Reconnaître

Notes de l’auteur : C’est un chapitre avec lequel j’ai eu beaucoup de mal et il est bien moins abouti et compréhensible, j’en suis consciente. Tous retours / conseils / critiques est bon à prendre !

Un soir, elle eu mal au cœur au milieu du clair obscur. Il n’y avait pas de vent, mais l’air cinglait ses yeux. Elles avait des larmes étalées sur la cornée. Elle était lourde, il n’y avait pas de noeud mais beaucoup de pierres. Elle avait laissé tombé ses bras sur sa tristesse. Elle regardait autour d’elle en voulant dire quelque chose dont elle n’avait pas les mots.

Elle voyait des battements et des rires coupés d’elle par un mur d’eau. Elle était ailleurs. Elle était nul part. Elle ne pouvait pas traverser la membrane.

Il y avait de nombreuses paroles qui salivaient entre les corps, c’était des projectiles, ils étaient ronds, ils étaient élastiques. Elle était rigide. Elle ne comprenait rien. Il y avait des brumes derrière sa tête. 

Et puis, elle croisa un regard qui refléta ses larmes. Il était clair comme le chagrin et doux comme l’égarement. Mais elle, il l’avait tranchée. Elle avait vu le revers de la lame sous la pupille.

Alors les mots remuèrent au fond d’elle. Ce n’était pas facile, mais ça avait commencé. Elle bouscula son corps-continent vers sa terre reculée. 

« Ça va ? » 

Ce n’était ni une inquiétude ni une salutation. 

« C’est une vrai question. » 

L’autre ria nerveusement. 

« Je sais. Je sais. » et puis brusquement la beauté et la lucidité au fond du regard : 

« Moi aussi. » 

Elle avait aboli le langage par une banalité. Il n’y avait rien à répondre à ce reflet, tout comme ce reflet ne s’appuyait sur rien, mais elle avait raison. Elle savait. 

« Désolé, de te demander comment tu vas, je sais qu’on doit te poser la question tout le temps. » 

« Je sais, je sais. » Toujours ce rire, et cette excuse derrière. 

« Je sais, c’est moi qui suis désolé, c’est simplement que je n’ai pas de réponse. Je sais pas ce que je ressens. C’est ce qui me rend triste, enfin, non pas triste mais...» Immense soupir. Elle non plus n’avait pas les mots. 

« Je sais. » Elle lui avait transmis sa réciprocité. 

« Je crois aussi que tu sais. » 

« Alors ? » il y avait un sourire dans ses mots, et il germa en même temps sur leur deux visages flottants. Ce n’était pas une vrai question. Toutes deux savaient désormais que la finalité n’était pas pour elles. « Alors » et elles rirent en expirant. Doucement, elle se déplacèrent, quittant l’esplanade abruptes de rires graves et de piques aiguës. Elles s’assoièrent  doucement sur un banc humide, avec beaucoup de maladresse et d’embarras. Mais toujours en miroir, cela les sauva. 

« Qu’est ce que ça fait ? » elles se comprenaient à mi-mots et tant mieux,  car aucune n’aurait supporter un son de trop. 

« Je sais pas... » Il semblait que toutes les pensées de l’interlocutrice soient guider par ce savoir qui tranchait le monde en deux, ignorance et vérité. 

Mais elle continua. 

« ... c’est comme si le monde était en train de se noyer. Je n’ai pas l’impression de me noyer. C’est comme si tout glissait hors de moi dans les remous incolores et fumeux d’un tout qui me laissait froide. C’est devenir un caillou sans sentir aucun poids. Le monde est un écran brouillé et je lutte contre un vertige et une migraine incessante. J’aimerais dormir. Je crois... que j’ai juste sommeil. »

« Moi aussi. » Et les larmes avaient coulées, d’une source ancienne depuis longtemps silencieuse dans les tréfonds frais des artères. 

Soudain, toutes les feuilles, toutes les fleurs, tous les brins, tous les poumons s’ouvrirent en elles avec violence. Elles se virent redressées d’un centimètre de lumière et les sensations s’étalèrent à nouveau sur chaque surface. Elles sentirent à nouveau et elles revirent les contrastes. Leur parole et leur similarité avaient secoué le sable qui s’était infiltré en elles, les cartes étaient redistribuées. Pendant l’heure qu’elles passèrent encore à parler, arrachant un à un les mots à l’absence et à l’incompréhension, elles vécurent à nouveau le kaléidoscope de leur existence. Cette vérité flotta le long de leur os encore jusqu’au lendemain.

Ainsi, elles se réapprirent la Parole, un savoir et un espoir. 

 

Pour Busra, c’était dure mais ça avait commencé.

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Alice_Lath
Posté le 18/08/2020
Quelques coquilles, mais j'ai préféré me concentrer sur le rythme du texte et me laisser embarquer par sa poésie. Personnellement, je pense avoir compris que Busra a trouvé quelqu'un qui partageait la douleur de sa dépression, quelqu'un à qui en parler et à quel point c'est dur. Je me trompe ? Dis-moi si je suis à côté de la plaque haha. Sinon, te dénigres pas, vraiment, j'ai adoré cette partie à nouveau, toujours aussi belle et plaisante, comme à chaque fois. Juste magnifique.
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