"La psychologie est la science qui vous apprend des choses que vous savez déjà en des termes que vous ne comprenez pas"
Jean NOHAIN
Un an plus tôt
S'accrocher à des faits simples. C'est ce qu'on m'avait toujours répété.
Quand l'angoisse monte, il faut s'accrocher à des faits simples et objectifs afin de calmer son esprit. On m'a fait répéter l'alphabet à l'envers, en enlevant les voyelles quand l'angoisse était trop forte. On m'a conseillé d'énumérer des nombres en les doublant, 2, 4, 8, 16, 32, 64, 128, 256, 512, l'ironie étant que passer de 512 à 1 024 m'a toujours provoqué une bouffée de stress. On m'a également conseillé de me concentrer sur ma respiration, inspirer, expirer. Cela a toujours entraîné l'effet inverse sur moi. Sentir ma respiration s'accélérer en même temps que les battements de mon cœur me terrifie, cela me rappelle que je ne suis qu'une machine avec une conscience. Cette même conscience qui se bat pour compter l'alphabet à l'envers afin de ne pas penser aux marches de l'amphithéâtre dans lequel je me trouve.
En général, ma conscience divague sur plusieurs détails amenant à l'angoisse. Pourquoi les constructeurs ont mis des espaces aussi longs entre deux marches ? Dois-je les descendre en un pas, ce qui relève d'un exploit au vu de ma petite taille ? Mais si je les descends en deux pas, ma démarche ne sera-t-elle pas étrange ? Et si je réfléchis tellement que je tombe ?
Quand mon esprit se lasse des marches de l'amphithéâtre, il passe à l'estrade et à ma future présentation. Où dois-je me tenir ? Ma voix va-t-elle trembler ? Et si je n'arrive pas à diffuser ma présentation sur l'écran géant ? Chaque question s'allonge d'une nouvelle question qui s'accompagne en général d'une nouvelle accélération de mon rythme cardiaque. Comment mon cœur a-t-il pu résister depuis toutes ces années ?
Je fus tirée de ces affreuses pensées par la voix cassante de Mr. Jarts, mon professeur référent et au passage décisionnaire de mon avenir.
- M. Preston, je vous remercie pour cette présentation. Dieu merci, nous avons encore des étudiants comme vous. Vous pouvez aller vous rasseoir. Cette nuit dormez sur vos deux oreilles, cette matière vous sera très certainement validée. Mlle. Drown, c'est à vous.
Je dois y aller, je dois me lever, je me lève. Ne pas penser aux marches, avancer, un pas après l'autre. Espérer faire un malaise plutôt que de monter sur une estrade, voici la vie que j'ai décidé de mener quand j'ai laissé un beau jour l'angoisse prendre le contrôle de mon corps. Ne jamais montrer sa peur est ma règle préférée. Je me meurs de l'intérieur mais personne dans cet amphithéâtre n'en saurai jamais rien. Un pas après l'autre. Je croise des regards amicaux, d'autres moins. Les dernières marches permettant l'accès à l'estrade se rapprochent. Un pas après l'autre. J'accède à l'estrade, garde la tête baissée, branche mon ordinateur, ouvre ma présentation, vérifie que tout est en ordre. Tout est en ordre.
Je relève la tête et m'autorise un coup d'œil général et me fais la même réflexion qu'à chaque fois. Ces gens, qui me font si peur par leurs jugements, ont intégré la Psychologie School SouthFlow ou PSSF pour la même raison que moi : ce sont tous des machines possédant une conscience qui veulent assourdir les battements de leurs cœurs. Un étudiant en psychologie humaine n'est rien d'autre qu'un humain ayant des problèmes nécessitant une psychologie. Sinon pourquoi passer cinq années de sa vie à apprendre tous les rouages de notre conscience et subconscient ? C'est sur ces pensées réconfortantes que ma présentation commença avec une voix non-tremblante et une transpiration contrôlée.
J'ai donc commencé ma présentation. Elle se portait sur un choix libre. Nous devions travailler individuellement sur un trouble mental, un syndrome pouvant affecter la vie du patient au quotidien. Je ne sais pourquoi, mon choix s'est immédiatement porté sur le syndrome de Stockholm. Ce sentiment d'attachement à quelqu'un qui nous veut du mal sans même s'en cacher. Un je-ne-sais-quoi me donnait l'impression de pouvoir comprendre. J'avais donc étudié en long et en large ce syndrome et j'avais réussi à en faire une présentation structurée, détaillée et bien fournie en exemples.
J'allais en venir à ces mêmes exemples quand M. Jarts m'a interrompu.
- Mlle. Drown, êtes vous perdue ? Vous me semblez hésitante dans vos propos. Peut-être ne maîtrisez-vous pas assez ce sujet.
Le silence se fit dans la salle. M. Jarts n'était pas le genre de professeur qui vous réconfortait lorsque vous aviez la voix qui tremble lors d'un passage oral. C'était plus le genre à le faire remarquer à l'amphithéâtre entier.
- Tout va bien M. Jarts, je me suis juste un peu égarée dans mes notes. Je peux reprendre si vous le souhaitez.
M. Jarts me dévisagea longuement avant de reprendre la parole.
- Non, je pense que cela ira pour aujourd'hui. Merci Mlle. Drown.
Le silence devint de plus en plus assourdissant. Puis des ricanements se firent entendre. Certains devaient trouver mon humiliation amusante. D'autres de mes camarades me regardaient d'un air désolé, en particulier ceux qui avaient subi le même sort que moi quelques heures auparavant.
Je commençai donc, résignée, à ranger mon ordinateur portable dans sa sacoche et comme l'on dit vulgairement, à débarrasser le plancher. Je descendis la première marche puis quelque chose me retenu. M. Jarts était peut-être un professionnel de la psychologie humaine, mais au fond toute personne dotée d'une conscience et d'un subconscient pouvait également l'être.
- M. Jarts, connaissez-vous la théorie du lapin ?
Le regard du jugement me traversa le corps de part en part. Tant pis, je continue.
- Les lapins, vous savez ces adorables boules de poils. On les adopte, on leur donne un nom mignon, on leur achète une cage puis on les met dedans.
- Nous savons tous ce qu'est un lapin Mlle. Drown. Pouvez-vous regagner votre place je vous prie.
- Je vais plutôt finir si vous n'y voyez pas d'inconvénients. Alors vous avez adopté un lapin, les jours passent et cette adorable boule de poils commence à faire partie du paysage. On y pense de moins en moins. Puis on se contente de la nourrir.
Mr. Jarts commença à s'agacer mais j'avais l'impression que rien ne pouvait m'arrêter.
- Attendez quelques mois, voir quelques années selon la solidité de votre petite bête. Attendez que ce lapin ait été enfermé dans cette cage aussi longtemps, puis ouvrez lui la porte de sa cage. À votre avis, quelle sera sa réaction ? Vous ne savez pas ? Je vais vous le dire moi, il ne bougera pas. Son cerveau aura tellement été formaté que même la porte de sa cage grande ouverte ne lui fera pas prendre conscience de sa liberté retrouvée. Il restera là, avec vous, les personnes qui l'avaient enfermé dans cette minuscule cage. Voilà là où je voulais en venir M. Jarts. N'importe qui peut être victime d'emprisonnement mental. Il n'y a pas de prédisposition génétique, de maladie mentale antérieure à avoir. Vous pourriez tous être ce lapin. C'est tout ce que j'avais à dire.
M. Jarts, bien trop choqué par cette vulgarisation scientifiqu, préféra ne pas répondre et simplement hocher la tête d'un air dépité.
Me rendant compte de l'esclandre que je venais de faire, je quitta l'estrade aussi vite que mes jambes me le permettaient. En passant devant les rangs, j'entendis une fille chuchoter à sa voisine de siège.
- Attends, elle vient vraiment de nous comparer à des lapins ?
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- Théa, c'était incroyable. J'ai cru que les yeux de Mr. Jarts allaient sortir de leurs orbites. Non vraiment, tu nous as fait une grande scène là. On va en entendre parler pendant un moment.
Je soupirai.
- Kléo, je viens de subir une des pires humiliations de ma vie et crois moi, il y avait de la concurrence. On peut éviter d'en parler. Si pour une fois tu te contentais de me ramener chez moi en te concentrant sur la route et pas mes terribles aventures.
Kléo se tourna vers moi et me fixa avec ses grands yeux noirs. Son regard de chien battu avait un impact plus élevé que la moyenne grâce à ce que la génétique lui avait donné. Sans rire, elle aurait pu faire carrière dans le mannequinat au lieu de s'engager dans cinq ans d'études à la PSSF. Mais en plus d'étre gatée par la nature, Kléo était la personne la plus amusante et dégénérée que je connaissais. C'est pour ces raisons là qu'elle était ma plus chère amie depuis toujours.
Ne voulant pas croiser son regard plus longtemps qu'il ne le fallait, je tournai la tête vers la fenêtre en admirant la beauté de ces rues. SouthFlow, abréviation de SouthFlowers, non donnée à la ville où nous habitions grâce aux nombreuses fleurs que l'on pouvait trouver sur notre chemin. J'adorais cette ville si apaisante.
- Théa si tu crois vraiment que je vais te laisser rentrer chez toi après cet oral fantastique. Non, on sort, on va au Narcissus.
Le Narcissus, venant du nom scientifique des narcisses, ces jolies fleurs du printemps, était le bar le plus en vue de toute la ville. Je m'y était encore jamais rendue.
- Dois-je te rappeler que nous avons cours de bonne heure demain matin ?
Kléo secoua la tête d'un air désapprobateur.
- Au diable ton sens moral Théa.Il n'est que 19 h et le bar n'est qu'à 500 mètres. Regarde, j'ai une place juste là.
Ces propos s'accompagnèrent d'un vigoureux coup de volant afin de se garer sur là dite place. Nous nous retrouvâmes devant l'imposant bar qui détonnait avec le reste des bâtiments de la ville. En effet, c'était le seul à ne pas être orné de décorations florales. Il m'avait toujours intrigué, mais faire la tournée des bars, c'était plus le style à Kléo que le mien.
Une fois le pas de la porte passé, je pu découvrir l'intérieur. Il faisait plutôt sombre. Le seul éclairage venait des lampes fixées sur les quatre murs ainsi que des nombreuses bougies présentes sur le bar. Le lieu était bondé mais les conversations très discrètes, de ce fait il était étrangement calme.
Je suivis Kléo jusqu'au bar en se frayant un chemin parmi les clients. Les chaises du bar étaient heureusement réglables. Une fois installée, je posa mon sac sur le bar et attendis qu'on vienne prendre ma commande.
Je ne vis pas l'ombre de l'homme qui s'installa à côté de moi. Je ne su sa présence que lorsqu'il m'adressa la parole d'une voix onctueuse.
- Dis, tu connais la théorie du bar ?
Je me retournai et plongeai mes yeux dans les siens et je le reconnus. Son regard, je le reconnu.
C'était celui du lapin.
Contente de cette suite. Je me demande où tu vas en venir. J'ai fait une petite correction juste dessous. J'espère que celle-ci pourra t'aider pour la suite.
Bien à toi,
Trisanna.
Quelques erreurs :
- Cette nuit dormait sur vos deux oreilles, cette matière vous sera très certainement validée. -> dormez
- Ces gens , qui me font si peur par leurs jugements, ont intégré la Psychologie School SouthFlow ou PSSF pour la même raison que moi. -> Ces gens, ...
- C'est sur ces pensées réconfortantes que ma présentation commença avec une voix non-tremblante et une transpiration contrôlée. -> commence
- Ce sentiment d'attachement à quelqu'un nous voulons du mal sans même s'en cacher. -> à qui nous voulons
- M. Jarts n'était pas le genre de professeur qui vous réconfortiez lorsque vous aviez la voix qui tremblait lors d'un passage oral. -> réconfortait/ tremble
- Il restera là, avec vous, les personnes qui l'avaient enfermé dans cette minuscule cage. -> l'ont enfermé
- M. Jarts bien trop choqué par cette vulgarisation scientifique qui , selon lui, n'avait rien à faire dans son cours préféra ne pas répondre et simplement hocher la tête. -> qui, selon lui
- En passant devant les rangs, j'entendis une fille chuchotait à sa voisine de siège. -> chuchoter
- Kléo, je viens de me faire subir une des pires humiliations de ma vie et crois moi, il y avait de la concurrence. -> viens de subir
- Si pour une fois tu te contentais de me ramener chez moi en te concentrant sur la route et pas mes terribles aventures. -> si pour une fois ...
- Sans rire, elle aura pu faire carrière dans le mannequinat au lieu de s'engager dans cinq ans d'études à la PSSF. -> elle aurait
- Ne voulant pas croiser son regarde plus longtemps qu'il ne le fallait, je tournai la tête vers la fenêtre en admirant la beauté de ces rues. -> son regard
- SouthFlow, abréviation de SouthFlowers, non donnée à la ville où nous habitions grâce aux nombreuses fleurs que l'on pouvait trouver sur notre chemin. -> nom donné/ peut trouver
- Que cela soit grimpant sur les murs ou dans les jardinières entretenues par ces habitants. -> La phrase sonne bizarre.
- Théa si tu crois vraiment que je vais te laisser rentrer chez toi après cet oral fantastique. Non, on sort on va au Peonis. -> Théa, ... on sort, ...
- Le Peonis, venant du nom anglais donné aux pivoines, était le bar le plus en vue de toute la ville. -> est le bar
- Je n'y était encore jamais allé. -> Je n'y suis encore jamais allée/ je ne m'y suis jamais rendue
- Au diable ton sens moral Théa, il n'est que 19 h et le bar n'est qu'à 500 mètres. -> Point après Théa.
- Le seul éclairage venait des lampes fixées sur les quatre murs ainsi que des nombreuses bougies présents sur le bar. -> présentes
- Je suivis Kléo jusqu'au bar en se frayant un chemin parmi les clients. -> en me frayant
- Les chaises de bar étaient heureusement réglables. -> du bar
- Je ne vis pas l'ombre de l'homme qui s'installait à côté de moi. -> s'installa
Je te remercie pour le temps que tu as accordé à cette correction. Ça m’aide beaucoup pour la suite.