Oren et Malakel attendaient Nour devant l'école. Tout le monde aimait Malakel. Ceux qui ne le connaisaient pas, ceux qui ne l'avaient jamais vu avec Méroé, s'approchaient pour le saluer, le caresser délicatement. Patient, Malakel se laissait faire.
– Méroé fait des merveilles tu trouves pas ? demanda Oren d'un air entendu.
– Plutôt oui, j'ai plus du tout mal, répondit Nour toujours époustoufflée par les exploits de la damona.
– Mais Anya doit payer. Tu dois être furieuse contre elle, moi je le suis.
Nour était furieuse bien sûr, contre elle surtout. Elle avait très souvent le dessus sur les petites crapules, mais ici elle se sentait démunie. La vérité c'est qu'elle avait peur, malgré ses nouveaux amis elle se sentait seule, sa mère n'était pas là pour la protéger, pour la guider. Elle était perdue. Aussi elle se sentait gauche et gourde, à des années lumière des capacités des autres élèves. Méroé avait-elle raison, le pouvoir de persuasion était-il le plus grand de tous ? Penser être capable d'accomplir l'impossible le rendait-il possible ?
Elle était partagée entre son envie de retrouver sa mère au plus vite, et celle d'apprendre à être plus forte, d'apprendre à se servir de son esprit. Elle pourrait même devenir une sorte de super héroïne sur Terre, qui sait. Immédiatement elle grimaça, elle qui n'arrivait pas à faire léviter une plume.
Elle fut distraite, ses pensées s'envolèrent. Timéo et les jumeaux venaient à leur rencontre d'un pas rapide.
– Heureusement vous êtes encore là, je n'aurais pas voulu courir jusqu'à chez toi, s'exclama Timéo, essouflé.
Nour s'interrogea, d'habitude les jumeaux rentraient tout de suite chez eux après l'école. Leur mère semblait très stricte, ils devaient goûter à la maison avant de ressortir voir les copains.
– On devait absolument vous prévenir. On a un plan, s'exclama fièrement Elijah en posant ses mains sur ses hanches.
– Notez qu'on ne ma pas demandé mon avis, se plaignit Timeo.
– Un plan pour quoi, expliquez vous? demanda Nour, les sourcils froncés.
– Nous avons sollicité Timéo pour qu'il nous accompagne chez lui, en Fandari, annonça Azénor, le plus tranquillement du monde.
Nour restait fascinée par la décontraction en toute circonstance de la jumelle. Rien ne semblai jamais la destabiliser.
-- C'est pour allez voir ce dessin dans les archives, s'enthousiasma Oren.
– Je croyais que ces archives étaient interdites, s'inquiéta Nour.
– Timéo est certain de pouvoir nous faire entrer, n'est-ce pas Timéo ? demanda Elijah d'un air menaçant.
– Ce n'est pas exactement ce que j'ai dit. L'archiviste m'aime bien, c'est pourquoi JE peux aller aux archives autant que je le souhaite. Je ne vous cache pas que je vais devoir déployer tout mon charme pour vous faire entrer tous les quatre.
Alors qu'Elijah ouvrait la bouche pour lancer une réplique cinglante sur le supposé charme des Fandarii, des cris retentirent. Les oreilles de Malakel se dressèrent.
« La petite Elisa Stole a été enlevée sur la passerelle » entendirent-ils au loin. L'homme, porteur de la mauvaise nouvelle, se rapprochait, ameutant en même temps une foule de plus en plus dense. «Mais la famille d'Elisa n'a rien a voir avec le Conseil » s'alarma une femme.
– Je la connais, elle est en deuxième année, fit Azénor sous le choc. C'est affreux. On doit aller voir grand-père.
Anya, que personne n'avait vu venir, se posta devant les jumeaux.
– Ca fait des semaines que ces enlèvements s'enchaînent, les gens d'armes auraient déjà dû éliminer le rapteur. Ce ne serait jamais arrivé chez moi.
– T'es toujours là quand on n'en a pas envie toi, fit remarquer Oren.
– Oui, comment ça se fait que tu sois pas encore rentrée chez les êtres supérieurs ? se moqua Elijah.
– De quoi je me mêle Hiver ? A cause de l'incompétence du Conseil, je vais probablement devoir arrêter l'école, tout comme toi Timéo.
– C'est pas la peine de se chamailler, allons plutôt voir ce qu'en dit grand-père, proposa Azénor.
– Faites donc ça, et suggérez lui de faire appel à des professionnels pour retrouver ces malheureux, asséna l'elfe avant de se mêler à la foule compact qui s'amassait et avançait vers l'entrée du Conseil.
Elijah se fraya un chemin parmi les villageois consternés, suivit de près par Azénor qui prit Nour par la main, laquelle serra celle d'Oren. Timéo hésita quand à la conduite à tenir. Il n'y a pas si longtemps il se serait contenter de rentrer chez lui, mais Nour avait éveillé une certaine curiosité chez lui, qui s'étendait maintenant à a peu près tout.
Nour avançait tête baissée pour ne pas trébucher, heureusement le Conseil jouxtait le Sanctuaire. Le silence qui se fit soudainement autour d'elle lui fit stopper sa marche. Il se passait quelque chose. Chacun lâcha les mains tenues et se redressa sur la pointe des pieds.
La rumeur enflait elle prétendait qu'Hiver venait d'apparaître au balcon du Conseil. Nour leva les yeux.
– Mes très chers concitoyens, commença-t-il. On m'informe à l'instant qu'une terrible tragédie vient de se produire.
– Il a pas l'air bien, constata Azénor.
– Non, il a pas l'air bien du tout, confirma Elijah.
C'est vrai que le vieillard, bien que ce fut inimaginable, paraissait encore plus vieux. La gravité de la situation, et l'urgence d'y remédier le rendait vulnérable, rabougri.
– Le rapteur nous a encore prit une enfant. Aux portes de la ville. Vous le savez, tous les gens d'armes sont déjà à la recherche des disparus, malheureusement sans succès jusqu'à présent. C'est pourquoi je dois me résoudre à faire appel à des hommes venant d'autres mondes.
– Des mercenaires c'est bien ça ? hurla un jeune homme.
A cette mention, une vague de contestation s'éleva de la foule.
– C'est qui ces mercenaires ? demanda Nour tout bas.
– Ce sont seulement les pires êtres qu'on puisse trouver dans chacun des mondes, expliqua une vieille dame à côté d'elle. A l'époque de Mahaut, le Conseil avait déjà fait appel à des hommes comme ça pour l'éliminer. Tout ce qu'ils ont réussir à faire c'est à tuer des civils. C'est une coriace la Mahaut.
– Comprenez bien que j'y suis contraint. Si nous voulons revoir nos enfants c'est la seule solution, tonna Atticus. En outre, je demande aux enfants de ne plus circuler seuls, à partir de demain, vous devez automatiquement être accompagné d'un adulte dans tous vos déplacements. Sachez que si un nouvel enlèvement se produisait, les écoles seraient fermées, et les enfants confinés dans leurs foyers. Je vous demande à tous la plus grande prudence. Tout ceci sera bientôt un mauvais souvenir je vous le promet. A présent, rentrez tous chez vous.
Sans plus de cérémonie, le conseiller disparu du balcon, laissant la foule abasourdie, inquiète.
– Faudrait faire quelque chose pour aider, suggéra Azénor.
– Nous sommes des enfants, on peut rien faire, affirma Timéo.
– Comment on va faire pour aller en Fandari ? demanda Oren, alors que les villageois commençaient à se disperser.
– Va falloir trouver un adulte, fit Timéo, révélant ainsi l'évidence même.
Nour sentit une main sur son épaule.
– C'est vraiment moche ce qui arrive les enfants, dit tristement Méroé.
Petite chose pour Timéo : il s'est quand même pris un méchant coup de la part de Nour, et il n'en est pas fait mention. Je m'attendais à un écho de ce qu'il venait de se passer entre eux, quand même (c'était il y a deux chapitres, mais dans la chronologie peut de temps est passé).
Je trouve très profond le fait que Nour prenne conscience que c'est en se sachant capable de faire des progrès qu'elle peut en faire. La manière dont tu l'amènes est très authentique (elle a vraiment du mal à le croire (et nous aussi, en fait, on ne peut pas s'empêcher de douter) mais elle y va pas à pas), ça ne sonne pas du tout comme les petites phrases en forme de moralités qu'on trouve dans les livres jeunesse et qui assènent une leçon au détour d'un événement, que le personnage comprend dans un éclair de lucidité auquel on a du mal à croire).
- Elle fut distraite, ses pensées s'envolèrent. => j'aime bien cette petite phrase. Des pensées-oiseaux qui se perchent dans la tête et se concertent entre elles et s'envolent d'un coup.
- Chacun lâcha les mains tenues et se redressa sur la pointe des pieds. => les mains tenues, je me suis demandé, tenues par qui, à quoi, je n'arrivais pas à visualiser.
Hâte de lire la suite ! A bientôt !
Merci pour ce compliment, ça fait très plaisir. Je suis d'accord, parce que c'est écrit alors c'est vrai et tout le monde doit être ok avec ça.
La confiance en soi est primordiale dans une vie, et j'aimerais faire passer ce message avec Nour.
Je vais revoir le passage sur les mains tendues.
Encore un grand merci, à très bientôt :)
Voilà un chapitre plein de tension comme on les aime, avec une fin à la fois amusante et prometteuse. Félicitations !
Les jumeaux sont chouettes, Anya est irrécupérable, Nour continue sur la bonne voie. C'est bien que tout cela avance.
Je suis curieux de voir comment vont s'entremêler le récit de Rapteur et celui des archives / de Nour.
La question des mercenaires m'intrigue aussi, mais là c'est peut-être parce qu'il manque quelques explications. Je ne comprends pas ce qu'ils feront de mieux que les gardes de la ville. Si on les dit incompétents contre Mahaut (un rappel de qui est cette personne serait pas mal aussi (même avec juste un titre), je crois que le dernier chapitre où on en a entendu parler est assez loin), en quoi est-ce le dernier espoir du conseiller ? (certes ce n’est pas un malin).
J'ai eu un peu de mal à comprendre cette phrase aussi " Nour avait éveillé une certaine curiosité chez lui, qui s'étendait maintenant à à peu près tout", même si on finit par avoir le sens ^^
À bientôt pour la suite !
Ce chapitre étant un premier jet je craignais qu'il soit mal foutu, tu me rassures.
Pour les mercenaires, c'est vrai que c'est un peu vague je vais étoffer un peu. Je vais aussi ajouter un complément d'infos pour Mahaut (elle est tellement dans ma tête) d'autant qu'à partir du prochain chapitre elle sera plus présente.
Je suis bien contente que cette histoire ne t'ennuie pas encore, alors merci.
A bientôt :)
Voilà les quelques points que j'ai relevés :
– Elle paie rien pour attendre -> l'expression habituelle c'est "elle perd rien" à voir si tu veux faire comprendre que ton personnage se trompe ou non ?
répliqua Azénor. -> j'avoue qu'en début de chapitre je ne resituait plus qui est Azénor et ce qu'il fait là (et en plus je m'attendais à ce que ce soit Nour qui réponde)
– On a prit le risque d'être en retard -> C'est bizarre, c'est comme s'ils répondaient à ce que Nour venait de penser (et si elle leur demandait directement ? ou si ils ne parlaient pas de leur retard : le fait qu'ils aient un plan à transmettre en urgence sous-entend le risque qu'ils ont pris ?
L'homme se rapprocha -> tu en parles comme si on le connaissait ? "Un homme" serait plus approprié si on ne la jamais vu.
Le conseiller Hiver venait d'apparaître au balcon du Conseil. -> Je n'avais pas encore eu le temps de bien comprendre ce qui se passait (l'enlèvement semblait avoir eu lieu presque à l'instant) alors j'ai trouvé bizarre que le gouverneur soit déjà au courant et ait déjà des mesures à annoncer.
A bientôt pour la suite !
Merci pour ton retour. Effectivement, il y a des passages où on comprend pas tout. Je viens déjà de faire une première relecture pour améliorer ça.
A bientôt :)