La Harde des Jorsel préparait l’hiver dans une frénésie d’activité. On renforçait avant tout les habitations qui devaient affronter les intempéries — les structures des huttes étaient parées pour les tempêtes, et on constituait de substantielles réserves de nourriture.
Durant tout le jour, les denrées avaient été infatigablement préparées, séchées, stockées. Les Jorsel chargés d’éviter que les enfants de la Harde s’immiscent dans les pattes des adultes affairés, avaient aussi préparé le repas collectif dans de grandes jattes suspendues au-dessus du feu : la soupe bouillonnante répandait un fumet agréable.
Il restait encore tant à faire.
De nouvelles huttes avaient été construites et il fallait rapidement les agrémenter. Il était pressant, aussi, de reprendre tous les vêtements des enfants et certains manteaux.
Yana appréciait les tâches de tissage, mais elle avait préféré aller chercher les plantes, herbes, racines pour la Harde avec Trella, la fille de la Sestre qui était comme sa sœur, pour qu’on les laisse seules et libres d’explorer.
La journée avait été éprouvante et ce soir-là, Yana vit arriver la fin du jour avec avec un étrange soulagement.
À la nuit, les Jorsel s’étaient rassemblés près du feu collectif, à quelques mètres de la hutte de la Mère des Coutumes, qui sortit, parée de ses deux grands bois, et raconta quelques bribes de l’histoire des Jorsel, ce peuple encore blessé se remettant difficilement du dernier cataclysme, des épreuves destructrices et funestes qu’il avait dû, encore récemment, traverser.
Yana participa avec les autres à la Veillée, écouta avec attention, mais mangea peu car, pour une raison inconnue, l’appétit lui manquait.
C’est alors qu’elle sentit tout son corps s’immerger dans une masse tiède, se mit à la traverser insensiblement, comme on passe un buisson dense — mais liquide — et en quelques secondes elle en était sortie.
J'ai trouvé ce prologue court et rythmé, sans information superflues et assez d'action pour être immergée dans l'histoire.
La dernière phrase est envoûtante et donne envie d'en savoir plus.
Je ne suis pas familière du vocabulaire donc j'ai appris des mots (jattes, ) mais je n'ai pas trouvé pour Sestre (= pas le groupe de musique POP composé de drag queen slovènes, je suppose). C'est un mot évident pour tout le monde sauf moi ?
Mes remarques de détail :
- On parle des huttes dans le premier et le second paragraphe avec une phrase sur la nourriture entre les deux, sur le plan thématique ça m'a semblé redondant alors que ça contient bien deux informations différentes mais comme on répète le même mot, en lisant vite j'ai associé à la même idée.
Ce n'est pas un problème pour comprendre le texte mais ça m'a un peu gênée pour la fluidité de ma lecture. Si tu veux retravailler ce passage, ton accroche serait peut-être encore plus percutante ?
- Dans le dernier paragraphe, Yana se SENTAIT étrange. Puis quelques mots plus tard elle SENTIT tout son corps. Dans le registre de la sensation, p-être trouver un autre verbe ?
- L'ordre des paragraphes me perturbe.
J'ai personnellement l'impression qu'il manque un petit quelque chose entre l'imparfait d'habitude et l'expérience de Yana.
J'aurais mieux vu le passage sur les données alimentaires à stocker et les huttes à agrémenter à la suite des souvenirs de la mère des coutumes, et ensuite celui sur les préférences de Yana pour "justifier" que la journée fut éprouvante pour Yana qui préfère cueillir des herbes.
Ce qui donnerait :
"La Harde préparait l’hiver dans une frénésie d’activité. On renforçait avant tout les habitations qui devaient affronter les intempéries — les structures des huttes étaient parées pour les tempêtes.
Les Jorsel préposés à la surveillance des enfants de la Harde – qui sans cela s’immiscaient dans les pattes des adultes affairés – préparaient également le repas collectif dans de grandes jattes suspendues au-dessus du feu : la soupe bouillonnante répandait un fumet agréable.
Le soir, on se rassemblait près du feu collectif, à quelques mètres de la hutte de la Mère des Coutumes. Elle sortait, parée de ses deux grands bois, et racontait les souvenirs de ce peuple encore blessé se remettant difficilement du dernier cataclysme, des épreuves destructrices et funestes qu’il avait dû, encore récemment, traverser."
[ajouter qqch comme "Durant tout le jour, "]
"Les denrées étaient [avaient été] infatigablement préparées, séchées, stockées. Il y avait encore tant à faire. Il fallait déjà reprendre tous les vêtements des enfants et certains manteaux. De nouvelles huttes avaient été construites et il fallait également les agrémenter.
Yana appréciait les tâches de tissage mais moins que d’aller chercher les plantes, herbes, racines pour la Harde. Elle aimait y aller avec Trella, la fille de la Sestre qui était comme sa sœur, car alors on les laissait seules et libres d’explorer.
La journée avait été éprouvante. Ce soir-là, Yana se sentait étrange. Elle participa avec les autres à la Veillée, mangea peu mais écouta avec attention. C’est alors qu’elle sentit tout son corps s’immerger dans une masse tiède. Elle se mit à la traverser insensiblement, comme on passe un buisson dense — mais liquide — et en quelques secondes elle en était sortie."
C'est une proposition selon ma logique de lecture, évidemment c'est comme tu le sens :)
Bonne année 2025, bon réveillon !!
Pour le néologisme « Sestre » : ( ha ha, je ris pour la ref au groupe popˆˆ), c’est un titre que j’ai inventé sur la base des langues slaves, il vient du mot « soeur » (sestra en russe). J’avais commencé avec une Mère des Herbes mais comme il y a aussi une Mère des Coutumes, ça faisait trop de mères, et même si je pouvais décliner le titre en « ancienne », « aïeule » etc., comme elles étaient toutes deux plus âgées que Yana, ça pouvait prêter à confusion. Je suis finalement restée sur ce terme, car ça convenait bien à la zone géographique d’inspiration de mon histoire, le continent eurasiatique (mais sans aucun égard pour la chronologie linguistique, j’ai pas poussé aussi loinˆˆ).
L’ordre des paragraphes : en effet, c’est le bazar ! Pour la raison bien simple que j’ai changé plein de fois l’ordre des phrases tant j’en étais insatisfaite. Conclusion = je remanie ce début trop souvent et à force je perds de vue la logique de l’enchaînement. Je vais me laisser le temps de l’oublier pour le reconstruire en plus-joli-plus-fluideˆˆ
Quand tu dis « il manque un petit quelque chose entre l'imparfait d'habitude et l'expérience de Yana » : mais tout à fait, super remarque ! C’est justement un souci que j’avais en rédigeant ce début : articuler les habitudes de la Harde, les activités ordinaires et ce qui se passe ce soir-là, précisément.
Ma première idée avait été de créer une scène de Veillée avec le discours de la Mère des Coutumes et Yana qui s’endort/glisse dans un songe. Mais j’ai pris ce dialogue pour un autre chapitre… du coup, j’ai ce début un peu bof :)
Réutilisation trop vague du verbe SENTIR : carrément ! (je vais reprendre ça, bien vu!)
Enfin, je te remercie beaucoup beaucoup (oui, j’ai mis le mot deux fois ˆˆ) pour ta suggestion de reprise, ça met effectivement de l’ordre, fait entrer progressivement et néanmoins de manière plus logique dans cet univers préhistorique alternatif. Je pense te la piquer provisoirement, en attendant de revenir sur ce prologue quand je reprendrai la construction d’ensemble de l’histoire.
Une excellente année 2025 à toi !
C'est juste que pour les quelques mots d'introduction, autant qu'ils soient les plus percutants et "parfaits" possible, surtout dans une démarche d'édition, car c'est sur eux que vont se buter les décideurs s'ils y voient des failles (plus tard dans le texte c'est moins déterminant car le lecteur est "accroché") et comme le reste de ton texte est écrit je sais que ça ne va pas te bloquer au prologue héhé.
Je note que Sestre est un mot inventé, je pense qu'on comprend très bien dans le contexte (mais moi je cherche les mots que je ne connais pas par acquis de conscience de ne pas faire de contre-sens, hein). Je me souviens que c'était la mère des herbes, et ça peut prêter à confusion de garder deux termes proches, effectivement c'est une bonne idée de l'avoir modifié (c'est ta Panoramix préhistorique :D ). :)
Mais du coup pour la partie qui "manque" (à mes yeux et aux tiens), pourquoi ne pas reprendre ta première idée en faisant raconter très brièvement un songe de la Mère des Coutumes, en passant progressivement de l'habitude à l'exemple concret au passé simple (ex : "Ce soir, la Mère raconta comment le grand feu avait décimé la tribu des XX" - j'invente n'importe quoi :D ) au cours duquel Yana se "sentait étrange" (en gardant l'imparfait de "pendant ce temps / au cours du récit de la Mère des Coutumes") et à nouveau le passé simple quand son expérience mystique commence "elle se mit à traverser etc." ?
A mon avis c'est une pure question de fluidité, comme s'il y'avait une marche un peu trop haute à monter à ce passage du récit. Avec un élément comme un début de récit au passé simple je pense que ça fournit le bout de marche qui manque. (pour moi ton idée de base fonctionne, et ça ne sera pas répétitif si tu ne reprends pas le même récit de la mère des Coutumes que celui qui est développé plus tard, et que ça fait 2 phrases ça ne risque pas de lasser :D ).
Le style est fluide et agréable à lire, assez rythmé. Le seul petit point que je soulèverais est la répétition du verbe aimer : "Yana aimait s'occuper des tâches de tissage [...]. Elle aimait y aller[...]" . Sinon, rien à dire !
Bravo à toi ! Je fonce lire la suite !