PROLOGUE
Pendant un long moment, il descendit l’escalier en colimaçon, une lampe à pétrole à la main. Les marches grincèrent sous ses pas, et leur écho feutré se répercutait contre les murs suintant. L’humidité pesait dans l’air, poisseuse. Enfin, il atteignit la dernière marche. Devant lui, une porte en bois, ébréchée, se dressait comme un seuil vers l’inconnu.
Le nœud au creux de son ventre se resserra. Que trouverait-il derrière cette porte ?
Un Roser, peut-être ?
L’idée n’aurait pas dû l’effrayer autant. S’il en croisait un, il n’aurait qu’à présenter l’objet caché dans sa poche et il n'aurait pas d'ennuis. En théorie. Mais un Roser restait un Roser. Et personne, pas même lui, ne pouvait se vanter d’être à l’aise en présence d’un membre de l’organisation criminelle la plus puissante de l’Empire britannique.
Il inspira profondément, tenta de dompter la nervosité qui comprimait sa poitrine. Puis, d’un geste plus assuré qu’il ne l’aurait cru possible, il poussa la porte.
Une odeur de poussière et de renfermé emplirent ses narines. Le couloir sombre s’étira devant lui, éclairé par des torches accrochées à intervalles réguliers dont les ombres, dansaient sur les parois. L’atmosphère suintait le danger, comme si une menace invisible pouvait surgir à tout instant.
Mais aucun bruit ne trahissait la présence d’un Roser. Il put respirer à nouveau pendant quelques instants.
Il s’avança prudemment, le bruit de ses pas créant de faibles échos qui rebondirent contre les parois. Son regard fut bientôt attiré par un immense rectangle fixé au mur. Un plan aux dimensions impressionnantes, éclairé à moitié par la lueur des torches. Il leva la lampe pour mieux distinguer les détails.
Un dédale complexe de passages entrecroisés se dessinaient sur le papiers jaunis. Des centaines de lignes noires se mêlaient entre elles, toutes menant à des points blancs numérotés. Plus bas figurait la légende :
Quartier 1 à 55 : Opiacées
Quartier 55 à 90 : Contrefaçons
Quartier 90 à 145 : Larcin
Quartier 145 à (…)
Son doigt parcourut les numéros jusqu’à la dernière ligne :
1812 : Augustus
Une secousse de peur traversa son ventre. Il ne s’attendait pas à ce nom — et pourtant, il comprit immédiatement. L'appelation Augustus n’était qu’un masque. Derrière, se cachait l’homme qu’il cherchait obstinément.
Il se mit en marche.
Il aurait pu emprunter le dispositif prévu pour atteindre rapidement la destination. Mais il préféra avancer à pied. Gagner du temps pour affiner ses pensées, consolider sa stratégie.
Après un long moment, il arriva enfin devant une porte.
Ce n’était pas une porte ordinaire. En réalité, nul n’aurait pu deviner qu’il s’agissait d’une porte. C’était une illusion, un camouflage parfait. Et pourtant, lui l’avait perçue d’un simple regard.
Il la fixa un instant, fasciné.
À ses yeux, elle représentait un passage.
Un passage vers l’irréversible.
Derrière elle, une autre vie l’attendait. Une vie où il ne serait plus jamais le même. Ce qu’il avait été jusqu'à présent resterait ici, sur le seuil.
Enfin… si tout se passait comme prévu.
Sinon…
Il posa la lampe au sol, ferma les yeux et plaqua ses paumes contre son visage. Une manière de faire le vide. Il ne devait laisser aucune distraction troubler son esprit. Pas maintenant.
Il le savait : ce qu’il s’apprêtait à faire était dangereux. Il allait défier un homme. Et pas n’importe lequel.
Augustus.
Un titre jadis porté par les empereurs de Rome.
Symbole de puissance. De grandeur.
Officiellement, le pouvoir en Angleterre était détenu par la Reine et le Parlement. Officieusement, tout le monde savait que Londres appartenait à un homme de l’ombre. Un homme qui, seul, avait bâti un empire sur le crime et la peur.
Un homme qu’on appelait Le Croupier.
A ses yeux, il ne faisait aucun doute possible. C'était Le Croupier qui se cachait derrière ce vocable d'Augustus.
Et lui, debout devant cette porte invisible, avait parfaitement conscience que ce qu’il s’apprêtait à faire revenait à tendre une allumette à un pyromane alors qu’on dégoulinait d’huile.
Un pari suicidaire, même pour le plus fou des joueurs.
Mais s’il prenait ce risque, c’était bien évidemment pour une raison remarquablement solide.
Car si son plan fonctionnait, alors un autre jeu s’ouvrirait à lui. Un jeu bien plus grand.
Et s’il fallait miser sa vie pour en permettre l'accès, il était prêt. C'était une enchère folle mais qui en valait la peine.
Il ne laisserait rien le détourner.
Pas même la peur.
Pas même l’image de son corps qui flotterait peut-être dans la Tamise avant la fin de la nuit.
Il prit une grande inspiration. Profonde. Lente. Maîtrisée.
Puis il retira ses mains tremblantes de son visage.
Actionna le mécanisme.
Et franchit la porte.
Ta plume est fluide et très belle, hâte de connaitre la suite !
Bonne écriture
Anaïs^^
J'ai bien aimé ton prologue : l'écriture est fluide, bien rythmée, le mystère et le suspense sont bien présents, et on a bien envie de découvrir ce qui se cache derrière cette porte et qui est ce mystérieux personnage qui souhaite rencontrer l'effroyable Croupier alias Augustus.
Hâte de lire la suite !
Super début, rythmé avec de l'intrigue. Je suis curieux de rencontrer Augustus.
petit éclairage sur les expressions que j'ai appréciées: "suinter de danger" et ''tendre une allumette à un pyromane alors qu’on dégoulinait d’huile.''
Un début déjà très énigmatique, que c'est charmant :-D.
Tu donnes déjà la note c'est très bon signe ça. J'ai donc hâte de lire la suite.
Je suis très heureuse de découvrir ton histoire (je suis très friande de mystère, d'enquête et de meurtres hihihi).
Au plaisir de commenter un nouveau chapitre,
À bientôt !
Merci infiniment pour ton commentaire qui me touche beaucoup <3
J'espère que la suite te plaira ^_^
A bientôt !
Sinon, courage à toi pour.ton mot de passe !
Merci beaucoup pour ton commentaire, ça me fait très plaisir !! :D