La nuit fut compliquée. Nour revoyait sans cesse le regard dur de la vieille dame, ses yeux bleus perçants ne la quittaient pas. Au petit matin, alors qu'Oren dormait encore profondément, elle s'extirpa de son lit sans bruit, caressa Malakel pour le rassurer, et sortit de la chambre en catimini. Elle s'empara d'une couverture sur le canapé, et marcha sur la poite des pieds jusqu'au jardin. Le jour se levait à peine, tout était silencieux, l'air était frais et l'herbe humide sous ses pieds nus. Finalement, était-ce cela méditer, prendre conscience de tout ce qui nous entoure et l'apprécier, rééllement, sans penser à mille autres choses ? Nour s'assit sur la couverture, croisa les jambes et inspira profondément. Elle devait laisser ses questions sans réponses loin d'elle. Mais c'était si difficile. Mahaut est-elle si cruelle que tout le monde le dit ? Est-elle vraiment de ma famille ? Et si Hiver était savait que j'ai le médaillon des Tamlin alors qu'il les hait ? Et si Mahaut apprenait que son bien le plus précieux est entre mes mains, voudrait-elle le récupérer ? Ca suffit.
Elle inspira, expira en soufflant fort. Puis elle recommença encore, et encore. Sans vraiment s'en rendre compte elle agrippa une main sur le bijou, le serra fort. Elle sentit la brise dans ses cheveux, la vit faire danser les branches des arbres, elle observa les quelques nuages annonçant l'aube, d'un rose orangé qui se déplacaient lentement, se déformaient, ne luttaient pas. Nour sentit ses yeux piquer, ses paupières étaient lourdes. Après une nuit d'insommie, le sommeil venait-il enfin la cueillir ? Une vague de chaleur s'empara d'elle, d'abord les jambes, les bras et le torse. L'étrange sensation se propagea dans sa tête, ses oreilles se mirent à bourdonner. S'endormait-elle, rêvait-elle déjà ? Elle fut soudain aspirée, comme si une force invisible l'attirait violemment en arrière.
Elle se retrouva dans le salon d'une maison. Une odeur de fumée imprégnait l'air, tout était noirci, du sol au plafond. Il ne restait que des lambeaux de tapis, des débris de tableaux et de meubles. Une vieille dame, assise sur un fauteuil à bascule fixait l'âtre de la cheminée vide. Des cheveux blancs ramenés en chignon et vêtue d'une robe noire, pour Nour elle était l'image de la parfaite grand-mère. Était-elle décédée dans l'incendie de sa maison ? Celle-ci se mit alors à lui parler :
— J'ai vécu ici autrefois, oh, pas très longtemps.
— Qui êtes-vous ? demanda timidement Nour.
— Approche mon enfant, que je te regarde, répondit la dame sans répondre à la question.
Nour se demanda comment ses jambes accepteraient d'avancer d'un pas, mais elle voulait savoir qui était cette femme. Elle s'approcha donc, se baissa pour être à sa hauteur. Elle reconnue le regard de la vieille dame, d'un bleu perçant, celui de Mahaut. Elle eut un mouvement de recul, mais déjà la grand-mère caressait une de ses tresses en souriant, alors Nour s'agenouilla devant elle, le coeur battant. Mahaut ressemblait plus à une enfant à qui l'on vient de donner un bonbon qu'à un monstre sanguinaire. Puis Nour sentit la main ridée, un peu rêche, sur sa joue. Tout était si réel. Le sourire s'effaça du visage fripé, la voix se fit dure :
— Prend-garde mon enfant. Tu dois me trouver, c'est la seule solution.
Subitement, le décor changea. Nour se retrouva sur un balcon, avec une vue à couper le souffle. Des montagnes et des collines aussi loin que peut voir l'oeil, parsemés d'arbres violets, ou blancs. Surtout, il y avait la Lune au-dessus d'elle, si énorme et si près que Nour se prit à croire qu'elle pourrait la toucher. D'ici on distinguait ses monts et ses cratères, la surface du sol d'un blanc argenté. Ce spectacle était tellement magnifique qu'il fallut à la jeune fille quelques secondes pour s'apercevoir de la présence de la vieille dame.
-- Je comprends, fit Mahaut. Moi aussi j'ai été subjuguée à mon arrivée chez les elfes.
Chez les elfes ??!!
-- Vous êtes prisonnière ?
-- Plutôt une invitée assignée à demeure. Les elfes n'ont rien contre moi. En agissant ainsi, ils me protègent sans se mettre à dos le Conseil.
Nour avait tellement de questions, elle ne savait par laquelle commencer. Mais Mahaut ne lui en laissa pas le temps.
— Je m'en veux tellement si tu savais, reprit la mamie sur un ton larmoyant. J'ai fait tellement d'erreurs. J'ai mis en danger ma fille. Elle a dû fuir, tellement loin de moi. Je n'ai jamais pu voir son fils, Victor.
Nom d'un petit bonhomme.
Nour sentait son coeur battre la chamade, assourdissant.
-- Je, c'est moi qui ai le médaillon, lâcha Nour, pas vraiment consciente de ce qu'elle faisait.
-- Je le sais, je peux le sentir. Ce médaillon n'a apporté que malheur à notre famille. Tu dois le détruire.
Pourquoi moi ??
-- Vous savez comment je peux rentrer chez moi ?
-- Tu ne peux pas repartir sans l'avoir détruit.
-- Mais comment ?
-- Viens me trouver, et nous nous débarasserons de lui.
Nour ouvrit la bouche, mais la vieille dame disparut soudainement, la laissant seule sur le balcon. Après quelques secondes, le ciel s'assombrit. Le temps parut s'arrêter, de nouveau elle fut happée, et quitta son rêve.
Elle aurait préféré y rester, une vive douleur lui parcourut tout le bas du corps. Elle venait de tomber, sans aucun doute. Mais d'où ? Puis elle sentit qu'on la secouait, on lui parlait. Elle parvint à se redresser et enfin à ouvrir les yeux. Oren était penché au-dessus d'elle.
-- Qu'est-ce qui s'est passé ? demandèrent-ils en même temps.
-- Tu étais en train de léviter, raconta Oren, c'était comme si tu étais en transe. Comment tu as fais ?
-- J'en ai aucune idée. Je crois que je me suis assoupie, j'ai rêvé de Mahaut Tamlin.
-- On ne lévite pas quand on rêve Nour. A mon avis, c'est plutôt une projection astrale.
-- Imposible, je ne sais pas me projeter.
-- Le médaillon t'a peut-être aidé. En tout cas je vois pas d'autre explication.
-- Tu crois que j'étais vraiment avec elle ? demanda Nour qui ne parvenait pas à y croire.
-- Oui, affirma Oren. Alors, elle est comment Mahaut ?
Un chapitre qui apporte des réponses et où on voit Nour évoluer, c'est très bien ! Et en même temps il ouvre de nouvelles questions, la plus importante étant "Mahaut va-t-elle la trahir ?" :P
La partie sur la méditation est assez cool, on sent bien l'ambiance "cosy" du moment. D'ailleurs, je pense que "Finalement, était-ce cela méditer, prendre conscience de tout ce qui nous entoure et l'apprécier, réellement, sans penser à mille autres choses ?" est peut-être de trop du coup. Suivant la règle du "show don't tell" (bon pas obligé certes), tu n'as pas forcément besoin de forcer en expliquant qu'il s'agit d'une méditation. L'ambiance du texte doit suffire au lecteur.ice pour le percevoir. Je pense qu'ici c'est largement suffisant pour le comprendre.
La rencontre avec Mahaut est intéressante pour les informations qu'elle donne. Je suis néanmoins surpris que la première pensée de Nour quand elle voit quelqu'un ce soit de se demander si elle est morte (l'a-t-elle prise pour un fantôme ?). Le risque avec un dialogue pareil c'est aussi que la rétention d'information (de Mahaut) fasse trop artificielle. Je trouve que ça passe, mais il serait peut-être bien de mettre un peu plus de tension dans le dialogue "on n'a pas beaucoup de temps" ou quelque chose du genre pour expliquer que Mahaut n'explique pas grand-chose.
La fin explique bien ce que l'on pensait, Nour a fait de la magie !!! Il manque peut-être quelques incises pour exprimer sa surprise/joie/confusion. Sinon c'est bien (bon les tirents cadratin sont tout cassés).
Une bonne lecture en tout cas !
Bon week-end.
Et puis la quête se dessine (une quête à la Seigneur des Anneaux ^^ détruire l'objet maléfique, c'est rudement efficace !). Allez, maintenant, comment s'en débarrasser ?
Coquillette :
- Le médaillon t'a peut-être aidé.=> dée
A très vite
Pour toi, une nouvelle histoire commence, j'espère que ça te plaira.
A très vite :)