Les journées s'éternisent. J'ai dans les yeux la marque indélébile des larmes d'autrefois. J'ai beau y mettre des gouttes, consulter tous les médecins du monde, il n'y a aucun remède pour me soulager. J'ai peur de l'avenir, du futur proche et de tout ce qui, de près ou de loin, serait susceptible de m'affecter. Alors, impuissante, j'attends. Mon être entier brûle et se consume, comme si Satan s'en emparait chaque minute où j'ai le malheur de penser de travers. Le matelas me détruit le dos, les cachets me retournent l'estomac, le papillon s'attaque à mes neurones et plus encore. Je suis prédestinée à mourir, le compte à rebours enclenché et l'épée de Damoclès au-dessus de la tête.
Pour ne plus y songer, je me jette dans les bras de Morphée, cette créature aussi douce que les nuages sait parfaitement comment me faire chavirer. Hélas, dépourvu de compassion, lui aussi se lasse de moi et, lorsqu'il m'abandonne aux rayons du soleil, ma peau brille et s'enflamme dans l'illusion d'un vampire à découvert. J'ai longtemps cherché la solution, comment immortaliser le sommeil, les moments de tendresse où ma figure n'effraye personne d'autre que la nuit et ses grands airs. Mais je ne peux rien y faire. Dans le meilleur des cas, les anges m'accordent une courte visite. Je leur demande où est mon fils, s'il est beau, plus radieux que moi et mes questions tiennent compagnie au silence tandis qu'involontairement, je m'endors.
Il est dix-sept heures passées. Le travail est terminé, je ne suis pas en avance. Ça ne me ressemble pas de terminer si tard. A la maison, quelqu'un m'attend et je ne voudrais surtout pas le décevoir. J'aime Sam, le seul à regretter mes absences, mes mutismes, celui à qui je m'offre tout entière, ces parenthèses insoupçonnées, l'obscurité et nos murmures. Il connaît chaque subtilité de mon visage, supporte la moindre de mes contrariétés. Avec lui, j'ai l'impression d'exister, d'avoir un nom, une identité. Je lui dois mon existence.
Je me souviens de ces deux pas sur le plancher avant de m'effondrer. Dans ma chute, mon crâne a heurté le mur. J'ai sauté un repas, enfin, je pense, car il m'arrive d'être si confuse que je ne sais même plus ce que je fais. Tout est fini. Il est trop tard désormais, je ne trouverai plus la force de me lever, même si je le voulais. Cependant, je suis interminablement vivante. Je vis et j'ai mal d'en vivre, mes membres ne répondent plus, le papillon cogne trop fort, arrache mes tempes, pulvérise mes pupilles, me déboîterait la mâchoire s'il s'en sentait capable. Il est en moi, il ne me quittera pas. Et, en même temps, que pourrais-je lui reprocher ? Nous étions si solides autrefois...
Mes pensées s'évaporent, une chaleur douce m'enveloppe de sérénité, Sam me porte sur le lit, étend la couverture et recouvre mes épaules dénudées. Il ignore que j'ai mal, que je me sens toute cassée de l'intérieur et, par crainte de le bouleverser davantage, je fais semblant de dormir profondément. Morphée m'attend de l'autre côté et m'accueille avec affection. Je devrais avoir honte de cette infidélité, mais ce n'est pas de ma faute, car les monstres ne connaissent pas la pitié.
En termes de stylistique, c'est toujours aussi beau. Cependant, étant donné la taille du chapitre précédent, la courtesse de celui-ci me donne une sensation d'être bancale et c'est exacerbé par le fait que l'histoire est courte, donc les différences de chapitre se remarquent d'autant plus. Dans ce chapitre, l'histoire avance relativement peu, c'est peut-être ce qui manque. peut-être devrais-tu transférer certains détails du chapitre 1 au chapitre 2 ? (ce qui pourrait rejoindre ma suggestion de garder un peu plus longtemps le mystère autour de la fausse couche... 0:-) )
J'ai trouvé les deux derniers paragraphes un peu trop désolidarisés du reste du chapitre, comme si une transition avait été oubliée à cet endroit-là.
Je fais pas mal de remarques ""négatives"" mais elles sont entièrement subjectives et cela ne signifie aucunement que ce que tu écris est nul, au contraire. J'ai hâte de voir ce que tu réserves pour la conclusion !
Plein de bisous
Je vois ce que tu veux dire par le côté désolidarisé des paragraphes et je pense que tu as tout à fait raison de le souligner. D’un côté, je t’avoue que j’ai une tendance à écrire de façon « saccadée » et parfois, je n’arrive pas à combler les vides comme c’est le cas ici. Mais en même temps, ça permet aussi je pense de ménager un peu le suspense et de renforcer la tension.
L’idée qu’elle trompe son mari avec le sommeil est singulière.
Coquilles et remarques :
— Je vous l'avez promis (Notes) [l’avais]
— lui aussi s'ennuie de moi et [Quand on s’ennuie de quelqu’un, c’est qu’il nous manque ; il me semble que tu veux plutôt dire qu’il se lasse d’elle.]
— celui à qui je m'offre toute entière [tout entière ; ici, « tout » a valeur d’adverbe et dans ce cas de figure, il s’accorde uniquement au féminin devant un nom qui commence par une consonne (sauf le h muet)]
C'est toujours aussi bien écrit. Par contre, c'est moi ou le chapitre et plus court? Dommage.
Je trouve qu'on a pas beaucoup avancé dans le stade de la douleur. Juste un espoir semble apparaitre, Sam. est-il suffisant?
On voit un volet douleur, espoir... et?
Hâte de voir et de comprendre la fin.
Merci pour ce nouveau message. Non, le chapitre est effectivement plus court et au risque de décevoir, le prochain (et dernier) sera de la même longueur :-/
Je commence à craindre un peu que cette "histoire" déplaise ahah. Car je me rends compte que j'aurais sans doute dû clarifier certains points dès le début.
Peut-être que couper la nouvelle en trois parties n'était finalement pas une bonne idée (du moins, il aurait fallu tout faire lire d'un coup). Je me pose la question et en même temps ta réflexion m'intéresse, parce qu'elle me permet de me remettre en question et de m'aider à avancer ! Je prends donc note des remarques et t'en remercie :)
J'espère que la fin te satisfera !
En revanche, je le trouve court, ce chapitre (ça, c'est mon instabilité de lectrice) : je pensais qu'on pourrait avancer un peu, apporter des éléments nouveaux. Le premier chapitre m'avait marquée, pour l'écriture mais aussi pour le thème de l'enfant mort - là, j'ai l'impression qu'on continue d'évoquer la souffrance de la mère, mais sans ajouter beaucoup plus que ce que l'on savait déjà (elle souffre).
Après, tu veux sans doute montrer cette souffrance en tant que telle, sans forcément d'intrigue à proprement parler (ce qui est un très bon choix !). Mais comme tu sépares ton histoire en trois volets, j'ai pensé que chacun de ces volets apportait sa pierre à l'édifice (la faute à la publi par chapitre, peut-être ?).
Bref. Ceci n'est paaaas du tout un commentaire négatif, bien au contraire : j'en demande plus parce que j'aime beaucoup :-D
Merci pour ce petit retour ! Je comprends tout à fait ta frustration et ça m'a d'ailleurs fait sourire parce que c'est un peu ce que je recherche :p
Il n'y a, en effet, pas de réelle intrigue (quoique...) A l'origine cette nouvelle devait être lue d'une traite, malgré les trois moments, ici regroupés en chapitres. Donc je pense que ta réaction est tout à fait normale parce que moi-même, je n'avais pas prévu de telles coupures.
Sois néanmoins rassurée, chaque volet apporte bien sa pierre à l'édifice et tu comprendras, je l'espère lorsque j'aurai publié le dernier chapitre. J'ai passé beaucoup de temps à écrire ce texte et la construction a vraiment une importance. Dans le fond, néanmoins, c'est vrai que ça n'avance pas beaucoup, mais c'est une écriture qui me plait et qui me vient plus ou moins naturellement.
Comme tu le vois, je ne prends pas du tout mal ton commentaire. Je suis justement venue ici pour avoir des avis constructif comme celui-ci :)
(Ah et...je suis toujours en train de te lire mais à allure escargot ! J'espère pourvoir te faire un retour le plus vite possible ^^')