Un procès sans bavure

Un Procès sans bavure

La genèse de l'histoire : un pacte avec le diable.

Un soir que j'étais sorti avec mon chien et mon désespoir, je me suis trouvé confronté à un choix manichéen : donner mon âme à Dieu ou la vendre au diable. J'avais un besoin impérieux d'argent, j'ai donc pactisé avec Satan.

Pour fêter notre alliance, j'ai aussi pastisé avec lui. Alors que nous étions ivres tous les deux il m'a dit : "Christian, écris-moi une histoire !"C'était une prière ; alors, une prière du diable, mon Dieu, ça change !

Cette histoire, je l'ai écrite. Elle commence et se termine comme un conte pour enfants..., enfin, presque. Elle s'intitule Un Procès sans bavure. Depuis, j'ai appris que Satan ne paie jamais rien. Vendez-lui votre âme et il vous la rendra en horreur et en souffrance. Mais Dieu, Allah et les autres ne font pas mieux.

 

L'histoire : un procès sans bavure

Il était une fois un homme qu'on accusait d'infanticide. Il se nommait Bertrand Rochefort et entamait sa détention préventive lorsque Muriel lui rendit sa première visite en prison.

La jeune avocate n’avait aucune envie d’assurer la défense d’un tueur d’enfant. Elle aurait préféré, pour son premier grand dossier, une affaire plus facile, moins sordide en tout cas. Maître Muller, son patron, lui avait rappelé fermement, que d’une part, en droit français un suspect est présumé innocent tant qu’on n’a pas prouvé sa culpabilité et que d’autre part, un avocat est choisi par son client et non l'inverse.

Aussi, chaque semaine, Muriel s’entretenait avec Rochefort et rapportait les notes recueillies à son patron qui l'épaulerait jusqu'au procès.

Au début, horrifiée par les faits dont son client était accusé, elle pénétrait dans la prison avec une appréhension palpable, un malaise auquel les années d’études de droit ne préparent pas. Le comportement et les propos de Bertrand Rochefort la déconcertèrent souvent. Il possédait une personnalité à tiroirs d’une complexité que Muriel jugeait malsaine. Tantôt secret et glacial, tantôt affable et volubile, il ne laissait jamais rien deviner des raisons de ces fluctuations d’humeur. L'idée que se faisait la jeune avocate de la personnalité de son client reposait sur plus de non-dits que d'épanchements.

Muriel n’ignorait pas que les conseils de Maître Muller, aussi brillant avocat fût-il, ne suffiraient pas à lui faire gagner le procès. D'ailleurs, au fond d'elle, avait-elle vraiment envie de faire acquitter son client ? Elle savait aussi que de la sincérité de ses entretiens avec Rochefort dépendait la qualité de sa défense, et elle mit tout en œuvre pour gagner sa confiance.

Après quelques mois, les rencontres qu’elle redoutait lui furent moins pénibles. Le fait que Rochefort soit coupable ou innocent semblait ne plus la concerner. Elle assurerait sa défense sans état d'âme. À quelques semaines du procès, Muriel se surprit à s’impatienter de sa visite à Fresnes. Elle en fut troublée, mais justifia cela par le fait que de quasiment conflictuelle au début, sa relation avec Bertrand – elle avait bien pensé Bertrand –, avait désormais des allures de connivence, et qu’elle dépassait parfois, et de plus en plus fréquemment, le cadre de l’affaire qui les avait réunis.

Après un procès sans bavure comme on en vit rarement en assises, et une plaidoirie remarquable de la jeune avocate qui suscita l’admiration de Maître Muller, le jury acquitta Bertrand Rochefort.

Quelques jours plus tard, libre cette fois, il rencontra Muriel ; puis ils se revirent une seconde fois la semaine suivante ; puis une troisième fois. Cela dura…

Puis ils se marièrent… et tuèrent beaucoup d’enfants.

 

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Fannie
Posté le 15/02/2018
Re-coucou,
Oh ! Là, ton humour caustique bascule dans l’humour noir.
Ce criminel n’aura pas seulement réussi à endormir le sens moral de la jeune avocate, mais il l’aura même gagnée à sa cause… et à son passe-temps favori. Après tout, il n’a peut-être rien fait d’autre que réveiller en elle une tendance latente.<br /> Quoi qu’il en soit, c’est toujours un plaisir de lire tes nouvelles, d’en savourer les tournures et le choix des mots.
Quelques détails :
et débutait sa détention préventive [débuter est intransitif ; voir ici : http://academie-francaise.fr/debuter-demarrer]
aussi brillant avocat soit-il [en tant que grande amatrice du subjonctif imparfait, je vois ici une occasion manquée pour « fût-il »…] ;-)
et une une plaidoirie remarquable de la jeune avocate [il y a deux fois « une »]
Christian
Posté le 15/02/2018
Merci fannie d'être passée voir mes textes.
Oui, cette fois, j'ai basculé dans l'humour noir. Lorsqu'une idée me vient, je me censure rarement.
Merci également pour ces corrections. 
Je te conseille la lecture de ce livre numérique, mais tu le connais peut-être déjà : http://ebook-gratuit-francais.com/ebook/bouissiere-bar-du-subjonctif/
À bientôt.
 
 
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