Mon nom est Rhulyan, je suis ce qu’on appelle une sirène grise, ou sèche, c’est-à-dire que je n’ai jamais connu la mer, pour dire vrai je n’ai jamais su nager. J’ai grandi dans la capitale de Fleursang, Naurore. À ma naissance, ma mère est morte et j’ai été recueilli par un des plus brillants esprits de la grande université, Eïntir. J’ai été formé comme son assistant, mais il a plus été un père pour moi qu’un patron. C’était un éminent cartographe et aussi un des premiers chercheurs en matière de magie. Eïntir était un géant, comme la majorité de la population de Fleursang — il y avait eu beaucoup d’elfes à un moment, mais ils sont partis il y a très longtemps pour fonder la ville de Cyanazur à l’ouest.
Il faut que je rappelle quelques choses sur Fleursang et les géants en général, vu que la majorité des personnes qui vont lire ces notes n’ont jamais entendu parler ni de l’un ni de l’autre. C’est un immense pays, et à mon sens le plus beau du continent ; le relief y est plutôt montagneux et il est d’ailleurs bordé à l’est par la chaine de montage qu’on nomme plus généralement « les montagnes ». On y cultive exclusivement l’amarante rouge, une herbacée qui est la nourriture principale des habitants. Beaucoup de personnes pensent que c’est à cause des gigantesques champs qui recouvrent les paysages que le pays s’appelle Fleursang, mais c’est pour une raison beaucoup plus tragique. En fait, la race des géants est la race qui a la plus grande longévité, beaucoup plus grande que les nains des plaines. Pour dire vrai, personne ne sait combien de temps vit un géant, car aucun géant n’est jamais mort de vieillesse. Malheureusement, leur mémoire exceptionnelle et leur esprit brillant s’accompagnent de ce qu’on appelle la malédiction des géants. Ils sont extrêmement pessimistes et fragiles mentalement. Ils sont tellement sensibles à la dépression et à la mélancolie qu’il s’est développé dans leur communauté une véritable culture du suicide. C’est de là que vient le nom de Fleursang. Mais malgré leurs penchants sombres et leur alcoolisme, ça ne les a pas empêchés de construire la civilisation la plus avancée et la plus riche du continent. L’intelligence supérieure de cette race a transformé ce pays et ses grandes villes de sorte qu’en y entrant on se croirait dans un autre monde. Il faut dire que la passion des géants qui peuplent Fleursang pour la science, le classement et la compréhension est tout à fait stupéfiante.
Et le paroxysme de cette passion, c’est la grande université de Naurore, le centre névralgique de la science des géants qui regroupe tous les plus brillants esprits de ce pays. Elle est dirigée par un général qui est assisté de quatre lieutenants généraux, ceux-ci ont la responsabilité d’une dizaine de Généraux-majors et chacun d’eux gère deux généraux de département. Dans chaque département on retrouve les étudiants et les professeurs. Eux aussi sont répartis par grades : les professeurs sont divisés par ordre décroissant d’importance en colonel, en lieutenant-colonel et en major. Et leur rôle est d’enseigner aux étudiants qui peuvent eux aussi avoir des grades qui sont, par ordre décroissant d’importance : le capitaine commandant, le capitaine, le lieutenant et le sous-lieutenant. Ensuite tous ceux qui n’ont pas de grades sont de simples étudiants qu’on appelle formellement des soldats. Évidemment aucun d’entre eux ne se bat, leur seul but est de continuer la tâche infinie de la connaissance qu’ont commencée les géants en créant la ville de Naurore et qui n’a fait que proliférer depuis sa naissance.
Eïntir était donc le général-major du général de département de cartographie et du général de département de magie qui était tout récent à mon époque. Et c’était évidemment un expert dans ces deux domaines. Pour ma part j’ai été pendant très longtemps un simple soldat, j’ai réussi à me distinguer pendant mon cursus et à me faire élire lieutenant — j’étais le référent d’un petit millier de soldats qui passaient par moi pour toutes questions ou requêtes. Puis à la fin je suis devenu professeur de culture géographique des Iles du sud-est — que voulez-vous, on est sirène ou on ne l’est pas — avec le grade de Major. Et c’est à cette époque qu’Eïntir est venu me demander de l’accompagner dans sa folle expédition. Il avait entendu par quelques nains qu’il y avait une terre au-delà des montagnes, alors que nous imaginions que ce n’était qu’une grande étendue d’eau, et il voulait que je vienne avec lui, car en plus d’être pratiquement son fils adoptif, mon expertise en culture géographique permettrait certainement de faire un papier tout à fait intéressant sur le sujet. Le voyage était long, dangereux et embrumé dans l’inconnu, puisque le chemin qu’Eïntir nous avait défini n’avait jamais été emprunté. C’était son côté géant qui demandait absolument à donner un nom à quelque chose. J’ai accepté sans aucune hésitation.
Après un mois de préparation, quelques semaines pour obtenir les autorisations du lieutenant général et quelques jours pour rassembler des informations et établir l’itinéraire exact, nous nous sommes retrouvés, Eïntir et moi, dans le petit village de Cruelueur. Notre but était de rentrer à l’intérieur de Ferveine et utiliser les ascenseurs qui s’y trouvaient pour sortir près du sommet. De cet endroit, il nous suffisait de suivre la crête entre Ferveine et Grêlgrès — les deux plus hautes montagnes du continent — jusqu’à un village de nains des plaines appelé Grèlierre. Et à partir de là c’était l’inconnu complet, la documentation que nous avions sur ce hameau était très faible et datait d’il y a très longtemps — un étudiant qui avait fait un papier sur les nains des plaines. De plus, aucune cartographie n’avait été faite après ce village, il nous faudrait descendre la montagne. Et même si nous y parvenions, il nous faudrait alors tracer notre chemin sur cette nouvelle terre. Nous comptions beaucoup sur les informations que nous pourrions trouver sur place.
Pénétrer dans Ferveine était assez simple, Eïntir connaissait bien les nains qui vivaient à l’entrée, le plus compliqué était de trouver un ascenseur, car ceux-ci sont très peu utilisés et la plupart du temps en très mauvais état. Après avoir marché une demi-journée, nous sommes arrivés devant la gigantesque porte d’acier, incrusté sur le flanc de la montagne. Mon maître y frappa à trois reprises de son poing qui devait faire trois fois la taille de ma tête. Les gonds vacillèrent et l’écho des coups portés sur le métal continua de résonner après plusieurs secondes. Trois nains nous accueillirent rapidement, ils avaient l’air de connaitre Eïntir et ils nous installèrent dans ce qui devait s’apparenter à une auberge à l’intérieur de la montagne. On nous expliqua qu’un ascenseur encore en état de nous faire monter se trouvait à une journée de wagon d’ici et qu’il était préférable que nous soyons bien reposés pour ce trajet.
Après une nuit d’un sommeil relatif, nous étions dans les fameux wagons, partis pour dix heures d’un trajet tout simplement horrible, debout à s’agripper à une barre de fer branlante afin de ne pas tomber. Effectivement il fallait mieux être reposé, chaque tournant et chaque secousse pouvait vous faire quitter le ridicule panier à vapeur et nous précipiter dans le vide. Évidemment c’était beaucoup moins problématique pour les nains dont la tête dépassait à peine, et qui pouvaient s’allonger de tout leur long pour dormir — oui ils parviennent à dormir dans ces conditions. Ce fut vraiment compliqué pour Eïntir qui était réellement trop grand pour le chariot, mais je ne m’en sortis pas plus mal, car je réussis tout de même à vomir une petite dizaine de fois sur le trajet. Nous sommes arrivés à destination, et les trois mètres que j’ai dû parcourir du wagon jusqu’à la porte de l’ascenseur ont été les plus laborieux de toute ma vie. Nous avons profité du long moment qu’il prit pour nous amener à la surface pour reprendre nos esprits et finir de rendre nos petits déjeuners.
Donc l'écriture : toujours agréable à lire, même si parfois, certaines phrases cassent un peu le rythme. Elles sont complexes ou délivrent beaucoup d'info (l'histoire des grades par exemple, le mot "général" ou "généraux" est répété) à la fois. Peut-être distiller un peu plus ?
Pas d'autre remarque, des bisous !
El
PS : fofo is back