Il y a de cela 15 ans, j'arpentai pour la première fois les royaumes mortels. C'était durant un été orageux. Les plaines étaient inondées, le ciel portait un drap noir et brumeux.
Mêlé aux bêtes sauvages, je visitais furtivement les vallées et villages. Jusqu'aux premières feuilles mortes, j'observais dès l'aurore leurs étreintes, leurs rires, leurs chagrins, leurs conflits. Curieux, je les regardais, perché sur les chênes, les hêtres et les frênes.
Je portais pour leur doux visage une profonde affection, pour chacun d'entre eux. Pourtant, sous mon manteau ombreux, je n'osais les approcher davantage.
Lors de ce premier automne, je découvris la froideur qui chantonne. Le plaisir de contempler les feuillages de feu tapisser la terre embrasée. Un incendie de couleurs qui fit jaillir en mon cœur une amère nostalgie.
Comme je désirais rentrer. Mère me manquait. Je la voyais encore dans la lueur de l'aube.
Mais mon âme fût saisie par la beauté de la vie, celle dont j'ai été privé à cause de l'immortalité dont je jouis. L'éphémère, splendeur de la nature, qui dans ses murmures, chaque saison, annonce des jours meilleurs.