La pièce, plongée dans l’obscurité, n’était éclairée que d’une hésitante lumière orangée. Une femme, assise à un bureau de bois sombre, dont la surface laquée reflétait le peu de lumière, écrivait à la main. La feuille blanche, posée devant elle, se couvrait de noir à une vitesse surprenante. Sa plume irisée de vert courait à la surface du papier à un rythme effréné. Derrière elle, une immense bibliothèque recouvrait le mur. Elles semblait remplie d’un millier de classeurs, tous verts émeraude, tous de la même taille.
Sur un des angles du meuble, un dahlia cactus sortait sa tête lie-de-vin d’un vase, aussi noir et satiné que le bureau.
Il aurait été difficile de donner un âge à la femme tant elle paraissait jeune de part la rondeur de son visage et âgée par la dureté de son regard. Deux cache-œil couvraient ses yeux et leurs lacets se croisaient entre ses sourcils. Au milieu de son front, un troisième œil, d’un bleu glacée, suivait la course de la main sur la feuille. Une magnifique fleur noire, tatouée, s’épanouissait à la racine de ses cheveux, gris et coupés au ras du crâne. Le bout de ses pétales touchait presque ses cils.
Un coup sourd résonna dans toute la pièce et le dahlia tourna ses corolles vers la femme. Le bruit semblait venir de très loin et se répercutait contre tous les murs du bâtiment. La femme arrêta d’écrire et son œil se posa sur la fleur.
- Ils arrivent n’est-ce pas ?
Elle se tut, comme dans l’attente d’une réponse. Un second coup retentit alors, venant des entrailles de l’immeuble. Le dahlia eut un sursaut et la femme ferma son œil.
- Il fallait bien qu’ils viennent un jour.
Elle se leva, rouvrant son troisième œil et, calmement, attrapa l’un des classeurs et en arracha une feuille. Elle renouvela cela neuf fois et fourra les dix feuilles dans une poche de pantalon de son costume gris anthracite. Un troisième coup se fit entendre.
Elle plia soigneusement la feuille qu’elle venait de couvrir de son écriture fine et la laissa sur son bureau.
Quatrième coup.
Le dahlia se tourna, comme pour la suivre, alors qu’elle se dirigeait vers un placard, face au bureau. Elle fouilla dans l’un de tiroirs et en sortit une petite boîte bleu nuit sur laquelle était dessiné un serpent à trois têtes surprenantes, une bovine, une humaine et celle d’un lion. Le femme la glissa dans la deuxième poche de son pantalon.
Cinquième coup.
Elle prit le dahlia entre ses doigts, et il enroula ses feuilles autour d’eux.
- Au revoir, Dahlia Debra Anne Cravea, les bas quartiers t’accueilleront chaleureusement, sois en sûr.
Il ouvrit alors ses pétales centraux et apparu l’iris gris d’un œil. La femme posa délicatement ses doigts sur les pétales pour les refermer. Elle alla déposer la fleur sur le rebord de la fenêtre. Cette dernière se détacha d’elle avec difficulté.
La femme ouvrit la fenêtre. Un soudain coup de vent emporta le dahlia.
Sixième coup.
Des pas résonnèrent dans un escalier proche.
La femme déplaça la bibliothèque avec une aisance étonnante et ouvrit la porte cachée derrière. Tandis que la porte se refermait sur elle, que la bibliothèque retrouvait sa place, elle disparu dans la pénombre d’un couloir de secours.
Voilà un prologue bien mystérieux. Une femme extraordinaire, vraisemblablement pas tout à fait humaine, poursuivie par on ne sait qui, liée à un dahlia intelligent qui réagit à ce qui se passe, ça pique la curiosité.
En comparaison avec l’époque où tu as commencé à publier Opposés, je trouve que tu as beaucoup progressé dans ta manière d’écrire... et de décrire. :-) J’ai hâte de lire la suite.
Coquilles et remarques :
— Elles semblait remplie d’un millier de classeurs [Elle]
— elle paraissait jeune de part la rondeur de son visage [de par ; j’apprends aujourd’hui que l’Académie française déconseille cet emploi : http://www.academie-francaise.fr/de-par. Je propose donc « du fait de ».]
— d’un bleu glacée [glacé]
— La femme arrêta d’écrire [Certains grammairiens déconseillent cet emploi, bien qu’il soit ancré dans l’usage ; je propose « cessa d’écrire », qui me semble plus élégant.]
— Ils arrivent n’est-ce pas ? [J’ajouterais une virgule après « arrivent ».]
— et, calmement, attrapa l’un des classeurs et en arracha [Je te propose de remplacer le premier « et » par « puis ».]
— Elle fouilla dans l’un de tiroirs [l’un des]
— Le femme la glissa dans la deuxième poche [La]
— sois en sûr [sois-en sûre]
— et apparu l’iris gris d’un œil [apparut]
— elle disparu dans la pénombre [disparut]
Répétitions : Dans un chapitre aussi court, c’est préférable de les éviter.
— Tu as deux fois « surprenant » et une fois « étonnant » : je te suggère de trouver le synonyme qui te convient le mieux et de redistribuer les trois adjectifs. (Ce n’est pas forcément la 2e occurrence qu’il faut changer.) Je propose : incroyable, saisissante, remarquable, prodigieuse (pour la vitesse ou l’aisance) ; extraordinaires, insolites (pour les trois têtes).
— Pour la porte et la bibliothèque, il y a toujours : battant, vantail, ou accès et étagère, meuble.
Merci bcp d'avoir pris le temps de lire et corriger ce prologue ! :)
Je suis très contente que tu vois une progression dans mon style d'écriture, et j'espère pouvoir continuer à l'améliorer.
Je vais essayer de trouver le temps de finir d'arranger mon premier chapitre et de le poster ici, mais ce sera sûrement après mes partiels...
Bonnes fêtes à toi ! et merci encore pour le temps passé sur mon prologue