va m’empêcher d’accéder à mon rêve ! Comment ai-je pu me perdre dans des pensées si négatives ! Cela ne me ressemble pas.

Je marche sans trop regarder ou je vais depuis deux minutes, je devrais tourner là, dans cette grande rue. Il y a des boutiques aux rez-de-chaussée de grands immeubles, quelques arbres qui transpercent tant bien que mal le goudron, beaucoup de voitures qui circulent ; cela me parait être une rue passante et avec de l’activité commerciale. Je trouverais bien là quelqu’un pour m’aider. Paris telle que l’on me l’a décrite ne peut pas être une ville déserte. Et puis vers seize heures il y aura bien des gens qui commenceront à quitter leur travail et se retrouveront à marcher dans la rue pour rentrer chez eux.

Je m’arrête juste avant de sortir de ma petite rue. Je perçois du mouvement au loin. Il y a quelqu’un qui marche sur le trottoir d’en face ! C’est un homme banc que je situerais aux environs de la trentaine. Il est vêtu d’un ensemble de sport et me semble assez décontracté. C’est parfait il doit sûrement être quelqu’un de très cool. Je vais aller lui demander.

Ah, il s’arrête… Et il éclate de rire… On dirait qu’il se moque de quelque chose, ou de quelqu’un.

Bon s’il se moque de quelqu’un en plein milieu de la rue sans raison apparente ce n’est peut-être pas la personne que je cherche. Il risquerait de me rire au nez et partir sans que j’aie le temps d’expliquer quoi que ce soit. Finalement il n’est peut-être pas la personne idéale.

Et si on me demande de l’argent ? Cette idée me frappe à l’instant. Je n’avais pas pensé à cette éventualité. Après tout quelqu’un pourrait totalement demander à être payé pour ce que je lui demande. Oh my ! Comment vais-je faire si le cas se présente ? Je pourrais payer… Si j’avais les moyens, je serais près à le faire. Où pas, j’ai trop peur de me faire arnaquer. People can be so mean when it comes to money!

Dude ! Retourne à la situation, à la réalité. Ne juge pas ce monsieur avant de lui avoir parlé. Peut-être qu’il rit à cause d’une blague sur un mur ou une publicité sur un abri bus. Après tout je ne sais pas, et si c’est quelqu’un qui sait apprécier les bonnes blagues, il sera peut-être partant pour une petite aventure comme je lui propose. Enfin il n’y a rien de drôle dans un rendez-vous professionnel…

Retour à la situation Dave. Pourquoi rit-t-il ?

Il n’y a qu’un moyen de le savoir.

Je tourne à ma droite, pour voir ce qui peut faire rire cet homme à ce point, quand, mettant fin à mes plans échafaudés, il reprend son chemin. Le fou rire est passé, il retourne à son trajet, jette un œil à son téléphone et disparaît de mon champ de vision.