La nuit. Intermède féerique où tout s’apaise et repose. Au beau milieu du camp assoupi, un jeune garçon s’assoit à même le sol, les yeux levés vers le ciel. Les myriades d’étoiles se reflètent dans son regard bleu nuit ; il cherche dans les cieux des réponses qui le fuient, insaisissables. Il paraît bien trop chétif pour les soucis que l’on devine sur son visage, encore plus pour le soupir qu’il laisse échapper avant de s’allonger.
Zorren semble presque endormi quand un changement imperceptible dans l’atmosphère le fait se redresser. Il regarde autour de lui, se sermonne en silence. Impossible que quelqu’un parvienne à s’introduire ici : les gardes se relayent toutes les deux heures pour veiller sur le bivouac, encerclent savamment les habitations de toiles et ne relâchent jamais leur vigilance. Seule cette place offre une relative intimité.
« Petit frère… »
L’enfant bondit sur ses jambes, en garde, les paumes tendues devant lui. Son souffle s’accélère, sa poitrine se soulève en rythme irrégulier, et il tourne la tête de tous côtés.
— Qui est là ?
Le garçon ouvre la bouche, abasourdi : une forme se matérialise devant lui, sortant de nulle part. Il la prend tout d’abord pour un chevreuil, mais réalise son erreur dès qu’il s’attarde sur la taille de l’animal. De hauts bois se dressent fièrement au-dessus de sa tête et une noblesse indicible se dégage de lui. Un cerf, mais entièrement noir, translucide. Il se fond à demi dans la pénombre et les arbres alentour ; présent sans vraiment l’être.
— Qu’est-ce que ? Es-tu un cerf ou une sorte de fée ?
La créature fabuleuse avance d’un pas, et bien qu’époustouflé par sa beauté, l’enfant recule.
« Je serais les deux si tel est ton souhait ; je serais… Céphée. »
Il parle, mais son museau reste étroitement clos. Aucun son n’émane de lui, seule une onde de douceur l’environne.
« Tu n’as aucune raison de te défier de moi. »
— Je n’ai pas peur.
Son attitude trahit largement ses mots.
« Je t’entends, petit frère, soir après soir, tes paroles assourdies se mêlent aux murmures des arbres. Que souhaites-tu avec autant d’ardeur ? »
— Je…
Cette fois, il laisse le cerf approcher et baisse la tête, remuant les feuilles mortes du bout de ses pieds.
— Nous allons tous mourir. Peut-être pas demain, ni le jour suivant, mais très bientôt, je le sais. Non seulement mon père est une menace pour le trône, mais en plus, nous sommes différents et ils ont peur de nous. Jamais ils ne renonceront à nous traquer, et il n’y a nulle part où se mettre à l’abri.
« Tu es en quête de la réponse qui sauverait les tiens, petit frère, mais tu es si jeune encore… »
— Peut-être. Mais je suis plus fort que tous les autres. Si je n’arrive pas à les protéger, qui le pourra ? Tout repose sur moi, et je ne suis pas le seul à en avoir conscience.
La silhouette de la créature tremble, comme si elle cherchait à rire, mais s’en découvrait incapable. Cependant, elle recouvre rapidement son sérieux et regarde l’enfant d’un œil nouveau.
« Quelle est la force de ton dévouement ? Jusqu’où irais-tu pour eux ? »
Zorren hésite, méfiant.
« Saurais-tu apprendre ? »
Il réfléchit. Quel danger y aurait-il à seulement lui répondre ? Il tient peut-être là son unique chance : l’apparition semble tout sauf ordinaire et elle pourrait fuir pour ne plus jamais reparaître. Sa volonté s’affirme avec le passage des secondes. Que pourrait-il risquer de pire que la mort ? Il se sait condamné depuis qu’il est suffisamment âgé pour réfléchir de lui-même. Il préfère s’éteindre en ayant commis une erreur, plutôt qu’en regrettant de n’avoir pas eu le courage d’agir. Il acquiesce finalement d’un geste sec et déterminé.
« Saurais-tu battre le fer pour moi ? »
Il hoche la tête une deuxième fois. L’esprit ne peut pas plus sourire que manifester son amusement, pourtant, on le devine gagné par la satisfaction.
« Saurais-tu forger une arme de légende dont nul autre n’égalera jamais la puissance ? »
Une nouvelle fois, la tête s’abaisse, et la curiosité prend le pas sur les derniers doutes.
« Saurais-tu sauver ton peuple ? Œuvrer jour et nuit ? Déposer ta puissance et tes espoirs dans un seul et unique objet ? »
La témérité de Zorren enfle, sa volonté s’affirme ; il ne doute pas un instant de ses capacités à réaliser l’impossible. Sans plus tergiverser, il scelle son destin.
— Oui.
« Alors, peut-être seras-tu suffisamment fort pour mon chemin…
Le mystère est posé dans ce prologue. Il pourrait être un peu plus étoffé avec ce que ressent Zorren et un peu plus de descriptions de l'environnement, mais il donne envie d'en savoir plus sur ce monde que tu nous dépeins brièvement.
En tout cas, ta plume est belle et nous plonge dans le décor.
Me voilà enfin pour découvrir ton histoire et faire connaissance avec ta plume. Et à première vue, je trouve ce prologue vraiment réussi.
Bon, déjà d'un point de vue subjectif : on est en plein dans la fantasy, mon genre de prédilection, et j'adore l'ambiance de mystère qui plane autour de Céphée. Le résumé de ton livre est intriguant aussi : une histoire de prophétie, deux mondes que tout oppose, un enfant qui doit ramener la paix... C'est un peu classique sur le papier, mais quand c'est servi par une jolie plume c'est toujours efficace.
Parlons-en, de ta plume.
Elle est vivante, elle rend bien l'atmosphère un peu mystique de cette scène et les dialogues sont maîtrisés. Sur un prologue somme toute assez court, tu parviens à nous donner assez d'éléments pour qu'on s'interroge sans être complètement perdus.
Bref, une introduction qui donne évidemment envie de lire la suite.
ça fait plaisir de te voir jeter un petit coup d'œil par ici :) Bienvenue à Atharian ! ^^ Je suis ravi que ce prologue te plaise, et ma plume , (et aussi qu'on ne puisse pas me voir devenir toute rouge quand je lis les coms... ^^)
J'espère ne pas te décevoir s'il tu lis la suite, du coup ^^
Je continuerai avec plaisir de te lire dès que j'aurai un peu de temps, en ce moment je jongle entre le boulot, Jaken et la lecture de Symbiose :p
Je me demande comment j'ai pu passer à côté de cette histoire depuis mon arrivée!
Je trouve ce prologue magnifique, une pointe de mystère, de poésie, deux personnages qui se font face et auxquels on s'attache tout de suite, la suite promet d'être toute aussi magique et j'ai hâte de m'atteler à la lecture des chapitres que tu as déjà écris.
J'avais archivé l'histoire un moment, parce qu'il y avait trop eu de versions et que les coms ne correspondaient plus sur le site. je reposte depuis peu, peut-être que c'est pour ça que... ^^ En tout cas, je reposte petit à petit après un coup d'antidote (j'ai déjà fini le livre 1, et un petit tier du deuxième) alors il va y avoir de quoi lire si tu accroches avec la suite ;)
Plein de ronrons !
Il y a d'ores et déjà fort à parier que la suite saura me plaire!
Moi aussi, je viens te lire ! :)
Je trouve également que c'est un bon prologue ! Il est accrocheur et il pose assez de questionnements pour qu'on ait envie de continuer notre lecture. Et ma lecture était fluide ! Ce qui me fait dire : continue, continue, continue !
J'ai hâte de lire la suite !
Je viens voir ce que tu écris. Ce prologue remplit parfaitement sa fonction. Je trouve qu'il y a un bon dosage du mystère, on a envie d'en apprendre plus sans être complètement perdu. Et il y a déjà beaucoup d'éléments intéressants. Le narrateur promis à la mort depuis sa naissance (pourquoi), l'apparition un peu mystique d'un cerf au milieu de la nuit (qui est-il ? pourquoi l'appelle-t-il petit frère ?). Et cette espèce de défi final : forge moi une arme à ma hauteur, pour conclure le prologue et lancer l'intrigue. Très efficace !
Je ne suis pas d'accord avec saltimbanque par rapport à la longueur. Que ce prologue soit court, à mon avis c'est une bonne chose. Il n'y a pas besoin de donner plus d'éléments à ce stade de l'histoire. Le but c'est de poser les questions qui donnent envie de lire la suite.
"Il préfère s’éteindre en ayant commis une erreur, plutôt qu’en regrettant de n’avoir pas eu le courage d’agir." joli ! j'approuve le message xD
Je poursuis ma lecture...
Je suis ravi de te voir ici et que mon prologue te plaise. Cette scène, cet échange, ce pacte, c’est vraiment très important pour mon histoire, même si on va mettre longtemps à comprendre pourquoi. Il était délicat à écrire car il m’a fallu jongler avec des secrets, montrer des choses, mais pas trop. ^^
Tu me rassures pour la longueur, après réflexion, rapport au souci cité plus haut, il aurait pour moi été dangereux de l’augmenter. Je risquais en plus de perdre le côté percutant et je ne voulais pas non plus qu’on se fixe trop sur Zorren, qui, s’il est très important, n’est pas le héros principal de cette histoire.
Merci beaucoup pour ta lecture et ton retour. :)
Ça sonne très vrai, surtout dans les dialogues. Ni pas assez ni trop peu. Tu donnes assez d'information pour qu'on devine qu'est-ce qui se passe, mais tu laisses assez de mystères (surtout l'identité de Céphée) pour pousser à lire la suite.
L'écriture est très fluide et expressive. Tu donnes une sacrée ambiance à cette étrange rencontre... MAIS en allant un chouïa trop vite. Le rythme pourrait être plus posée, laisser l'étrangeté de la scène s'installer (après tout, on parle d'un cerf fantôme qui vient faire un marché au milieu de la nuit ; tu peux même rendre la scène horrifique !).
voili voilou
Il est court, oui, peut-être un peu trop et j’y réfléchirais ;) J’avais peur qu’on ne se fixe trop sur ce jeune personnage et que l’on soit déçu ensuite car il ne s’agit pour du héros de l’histoire. Le côté horrifique, tu verras si tu poursuis ta lecture, ne correspond pas à mon histoire. Diaboliser Céphée ne jouerait en ma faveur et ne luis correspondrait pas. Zorren t’as peut-être paru un peu confiant malgré son jeune âge, mais ça correspond à son vécu et à son caractère. Merci beaucoup pour ton avis et ta lecture en tout cas.
Ronron.
Merci pour ce moment de lecture !
J’avais galéré un sacré bon moment avant d’écrire ce prologue. Il a des tas de grands frères et m’a demandé beaucoup de réflexion alors je suis très contente qu’il te plaise.
Tu verras qu’il est très important pour l’ensemble de l’histoire : c’est en effet un moment capital.
Merci beaucoup de m’avoir lu et laissé un petit mot, c’est très gentil :)