Le liquide épais coulait, le long de mes doigts, tout tremblants. J'observais avec douleur l'ampleur de l'horreur que j'avais accompli. Jamais encore mon âme n'avait ressenti un dégoût aussi incommensurable. Ma vision troublée, les bouffées de terreur crachées par mes poumons resserrés, mon corps renversé entouré de chair lacérée. Mes larmes affluaient sur mes joues gelées, sans pouvoir les figer. Elles gravent encore ma peau, après tous les maux que j'ai pu infliger à ces êtres désespérés...
Leurs hurlements percent encore mon esprit hanté. Je demeure inerte. Le repos m'a quitté. Le sommeil n'est plus, et c'est aujourd'hui que je vois la fin de toute mon humanité. Comment ai-je pu faire cela...
Ma sœur dort sur le duvet, paisiblement, aucunement tourmentée, tandis que je sombre peu à peu dans la désolation. Elle qui lui prête tant d'attributs divins, Diable vêtu de blanc. Nulle pureté n'apparaît sur son visage angélique. Mensonge. Meurtrier...
À l'aurore, un ordre fut donné. Dans l'étonnement, je me contentai d'écouter attentivement. Je fus saisie d'effroi aux premiers mots prononcés. Zafyra cligna à peine des yeux, dans un calme démesuré.
« Chères servantes. Vous devez de ce pas vous rendre dans le monde des humains. Les vies les plus innocentes sont les plus simples à attaquer, vous n'aurez donc aucun mal à les tuer. Vous devrez prendre leur vie de vos propres mains et me les apporter au château. Je vous confie les boîtes d'Erya. Elles conserveront soigneusement votre butin. Vous êtes miennes, désormais. Partez donc à la chasse, et obéissez. »
J'hésitai, alors que grande sœur, autrefois douce, ne montra pas de signe d'agitation. Aussi impassible que les gargouilles, dévisageant mes iris ambrés qui cherchaient à fuir ces lieux.
La nuit tombée, la clameur épouvantable fit vaciller la terre et les cœurs s'élevèrent.
Je les entends encore. Leurs hurlements percent toujours mon esprit hanté.