Schizo

Je fus diagnostiquée schizophrène, et si je ne suis pas entièrement que ça et critique les étiquettes, j'accepte peu à peu cette façon de voir les choses. La maladie est bien réelle. Rien ne sert de la nier. Les empêchements et symptômes négatifs sont plus présents que les hallucinations, de plus en plus rares. Aujourd'hui, je témoigne et tire leçon de ce que j'ai pu vivre et éprouver. Je fais partie d'une association dans laquelle la pair-aidance est centrale: c'est le pivot de mes relations. Cela me permet de sortir de mon isolement. Je n'ai plus honte de dire que je suis schizo.

J'arrive à réaliser malgré tout certaines choses qui font sens pour moi, et je suis fière des petites victoires que je récolte sur mon chemin.

Foucault dénonçait les lieux d'enfermement comme les asiles et les prisons, mais la pire prison c'est soi. J'essaye de m'ouvrir aux autres et de voir que les possibles sont encore à explorer. Je m'appuie sur mes ressources et l'écoute musicale quotidienne m'aide à mieux traverser mes journées. Je deviens de plus en plus mélomane.

Mais pour en revenir à la maladie psychique, je peux dire que j'ai beaucoup souffert et que je souffre encore parfois. Il est dur d'avancer quand on a conscience que réaliser les plus petites tâches est un calvaire et vite une montagne! Je progressais bien davantage fut un temps! Régression?

Mon sentiment de solitude est en partie comblé par mes rencontres. Mais, je suis célibataire et n'ai pas beaucoup de contacts familiaux, contrairement à d'autres. Je relativise et philosophe.

Ma schizophrénie n'est pas si évidente que cela dans le sens psychanalytique du terme. Et je me stabilise par mon traitement, ce qui paradoxalement masque certains symptômes et rend difficile le diagnostic. Je crois malgré tout à des choses erronées, tout en restant lucide.

Lorsque le délire a éclaté et que j'ai déclenché ma psychose vers mes trente ans, y'a un moment où je fus pas mal parano. Cela me fait penser à la chanson de la Tordue, mais dans ma réalité d'autrefois, tout était orchestré de façon malveillante. J'étais persécutée par les Autres. J'étais devenue quelqu'un d'important qui était sur écoute et dont des mains invisbles me manipulaient. Une vraie marionnette. J'ai cru que la CIA voulait me recruter. Mais cela n'a pas duré longtemps, heureusement.

Schizo, je fus. Schizo, je resterais. Schizo, je suis. Schizo?

Cela est-il la conséquence du trauma, je ne saurais le dire avec exactitude. Mais les deux me semblent liés.

Je garde espoir et continue le travail que je fais sur moi. La psychanalyse m'est précieuse. Rechercher les causes permet de mieux expliquer et comprendre, et évite les malentendus. Dire aux autres que ma folie n'est qu'une partie de moi-même, et que je suis capable de vivre normalement peut rassurer certaines personnes.

Schizo, mais pas seulement...

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Liné
Posté le 21/08/2023
Je me baladais gentiment dans tes textes et mes yeux se sont tout de suite arrêtés sur le titre "schizo". C'est une maladie qui me concerne aussi (ma mère est schizophrène), c'est la première fois que je lis les mots d'une personne touchée par cette maladie. Donc bravo à toi, et merci.

(PS : j'espère que tu ne m'en veux pas trop d'avoir lu ce chapitre pour commencer tes textes, sans avoir lu les précédents !)
anapoesis
Posté le 21/08/2023
C'est bien naturel de commencer par lire ce qui nous touche de près. Merci à toi.
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