Je suis incapable de vous expliquer à quoi j'ai assisté, c'était trop surréaliste... Je me demande si écrire ce que j'ai vécu aussi tôt est une bonne idée.
Je revois encore ses formes, son ombre longer les murs, accompagnée par ce silence profond au beau milieu de l'océan. Je revois l'équipage tomber un à un en morceaux, tout ça à quel prix ? Le désir de puissance est-il plus important que notre survie commune ?
Voilà maintenant 6 jours que je suis sorti de cette prison médicale. J'entends encore leur question : « Tout va bien, Monsieur Moltaigne ? » « Vous désirez quelque chose ? »
Chaque jour, les mêmes questions planaient dans la chambre, comme-ci que j'étais fou malgré mes blessures et les nombreux dégâts sur le sous-marin.
Aujourd'hui, je suis incapable de m'allonger dans un bain, ils le savaient, mais ils voulaient s'assurer qu'en sortant, je sois lavé de tous mes traumatismes. C'était plus facile pour eux, car ils ignoraient que l'eau qui coulait était rougeâtre et non bleue, comme pouvait le faire croire leur sage psychologie.
Ils avaient peut-être raison, j'aurais dû prolonger mon séjour dans ce merveilleux hôpital. Depuis que je suis rentré, je n'ai fait que boire pour m'empêcher de dormir et de m'inonder dans mes draps. Je n'ose même pas déguster de l'eau, ma gorge la rejette et je ne vous parle pas des fruits de mer, l'autre tuyauterie la rejette tout aussi bien.
En revanche, ce dont je ne suis pas détaché ici, c'est ce silence. Ce silence et cette obscurité qui m'enlace, c'est quelque chose d'unique et d'intime dont je suis tombé amoureux. Le monde moderne est aujourd'hui bien trop bruyant ; j'ignore comment la nature arrive à s'apaiser dans cette boîte à musique géante qui s'arrête uniquement lorsque la mort frappe à la fenêtre.
J'ai sûrement survécu pour vous faire part de tout ça après tout, donc qu'est-ce que j'ai à perdre à vous révéler tout depuis le début ?