Le vendredi arriva plus vite qu'Arwen ne l'aurait cru. Toute la semaine, elle avait ressenti une sorte d'impatience mêlée d'appréhension à l'idée de cette soirée chez Nelly, sa dernière fête semblait déjà loin. Une partie d'elle aurait préféré rester dans le cocon fragile qu'elle commençait à reconstruire avec Amy, entre la maison, les cours et ses dessins retrouvés. Mais une autre part d'elle — plus vive, plus silencieuse jusque-là — voulait enfin goûter à cette normalité qu'elle observait depuis des années chez les autres : les rires adolescents, les conversations qui n'avaient rien à voir avec la douleur ou le danger, les regards furtifs échangés dans un coin d'une pièce trop pleine.
Ce vendredi, donc, Amy s'était montrée étonnamment douce. Elle avait à peine insisté quand Arwen avait annoncé qu'elle sortait, comme si elle voyait dans cette soirée une promesse de guérison. Ses yeux brillaient d'un mélange d'inquiétude et de soulagement. Avant de la laisser filer, elle avait simplement posé une main chaude sur son épaule :
— Profite, ma chérie. Et surtout... sois prudente.
Ces derniers mots, bien qu'enveloppés de tendresse, résonnaient comme une mise en garde. Sa tante savait plus que ce qu'elle disait, Arwen le sentait chaque jour un peu plus. Mais ce soir, elle voulait s'accorder une pause.
Elle enfila son manteau noir, noua ses cheveux bruns ondulés en une simple demi-queue et rejoignit Nelly devant la grille du lycée.
L'afro-américaine, fidèle à elle-même, rayonnait. Ses boucles noires dansaient à chaque mouvement de tête, et son sourire lumineux contrastait avec la froideur de la soirée. Elle la salua d'une accolade amicale, presque protectrice.
— Tu vas voir, ça va te faire du bien, promit-elle. Et puis... tu ne seras pas seule.
Ces mots rassurèrent Arwen. Ensemble, elles prirent la route vers la maison de Nelly, un pavillon chaleureux au cœur d'un quartier animé. Déjà, de la musique filtrait depuis les fenêtres éclairées. La maison vibrait d'une vie qu'Arwen n'avait pas connue depuis longtemps.
À l'intérieur, l'air sentait le parfum sucré des boissons fruitées et les effluves salés des chips. Des adolescents riaient, jouaient à des jeux improvisés, discutaient par petits groupes. La jeune fille se sentit d'abord étrangère, plantée là, son sac serré contre elle, observant ces visages familiers entre eux mais inconnus pour elle.
— Viens, lança Nelly en lui prenant la main. Tu resteras pas plantée ici comme un fantôme !
Arwen se laissa guider. Très vite, elle fut happée dans une conversation légère sur les cours, puis dans un jeu où chacun devait deviner un mot à partir de mimes. Elle rit, un vrai rire, clair, qui surprit même Nelly. Pendant quelques minutes, tout danger sembla loin.
Pourtant, même dans la lumière des guirlandes colorées qui illuminaient le salon, il y avait des ombres.
Layla, par exemple. Elle était là, évidemment, invitée comme les autres. Sa chevelure rousse flamboyante se repérait à l'autre bout de la pièce. Elle rigolait, mais pas de ce rire léger des autres adolescents : le sien sonnait toujours un peu trop étudié, trop perçant. Et surtout, ses yeux semblaient chercher quelque chose, ou quelqu'un.
Nelly, qui l'observait du coin de l'œil, fronça les sourcils. Elle se pencha vers Arwen et murmura :
— Dis-moi... tu as la même sensation étrange que moi par rapport à Layla ?
Arwen haussa les épaules. Elle n'avait pas envie de penser à ça, pas ce soir. Mais la remarque resta suspendue dans l'air comme une poussière invisible.
Un peu plus tard dans la soirée, alors qu'elle cherchait un coin tranquille pour souffler, Arwen surprit justement la rouquine. Dans le couloir menant à la cuisine, Layla parlait à voix basse avec un garçon que personne n'avait présenté à la soirée. Il était un peu plus âgé, ses vêtements sombres contrastaient avec la tenue décontractée des autres invités.
— ... tu sais pourquoi je suis là, murmurait Layla, son ton durci. Ne t'attarde pas trop, ils pourraient se douter.
L'Arwen d'avant aurait continué son chemin. Mais celle qui avait vu trop de choses, qui avait grandi trop vite, s'immobilisa, tendant l'oreille. Elle ne comprit pas tout, mais assez pour sentir un frisson glisser le long de sa nuque. Ce n'était pas une discussion anodine.
Quand Layla se retourna brusquement, leurs regards se croisèrent. Pendant un instant, Arwen crut que la rousse allait s'expliquer, trouver une excuse maladroite. Mais au lieu de ça, l'adolescente lui adressa un sourire éclatant, presque trop éclatant, et lança :
— Arwen ! Tu tombes bien, viens, je voulais te montrer quelque chose.
L'intéressée suivit, sans un mot, mais son esprit s'agitait. Nelly avait peut-être raison.
La soirée reprit son cours. Entre deux éclats de rire, Arwen sentit pourtant un poids grandir dans sa poitrine. Jusqu'à ce qu'un détail la surprenne : Liam.
Il n'était pas censé être là. Et pourtant, elle le vit dans le jardin, appuyé contre une rambarde, une canette à la main. Sa silhouette élancée se découpait sous les lumières tamisées. Ses cheveux noirs un peu ébouriffés lui donnaient un air indompté, et ses yeux sombres semblaient fuir la foule.
La brune hésita longtemps avant de le rejoindre. Mais finalement, poussée par une curiosité plus forte que sa réserve, elle traversa le jardin. Il leva les yeux vers elle au moment où elle arrivait.
— Je pensais pas te voir ici, lança-t-il avec un demi-sourire.
— Moi non plus, répondit-elle simplement.
Un silence s'installa, ni pesant ni gênant. Un silence étrange, comme une bulle isolée du reste de la fête. Puis, presque naturellement, ils se mirent à parler. De l'école, de la musique diffusée trop fort, de choses simples. Arwen découvrit que Liam avait ce don rare : il savait écouter. Pas comme quelqu'un qui attend son tour pour répondre, mais comme quelqu'un qui voulait vraiment comprendre.
Peu à peu, la soirée toucha à sa fin. Les rires se firent plus étouffés, les musiques s'apaisèrent. Nelly, débordante d'énergie malgré l'heure, raccompagna certains invités. Arwen, elle, resta un instant dans le jardin, observant Liam qui s'éloignait. Elle sentit quelque chose bouger en elle, quelque chose qu'elle n'aurait pas cru possible : une pointe d'espoir.
Pour la première fois depuis longtemps, elle se surprit à penser que peut-être, oui, les choses pouvaient redevenir normales. Pas simples, pas faciles, mais normales.
Et c'est avec ce sentiment fragile mais précieux qu'elle regagna la maison, serrant contre elle le souvenir de cette soirée. Elle ne savait pas encore que, derrière les rires et les apparences, les ombres se rapprochaient.
SINON PLEASEEE OMG LIAM ET ARWEN AKDNZKZK
(Pardon je perds les pédales au fur et a mesure que je lis l’histoire)