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Notes de l’auteur : TW: suicide. Pour le zapper, passez au chapitre suivant.

Noah se tenait en face du miroir de la salle de bains, une lame de cutter entre le pouce et l'index. Ses mains tremblaient. Son cœur martelait un rythme irrégulier. Il pressait ses lèvres l'une contre l'autre dans une tentative de trouver le courage de passer à l'acte. Ce monde, cette vie, c'était de la merde. On allait tous crever, très bientôt. Le réchauffement climatique allait tout foutre en l'air. L'être humain avait massacré presque tous les animaux et, à présent, même les plantes crevaient, jaunies, desséchées par les fortes chaleurs puis arrachées par les inondations.

L'adolescent releva le menton, se regarda dans les yeux. Ils étaient bleus, recouverts d'un voile qui aspirait tout espoir.

Il était à bout.

Entre ses doigts, il tenait son échappatoire. Une lame neuve, effilée, classique et parfaite à la fois. Il la scruta, elle reflétait la lumière blanchâtre des LED du plafonnier.

Le temps n'avait plus d'importance. Sa seule issue, dans ce monde de merde, serait par le sang. Le sang qui s'écoule, la vie qui s'enfuit, les angoisses qui s'évanouissent.

Il se sentait seul. Seul à comprendre la réalité de ce monde hideux, seul à voir combien les adultes s'en foutaient, combien le gouvernement s'en foutait, combien les pétroliers s'en foutaient. Encore ce matin, il avait regardé les statistiques du trafic aérien. Ah ! La pandémie n'avait pas suffi. Tous ces crétins qui prenaient l'avion encore plus qu'auparavant, pour « voir tant que c'est possible, avant qu'on ait tout détruit ». Bande d'abrutis. La responsabilité est individuelle, elle est collective. Il n'avait que quatorze ans, et pourtant il le savait. Rien n'arrêterait la folie des hommes. Sa vie n'avait aucun sens. Il n'y avait que le déclin devant lui. Que la mort. Au bout du fil.

Il était temps d'en finir.

Il se regarda une dernière fois dans le miroir.

— Adieu, monde de merde.

D'un geste vif, il sectionna les artères de son poignet gauche.

Les larmes déferlèrent sur ses yeux. Toute la misère du monde se coinçait dans sa gorge, incapable d'en sortir. Il sentait un fluide chaud couler le long de sa main. Quelque part au fond de sa conscience, il sentait que ça giclait.

La vie le quittait.

Pas une fois, il ne pensa à ses parents, à ses amis.

Il était seul. Effondré. Désespéré.

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Edouard PArle
Posté le 09/11/2024
Coucou Iphégore !
Aie. Pas évidente à lire cette scène, très visuelle et bien écrite. L'image du cutter est très facile à imaginer et le moment de l'acte m'a fait serrer les dents. Les "motivations" du suicide sont intéressantes, avec des problématiques écologiques etc, je m'attendais plutôt à un truc personnel, des traumas... Mais je pense qu'on a pas encore tout découvert sur Noah. Et j'avoue que le thème de l'écoanxiété m'intéresse aussi, je suis curieux de voir comment tu vas le développer.
Sinon, tu as une très jolie plume, il y a de belles tournures. J'ai beaucoup aimé celle-ci notamment :
"Ils étaient bleus, recouverts d'un voile qui aspirait tout espoir."
Je rejoins Cleoo sur la chute, tu peux enlever les 2 derniers mots. Le "seul" termine parfaitement ce chapitre. En tout cas, on se demande bien ce qui va arriver pour notre protagoniste. Après ça, qu'est-ce qui va pouvoir lui rendre espoir ?
Un plaisir,
A bientôt !
Iphégore
Posté le 10/11/2024
Chouette ! Content que ça te plaise !
A Dramallama
Posté le 28/08/2024
Coocoo!

Alors, au 'Adieu Monde de merde', je ne sais pas pourquoi mais ça m'a fait penser à Orin de Parks and Recs et j'ai pas pu m'empêcher de rire 🙈.

J'aime beaucoup sinon, le pitch m'avait bien inspirée! Les thèmes de la destruction de notre habitat et ce qui se profile à l'horizon, c'est ma cam de manière générale. On parle assez peu de l'écoanxiété et je trouve que tu décris admirablement la spirale mentale dans laquelle cela peut embarquer quelqu'un. Hâte de lire la suite!

A Dramallama!
Iphégore
Posté le 28/08/2024
Hello ! J'ai été voir de quoi il retournait, merci pour le fou rire ! Je te souhaite une bonne lecture ;)
Libellya
Posté le 21/08/2024
Salut Iphégore !

(J'adoooore ta miniature avec le dragon 😁)

Il n'est pas facile d'écrire sur le thème de la tentative suicide et l'envie d'en finir. Mais ici, tu parviens de manière très concise, percutante et forte à nous faire éprouver les émotions de ton personnage. C'est bouleversant💗
Iphégore
Posté le 21/08/2024
Yo ! Ils sont tout choupinous, ces dragons (même si je pense que c'est une hydre). Il y a tant de talents sur Deviantart (comme ici, en fait :D )

Heureux que ça t'envoûte :) Les thèmes sont durs, mais tellement d'actualité qu'on ne peut plus les esquiver.
Cléooo
Posté le 20/08/2024
Coucou Iphégore !
Je suis ravie de pouvoir découvrir un écrit de toi :D

C'est incisif (sans mauvais jeu de mot).
En peu de mots tu partages très bien les douleurs qui l'agitent. Je peux sentir son écœurement pour le monde qui l'entoure.
Sur le fond, pour la dernière phrase, je me demande si juste "il était seul" point final ne serait pas plus impactant.

Je te fais quelques remarques sur l'écriture, si tu veux?

Dans ton résumé, tu as écrit "un adolescent se suicide sans succès" et je ne peux pas m'empêcher de me dire que c'est un non-sens. Comme de dire il l'a tué sans succès quoi.

Ensuite, "« voir tant que c'est possible, avant qu'on ait tout détruit »" -> j'ai adoré, c'est cynique, et trop vrai.

Puis "La responsabilité est individuelle, elle est collective" -> me donne le sentiment qu'il manque quelque chose à l'endroit de la virgule.

C'est tout pour les remarques ! Je file voir la suite.
Iphégore
Posté le 20/08/2024
Coucou ! Ca me fait plaisir de te voir par ici. Tu vas voir que moi aussi, je fais souffrir mes personnages, niark niark niark !

Bien sûr, que tu peux faire toutes les remarques, on est là pour ça !

Tu as raison, ça passe mieux en virant les deux derniers mots de la fin.

Je reporte la réponse au "sans succès" sur le com suivant (spoiler).

Ça me plaît, que tu aies le sentiment qu'il manque quelque chose dans la phrase sur la responsabilité, car pour lui aussi, il manque quelque chose. Il a 14 ans. Il n'a pas toute la logique du raisonnement, seulement son instinct et sa certitude.

Merci !
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