2. la rencontre

Dieu, c’est quelqu’un de central dans la vie de Jeanne. Dès qu’elle ne se sent pas bien, elle discute avec lui, ou bien juste elle se blottit dans ses bras quelque minutes et comme cela, elle sait qu’elle n’est pas seule. Mais faut le savoir, c’est assez récent comme amitié. En fait, ça date à peu près d’il y a trois ans.

Déjà, ils se connaissaient avant, mais mal. Petite, Jeanne a été baptisée par ses parents, qui ont décidé qu’il veillerait sur elle et qu’ils lui apprendraient à tisser des liens avec lui. Du coup, enfant, elle a commencé à aller toutes les semaines au catéchisme : là-bas, on leur apprenait comment discuter avec lui et à quel point il les aimait. Elle y arrivait pas mal, à discuter avec lui, enfin, à en croire Maman.

Mais avec le temps les relations se sont distendues, vous savez, comme c’est souvent le cas avec les amitiés d’enfance. On ne se parle plus, voilà tout. Et il faut dire aussi que Dieu ne vient pas vers vous sans que vous le lui demandiez un peu, ça demande des efforts de lui parler – et les efforts, ce n’est pas le fort de Jeanne. Alors, elle le voyait juste comme quelque chose qui, paraît-il, existe. Comme un vieil oncle chez qui on irait déjeuner tous les dimanche matin mais il reste en cuisine, alors on a goûté ses plats mais on n’a jamais vu son visage.

Et puis, il y a eu la confirmation. La confirmation, c’est quand à quatorze ans, à la fin du collège, on vous propose de recevoir l’Esprit-Saint. L’Esprit-Saint, c’est une forme de Dieu qui s’exprime au sein de soi-même, par une force particulière qui vous permet de vivre mieux, d’accomplir sa volonté avec plus de grandeur. C’est la Force, en fait. Bref, Jeanne a accepté de recevoir l’Esprit-Saint, déjà parce que toutes ses amies le faisaient, et puis parce que pourquoi pas, elle allait peut-être y gagner finalement. On lui avait dit qu’il était cool, Dieu, donc c’était l’occasion de le re-rencontrer.

Ça n’a pas non plus été le coup de foudre immédiat entre Dieu et Jeanne. D’abord, elle a entendu des témoignages par dizaines de gens qui affirmaient que le Seigneur avait changé leur vie, qu’il leur avait parlé dans la prière, qu’il les avait transformés. Témoignage après témoignage, elle a su qu’elle voulait aussi qu’il la transforme, elle, elle ressentait le besoin d’être transformée. Alors, elle a essayé de prier comme les gens lui disaient.

Elle a reçu l’Esprit-Saint, ça n’a pas changé sa vie. Mais elle a décidé de continuer, alors elle est allée à la messe des jeunes, celle où il y a de la belle louange et des curés marrants.

Et il y a eu ce soir d’adoration. Le prêtre avait enfermé Jésus dans un ostensoir qui ressemblait à un soleil avec au milieu l’hostie comme une lune pleine, et tout autour, des petites bougies. Et puis surtout, il y avait la musique. La chanteuse avait une voix d’ange, et elle chantait avec le piano et la guitare qui l’accompagnaient, l’abandon, l’amour pur, la lumière qu’on voit partout et le monde vibrant d’éternité.

Et là, les larmes ont coulé. Jeanne a perdu toute la force de prier, alors elle s’est tue. Et Dieu est arrivé, doucement, il l’a enveloppée de lumière et d’une espèce de chaleur toute douce, caressante. Et il a murmuré à son oreille : Je suis là. Je suis là, Jeanne, je suis là avec toi et je t’aime. Et elle a continué à pleurer et à rire en même temps tout en l’étreignant et en s’abandonnant dans ses bras.

En Dieu, elle a tout trouvé. Il est devenu son soleil et les étoiles de ses nuits, il est devenu celui sur qui elle s’appuie quand elle se sentait seule, celui à qui elle parle quand ça ne lui suffit plus de tout dire à ses proches, celui qui colore ses journées et qui étire ses sourires, celui qui fait pleurer ses yeux et celui qui sèche ses larmes. Le monde, pour Jeanne, est grand, plat, il fait peur, mais quand elle loue, il devient vif, coloré, profond, et elle y est confortable, il a la vivacité qu’il avait dans son enfance. Quand elle va mal, elle écoute des musiques de louange. Quand elle va bien, elle loue avec ou sans musique. Quand elle ne peut plus louer, elle pleure avec lui.

Dieu est tout, et il est sa puissance. Il est son sol. Il est son toit.

Voilà. C’est ça, la relation entre Dieu et Jeanne. S’il venait à l’abandonner, elle flotterait dans l’espace comme un astronaute tombé de sa fusée.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
MarieZM
Posté le 30/01/2025
Re Joanne :)

Merci pour ce cours de chrétienté (je dis ça sans ironie) qui est amené très subtilement et qui permet de bien se représenter l'état d'esprit de Jeanne au moment de l'histoire. C'est une exposition vraiment sensible...

Et, franchement, j'aime bien le mélange imparfait / présent de narration / passé composé qui donne un rythme presque "parlé" à ton récit. Sauf si à l'arrivée tu trouves que ça dénote trop, mais je te suggères de ne pas (trop) harmoniser les temps quand tu réécriras / corrigeras, il y a vraiment une fraîcheur en l'état.

Si ça peut te donner une indication, éventuellement, essaye de faire attention aux "ET" qui sont naturels quand on parle mais qui alourdissent peut-être ton texte. Par exemple : "Et là, les larmes ont coulé. Jeanne a perdu toute la force de prier, alors elle s’est tue. Et Dieu est arrivé, doucement, il l’a enveloppée de lumière et d’une espèce de chaleur toute douce, caressante. Et il a murmuré à son oreille : Je suis là. Je suis là, Jeanne, je suis là avec toi et je t’aime. Et elle a continué à pleurer et à rire en même temps tout en l’étreignant et en s’abandonnant dans ses bras."

C'est peut-être fait exprès (la répétition des "et" en début de chaque phrase, comme un inventaire à la Prévert) mais sur un texte avec une forme déjà parlée et brute, moi ça m'a semblé plus répétitif que maîtrisé. Voilà pour une critique que je trouve constructive, même si encore une fois ça se défend aussi de les laisser. :p
MarieZM
Posté le 30/01/2025
Ou sinon, si tu les laisses dans le paragraphe de façon maîtrisée, p-être justement essayer d'en retirer dans les autres paragraphes pour alléger le reste du récit et que ça fasse maîtrisé dans celui-ci. Qu'on voit vraiment la dynamique "Et la lumière fut".
RienQueJoanne
Posté le 31/01/2025
Re Marie ! Hyper heureuse si ça t'apprend des choses sur le milieu catho, c'est un vrai plus pour moi car c'est un monde vite un peu fermé (comme beaucoup d'autres d'ailleurs).

Le mélange des temps me vient naturellement, j'écris un peu au fil de la pensée et moi j'aime bien, donc je retiens ce que tu me dis au cas où j'aie peur un jour que ça dérange !

Pour ce qui est des "et", c'est partiellement "volontaire" dans le sens où ça me vient comme ça. Mais à la relecture c'est aussi beaucoup beaucoup de répétitions auxquelles je vais veiller à la relecture/réécriture/suite bref
MarieZM
Posté le 31/01/2025
Franchement, c'est très immersif ces jeunesses chrétiennes et c'est un beau théâtre pour ton histoire ! (le monde réel est plein de magie hein :p)

Et si tu te demandais si ça peut intéresser d'autres personnes que toi, avec ta manière de raconter les événements avec de la vie, de l'émotion et du recul, la réponse est OUI.

A titre personnel, c'est vraiment pas une problématique qui m'intéresse, le rapport à Dieu, mais tu la rends intéressante, dans ta manière d'en parler, et c'est ça qui fait une "bonne histoire" à mon humble avis. :)
RienQueJoanne
Posté le 04/02/2025
Eh bien je m'étais posé la question, de si ça avait un intérêt pour quiconque d'autre que moi, alors ça me fait vraiment chaud au coeur de le savoir. En plus ça aura au moins créé ces discussions que je trouve personnellement hyper enrichissantes !
Alésia
Posté le 21/01/2025
Ne pas avoir la foi est une grande souffrance dans ma vie, et ton texte exprime très simplement pourquoi. Je trouve magnifique la simplicité avec laquelle tu contes la relation que Jeanne entretient avec Dieu. Il y a quelques fautes d'orthographe qui se sont glissées dans le texte, j'ai oublié de les noter mais je te conseille de le relire pour les repérer. :)
RienQueJoanne
Posté le 21/01/2025
Ça me touche que tu ressentes ça, merci. Pour les fautes d'orthographe, merci de le signaler ! Comme il s'agit d'un premier jet je ne les relirai peut-être pas tout de suite mais c'est bon à noter !
Syle
Posté le 08/01/2025
Bonsoir,

C’est profond tout en étant simple. Pour moi qui n'ai pas reçu la foi, je ne peux qu’imaginer que c’est une relation telle que tu la décris dans sa beauté et son réconfort. Une belle montée en gamme avant une chute que je ne peux qu’imaginer douloureuse…

Petites réflexions sur quelques points, si tu me permets :

“Elle y arrivait pas mal, à discuter avec lui, enfin, à en croire Maman.” Je pense qu’il manque un “sa” avant “Maman”, j’ai l’impression que sans, c’est le narrateur qui parle de sa propre mère.

“Comme un vieil oncle chez qui on irait déjeuner tous les dimanche matin mais il reste en cuisine, alors on a goûté ses plats mais on n’a jamais vu son visage.” La syntaxe et le mix des temps dans la même phrase me laisse perplexe, je pense que ca serait plus claire comme ca “Comme un vieil oncle chez qui on irait déjeuner tous les dimanches matin mais qui resterait en cuisine, alors on aurait goûté ses plats mais on n’aurait jamais vu son visage.”

Je te souhaite beaucoup de courage dans ton écriture, cela semble être un sujet très personnel, et peut-être expiatoire, je ne peux que te soutenir.
RienQueJoanne
Posté le 09/01/2025
Hello merci beaucoup ^^ Pas de souci pour les remarques, je ne corrige pas tout mais je prends !
Pour ce qui est de l'aspect expiatoire, il est présent mais cette version est quand même plus détachée de moi :)
Vous lisez