14- Une confidente

Notes de l’auteur : Bonne lecture

La fin des cours sonna. Les couloirs se vidèrent laissant Oren guider Nour jusqu'à l'infirmerie. Ils traversèrent le grand hall, et alors qu'ils s'apprêtaient à monter l'étroit escalier qui y mener, ils virent Méroé qui en descendait. Une seule petite lucarne éclairait le passage, un léger filet d'or illuminait la moitié haute de son visage, faisant ressortir ses yeux jaunes et la bande noire qui les ceinturait.

– Une livraison de potion pour l'infirmerie ? lui demanda Oren.

– Mon onguent pour soulager les brûlures est très appréciée. Dorénavant je dois en livrer une fois par semaine. Le fétiche de Myrddin fait toujours autant de dégâts.

– Myrddin aimait faire danser le feu, expliqua Oren. Mais ce n'est qu'en deuxième année qu'on l'apprend.

-- Oren, peux-tu me laisser seule avec Nour ? Elle est entre de bonnes mains, tu crois pas ?

– Entre les meilleures mains, répondit-il avec un grand sourire. Je vais rejoindre Malakel.

Puis, sans que Nour ne le voit, il désigna le poignet de son amie à la damona.

– Sortons un moment sur la terrasse, l'invita Méroé. On dirait que l'entraînement à été rude, les coups de ffon peuvent être très douloureux.

L'air frais fit du bien à Nour, l'air iodé était toujours revigorant. Méroé s'assit à même le sol au bord de la terrasse et laissa ses jambes pendre dans le vide. Elle posa sa besace à côté d'elle, et observa la mer, le temps que Nour, visiblement hésitante, ne l'imite.

– Relâche ton bras, et montre-moi ce poignet.

Nour leva sur la damona un regard incrédule. Comment avait-elle deviné ? Avait-elle des dons de divinition ? Ou sa main serrée, à en devenir rouge, sur son poignet enflé la trahissait-elle ? Elle lui tendit son bras, tout en affichant une grimace de douleur.

– Vous alliez à l'infirmerie n'est-ce pas ?

Ce que je suis gourde.

– Ces quelques jours ont dû être éprouvants, dit la damona en prenant délicatement la main offerte. On dit que l'on mesure sa valeur à la qualité de ses adversaires. Certains élèves du Sanctuaire sont redoutables. Tu en sortiras plus forte, et je serais toujours là pour soulager tes blessures, fit-elle avec un léger sourire.

Méroé passa alors sa main à plat au-dessus de celle de Nour, des doigts au coude. Elle recommença plusieurs fois, jusqu'à que la douleur s'envole, et le gonflement s'estompe. Nour fut estomaquée. Cette faculté de guérison était exceptionnelle.

– Comment vous faîtes ça ?

– Tu peux me tutoyer tu sais. Je ne suis pas si vieille, pour beaucoup je ne suis encore qu'une gamine dans des habits de dame.

– D'accord, accepta Nour malgré tout toujours impressionnée par la damona. Alors comment tu fais ça ?

– C'est assez simple en fait. Tous les êtres humains sont composés d'énergie. L'énergie cumulée dans un corps donne à son porteur des facultés, certains sont plus doués avec l'esprit, d'autres avec la matière. L'esprit a une capacité phénoménale.

– J'aimerais parvenir à progresser en télékinésie.

– Penses-tu au fond de toi que tu en es capable ?

– Non, fit Nour après réflexion.

Méroé la regarda longuement sans rien dire.

– Si je n'y crois pas, je n'y arriverais jamais c'est ça ?

– Tu sais te montrer perspicace quand tu le souhaites. La force de persuasion est la plus importante, la plus fascinante, elle peut te faire déplacer des dragons, littéralement. Même si ce serait ridicule. Tu te sens un peu mieux ? Demanda-t- elle après un moment, en lâchant son bras.

– Oui, mon bras va beaucoup mieux, merci. J'ai quand même peur de ne jamais être au niveau des autres élèves, et puis Anya a dit que j'étais mal coiffée. D'habitude c'est ma mère qui refait mes tresses, fit-elle la voix tremblante. Là, j'ai dû les faire moi-même, mais c'est n'importe quoi.

Cette fois, elle éclata en sanglots. Gênée, elle baissa la tête, et tenta de ravaler ses larmes, qui tombaient sur son pantalon. Elle ne vit pas Méroé la regarder comme si elle était en équilibre au bord d'un précipice, en plein désarroi quand à l'attitude à adopter. Enfin, elle passa son bras autour de son épaule.

– Je te proposerais bien de refaire ta coiffure, mais j'ignore comment faire ce genre de tresses. Je vais être honnête, regarde mes cheveux, je ne sais faire aucune sorte de tresses, avoua-t-elle, faisant sourire Nour. J'imagine que ce n'est pas drôle pour toi, et je crains de ne pas avoir de bonnes nouvelles, fit-elle en soufflant. Je n'ai rien trouvé à Epoké concernant un portail reliant Terra, et le médaillon reste un mystère, pour l'instant.

– Est-ce que tu penses que mon père peut se trouver ici, en Doradéa ?

– Ca paraît improbable. Tout An Domhan connaît maintenant ton existence, je pense qu'il se serait déjà manifesté. Avec le médaillon il a sans doute voulu te faire parvenir un message, où te faire venir ici à dessein. Je vais continuer de le chercher.

Nour soupira discrètement. Elle avait craint que Méroé oublie sa promesse.

– Maintenant si tu veux bien, j'aimerais te montrer une petite astuce qui te permettra d'être meilleure au combat, reprit la damona en se levant. Alors voilà, ma botte secrète est de me placer à trente degrés de mon adversaire. Ainsi, je peux le voir venir plus facilement, et anticiper ses mouvements. Je ne sais pas pourquoi mais le face à face ne permet pas une optimisation du combat rapproché. Au prochain entraînement, essaie, et tu me diras ce que tu en penses. À ta place, et pour une raison évidente, je ne l'ébruiterais pas.

– Je ne dirais rien, promis, répondit-elle, le cœur revigoré.

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Baladine
Posté le 11/02/2023
Du baume pour notre coeur. Heureusement que Méroé est là. C'est un beau passage. J'étais déçue que Méroé lui refasse pas ses tresses à sa manière, mais je lui pardonne parce qu'elle est gentille :D
Une seule petite lucarne éclairait le passage, un léger filet d'or illuminait la moitié haute de son visage, faisant ressortir ses yeux jaunes et la bande noire qui les ceinturait. => très joli !
A très vite
sifriane
Posté le 12/02/2023
Merci pour ton retour :)
MichaelLambert
Posté le 22/01/2023
Bonjour Sifriane !

J'aime bien ce retour de Méroé et l'évocation de la maman de Nour (mais je ne m'étais pas rendu compte de l'âge qu'elle pouvait avoir et j'ai été surpris que Nour la vouvoie, soudain elle me parait plus âgée que ce que j'avais imaginé). C'est intéressant que leur relation soit teintée du souvenir de la mère.

Puis à la fin, j'aurais été partant pour que Méroé fasse une petite démonstration de son astuce au combat pour que ça soit plus visuel (et pour que Nour puisse éprouver son poignet guéri !)

A bientôt pour la suite !
sifriane
Posté le 23/01/2023
Bonjour Michael,

Méroé à 18 ans. J'ai hésité pour le vouvoiement mais ta remarque me montre que j'avais raison, le lecteur peut ainsi se rappeler la différence d'âge.

Je ne peux pas m'empêcher de me dire que sa mère doit terriblement lui manquer. A cet âge, la séparation, surtout forcé doit être très dur. J'essaie de coller à la vraie vie.

Pour la fin tu as raison, une démonstration serait plus sympa, je vais voir ce que je peux faire.

A bientôt :)
Vincent Meriel
Posté le 22/01/2023
Bonjour,

J'ai été touché par l'explosion de tristesse de Nour dans ce passage, et il était effectivement temps qu'elle se vide un peu le coeur. Méroé semble la meilleure personne pour cela (même si elle à l'air de le regretter un peu ^^). Leur dialogue est agréable à suivre et fluide, je l'aime bien. C'est aussi chouette de voir qu'elle a bien cherché des informations sur Nour, même sans succès ^^'

J'ai eu un peu plus de mal à début, le départ d'Oren et la rencontre sont un peu plus abrupts, elles mériteraient surement plus de ligne (de descriptions ou de dialogues à voir).

Je ne suis aussi pas très fan des "bottes secrètes", mais c'est un trope suffisamment utilisé pour que personne ne s'en émeuve, je pense (sauf les relouds comme moi ^^). Après, je vais rester lourd désolé (tu peux ignorer toute cette partie honnêtement), tu pourrais en utiliser une qui a plus de valeur martiale (se placer de profil c'est assez dangereux en combat). Le zen des samurais par exemple, consiste à accepter sa mort et donc se mouvoir sans peur. À un niveau moindre, beaucoup de gens pensent qu'on se bat avec ses bras, alors qu'on se bat avec ses jambes (et tout son corps). Je vais arrêter là, mais il y a pas mal de petites techniques comme ça "plus facile à dire qu'à faire" qui sembleraient peut-être plus logique.

Chouette chapitre en tout cas et à bientôt !


PS: J'ai regardé, les bretons pratiquent une lutte dérivée du combat celtes, "le gouren" je crois. Les portugais ont aussi une escrime au bâton qui leur vient des celtes le "jogo do pau".
sifriane
Posté le 23/01/2023
Bonjour,
Tu vois tout !! c'est vrai que j'ai réécris plusieurs fois le début du chapitre avec Oren et visiblement ça fonctionne toujours pas (je vais revoir ça).
Je prends toujours compte des remarques, elle me font réfléchir et m'aide à m'améliorer quoi qu'il en soit. C'est vrai que je pourrais trouver quelque chose de plus percutent. A voir.
Merci pour les recherches :) Le gouren (apparemment) c'est plus de la lutte mais je peut partir de là pour inventer un nom.
Merci pour les encouragements, ça fait plaisir.
A bientôt :)
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