« Excusez-moi ? Madame Simon ? »
Affalée dans une chaise longue, devant sa maison, des cernes sous les yeux, Ellie releva la tête. Devant elle se tenait une dame vêtue d’un longue robe noire, un foulard qui nouait ses cheveux et des lunettes de soleil noires qui dissimulaient ses yeux. Elle portait un large sac en cuir qui paraissait très chargé. Son visage souriant couvert de rides trahissait son âge avancée, mais sa silhouette était très grande et élancée, à un tel point que sa tête projetait une ombre sur le visage d’Ellie.
Ellie ne savait pas qui était cette personne. Elle ne savait pas non plus comment elle était entrée dans son jardin. Encore la police ? Ellie se redressa sur son siège, irritée, et dit :
« Vous êtes de la police, ou juste une journaliste ?
— Ni l’un ni l’autre. Je suis là pour vous aider. »
Cela ne fit qu’irriter Ellie encore plus. Elle haïssait qu’on se moquait d’elle, encore plus en ces temps-là. Elle se leva, se tenant droite face à l’indesirable. Ellie faisait malgré tout une tête de moins et l'intruse ne réagit pas le moins du monde, continuant de sourire. Ellie articula lentement :
« Cela ne me fait pas rire. Sortez de ma maison, ou j’appelle les flics.
— Pourquoi ? répondit-elle tranquillement. Ils ne vous ont jamais rendu service.
— Sortez d’ici, c’est la dernière fois que je le dis.
— Je sais où est Arthur. »
L’intruse avait déclaré cela d’une voix froide, grave, perdant son sourire. Elle paraissait sérieuse, sincère, et pourtant Ellie se sentit malgré tout de plus en plus énervée. Sans prévenir, elle gifla violemment cette inconnue.
Celle-ci ne recula même pas, ne réagit pas, fixant de ses lunettes insondables Ellie Simon. Son sac en cuir remua, si imperceptiblement qu’Ellie douta si elle l’avait bien vu.
L’intruse avança d’un pas, et inconsciemment Ellie recula légèrement.
« Je suis capable de vous dire où est votre mari, Madame Simon, énonça calmement l’intruse. Je sais beaucoup de choses, et également ce qui se passe dans cette maison. Je connais ce qui vous menace, vous et votre fille. Vous allez m’écouter calmement, car je suis votre seule chance de survie. »
Tout en parlant, l’inconnue n’avait cessé de se rapprocher d’Ellie, qui n’était plus en colère. Cette femme te veut du mal. L’intruse commenca à ouvrir son sac en cuir.
Sans attendre, Ellie se retourna et courut rejoindre la porte d’entrée. Elle monta les marches du palier, et s’arrêta en face de la porte. Il y avait, couchée à ses pieds, une petite chose d’une vingtaine de centimètres de haut, à la forme vaguement humaine.
C’était une poupée de porcelaine.
Ellie prit la poupée et se retourna vivement, faisant face à l’intruse. Ellie porta la poupée à bout de bras, comme un bouclier de fortune. Ses bras tremblaient légèrement, le dos contre la porte fermée, le regard incertain. L’intruse resta au même endroit, la main dans son sac, agrippant visiblement quelque chose. Elle fixa tour à tour Ellie et sa poupée.
« Madame Simon, je ne veux pas vous faire du mal. Cela va être très risqué, mais je peux vous sauver. Comment s’appelle votre amie ? demanda-t-elle en fixant la poupée. »
Ellie demeura silencieuse tandis que l’intruse sourit et enleva ses lunettes. Même à plusieurs mètres de distance, Ellie put voir la pâleur de ses pupilles, ses orbites aveugles qui ne la fixait pas réellement, semblant voir des choses qui la dépassaient. Ellie hésita encore un court instant, puis répondit timidement :
« Elle s’appelle Marianne.
— C’est un très joli nom ! ponctua l’intruse d’une voix guilerette. Et je vous prie de m’excuser, mais puis-je vous demander où est votre fille ? »
Ellie se figa. Elle ne trembla plus, ne paniqua plus, n’hésita plus. Elle baissa les bras, tenant la poupée de tel sorte que celle-ci fixait l’intruse. Le visage d’Ellie était impassible. Toute sa silhouette était de glace, mais ses yeux trahissaient malgré tout ce qu'elle ressentait : de la haine.
Pour moi ? Ou pour autre chose ? pensa l’intruse. Elle soupira, et referma tranquillement son sac. Elle remit ses lunettes d’un geste fatigué.
« Je reviendrai vous voir quand vous serez prêtes, soupira-t-elle. Je ne peux que vous donner quelques conseils. Prenez soin de Marianne, mais méfiez-vous tout de même. Faîtes attention à votre fille, même si elle vous haît. Dormez toujours dans une pièce fermée à clé. Assurez-vous de toujours laisser une lumière allumée…
— Où est Arthur ? la coupa Ellie. »
Ellie posa cette question avec une voix détachée, froide, comme si ce n’était qu’un détail. L’intruse se retourna et rejoignit la sortie. Elle ajouta néanmoins d’une vois grave :
« Voyons, il n’a pas pu aller bien loin, puisque vous lui avez arraché deux membres. »
L'ambiance est extraordinaire.
Merde, t'es fort. Bravo.
La conclusion est parfaite, c'est poisseux à souhait, on se sent pas en sécurité. Et on a pas vraiment d'attachement aux personnages de la famille, peut être plus pour les personnages secondaires, ils sont plus humains le détective et la dame aveugle.
Je m'étais promis de pas commenter à toute barzingue, mais merde quoi...
Ca fait longtemps que je n'avais pas pensé à cette histoire, je n'avais perdu l'intérêt...
Mais je suis content que tu aimes ! Ça me motive pour donner l'histoire la conclusion qu'elle mérite (dès que je trouve... le temps... et l'inspiration....)
Et cette femme, c'est qui ? Une médium ou un truc comme ça ?
Bref, les chapitres ultra courts sous forme de scènes très séparées temporellement les unes des autres, ça marche très bien parce que c'est comme un puzzle à reconstituer.
A propos de puzzle... euh, Arthur est donc en pièces détachées... Parfait, ça manquait un peu XD
Je viens de parcourir en diagonale le commentaire juste en dessous et je dois dire que de mon côté, l'absence de description ne m'a pas gênée ni empêchée de visualiser. Tu as fait le choix de plans serrés sur l'action, mais ton récit est quand même évocateur (sans doute parce qu'il fait appel à des références presque universelles).
Je continue dans ma lecture des HO, mais je reviendrais peut-être dans quelque temps.
A+
J'avoue que l'histoire des poupées "maléfiques"... Mouais, pour moi ça a été trop fait (il faudrait un coup de fraîcheur, j'espère que ça sera le cas). Et le "Marianne", clairement, tu t'es inspiré de Netflix ? ^^
J'avoue que je ne m'attendais pas à la dernière phrase de ce chapitre. La dame, elle m'intrigue vraiment (j'ai une petite idée et j'espère que je me trompe)!
J'aurais aimé un peu plus de descriptions sur l'ambiance autour aussi :) Ça m'a manqué pour que je me mette vraiment dans l'histoire et que j'imagine à fond la scène.
Après j'aime bien car on sent que c'est glaçant, et vu que tu arrivais toujours à me surprendre avec tes chutes dans Le Branleur du Temps, je te laisse une chance et continue de lire ^^ J'espère vraiment que ce que j'imagine pour la suite est faux :) En espérant que c'est bien la mère qui pète un câble et pas la poupée ^^
Ps : je viens de voir qu'il y a un quatrième chapitre, je le lis dans la foulée!