Cher Thomas,
J'aurais aimé te dire qu'ici tout va bien. Mais la vérité est tout autre. La vérité est que tu me manques. Tu vas trouver ça bizarre, mais je me suis souvenue, il y a peu, de nos jeux dans les champs de lavande. Je me souviens ô combien on riait aux éclats, combien on était heureux juste toi et moi et combien le monde nous importait peu. Je ne sais pas pourquoi je me suis souvenue de ça tout particulièrement, peut-être parce que je suis retombée sur de vieilles photos de nous ? Va savoir.
La vieille Huguette qui tenait l'épicerie au coin de la rue est décédée, il y a de cela quelques jours. Te souviens-tu quand elle nous tapait dessus avec son balai ? C'était drôle. Elle nous tapait et nous battait tellement fort que par moments, on rentrait avec des bleus sur les bras, enfin toi. Toi, tu rentrais avec des bleus. Parce que tu te mettais toujours devant pour moi. Tu prenais les coups pour moi. Tu affrontais cette vieille sorcière pour moi. Oh oui, je l'ai méprisée Huguette, mais aujourd'hui, les choses sont différentes et sa mort me rendrait presque triste. Parce que son souvenir me ramène au tien.
Cela va faire quelques mois seulement que tu es parti maintenant. Pour moi, c'est tellement plus. Je me souviens du jour où tu es parti. Quand tu as franchi le seuil de ta porte, que tu m'as regardée, l'air abattu et que tu m'as dit « Je reviendrai ». Je pensais que tu reviendrais, oui. Je le pensais sincèrement. Mais maintenant, on dit que la guerre est dans une impasse et que les choses ne s'arrangeront pas. Je les entends discuter, tu sais . Les vieux du quartier. Ma mère aussi. Elle s'inquiète beaucoup pour toi. Mon père étant trop vieux, il est resté derrière, avec d'autres, mais toi et tous ceux de notre âge... Vous êtes tous partis.
Tu es parti. Honnêtement... Je me sens abandonnée. Je me sens délaissée. J'aurais aimé partir avec toi. J'aurais aimé être avec toi. J'aurais aimé te prendre dans mes bras. J'aurais aimé être là pour toi.
Mais ce n'est pas possible, pas vrai ?
Depuis que tu es parti, je me suis trouvé une nouvelle occupation! Tu vas être surpris d'ailleurs. Tu es prêt ? J'ai repris la ferme en charge ! Ce n'est pas mal, hein ? Tu me vois, moi, sur un tracteur alors que je n'ai jamais réussi à pousser une brouette ? C'est ridicule, n'est-ce pas ? Mais bon, ça m'occupe et j'en ai besoin. J'en ai besoin pour ne pas penser à toi. Pour ne pas m'inquiéter pour toi.
En ce moment, la météo est mauvaise et avec les récentes pluies, la rivière menace de déborder. Il faut que l'on creuse une tranchée non loin de la ferme pour éviter que l'eau ne vienne sur les terres. On n'a déjà plus beaucoup de bestiaux. Quelques vaches, quelques moutons. Les poules ont été massacrées par les chiens du coin. Des chiens errants on suppose . Georges m'aide beaucoup pour tout remettre en état. Te souviens-tu de Georges, Thomas ? Ce petit rouquin pleurnicheur qui nous suivait tout le temps et qui nous voyait mariés. Il a bien grandi depuis. Disons qu'être l'un des rares « hommes » à ne pas être partis lui pèse sur la conscience. Il aimerait te rejoindre, mais personnellement, je préférerais qu'il reste ici. Avec nous. Avec moi.
Georges n'a que 15 ans.
Nous... Nous n'en avons que 19.
J'ai eu ta dernière lettre, tu sais ? Enfin, au début je ne voulais pas l'ouvrir et puis maman me l'a lue, un soir. Pour l'instant, j'ai du mal, pardonne-moi. Alors pendant qu'elle me faisait la lecture, je fermais les yeux et j'imaginais à chaque mot, à chaque son, le timbre de ta voix. J'imaginais que tu me racontais tes aventures de vive voix.
Et tu le feras, n'est-ce pas ? Tu me raconteras tout ça, hein, Thomas ?
Dis-moi... Comment c'est là-bas ?
La première , est-ce que les tracteurs étaient déjà suffisamment répandus de par les campagnes françaises en 1940?
La seconde, et c'est plus une impression : La séparation amoureuse est un bon thème surtout à cause de la guerre, ça donne de la solidité et de la vraisemblance. Mais tirer seulement sur cette émotion de manque de l'être aimé, je trouve que ça fait basculer le récit dans un côté naïf et "à l'eau de rose". À chaque fois dans ma tête, je me dis : "la réalité n'est pas ainsi faite", et c'est dommage pour la suspension consentie d'incrédulité.
Voila, peut-être qu'il faudrait rajouter des dimensions autres que le manque, la tristesse, la peur de la perte et de la mort et la nostalgie?
Par exemple, faire se poser des questions sur l'avenir général et personnel à ton personnage, ou la faire réfléchir sur des sujets détachés de leur relation sentimentale comme par exemple la beauté d'un paysage, etc. en fonction de la personnalité de ton personnage.
Et pour les tracteurs ?
Tu as donc choisi un style plus épistolaire, je m'en serais douté:p
C'est donc une correspondance très romancée, axée sur les souvenirs du quotidien de ces deux amis d'enfance., ce qui suscite une certaine nostalgie, voire un attachement évident !
Je voudrais parler du contexte historique tout de même. Je tiens à dire que j'ai lu les autres commentaires sur le sujet auparavant et que j'ai pris en considération les remarques faites,
Que tu ne donnes aucune indication de lieu n'est pas quelque chose qui me gêne.
Mais je ne peux m'empêcher de faire le lien avec la date dans la note de l'auteur (LA note, donc pas de "s" ;)). Avant le 10 mai, nous sommes encore dans la Drôle de guerre, donc pas troptrop de combats. Je trouve que ne pas du tout se servir du contexte est assez dommage, on se prive de dramatique. Pas ici, dans ce chapitre hein. Mais plus tard si ça continue dans les dates :p
Par exemple, je trouverais ça étrange qu'elle ne mentionne pas une certaine Wermarcht à sa fenêtre à un moment donné...
Mais je fais confiance à l'historienne !
À bientôt pour la suite, je ne peux pas faire de pavé à tous les coups ^^
Cela reste très bien écrit ! ;)
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Oui alors les remarques historiques, j'aurais peut-être dû en mettre "plus" ou du moins "mieux" cadrer le récit au moment où je l'ai écris mais en fait au début je pensais plus écrire une romance sur toile de guerre et c'est progressivement que je me suis rendu compte que tout compte fait, la guerre...était là et que peut-être j'aurai pu justement parler de certaines choses. Et il y en a ..Parfois. Des mentions discrètes, des clins d'oeils subtiles, mais je pense que si un jour je réécris l'histoire, ça sera une des premières choses à laquelle je m'attaquerais pour revoir le fond :)
Néanmoins, je suis contente d'avoir ton avis sur la question et j'espère que malgré ce "choix", l'histoire te plaira :D <3
Merci pour le beau compliment et on se retrouvera au prochain pavé, je n'en doute pas ^^
Bisous
D'un point de vue historique à présent : tu précises avril 1940. Donc voilà on est fixé ;-) Mais tu ne précises pas ( ou alors j'ai vraiment zappé lol) o se situe l'intrigue.
Puisque nous sommes en avril 40 et que la bataille de France commence seulement, et que j'imagine que ça se passe en France, je ne peux que déduire que Thomas a été mobilisé en septembre 39 pour participer à l'offensive de la Sarre ? Mais comme tu ne le précises pas c'est compliqué à savoir.
Du coup, je pense que pour étoffer ton récit, il faudrait quelques ajouts de repères historiques.
Ça fait longtemps que je n'ai pas lu un récit épistolaire, à mon plus grand regret. Du coup, je suis vraiment heureuse que ton histoire le soit ! C'est vraiment un format que j'aime beaucoup mais qui est malheureusement très rare. ;-;
J'aime beaucoup comment tu abordes des évènements du passé, avec une pointe de nostalgie. Ça paraît pas du tout forcé et c'est très fluide.
J'ai aussi eu l'impression d'entendre la voix d’Élise, comme si elle me lisait cette lettre. J'ai beaucoup aimé cet effet, peut-être aussi pour ça que j'aime les récits épistolaires. :3
Bref, je vais continuer ma lecture de suite. c:
Pour les petites corrections :
- "Je les entends discuter, tu sais ." > espace en trop avant le point
Ça part toujours en sucette haha XD
J'ai jeté un œil par curiosité et damn, la mise en scène est géniale. Que ce soit elle qui parle plutôt que Thomas, qu'on le découvre à travers leurs souvenirs d'enfants, à travers sa vision à elle, ses lettres à elle... J'adore ce principe de narration.
Mes petites remarques...
Dans le prologue, je crois qu'il y a un tiret de dialogue qui s'est décalé (ce n'est qu'une question de mise en forme). Le mot "tranchée" pour parler des canaux anti-inondations de la ferme m'a fait bizarre, peut-être est-ce volontaire pour évoquer la guerre en demi-teinte mais je l'ai trouvé trop puissant pour ce contexte. Attention à l'espace en trop avant le point de "des chiens errants on suppose" et à l'absence d'espace après le "!" de "je me suis trouvé une nouvelle occupation".
J'ai adoré le rythme de tes paragraphes, certaines phrases qui commencent avec des répétitions volontaires. Ça marque presque les pensées qui tournent en boucle chez elle, toujours l'absence, le manque, elle y revient sans cesse malgré elle. Décrire des tâches de fond, du quotidien et y insuffler ce trou dans sa vie fonctionne super bien. J'ai été happée !
D'autant plus que la ponctuation est bien gérée.
Seule remarque : chasse les adverbes, surtout de liaison. Les "d'ailleurs" et les "enfin"... Ils enlèvent du punch à tes phrases ! Pareil, l'adjectif "petit" de "petit rouquin pleurnicheur" est superflu. Pleurnicheur suggère déjà l'enfance.
En tout cas bravo, j'attends la suite !
Quel commentaire mon dieu...wow ! Merci beaucoup il me va droit au coeur et également merci pour les petites remarques, comme j'ai écris un peu sur un coup de tête, il y a probablement beaucoup à redire, mais que du positif donc ça me fait plaisir, je vais pouvoir corriger ce genre de petites choses !
J'ai également hâte de pouvoir mettre la suite maintenant !