Le ciel était d’une couleur de sang et la terre d’encre. Il n’y avait pas un bruit, pas un signe de vie ; juste des relents acides et brûlants qui empoisonnaient l’air.
Elle connaissait cet endroit, elle y était déjà venue. Quelque chose se cachait ici, dans les profondeurs du désert. Quelque chose de dangereux.
Le sol se mit à bouger sous ses pieds. La terre se fissura, craqua comme la surface d’un œuf. Les battements de son cœur accélérèrent et elle hésita à s’enfuir. Des pattes jaillirent de l’amalgame de sable et de roches noires scintillantes, suivies d’une tête, d’un corps puis d’une queue touffue.
La créature s’extirpa du sol dans un grondement sourd, s’assit sur ses pattes arrière et leva le museau vers elle. Ça ressemblait à un fauve. Ses prunelles rougeoyaient comme deux braises sur son pelage de charbon et de petites cornes écarlates pointaient près de ses grandes oreilles surmontées de longs poils : un gros chat cornu – ou une petite panthère – au regard dérangeant d’intelligence.
Le félin la fixa de ses pupilles fendues, puis trottina vers elle. Elle esquissa un mouvement de recul, mais s’apaisa lorsque l’animal se frotta à sa jambe. Un ronronnement semblable au ronflement d’une forge montait de ses entrailles. Elle s’accroupit pour mieux l’observer. Trois petites taches blanches ornaient son flanc droit, au bas de son dos. Prudente, elle passa ses doigts dans le pelage et fut surprise par la chaleur qu’il dégageait.
Soudain, l’animal se détacha d’elle et fila plus loin. Il se retourna pour la regarder et poussa un miaulement. Voulait-il qu’elle le suive ? Elle se mit en route.
Ils marchèrent. Dans toutes les directions, le paysage était le même : rocailleux et vide. Elle commençait à se demander où l’emmenait le félin quand quelque chose se dessina à l’horizon. Un mont, qui formait un unique cône de roches noires. Son sang pulsa plus fort que jamais et ses entrailles se soulevèrent. C’était là-bas...
Une part d’elle voulut faire demi-tour, mais la montagne était déjà là. Elle se retrouva à son pied en une enjambée, comme si la terre s’était mise en branle pour les réunir.
Vue d’ici, la silhouette du mont était écrasante. Une fêlure courait sur son flanc. Le félin s’y précipita, miaulant pour qu’elle le suive. La faille était assez grande pour permettre à l’animal de s’y faufiler, mais elle ne passerait pas. Il commença à creuser. Il voulait qu’elle descende sous la terre. Son malaise augmenta. Elle n’aurait pas dû être ici. Elle ne devait pas aller en bas.
Le félin cessa de gratter le sable pour la regarder, puis miaula encore. S’il était là pour la guider, elle ne pouvait pas se perdre… non ? Les anges la protégeraient. Il fallait qu’elle y croie. Tant qu’elle y croyait, il ne pouvait rien lui arriver. Il y avait quelque chose qui l’appelait, au cœur de la montagne, quelque chose qui s’était réveillé… Elle devait en avoir le cœur net. Elle avança. Alors, la voûte au-dessus de leur tête se fendit à son tour dans un bruit de tonnerre.
Déchirant l’immensité rouge, des traînées bleue zébrèrent le ciel. Oreilles rabattues, le fauve se plaqua au sol et feula. Les serpents de lumière se déployèrent en autant de voiles violets qui ondoyaient avec légèreté dans les cieux et glissaient vers la terre. L’animal s’enfuit dans la faille.
— Eh, attends !
Elle s’élança, prête à le suivre, mais la montagne s’éloignait. Elle eut beau courir, la distance ne fit que s’agrandir. La lumière se referma sur elle, entravant ses mouvements, l’éblouissant. Soudain, le sol se déroba sous ses pieds et elle se sentit tomber.
Elle tombait dans le ciel, engloutie par une force électrisante et froide.
— Hayalee ? Eh, réveille-toi !
Hayalee se redressa en sursaut et s’écarta pour échapper à l’aura aveuglante. Elle passa par-dessus l’accoudoir du fauteuil et s’effondra sur les dalles.
— Woh ! Tu fais pas semblant quand tu fais un cauchemar.
Elle cligna des paupières et les derniers points de lumière qui dansaient devant ses yeux s’estompèrent.
Elle n’était pas dans un désert, pas plus que dans son lit, mais dans une pièce basse de plafonds plongée dans le noir. Il lui fallut quelques secondes pour se souvenir où elle était et comment elle était arrivée là : la bibliothèque des souterrains de l’Alliance. Elle était en train de lire lorsqu’elle s’était assoupie.
— Ça va ? demanda la silhouette de Saru, penché par-dessus l’accoudoir.
Les poils hérissés sur la nuque, Hayalee inspira un bon coup pour se calmer.
— Ça va, oui, souffla-t-elle, la tête encore pleine d’images.
Avait-elle déjà rêvé de ce désert de roches noires ? Sur le moment, elle avait eu la conviction de bien connaître l’endroit, mais maintenant qu’elle était éveillée, elle n’en était plus si sûre. Idem pour l’animal : quelque chose chez lui avait paru drôlement familier sans qu’elle puisse mettre le doigt dessus.
— Pourquoi est-ce qu’on est dans le noir ? s’étonna Hayalee.
— Toutes les bougies et les lampes se sont éteintes d’un coup, juste avant que tu te réveilles…
Elle se mordit la lèvre.
— Pardon.
— C’est rien, assura Saru. C’est mieux que si t’avais foutu le feu à la bibli.
Hayalee ne voulait même pas y penser. Le corps perclus de courbatures, elle s’assit au coin de la table basse, trop secouée pour tenter de rallumer les lampes. Elle n’était pas sûre d’en être capable, de toute façon. Son rêve avait relancé les frissons que son bain du soir était parvenu à chasser. Elle se sentait à nouveau aussi faible qu’au retour de sa séance d’entraînement avec Frowin. Ses muscles la lançaient.
— Ça devait être un sacré cauchemar, reprit Saru.
— Oui et non. Concrètement, il n’y avait rien de très effrayant, mais c’était surtout… l’ambiance. Et la chute.
Si le désert lui avait inspiré de l’angoisse, l’étrange lueur qui l’en avait arrachée l’avait franchement terrifiée. Elle s’humecta les lèvres et fit de son mieux pour décrire le paysage, le chat à cornes et toutes les émotions et certitudes qui l’avaient traversée.
— Tu fais des rêves aussi bizarres que les miens, commenta Saru après qu’elle lui eut rapporté sa dégringolade dans le ciel. Ça me rassure.
Le pied d’Hayalee buta sur quelque chose. Elle se pencha, non sans grimacer de douleur, et ramassa l’énorme livre relié de cuir sur lequel elle avait sombré.
— Tu devrais peut-être pas te farcir la tête avec ces trucs, aussi.
— Hum…
L’ouvrage versait dans la démonologie. Saru avait sûrement raison. Ces histoires de cercles des Enfers gouvernés par toutes sortes d’abominables démons n’étaient certainement pas la meilleure lecture de chevet. D’un autre côté, la sensation de froid qui avait accompagné sa chute à la fin du rêve lui rappelait ce qu’elle avait éprouvé avant de s’évanouir lors de son premier entraînement avec Frowin.
Déjà six jours qu’Hayalee retrouvait le commandant en second tous les après-midi pour s’exercer. Elle n’arrivait toujours pas à décrocher le foulard sans faire de ravages – Frowin bougeait trop vite – mais faire appel au Feu avec la panique au ventre lui était devenu indéniablement plus facile. Aujourd’hui, elle n’avait pas fait un seul trou à ses vêtements. Et puis, à force d’essuyer des coups, elle finirait peut-être par ne plus sentir la douleur. En attendant, elle avait l’impression de s’en remettre de moins en moins vite.
De son côté, Saru passait presque tout son temps à étudier pour rattraper son retard. Hayalee avait pris l’habitude de l’accompagner à la bibliothèque des souterrains après le dîner, où ils restaient bien après le départ de l’archiviste. Hayalee en profitait pour glaner des informations sur les Descendants.
Son échange avec Lisandra avait remué quelque chose. Cette dernière avait raison : ici, Hayalee avait accès à des connaissances qui lui étaient interdites à Psamias. Fantaisie ou réalité, ça valait le coup de s’y intéresser. Sans parler des livres dont le contenu aurait été jugé subversif par le gouvernement, l’Alliance possédait une belle collection d’ouvrages traitant des Descendants, des Élus ou des Portes : récits d’aventure, d’Histoire ou de philosophie, parfois écrits par des Descendants eux-mêmes. Plus elle en apprendrait, mieux elle pourrait démêler le vrai du faux. La question des clans la taraudait particulièrement.
La question de son clan la taraudait particulièrement… Savoir à quelle lignée elle appartenait l’aiderait peut-être à mieux comprendre et maîtriser ses dons. Elle cherchait à se renseigner sur les Descendants de Nililar, l’archange qui commandait aux éléments – sa meilleure piste – quand elle était tombée sur « Les dix Cercles des Enfers ». Une curiosité morbide l’avait poussée à ouvrir le livre. Elle y avait alors reconnu les noms de quelques rois-démons, dont Zyilar « Gouverneur du 4ème cercle, maître de la ruse et du mensonge… Il se présente sous la forme d’une créature à trois têtes, celles d’un crapaud, d’un homme et d’un chat… Il tourmente l’âme humaine en la berçant d’illusions… ». Kuka, le mercenaire qu’ils avaient affronté à Uwata, était définitivement de ce bord-là.
Le malaise d’Hayalee avait augmenté d’un cran lorsqu’elle était tombée sur Ravilhiln « Gouverneur du 1er cercle… Roi des mers et océans… Monstre marin grand comme sept galions… Il domine sur l’envie et engendre la jalousie… Sur terre, il répand le chaos ». « Roi des mers et océans »… se pourrait-il que Cogh soit lié à ce démon ? Elle avait décroché à Aos « Prince de la Mort… Se repaît de la Vie elle-même… Possède les âmes assoiffées de meurtre et contrôle l’armée des Morts… Il a de grandes et longues dents dont il se sert pour déchiqueter des charognes, un corps effroyable, tout rempli de plaies, et a pour vêtement une peau de renard ». De quoi faire cauchemarder Hayalee longtemps. Malheureusement – ou heureusement –, elle n’avait trouvé aucun démon associé au feu.
— Il est quelle heure ? demanda-t-elle en abandonnant l’horrible livre sur la table.
— Je sais pas trop, marmonna Saru, il était minuit passé la dernière fois que j’ai jeté un œil au sablier. Et j’ai toujours pas fini ce foutu devoir de géographie… je crois que je vais laisser tomber pour ce soir.
Il s’agenouilla près de la table basse, cherchant à tâtons ses feuilles de parchemin parmi les livres. Hayalee allait lui proposer d’allumer une bougie quand une porte grinça, à l’autre bout de la pièce. La lumière du couloir creva l’obscurité et des bottes claquèrent entre les étagères. Quelqu’un remontait l’allée centrale à grands pas. Bien qu’ils aient parfaitement le droit d’être ici, Saru et Hayalee se figèrent par réflexe.
La silhouette d’une femme se découpa dans le noir. Elle ne remarqua pas les deux adolescents qui la fixaient depuis le coin salon, raides comme des statues, et fila vers la porte derrière le bureau de l’archiviste. Une clef cliqueta dans une serrure, puis la femme entrouvrit le battant.
— Iltaïr ? appela-t-elle d’une voix claire. Tu es toujours là ?
Elle s’engouffra dans la pièce et Hayalee et Saru se détendirent une fois la porte refermée.
— Iltaïr est juste à côté ? s’étonna Hayalee en baissant le ton. Tu l’as vu passer ?
— Non, mais cette pièce a une autre entrée qui donne directement dans le couloir.
— Qu’est-ce qu’il y a derrière cette porte ?
— Les archives, dit Saru qui s’était redressé. Très peu de personnes y ont accès. C’est là qu’on entrepose les rapports de mission et toutes les infos sur les membres… Je me demande ce qu’Iltaïr fabrique là, à cette heure. Et ce que Mara lui veut.
— Mara ?
— Zora Mara. La chef de l’Alliance.
Hayalee réprima une exclamation. La chef de l’Alliance en personne ? C’était la première fois qu’Hayalee la voyait – et elle ne l’avait même pas vue.
— C’est une Descendante ?
— Non, répondit distraitement Saru. C’est pas une obligation pour diriger l’Alliance.
Il avança entre les fauteuils, le pas hésitant.
— Ça doit forcément avoir un rapport avec cette histoire de fuite… marmonna-t-il. Iltaïr a dit qu’il enquêterait. Je me demande s’il en a parlé à Mara.
Un bruit, semblable à un rire dénué de joie, s’éleva de la pièce voisine. Il n’en fallut pas plus pour que la curiosité ait raison des hésitations de Saru.
— Qu’est-ce que tu fais ? chuchota Hayalee en le voyant se diriger vers la porte des archives.
— À ton avis ? On a failli y passer, à Mas. Si Iltaïr a des pistes sur l’identité de celui qui nous a trahis, j’aimerais bien le savoir.
Là-dessus, il colla son oreille au battant. Hayalee se mordit la lèvre, puis se décida à le rejoindre. Si Saru se permettait d’écouter aux portes, elle pouvait bien en faire autant ? Visage tourné vers lui, elle appuya prudemment sa joue contre le bois verni.
Les sons lui parvinrent étouffés et elle ne discerna pas immédiatement les mots, jusqu’à ce que la femme s’exclame :
— Tu as perdu l’esprit !
La voix d’Iltaïr lui répondit, douce et posée, si bien qu’Hayalee dut boucher sa seconde oreille pour entendre.
— On ne pourra pas le protéger éternellement, Zora. Il faut qu’il apprenne à se débrouiller.
— En le jetant dans les griffes de Jun ?
Il y eut un instant de silence. Iltaïr lâcha avec une pointe de sarcasme qui ne lui ressemblait pas :
— Es-tu vraiment concernée par sa sécurité… ou redoutes-tu simplement de perdre ce qu’il pourrait nous apporter ?
— Évidemment que je me soucie de sa sécurité, rétorqua sèchement son interlocutrice. C’est assez clair qu’il ne sait pas où se trouve la porte.
Hayalee retint son souffle. La porte… ? Parlait-elle d’une des Portes de la légende ?
— … mais il y a beaucoup de gens, là, dehors, qui le croient encore, poursuivit Mara. Il sera la cible de tout le monde !
— D’où ma suggestion.
Elle siffla quelque chose, trop bas pour qu’Hayalee puisse l’entendre.
— J’ai confiance en lui, oui, répondit calmement Iltaïr. Et en leur capacité à tous. On ne pourra pas le garder éternellement ici. Si l’on continue à le priver de sa liberté, il nous tournera le dos.
Tout ça n’avait aucun sens, aux oreilles d’Hayalee. Elle essaya de capter le regard de Saru pour l’interroger, mais la pénombre voilait son visage.
— Iltaïr… commença Mara, d’un ton maîtrisé. Tu as fait plus que n’importe qui pour l’Alliance et tes conseils sont toujours très appréciés, mais avec ces espions dans nos rangs et tout ce qui se passe dernièrement, ça me semble être une très mauvaise idée.
— Si mes intuitions sont justes, ça pourrait bien être notre meilleure chance d’arrêter Jun.
La réponse fusa, froide et tranchante :
— Si je ne m’abuse, se fier à tes intuitions a coûté la vie au dernier chef de l’Alliance.
Saru s’écarta vivement du battant et Hayalee l’imita dans un sursaut de frayeur, persuadée qu’ils avaient été découverts. Elle faillit détaler, mais Saru resta debout dans le noir, les bras ballants. Sa poitrine se soulevait au rythme profond de sa respiration.
— Saru… ? chuchota-t-elle, inquiète.
Une seconde, il parut sur le point de se pencher à nouveau pour continuer à écouter, puis il se ravisa. Reculant, il se cogna au coin du bureau de l’archiviste, tourna les talons et partit sans un mot, sans même se soucier de récupérer ses affaires. Hayalee s’empressa de lui emboîter le pas, priant pour qu’on ne les ait pas entendus.
La lumière du couloir leur sauta au visage. Saru ne ralentit pas d’une mesure et Hayalee dut pousser sur ses jambes courbaturées pour ne pas le perdre.
— Eh, ça va ? lui demanda-t-elle après qu’ils eurent mis une distance acceptable entre eux et la bibliothèque. Qu’est-ce qui t’arrive ?
— Rien. Ça va. Je vais me coucher.
Le ton était sec, presque agressif, et il cloua Hayalee sur place.
— Saru, attends… !
Elle crut qu’il allait la planter là, mais son désarroi ne dut pas le laisser insensible, car il consentit à s’arrêter. Tête basse et poings serrés, il dansa d’un pied sur l’autre, l’air d’hésiter entre vider son sac ou partir en courant. Était-ce d’apprendre qu’Iltaïr était responsable de la mort de quelqu’un qui le bouleversait à ce point ? Ou tout ce qu’ils avaient entendu avant ?
— Tu… Tu sais de qui ils parlaient… ? bredouilla-t-elle.
Il lui présentait son profil gauche à demi caché sous les mèches folles de ses cheveux, aussi ne vit-elle que ses mâchoires crispées. Les secondes s’étirèrent. Elle voulut faire un pas dans sa direction.
— Mon grand-père, lâcha-t-il alors. Le dernier chef de l’Alliance, c’était mon grand-père.
Le lendemain, Saru ne se montra pas au petit-déjeuner. Ses affaires n’étaient plus à la bibliothèque et l’archiviste confirma qu’il était passé les récupérer tôt le matin. Hayalee alla vérifier qu’il n’était pas sur la plage, trouva le courage de monter jusqu’aux écuries, puis revint à la bibliothèque – au cas où il y remettrait les pieds : sans succès.
Depuis le début, Hayalee avait eu le sentiment que Saru jouissait d’un statut particulier. Tout le monde le connaissait, on le laissait aller et venir à sa guise, accompagner Iltaïr en mission bien avant qu’il ait officiellement rejoint l’Alliance, ce malgré son jeune âge… Elle avait cru que ces privilèges étaient dus à sa proximité avec Iltaïr. Maintenant, elle se demandait si le commandant n’avait pas pris le garçon sous son aile parce qu’il était le petit-fils du précédent chef de l’Alliance. Sa famille avait sûrement péri pour la cause des rebelles ; aujourd’hui, les rebelles s’occupaient de lui.
Iltaïr s’occupait de lui. Hayalee ne saisissait pas toutes les subtilités du lien qui les unissait, mais elle pouvait concevoir que Saru soit contrarié d’apprendre qu’Iltaïr avait une part de responsabilité dans la mort de son grand-père. L’imaginer seul en train de ruminer cette pensée attristait Hayalee. Elle songea à aller frapper à la porte de sa chambre, mais renonça. Si Saru s’y était retranché, c’était qu’il ne voulait pas en parler.
Elle ne le croisa pas plus au repas de midi et ce fut avec un pincement au cœur qu’elle partit retrouver Frowin pour son entraînement. Mais Hayalee était si préoccupée par la conversation qu’ils avaient surprise et par la réaction de Saru qu’elle eut toutes les peines du monde à se concentrer sur l’exercice. Le Feu se révéla aussi capricieux que trois mois plus tôt, tantôt violent, tantôt faiblard, et Frowin l’envoya cinq fois au tapis en moins de vingt minutes. Hayalee se montra si médiocre qu’il décida d’écourter la séance.
— Une eau troublée est une eau qui stagne, déclara-t-il en s’allumant une cigarette.
Depuis le retour désastreux de leur premier entraînement, Frowin s’était résigné à utiliser les barques, s’épargnant d’avoir à porter la jeune fille quand celle-ci n’avait plus la force de mettre un pied devant l’autre. Habituellement, Hayalee ramait à l’aller en guise d’échauffement et le commandant les rapatriait pendant qu’elle agonisait au retour. Aujourd’hui, Frowin fut sans pitié et lui intima de prendre les rames. Elle se plia à la corvée en dépit des courbatures, trop honteuse pour protester.
La première moitié de la traversée se passa dans un silence épais. Couché en travers de la barque, les yeux fermés, Frowin semblait bien parti pour faire la sieste.
— Qu’est-ce que c’est ? lâcha-t-il alors, sans se donner la peine de soulever une paupière.
— De… quoi ?
— La chose qui te préoccupe : qu’est-ce que c’est ?
— C’est…
Elle faillit dire « rien ».
— Est-ce que je peux vous poser une question ?
— S’il le faut.
— C’est à propos du précédent chef de l’Alliance.
— Noah Evan ?
— Comment… Comment est-ce qu’il est mort ?
— Tué. Par un ennemi.
Voilà qui ne l’avançait pas beaucoup.
— Je ne sais pas si je suis le mieux placé pour te parler de Noah Evan. Il est mort un an après que j’ai rejoint l’Alliance, je ne l’ai pas beaucoup connu. Je sais qu’il était très apprécié. Il avait un don pour comprendre les gens et les toucher.
— C’était un Descendant ?
— Hun… Capable de faire fondre en larmes le pire des montres avec de simples paroles. Un pacifiste dans l’âme. Mais son refus d’avoir recours à la violence lui aura été fatal.
— Qu’est-ce qui s’est passé ?
— Il a fait face à quelqu’un qu’on n’arrête pas avec des mots.
— Qui ?
Frowin rouvrit les yeux.
— Tu poses beaucoup de questions. Pourquoi cet intérêt soudain pour Noah Evan ?
— C’était juste… Je suis amie avec Saru et… c’était son grand-père.
— Pourquoi ne pas l’interroger, lui ?
Hayalee ne répondit pas. Frowin retourna à sa sieste et ne réémergea plus jusqu’à ce que l’embarcation percute le ponton. Là, il quitta la barque qu’Hayalee s’échinait à rattacher au quai et s’alluma une nouvelle cigarette.
— Tu devrais peut-être changer de méthode, souffla-t-il en même temps qu’un nuage de fumée.
— Vous voulez dire… faire un autre nœud ?
Il la fixa longuement, puis dit, plus blasé que jamais :
— Je te parle de ton feu.
— Oh !
Hayalee rougit jusqu’à la racine des cheveux. Il avait le don de la faire passer pour une idiote.
— Tu es trop statique, expliqua-t-il.
Comme elle ne comprenait pas, il alla se planter au bout du ponton, cala sa cigarette entre ses lèvres et prit une posture de combat : un bras tendu devant lui, l’autre replié contre son flanc. Il inspira par le nez, puis donna un grand coup de poing dans le vide. Une brise agita les cheveux d’Hayalee. Devant Frowin, une force invisible fendit l’océan, gelant l’eau et faisant scintiller l’air sur une longueur impressionnante.
Il laissa retomber son bras, tira une bouffée et se retourna vers une Hayalee médusée.
— Tu vois ? Comme moi avec la glace, tu pourrais guider les flammes avec tes gestes. Ça demande moins d’efforts et de concentration que de se reposer entièrement sur la vue. C’est plus intuitif, plus rapide. Alors utilise tes mains.
— Vous… pensez vraiment que je peux faire ça ?
— Il n’y a pas de raison.
Hayalee baissa le nez sur ses mains. Pas de raison, oui… hormis son incompétence crasse. Frowin soupira.
— Après quoi est-ce que tu cours, au juste ?
Elle releva la tête.
— Comment ça… ?
— Qu’est-ce que tu veux ? Quel est ton but ? Je ne te demande pas de me répondre, ça ne me regarde pas, mais pose-toi la question. Tu t’es engagée dans l’Alliance et dis vouloir partir en mission, mais tu fuis les conflits comme la peste. Ça transpire dans ta façon de te battre : tu es sans cesse dans l’évitement, jusqu’au moment où tu te retrouves coincée. Alors, la peur prend le dessus et tu perds le contrôle.
Elle aurait aimé le contredire, assurer avec conviction qu’elle était prête à se battre, qu’elle savait ce qu’elle voulait : dompter ses pouvoirs et être réunie avec sa famille.
Ce n’est pas en risquant ta vie aux quatre coins du monde que tu les retrouveras… fit remarquer une petite voix, dans son esprit, et les mots lui restèrent en travers de la gorge.
— Tu devrais mettre tout ça au clair avant la suite.
— La suite ?
Il ôta la cigarette de sa bouche, souffla un nuage de fumée et dit :
— Iltaïr te demande. Sois dans son bureau à dix-sept heures.
Hayalee fut devant la porte du commandant avant même que les clochettes aient fini de sonner leurs cinq coups. Un rien nerveuse, elle inspira et frappa contre le battant. Pas de réponse. Elle allait tenter d’actionner la poignée, mais une voix l’arrêta :
— C’est inutile, il n’y a personne.
C’était Lisandra, qui avançait dans le petit hall. Hayalee ne lui demanda pas comment elle savait ça – Lisandra avait des yeux partout où il y en avait.
— Oh, salut, fit Hayalee. Ça va ?
La blonde fronça le nez :
— Pitiez, épargnons-nous les politesses ennuyeuses. Par ailleurs, j’ai toujours détesté cette question, « ça va »… qu’est-ce que ça signifie au juste ? Si tu veux savoir ce que j’ai pu faire récemment, pose-moi des questions précises.
— Euh, très bien…
Bras croisés, Lisandra la détailla des pieds à la tête et, passant de l’agacement à la curiosité, lâcha :
— Alors comme ça, tu travailles ta singularité ? En quoi consiste l’exercice ?
— Comment tu sais ?
— On peut voir l’île voisine flamber tous les après-midi, dit Lisandra en roulant des yeux.
Hayalee s’assit sur le banc près de la porte et commença à lui raconter ses entraînements – en omettant les détails trop compromettants. Comme il fallait s’y attendre, Lisandra se montra très intéressée par le pouvoir de Frowin et ne manqua pas de lui poser tout un tas de questions très techniques auxquelles Hayalee ne sut pas répondre. Elle cessa d’essayer quand Saru émergea d’un couloir.
— Tiens, il vous a aussi convoquées ?
Mains dans les poches, Saru se laissa tomber à côté d’Hayalee, qui eut toutes les peines du monde à ne pas le dévisager. Elle aurait voulu lui demander où il était passé, comment il allait, mais la mine fermée qu’il affichait l’en dissuada. De toute façon, il ne se confierait jamais devant Lisandra.
— Et il est en retard, ajouta-t-il, amer.
— Tu sais ce qu’il nous veut ? risqua Hayalee.
Se pouvait-il que le commandant sache qu’ils avaient espionné sa conversation avec la chef de l’Alliance ? Non, s’il s’agissait de ça, Lisandra ne serait pas là. Saru haussa les épaules, l’œil fixé sur la nature morte suspendue au mur d’en face. Lisandra répondit à sa place :
— Ce n’est pas évident ?
Iltaïr débarqua avant qu’elle ait pu éclaircir la situation. Un carnet plein de feuilles volantes sous le bras, il les salua avec son enjouement habituel, puis déverrouilla la porte de son bureau.
— Désolé de vous avoir fait attendre, les jeunes ! Entrez.
Lisandra s’engouffra la première dans la pièce et Saru et Hayalee suivirent en s’efforçant de ne pas cogner dans une pile de livres ou un meuble. Iltaïr largua son carnet sur la table la plus proche et battit un briquet. Des étincelles jaillirent : il enflamma une première bougie, claqua la porte dans son dos et fila vers le coin salon où il alluma plusieurs lampes.
— Ne restez pas debout, venez vous asseoir, dit-il en débarrassant le canapé de la pierre à aiguiser et des ouvrages qui y traînaient.
Il y avait aussi un fauteuil, mais si encombré qu’on le devinait à peine sous l’amoncellement de parchemins et de vêtements. Hayalee, Saru et Lisandra n’eurent d’autre choix que de se serrer sur le canapé – une proximité dont ils se seraient tous passés.
Dos tourné, Iltaïr renifla le contenu d’une bouilloire suspendue dans l’âtre de la cheminée et entreprit d’allumer le feu. Malgré l’impatience qui les dévorait, les trois adolescents le regardèrent empiler paille et petit bois sans rien dire. Peut-être avait-il découvert l’identité de celui qui avait vendu des informations et manqué de les faire tuer ? Hayalee ne voyait pas d’autre raison à leur présence à tous.
Le feu lancé, Iltaïr se redressa et fit craquer sa nuque avec un soupir de contentement. Il avait retrouvé son apparence d’adulte depuis la dernière fois, mais ses traits demeuraient jeunes. Les pattes d’oie au coin de ses yeux noirs n’étaient pas revenues, pas plus que les rides qui marquaient habituellement son front et soulignaient son sourire. Le regard qu’il promena sur eux, en revanche, était toujours aussi pénétrant – un regard que Saru évita soigneusement.
— Avant toute chose… commença-t-il.
Il fouilla ses poches et en extirpa un mouchoir plié en quatre qu’il remit à Lisandra. Cette dernière l’ouvrit, dévoilant deux petites plaques de métal enfilées sur une chaîne. Assise à ses côtés, Hayalee n’eut aucun mal à distinguer le nom « Lisandra Sigrune » et le matricule « 012103 » qui y étaient gravés.
— Je croyais que tu avais d’autres projets ? l’interpella Saru, qui s’était penché pour mieux l’observer.
Lisandra passa la chaîne autour de son cou et haussa le menton.
— D’autres projets que de rester ici à assister mon père aux laboratoires, oui. J’ai demandé à être envoyée en mission.
— Pourquoi ?
Hayalee partageait l’incrédulité de Saru. Lisandra ne donnait pas l’impression d’être le genre de personne encline à risquer sa vie pour celle des autres.
— Parce que, répondit-elle, j’aimerais mettre mes talents au service de la cause de l’Alliance.
Saru la dévisagea longuement, l’air de se demander qui était cette fille dans le corps de Lisandra, puis il se fendit d’un rictus désabusé et hocha la tête.
— Ah, ouais, bien sûr… tes talents de menteuse ?
— Vous avez chacun vos raisons de vouloir vous engager, intervint Iltaïr. Elles ne regardent que vous et – qui sait – elles pourraient bien finir par changer.
Les paroles du commandant remuèrent quelque chose de désagréable dans les entrailles d’Hayalee. Sur le canapé, elle ne fut pas la seule à se dandiner ou à détourner les yeux.
Ignorant le malaise qu’il avait jeté, Iltaïr attrapa une grosse bûche dans le panier à bois, la coucha à côté de la cheminée et s’y installa.
— Tout ce qui importe, dit-il, c’est que vous compreniez bien qu’en portant ce matricule, vous représentez l’Alliance. Il vous faudra agir en conséquence. Obéir aux ordres, vous montrer responsable et, surtout, ne jamais perdre de vue notre préoccupation première : secourir et protéger. Vous manquez peut-être encore de convictions, mais vous avez chacun beaucoup de potentiel et de talent. Ensemble, je suis certain que vous arriverez à prendre les bonnes décisions.
Les mots semblèrent tomber dans l’oreille d’une brochette de sourds, tant il s’écoula de secondes avant que l’un d’eux réagisse.
— Excusez-moi, commença Lisandra, lèvres pincées. Je ne suis pas sûre de bien comprendre… Quand vous dites « ensemble », vous voulez dire…
— En équipe.
Hayalee battit des cils, Saru lâcha un « dequeuequoi ? » et Lisandra se raidit comme si elle s’efforçait d’encaisser un énorme coup de poêle avec dignité. Si cette dernière avait deviné la raison de leur présence ici, visiblement, elle n’avait pas anticipé tous les détails.
— Vous avez fait du beau travail, à Mas, dit Iltaïr. Après une période d’ajustement, je suis certain que vous formerez une excellente équipe.
— Est-ce qu’une équipe n’est pas censée être composée d’un Descendant et de deux membres de la section Combattants ? interrogea Lisandra.
— Tu as bien fait tes devoirs. En théorie, oui, mais il faut aussi faire avec les effectifs. Et les profils de chacun.
Les sourcils de Lisandra étaient si froncés qu’ils n’allaient pas tarder à se toucher. On aurait dit que le commandant venait de lui présenter un calcul assez simple qu’elle répétait encore et encore dans sa tête sans parvenir au même résultat que lui.
— Vous ne pensez pas qu’il serait plus sûr de nous associer à des personnes plus expérimentées ? dit-elle finalement.
— Oh, si. C’est pourquoi j’ai affecté un quatrième membre à cette équipe. Quelqu’un de très compétent, qui a une grande expérience du terrain.
Dans l’âtre, une bûche craqua et la bouilloire se mit à siffler. Iltaïr attrapa un des pots remplis d’herbes séchées qui s’alignaient sur le manteau de la cheminée, puis tira à lui un bouclier sur lequel traînait un service à thé.
— Et ce quelqu’un a pas pu nous faire la grâce de sa présence ? lâcha Saru d’un ton mauvais.
— Eh bien, non, répondit Iltaïr, qui remplissait sa théière d’eau bouillante. Il est encore assigné à la base de Takmas.
Le commandant reposa la bouilloire en fonte, leva les yeux vers eux et déclara :
— Je dois m’y rendre demain. Vous allez m’accompagner. Comme ça, vous le rencontrerez et partirez pour votre première mission ensemble.
Hayalee sentit les battements de son cœur redoubler d’intensité. Les choses se concrétisaient. Elle allait bel et bien prendre part à la lutte de l’Alliance. Une bouffée d’angoisse la submergea. Elle en aurait chaviré si elle n’avait pas été coincée entre Saru et Lisandra. En plus de l’empêcher de vaciller, leur contact lui rappela qu’elle ne serait pas seule dans cette affaire, et la peur redescendit aussi soudainement qu’elle était montée.
Pour sa part, Hayalee était heureuse de faire équipe avec eux. Elle avait croisé les doigts pour accompagner à nouveau Saru en mission. Quant à Lisandra, son caractère avait beau être difficile à supporter, elle avait prouvé qu’on pouvait compter sur son intelligence et son sang-froid. Ni l’un ni l’autre ne frémit face à l’imminence du départ et Hayalee retrouva du courage dans le leur. À leur côté, les obstacles paraissaient moins insurmontables.
— Si vous n’avez pas d’objections, dit Iltaïr, soyez sur la plate-forme d’envol demain, au lever du soleil. N’emportez que le strict minimum.
— Ce sera tout ? demanda Saru.
— Ma foi, oui.
— Super.
Il se leva et prit la direction de la sortie. Iltaïr dut comprendre qu’il y avait plus dans cette attitude que son habituelle mauvaise humeur d’adolescent, car il le suivit d’un œil grave. Son regard revint sur Hayalee, qui piqua du nez sur ses genoux. Un instant, elle redouta qu’il l’interroge. Au lieu de quoi, il lança :
— Bien ! Qui veut une tasse de thé ?
Pour le cauchemar de Hayalee, bon, clairement, c'est pas anodin x) Pareil, le fait que Saru en ait aussi, ça me fait penser qu'ils sont liés et que c'est pas pour rien qu'ils ont tous les deux des cauchemars bizarres. Peut-être même Lisandra x) Mais je me fais peut-être des films ^^
Sinon, pour la conversation surprise, personnellement c'est la première partie qui m'intéresse le plus. La personne qui, selon les rumeurs, sait où est une Porte et qui est menacé, c'est Saru non ? Est-ce qu'il a réagi à cause de son grand père vraiment, ou à cause du débat sur le surprotéger ou non ? Si c'est bien ça pour la discussion, Iltaïr a eu gain de cause et c'est pour ça que Saru part en mission. C'est une façon de le protéger ou de mettre un hameçon pour le fameux Jun ?
Sinon, j'aime toujours autant le commandant ='D Le fait qu'il utilise des expressions liée à l'eau, j'ai beaucoup aimé ! J'avais espéré que ça serait lui qui partirait en mission avec le trio, mais il doit avec des trucs plus importants à faire :'(
Bon, du coup je suis curieuse de voir qui sera le nouvel arrivant dans le groupe, et à quel point la mission va mal se passer, est-ce qu'on va se retrouver avec Jun sur les bras ou pas ^^
Bon courage pour la suite =D
On te l’a fait pas, à toi. :p Aucune pièce du puzzle ne t’échappe, didondindon.
Les cauchemars/rêves sont pas anodins, non. J’embêterais pas le lecteur avec, sinon (j’ai pris la bonne résolution de virer tout ce qui est inutile).
Que j’aimerais répondre à tes questions… mais que je ne peux pas.
Rolala, une mission avec Frowin, c’est vrai que ce serait drôle. Mais il te dirait qu’il a effectivement plein de trucs méga importants à faire. Genre, la sieste.
Mais. J’espère que le quatrième membre de l’équipe saura te séduire et compenser cette déception.
Il se peut que la mission se passe mal, mais peut-être pas le pire des mal. Sinon, ben, ils sont morts. Et y a pus d’histoire. Et ce serait très triste.
Merci beaucoup Flammy ! J’ai pas mal de chapitres en réserve, prêts pour le postage. Comme personne lisait jusque là, je pensais poster ça tranquillou, au rythme de un chapitre par semaine. Mais je peux éventuellement m’adapter à ton rythme de lecture, aller plus vite ou plus lentement ? Tu me diras.
<3
A priori, je peux suivre deux chapitres par semaine, plus je ne sais pas vu que le bac approche et qu'il y a trop de boulot -.-" Mais c'est aussi à toi de voir selon ce que tu souhaites ^^
Deux par semaine, ça peut être faisable. On va voir ça !
Rolala, le bac... bon courage !