Rêve éveillé

L'île d'Hokkaido était très calme, et les régions montagneuses comme celles-ci recelaient de petits villages et de temples parsemées à travers l'épaisse végétation de la montagne. La neige avait recouvert les sommets rocailleux et la cime des arbres, le temps semblait s'être arrêté dans cette partie du monde. De temps à autre la neige tombait avec lenteur et paresse, le vent soufflait mélancoliquement dans les arbres et la toiture du temple, et les charpentes craquaient sous le poids des amas floconneux. Malgré ce temps, une adolescente était là, à genoux devant l'entrée du temple, à regarder la neige tomber. C'était sa saison préférée, chaque seconde passée à contempler ce que la nature lui offrait, lui permettait de mieux se rapprocher de son état spirituel. Fuyu officiait au temple de son père depuis sa tendre enfance, et elle n'avait jamais rien vu à l'extérieur à part les alentours du mont Touro et le petit village d'à côté, sur la route menant à la ville de Kushiro. Elle rêvait de visiter la ville, et de contempler les longues ruelles bordées de couleur et emplie de la bonne odeur du marché. Bien que l'hiver ne faisait que commencer, les matsuri d'hiver de Sapporo ne lui faisait que trop envie, mais ce qui la fascinait le plus, c'était les scènes de kabuki. Petite, les masques l'avait toujours effrayé, mais aujourd'hui, ils l'intriguait, elle commençait à comprendre leur signification, chacun incarnait un rôle bien précis, et reflétait les mœurs de son univers.

Il n'était pas évident de passer les hivers en cette époque, et la majorité de la population peinait à passer celui là.... Les famines qui avaient rongé le pays quelques années auparavant ne facilitaient pas les choses, pourtant, chacun s'efforçait de maintenir chez soi le confort nécessaire: une paillasse, un feu, et de la nourriture chaude. Grâce aux offrandes que les habitants donnaient, et les cultures faites au temple, Fuyu et son père pouvaient avoir de quoi tenir. Mais les journées étaient longues, et malgré la sérénité et le calme qu'apportait les retombées glacées de l'hiver, les tâches à accomplir se faisaient de plus en plus difficiles chaque jour. Même si l'air était calme, et le vent endormi, le froid était mordant et tenace, et les travaux les plus simples demandaient plus d'effort. Mais cela était, cela est, et cela sera toujours.  Peu importe la saison ou les difficultés rencontrées, Fuyu restait toujours dans le droit chemin et était dans l'acceptation. Garder son sang-froid et la tête haute étaient primordial. Et depuis quelques temps son père, paraissait étrange, silencieux, plus qu'à l'ordinaire, comme si une lourde inquiétude l'envahissait. Elle se leva et décida d'aller lui parler, et comme elle l'espérait, il se trouvait dans le bâtiment réservé au zazen. Il était assit là, au centre de la pièce, les portes étaient ouverte vu que le vent ne s'était pas encore levé, et des cierges éclairaient la salle d'une lueur pâle mais réconfortante. Elle retira ses geta à l'entrée du temple, mis ses chaussons, et s'approcha doucement de son père pour ne pas le perturber. Un long silence s'installa, et elle le regarda méditer à la lueur des petites flammes dansantes posées sur l'autel, et tout autour de la pièce. Au bout de plusieurs minutes, Fuyu pris la parole.

"- Qu'avez-vous Père ? S'essaya-t-elle, en espérant quelques réponses réconfortantes. Cela fait plusieurs jours que vous ne quittez pas cet endroit, et les moines sont inquiets à votre sujet.

Il ne répondit pas. Il resta là, à genoux, les yeux fermés, en pleine réflexion. Ses longs cheveux noirs étaient remontés en chignon sur le haut de sa tête, et son hakama, blanc et pur comme la neige qui tombait au dehors, flânait autour de lui sur le sol du temple. Il était en train de murmurer, de psalmodier pour lui-même. Une légère brise glacée vint perturber le rythme régulier des flammes des bougies, et Hideyoshi arqua un sourcil. Il ouvrit les yeux et se retourna lentement vers sa fille.

- Ne t'inquiète donc point comme cela, ne soit point accabler par mes inquiétudes. Mais ta foi et ta générosité sauront te guider. Mon esprit n'est point tourmenté, et le mauvais œil n'est pas sur nous. Heureux ici, heureux au-delà, l'homme droit est heureux. Sereinement joyeux, il est comblé de félicité en contemplant ses bonnes actions. Tu n'as aucune raison de t'inquiéter de la sorte. Mais prends garde aux esprits, bon ou mauvais tu ne peux déceler leur véritables intentions, alors évites les.

- Bien Père. Vos paroles ont su me réconforter, et me vont droit au cœur. Votre bonheur m'atteint profondément.

- Je dois m'absenter dès demain pour une durée que je ne saurai dire, des gens ont besoin de mon conseil au temple de Iwahogi, des choses étranges se passent là-bas. J'essaierai d'être de retour dans deux semaines. Je partirai à l'aube.

- Très bien. Je serai levée dans tous les cas, je serai présente pour votre départ."

À peine eut-elle finie de parler, qu'Hideyoshi était de nouveau plonger dans une profonde méditation, et rien ne pouvait le perturber.

La nuit vint à tomber, et Hideyoshi n'avait toujours pas bouger. Fuyu, épuisée, décida d'aller prendre un bain aux onsen. Le froid était encore plus mordant que pendant la journée, mais la sensation de bien-être quand elle entra dans l'eau chaude ne lui parut que plus intense. Tout son corps se détendit d'un coup, et elle se laissa bercer par les ondes qu'elle produisait, ainsi que par les volutes de vapeurs s'échappant du bain. La neige continuait de tomber avec paresse, et disparaissait instantanément dans l'eau bouillante du bain. Elle pensait à son père qui allait partir le lendemain, comment allait-elle gérer le temple sans lui ? Serai-t-elle à la hauteur ? Temps de questions se bousculait dans son esprit déjà tourmenté.

Plusieurs minutes avaient passé, peut-être bien des heures, les vapeurs lui montaient à la tête et se sentit soudain aspirée.  D'un seul coup elle se retrouva dans le noir total. Elle suffoquait et ne savait plus où elle était. Les ténèbres l'encerclèrent, la faisant toute petite au milieu d'un univers inconnu. Son esprit divagua, et elle se sentit emportée dans un flot mystérieux. Des voix lui parvenait, mais elle n'arrivait pas à en saisir le sens ni même à comprendre qui parlait, ou encore d'où cela pouvait venir. Ce moment paraissait durer une éternité, la pression se faisait de plus en plus fort, pas seulement sur ses poumons mais aussi sur son corps, comme si des milliers de main essayaient de l'attraper, et de l'entraîner vers des profondeurs inconnues. Au milieu des ténèbres, jaillit une pâle lueur qui semblait l'appeler, comme un murmure dans le noir, et elle aperçut une silhouette. À première vue la silhouette semblait humaine, mais elle ne pouvait en être sûre. La lumière semblait être de plus en plus forte, et elle se sentit comme pousser vers le haut, propulsée hors de cette étrange dimension. Elle se releva d'un seul coup, son étreinte relâchée, et ouvrit doucement les yeux. Elle était allongée sur son futon, dans sa chambre, quelques bougies avaient été allumées, et la fenêtre était légèrement entrouverte. Elle scruta la pièce, le calme régnait et il n'y avait dans la pièce, qu'elle et son ombre dansante sur le mur de la chambre, projetée par la faible lumière des bougies. Pourtant, elle sentait quelque chose de désagréable autour d'elle, une aura qu'elle n'avait jamais senti auparavant. Ce n'était ni bon ni mauvais, mais elle resta tout de même sur ses gardes. Elle regarda à nouveau autour d'elle et elle trouva un objet auquel elle ne s'attendait pas: un masque, un masque représentant une geisha, la peau très blanche, et un sourire malicieux sur les lèvres. Comment cela était arrivé là ? Son esprit, si pure qu'il pouvait être, ne pouvait résister à la curiosité de savoir ce dont il s'agissait, et surtout d'où cela provenait. Mais cet évènement l'avait épuisée, les ténèbres l'envahirent de nouveau, et elle sombra dans un profond sommeil.

 

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Nanouchka
Posté le 22/06/2023
Bonjour Paulcast,

Tu as choisi un univers intrigant pour situer ton histoire. Est-ce que tu es passionné par le Japon ? Tu dis que tu t'inspires de films et livres pour l'écriture : lesquels ?

Le dialogue gagnerait selon moi à être plus fluide, plus parlé : en l'état, il fait un peu littéraire, ampoulé, ce qui m'éloigne des personnages.

Je n'ai pas relevé les coquilles, mais il y en a un petit paquet, donc peut-être ça vaudrait le coup que t'investisses dans un correcteur d'orthographe et grammaire ? Au moins le temps de prendre les bons réflexes. Ça m'aide beaucoup d'avoir un correcteur qui me pointe mes fautes, j'ai tendance à ne plus les faire après.

Bon courage pour la suite ♥
paulcast99
Posté le 22/06/2023
Bonsoir!
Effectivement! Et bien les films de Kurosawa, Ozu et Miyazaki et quelques anime contemplatif. Je lis quelques romans sur le Japon féodal ou dans l’époque Edo, autour de l’animisme etc et quelques bouquins sur l’art de vivre japonais et leur histoire. Celui qui m’a le plus inspiré est Mémoire d’une geisha de Arthur Golden! A lire absolument!

Pour la suite je ferai attention, je reverrai tout ça en temps voulu (surtout quand j’aurais le temps)!
Merci pour tes retours et tes conseils!

Merci beaucoup et bonne continuation 😁
Hortense
Posté le 03/06/2023
Bonjour à toi,
Tu retranscris très bien cet univers un peu fermé et mystérieux de ce temple. On imagine une atmosphère d'hiver un peu brumeuse avec quelques flocons qui volètent. Le silence règne en maître et le temps semble s'étirer à l'infini. J'arrive très bien à visualiser la scène.
On sent que tu possèdes une certaine maîtrise du sujet, et que tu nous invites à pénétrer un monde de légendes et de fantasmagorie .
Quelques répétitions ici et là, quelques coquilles et quelques suggestion... Que de quelques !!!

- Petite, les masques l'avait toujours effrayé, mais aujourd'hui, ils l'intriguait : l'avaient toujours effrayée... ils l'intriguaient
- qu'apportait les retombées glacées de l'hiver : qu'apportaient (ce sont les retombées...)
- Mais cela était, cela est, et cela sera toujours : je ne mettrais pas le "mais" et je simplifierait : cela était et cela serait toujours ainsi ou quelque chose du genre.
- Il était assit là : il était assis
- les portes étaient ouverte : ouvertes
- et Hideyoshi arqua un sourcil : le "et" n'est pas nécessaire
- Mais ta foi et ta générosité sauront te guider : je supprimerais le "mais" et je placerais "ta foi et ta générosité sauront te guider" en conclusion du paragraphe.
- ne soit point accabler : accablée
- À peine eut-elle finie : fini
- Son esprit, si pure qu'il pouvait être : pur
A bientôt
paulcast99
Posté le 03/06/2023
Coucou ! Je suis très content que cela t’es plue et transportée! J’espère que la suite te plaira!

Merci énormément pour ton retour, je ferai une vérification pour les fautes et les répétitions!

A très bientôt !
Gaëlle N Harper
Posté le 07/05/2023
Les descriptions du début sont très belles ! L'ambiance est bien posée, on rentre facilement dedans.

J'ai pas contre l'impression que, si tu as lu et relu attentivement la première moitié, ton attention s'est relâchée ensuite (c'est normal !) : outre les coquilles, les phrases semblent moins travaillées.

Mais vu la qualité du début, je pense que c'est seulement une question de quelques relectures attentives :)

En tout cas, tout ceci est intrigant et j'aime particulièrement l'ambiance de cette région à cette époque (qui se prête très bien aux histoires de fantômes) :)
paulcast99
Posté le 08/05/2023
Merci beaucoup pour ton retour! J’ai effectivement quelques problème d’attention vis à vis de la relecture et d’impatience également sur le fait de poster rapidement mes écrits je prendrais plus de temps à l’avenir ;)
Merci beaucoup !
Gaëlle N Harper
Posté le 08/05/2023
Sinon tu peux tricher et commencer tes prochaines relectures à la deuxième moitié X)
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