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Vers la fin de l'après-midi, Alphonse rentra avec un grand sac de champignons. Noah le regarda entrer. Il ne bougea même pas, vu que de toute manière, il ne servait à rien sans ses mains.

— Encore dedans, Noah ? Tu boudes le bon air de l'été ?

— Ouais…

— Où est Jonathan ?

— Aucune idée, je crois qu'il est parti se promener avec l'âne.

— Ah ! Bonne idée, il faut qu'il se dégourdisse un peu les pattes, ce bestiau. Ça ne tiendrait qu'à lui, il mangerait sans déplacer d'un pouce ses sabots.

Alphonse déversa sa pile de champignons sur la table, puis sortit un couteau pour les tailler.

— Comment ça se passe ? demanda-t-il à Noah.

— Quoi donc ?

— Dans ta tête.

Noah haussa les épaules. Alors, Alphonse continua à préparer ses victuailles. Enfin, Noah inspira un bon coup, puis répondit :

— Je ne sais pas, je suis paumé. Le démon dit qu'il est venu quand je regardais une vidéo. La tortue dit que j'aurais mieux fait de regarder des pâtisseries.

— Vraiment ?

— Peut-être pas avec si peu de mots.

— Caroline ne dit pas de choses comme « tu aurais dû ». Dès que tu entends des remontrances, ce n'est pas l'effet d'une bonne influence. Et ça fait trente ans que je connais Caroline, elle a une bonne influence.

— Bah elle la dispense au compte goutte, son influence ! maugréa Noah.

— Ou tu n'es pour le moment capable que de l'entendre goutte après goutte.

Qu'Alphonse ait vraisemblablement raison énerva encore plus Noah :

— Ah, ça ! Tu sais taper où ça fait mal, hein !

— C'est l'univers qui fait des cadeaux, pas moi. Tu découvres simplement la justesse.

— Eh bien ça fait mal, la justesse !

— Eh oui ! Grandir, c'est dur, même pour les adultes !

Et il rigola franchement avant de leur servir un thé accompagné de quelques biscuits. Tout en donnant la béquée à Noah, il lui dit :

— Crois-tu aux cycles d'incarnation, Noah ?

— Je ne sais plus à quoi je crois. Je ne croyais ni aux fantômes, ni aux démons, ni aux tortues ninja.

Alphonse lui ébouriffa affectueusement les cheveux. Noah fut surpris de découvrir à quel point ça lui fit du bien.

— Alors, dans une incarnation précédente, tu as dû vivre quelque chose de très similaire à ce que tu as vu sur cette vidéo. Ce qui n'aurait été qu'un spectacle distant t'a touché très intimement, à un niveau que ta conscience ne te fait pas connaître. Je peux t'emmener voir cela, tu comprendrais mieux ce qui t'arrive, peut-être. Est-ce que ça te tente ?

— M'emmener voir ? Genre, on va partir dans un nuage de fumée et remonter le temps ?

Alphonse rit à nouveau, puis but lentement son thé.

— C'est un peu ça, et pas du tout à la fois. Mais avant, il va te falloir renoncer à ton démon.