Elle était revenue , comme prévu. La faim et l'envie carnassière la firent sortir de sa sombre tanière. J'avais pu la sentir dans le changement de température, dans le changement d'atmosphère. La Lune brillait plus intensément, comme si elle voulait éclairer la scène mortuaire, et la Nature était devenue silencieuse. Muette, fut plus approprié. Comme si toute trace de vie avait disparu, attendant qu'elle reparte enfin.
Puis il y eut ce hurlement, le sien. Ou celui de sa proie, je ne pouvais pas faire la différence. Je n'avais pas peur, je savais qu'elle ne me ferait pas de mal. Un cri, encore. Puis un bruit plus sourd, comme un choc brutal. Je supposai une pierre aplatie contre le crâne de sa victime, peut-être. Quoi que ce fut, le hurlement cessa, mais elle se mit à rire. Un rire guttural, sinistre et effroyable. Celui qui ressemble aux cris d'une hyène affamée, mais en plus cruel, en plus malsain. Je l'entendis laper le sang de sa proie, puis je la vis enfin. La Succube, l'affamée, l'aliénée. Elle semblait normale, si ce n'étaient les lambeaux de chair qui pendouillaient de sa bouche, qui était maculée du délicieux liquide carmin de sa proie. Je l'observais arracher des pans de peau à même le corps de son repas, telle une bête se repaissant de son gibier. Elle se régalait, au vu du sourire pourpre qu'elle arborait. Elle lécha ses doigts, couverts du sang encore chaud de son repas.
Sa proie vivait encore, et était terrifiée, mais ne pouvait fermer les yeux sur la créature qui la dévorait. Je vis son corps convulser, mais la Succube le regarda et lui sourit. Un sourire lumineux, et machiavélique. Elle ne voulait pas qu'il meurt tout de suite, pas avant qu'elle ait ingéré ses entrailles encore chaudes. Il s'arrêta de bouger, comme apaisé. Même son regard se fit serein.
Elle se positionna sur lui, lui griffant la joue, lui lacérant la gorge, avant de l'embrasser et de lui arracher un bout de lèvre. Le sang jaillit et la Succube but à même la plaie, béante.
Je l'entendis rire, encore, de ce rire sinistre qui vous donnait envie de vous enfuir loin, ailleurs, tout en vous clouant sur place. Et elle continua sa dégustation, en creusant la joue, jusqu'à racler l'os de la mâchoire. Un bruit rauque sortit de sa bouche, lorsque l'os fut touché. De la frustration semblerait-il. Elle était affamée et avide de chair fraîche. L'ongle de son pouce déchiqueta la ligne du sternum, jusqu'au nombril. Elle incisa horizontalement et plongea la tête dans la plaie ouverte. Elle engloutit ses entrailles, comme si elle ne venait pas de dévorer la moitié du visage de sa victime. Elle mastiqua longtemps, s'imprégnant du goût du sang, le savourant.
Le corps devint froid, et passa de mets exceptionnel à cadavre fade. La Succube se désintéressa du corps mais pris soin de le laisser sur le bas-côté, pour les autres charognards de la forêt .J'étais revenue comme prévue. Impatiente et affamée.
Alors c'est peut être fait exprès mais lors de la première traque, la succube utilise une dague et là l'ongle de son pouce est suffisant. Du coup, je suis un peu perdue.
Plus sérieusement, je retrouve ici ce que j'avais bien aimé sur l'autre chapitre du même type. C'est angoissant, très rythmé et on ne passe sur aucun détail cracra, ce qui place le lecteur dans une position très inconfortable (mais dans le bon sens du terme). Le fait que ce soit raconté d'un point de vue interne renforce encore cet aspect là, on se retrouve dans la position du spectateur impuissant qui n'a d'autre choix que de regarder passivement ce qui se passe et franchement, j'aime beaucoup