18 · Sole

— Père ?

— Oui, mon fils ?

Sole s'avança aux pieds de son père - bien qu'il n'en possédât pas - et baissa la tête.

— Père, je... Je suis amoureux. Follement, vraiment, purement et sincèrement. 

Soleil s'exclama, une étincelle de joie au fond des pupilles.

— Oh, mon fils, quelle merveilleuse nouvelle ! Qui est donc la jeune fille qui a fait chavirer votre coeur ? 

— C'est... Luna, Père, avoua Sole dans un murmure.

— Luna ?! Mon fils, vous savez que c'est impossible ! 

— Il n'existe pas d'amour impossible, si l'on s'en donne les moyens, Père, dit fermement le jeune homme.

— Mon fils, sais-tu qui nous sommes ? Sais-tu la signification de notre nom ?

— Oui, père, vous me l'avez répétée maintes et maintes fois du temps de mon enfance. Nous sommes "l'astre tout puissant, qui éclaire chaque vie ayant la chance d'habiter la terre". Et grand-père était espagnol, son père anglais, et vous, Père, français.

— Oui, et toi italien. Ce qui signifie que tu vas un jour me remplacer. Et ce jour, mon fils, tu devras consacrer chaque minute de ton vivant pour éclairer tous ces gens. Tu n'auras pas le temps pour cet amour qui, ne le nie pas, est impossible.

— Certes, je ne dis pas que je pourrais passer mes journées, notion abstraite en ce qui me concerne, à construire une relation. Mais... Je ne peux plus vivre sans elle, Père, et je préfèrerais mourir, au détriment du prochain métier qui sera le mien.

S'ensuivit une longue discussion entre le père et son fils. A la fin, Soleil, touché par la détresse de son fils, et transpercé par cet amour qui semblait vrai, accepta d'y remédier, ne serait-ce qu'un peu – le peu qu'il était capable de faire. Ainsi fut créée l'éclipse.