Salut !
Je n’arrive même pas à écrire “j’espère que tu vas bien” comme nous le faisons chaque fois ; ces mots ne m’ont jamais parus si creux. Comment peux-tu jeter cette information sur le papier et me dire de ne pas m’inquiéter ? C’est comme si tu plaçais une bombe sous mon lit en disant qu’elle ne va pas exploser, que je pouvais dormir tranquille ! Bien sûr que non, je ne peux pas dormir tranquille ; bien sûr que non, je ne peux pas ne pas m’inquiéter !
Pardon. Quel mauvais début de lettre… En vérité, ce n’est même pas contre toi que je suis en colère – ou peut-être juste un peu, à cause de la fin et du “ne t’inquiète pas”, de ce ton un peu paternel. Je suis énervé contre ta maladie, contre la maladie en général, contre ce monde qui cause bien trop de souffrances. J’en viens même à reprocher aux chercheurs de n’avoir trouvé aucun remède contre le cancer, alors que je sais que je ne dois pas, qu’ils font ce qu’ils peuvent ; et que moi, à leur place, je ne ferais vraiment pas mieux.
Enfin, excuse-moi pour cette entrée en matière un peu… virulente.
J’ai reçu ma note de maths ; comme je m’y attendais, ce n’est pas fameux. Et encore, je m’attendais à pire, alors merci pour ce croisage de doigts qui a sûrement amélioré la situation.
Des lettres pathétiques, hein ? Même moi, je ne les aurais pas qualifiées ainsi !
Honnêtement, Eliott, je ne sais même pas quoi t’écrire. J’ai l’impression que tous nos échanges sont puérils à côté de ce que tu vis. Je ne sais pas, je me sens vidé, lassé ; pas lassé de te parler, hein. Mais, je ne sais pas, j’ai le sentiment qu’avec ta dernière lettre on a perdu ce côté léger et amusant qui me plaisait. Je ne sais vraiment pas quoi dire… J’espère que tu ne le prendras pas mal (même si je doute que tu ne le fasses pas, vu que ce j’ai écrit).
A bientôt, peut-être. Pardonne-moi pour cette lettre, pire que les autres, pire que pathétique.
Maël.
❀
Maël colla le rabat de l’enveloppe et poussa un soupir long, profond, chargé de tristesse. Qu’est-ce qui lui avait pris… Cette lettre n’avait aucun sens et risquait de briser le cœur de son ami plus qu’autre chose.
Il glissa la lettre dans son sac pour la déposer, et sa mère entra tandis qu’il en refermait la fermeture éclair. Elle déposa une pile de draps propres sur son lit – elle tenait à le faire, même quand son fils lui proposait d’aller les chercher lui-même –, et fit demi-tour pour repartir.
— Maman ? lâcha Maël sans même réfléchir.
Elle s’immobilisa, la main sur la poignée de la porte, pour signifier qu’elle écoutait. L’adolescent soupira de nouveau.
— Maman… Quand est-ce que tu vas me reparler ?
— Quand tu me parleras, répondit-elle d’un ton tranchant.
— Tu veux pas… venir t’asseoir ? hasarda son fils.
Elle inspira profondément mais posa ses fesses sur le bord du lit de la pièce, et vrilla ses yeux sur le lycéen, attendant qu’il parle.
— On va pas rester fâchés tout le temps comme ça, quand même, si ? demanda-t-il, tout timide devant ce regard sec.
Sa mère détourna le regard, crispée, sans répondre.
— Maman… Ok, j’ai compris que tu voulais savoir. Mais le truc, c’est que j’ai pas envie d’en parler. Et c’est pas contre toi ! C’est contre personne ; juste, j’aimerais pouvoir aussi garder quelques trucs pour moi quoi…
— C’est ce que ton père me répète, dit-elle pour toute réponse d’un ton neutre.
— Alors pourquoi tu ne l’acceptes pas, simplement ?
— Parce que tu es mon fils ! s’exclama sa mère, les yeux brillants. Tu es mon fils et tu grandis, beaucoup trop vite ! J’ai peur de te perdre. J’ai peur que tu t’éloignes, de plus en plus, et que tu ne me dises plus rien, au final !
— Oh, maman ! murmura Maël, touché.
Il se leva et s’assit auprès de sa mère au bord des larmes, avant de passer son bras autour de son épaule.
— Ce n’est pas parce que je veux garder ça pour moi que tu vas me perdre, maman ! dit-il tout bas. Je suis toujours là, hé !
— Je suis désolée mon chérie, chuchota-t-elle. Je me suis comportée comme une vraie maman poule, et une imbécile.
Maël l’embrassa sur la joue tandis qu’elle reniflait.
— Je crois que ton père en a autant souffert que toi, ajouta-t-elle avec un rire embarrassé.
— J’ai survécu, lança le concerné depuis la porte en riant.
Maël leva des yeux surpris vers son père, avant de pouffer lui aussi.
— Tout est bien qui finit bien, murmura-t-il pour lui-même, tout en sachant que ce n’était pas toujours vrai…
Quand à sa famille, j'avoue que je suis aigre de les voir se reconcilier si facilement ahah. Je voulais un peu plus de chaos. Ca m'a paru allez un peu vite et je m'étais peut-être aussi fait ma propre suite dans ma tête impliquant plusieurs péripéties, vu leur engueulade à table.
D'accord, merci pour toutes ces remarques, c'est vrai que c'est assez "Peace and love" ici x)