14. Le clebs et le corps

Par Mart

Par Jess, essoufflée, le 13 décembre 201*.

« Vivent les imperméables et meurent les morts,

Ce truc n’a pas d’âme, je cacherai son corps. »

 

L’hôpital, enfin… Je sue à grosses gouttes et souffle comme un bœuf, heureusement que je risque peu de rencontrer un camarade de classe ici. J’imagine déjà la scène : « Oh ! Jess ! Mais que fais-tu là, accroupie dans les buissons en face des urgences ? Ouah tu pues ! Le déo, tu connais ? » Bref, génial pour la réput’. Mais bon, l’avantage des imperméables bouffants, c’est qu’à défaut d’être beaux, leur capuche cache bien l’identité. Enfin, sauf face aux gens comme le nouveau. Je me demande bien ce qu’il est exactement. Quoique ce soit, ça doit avoir un lien avec l’odorat.

Bordel que le temps est long quand on attend ! Je ne suis même pas certaine qu’il viendra ici… Je perds peut-être mon temps, mais si je rentre maintenant et qu’il se passe quelque chose…

Allez, on se calme. Si je me mets à pousser des cris de frustration, ça ne va pas aider. Dire que je rate sûrement le premier baiser de machin et bidule et que je ne saurai même pas en répéter les détails quand les filles en parleront demain… Enfin, de toute façon, on s’en fout. Rien qu’à les entendre jaser, j’en saurai assez pour tout reconstruire. C’était probablement nul de toute façon.

Des pas ! Ah, non, fausse alerte, juste quelqu’un qui part fumer. Ils ont du cran quand même, de faire ça juste en dehors de l’hôpital. Enfin, au moins ce n’est pas un docteur. Bonjour la promotion de la santé…

Au moins voir ce gros mec à moitié chauve se ruiner la santé permet de me distraire un peu… C’est qu’y a pas foule autour de cet hosto, et je commence à me les geler maintenant que ma sueur a refroidi. Sérieusement, je sais que ce n’est qu’une espèce de zombie sans réelle conscience, mais c’est pas pour autant qu’il ne peut pas se grouiller ! C’est même presque pas un mort-vivant, puisque le corps est toujours bien vivant…

Bon, monsieur fumette rentre déjà à l’intérieur. Il va pouvoir parfumer les couloirs de l’hôpital. Il ne reste déjà plus de son passage que la fumée qui monte de son mégot mal éteint. Je suis tentée de sortir mon smartphone pour scroller un peu sur Insta, mais… Ugh « Patience est mère de Vertu, et les écrans mèneront cette génération à la déchéance ! » Nope, je n’annoncerai pas à la cheffe que j’ai laissé un vioc se faire descendre parce que j’étais distraite. Elle risquerait de me priver de dessert…

Un frisson glacé me parcourt l’échine, et cette fois, ce n’est pas le froid. Mon sixième sens ne me trompe que rarement ; quelque chose est sur le point de se passer. Je regarde vite fait autour de moi. Personne en vue, mais une ambulance pourrait débarquer à tout moment, sirènes hurlantes. Des gens pourraient être postés aux fenêtres aussi. Le temps qu’ils sortent, j’aurai disparu. Tout ce qu’ils risquent de voir, c’est une silhouette fine traînant quelqu’un à l’écart, fermement, mais sans violence. Rien de particulièrement suspect ; probablement même que personne ne se bougerait. Je leur donne raison, il fait trop froid.

Bon, il arrive, ce papy ? Il ne doit pourtant pas être bien loin, si j’ai été avertie… C’est une question de secondes, je dois rester alerte.

Le voilà ! Comme je m’y attendais, il a pris le chemin le plus court : à travers le bosquet. Si je me dépêche, je peux même le choper avant qu’il ne sorte à découvert. Quelque part c’est triste de se dire qu’il n’y a aucune réelle détermination derrière ce pas décidé. Juste le besoin de combler ce vide. J’ai toujours détesté devoir m’occuper de goules. Ce ne sont pas des monstres. Juste des corps ambulants qui n’ont pas voulu mourir avec leur esprit.

Ma lame est dans le creux de ma paume, et je m’apprête à me lancer quand un bruit me retient. Autre chose arrive, et vite. Avant que j’aie le temps de réagir, un molosse s’est jeté au cou de ma cible. Stupéfaite, je les regarde culbuter dans la petite pente. Lorsqu’il se relève, à quelques dizaines de mètres de l’entrée des urgences, le chien a un morceau de chair dans la gueule. Puis, il secoue la tête, lâche le morceau de viande et s’enfuit.

Une mise à mort rapide et efficace, je n’ai rien pu faire. Et si je me précipite hors de ma couverture maintenant, je suis à cent pour cent grillée. Merde ! Il faut que je me casse d’ici. C’était un berger allemand ou quelque dans le genre. Peut-être que c’était juste un clebs fou, un vétéran de guerre qui s’est échappé ou quoi. Mais je n’y crois pas trop. D’abord le papy approche Greg, puis ça. Quelque chose cloche dans cette histoire.

Et je découvrirai exactement quoi, sinon je vais me faire tuer par ma mère.

 

 

 

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Cocochoup
Posté le 10/11/2020
Ah c'est top, on apprend quand même pas mal de choses dans ce chapitre.
J'aime beaucoup la précision dont tu fais preuve et qui donne de la texture au personne. Comme le détail de la sueur refroidit 😊
Mart
Posté le 10/11/2020
Content qu'il t'ait plu ! :D
Renarde
Posté le 28/10/2020
Coucou Mart !

J'aime bien l'explication sur la naissance des goules et l'information est bien amenée.

Je me demande toujours ce que fait Jess (et sa mère) pour les traquer ainsi, surtout qu'elle n'a pas l'air d'être très branchée loup ou chien-garou (cela ne lui effleure même pas l'esprit).

J'espère que tu es toujours motivé pour écrire la suite !
Mart
Posté le 30/10/2020
Coucou Renarde !

Ouf, c'est aussi un élément nouveau de l'histoire, content que ça soit bien passé !

Quant à Jess... Plus d'infos dans 3 chapitres ? x) (ça a l'air long, dit comme ça...)

Je traîne beaucoup trop dans tout ce que je fais dernièrement, mais je n'ai pas perdu la motivation de mener cette histoire à bout ! Je me laisse juste parfois un peu trop distraire. ;-)

Merci encore !
Flammy
Posté le 21/10/2020
Décidément, j'aime beaucoup les chapitres avec Jess, qui sont très drôle et décalés, mais en même temps si graves ^^ Notamment, le décalage entre "Si ya un mort, je me fais priver de dessert", c'est juste "Whut ?".

Bon, visiblement, c'est vraiment un chien qui a attaqué le patient, et pas n'importe quel chien, c'est trop net et précis. La maman de Greg peut-être ? SI ça se trouve, elle se transforme en chien et elle a pas aimé qu'une goule se rapproche trop près de son fils.

Au final, c'est un peu frustrant, parce qu'on en apprend pas tellement plus, on savait pour la goule et on se doutait qu'il y avait vraiment un chien chelou x) Mais bon, on saura un jour, on saura !
Mart
Posté le 21/10/2020
En effet, on n'en apprend pas beaucoup plus, mais Jess donne quand même quelques détails qui serviront ;-).
Pour le passage que tu as souligné... J'avoue, j'ai craqué xD.
Dans la version précédente, je n'aimais pas beaucoup Jess, là elle est... Bref, mieux x).

Merci pour ton commentaire et tes hypothèses ! Je travaille à la suite ! :D
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