20. La mort-sieste

Par Jowie
Notes de l’auteur : Chapitre 20 ! Wouhouu ! On a bien dépassé la moitié ! Que pensez-vous du rythme et des transitions dans ce chapitres ? N'hésitez pas à pinailler :D

Eleonara cessa de compter ses nuits à la Source des aveugles. Sgarlaad étant également Nocturne ; aucun d'entre eux ne dut réajuster son cycle hypnique. L'elfe passa tout de même les premiers jours à rattraper du sommeil et reprendre des forces dans une ouverture carrée en haut d’une paroi. Elle y accédait par une échelle, à l’instar de Sgarlaad qui, lui aussi, avait fait d’une découpure sa chambre à coucher.

Au moment de s'endormir, trois étages sous le niveau du grenier, Eleonara entendait les échos étouffés provenant de la Chambre des aveugles, un quartier qui pouvait autant rivaliser avec un cimetière qu'exploser en murmures, en pleurs, en cris et en rires. Tantôt silencieux comme des carpes, tantôt bavards comme des canards, les aveugles en avaient toujours à se dire.

Une fois ses blessures en majorité guéries, Eleonara put assister Sgarlaad dans les vapeurs et la fumée de l'âtre, entre les pelures de tous les fruits imaginables. Monsieur Yousef déposait les aliments dans le grenier, derrière la muraille de sacs de riz ; l'elfe et le Nordique montaient alors les récupérer, les préparaient à la Source et retournaient avec des plateaux de mets.

Eleonara et Sgarlaad étaient généralement seuls mais il arrivait que le Nordique reçut des visites de connaissances rencontrées au Bimaristan. Tous voulaient savoir où en était sa barque et admiraient sa « fameuse création » avec intérêt. Le Mikilldien, lui, cherchait surtout savoir qui d'entre les deux fils de Monsieur Yousef avait fait fuiter son secret. Eleonara observait cette affection et cet engouement d'un œil noir. Chaque jour, elle se convainquait un peu plus que leur « bonne cachette » n'était qu'un mythe.

Leur visiteur le plus assidu restait Monsieur Yousef. Sgarlaad était après tout son lecteur personnel : il lui lisait à haute voix toute correspondance ou documentation écrite, qu’elle fut triviale ou d’ordre majeur. Ainsi, Eleonara appris comment la communauté aveugle comptabilisait les dépenses et les entrées du lieu, recensait les admissions des malades, archivait les rouleaux d'informations concernant ces derniers et se chargeait de la logistique médicamenteuse et alimentaire. Elle embauchait et congédiait les médecins ; sans doute qu'elle avait autorisé l'assistanat d'Eleonara qui se demandait d'ailleurs ce que Razelhanout avait pu raconter pour les persuader de l'employer. Quelle excuse avait-il inventé maintenant qu'elle avait « disparu » ? Avait-il trouvé une remplaçante ?

Au moindre moment libre, l'elfe et le Nordique taillaient des clous de bois qui, avec l'humidité de l'eau, enfleraient et assureraient l'étanchéité de la lune-d'eau. Leurs mains occupées n'empêchaient pourtant pas leurs esprits de dériver. Sgarlaad en profitait pour entraîner Eleonara à l'expression orale et à la prononciation en mikilldien. Parfois, il se racontaient des histoires.

— As-tu entendu parler de la parabole du Bon Aveugle ? lança une fois le Nordique. Bien avant l'Ancien Temps, un éleveur perdit ses biens et son troupeau dans un incendie. En voulant sauver ses bêtes, le pauvre éleveur se brûla les yeux et ne parvint à épargner que le plus âgé de ses ânes. Sans bêtes et sans maison, l'éleveur demanda de l'aide auprès de ses voisins, les suppliant de lui donner du travail pour se nourrir, mais personne ne voulait l'embaucher car il était aveugle.

« Il quitta donc son village avec son âne, espérant trouver la chance ailleurs. Il marcha longtemps, sans être sûr de la direction. Fatigué, il s'arrêta au bord du sentier pour se reposer à l'ombre d'un olivier. C'est alors qu'il entendit : Au secours, au secours !  Un marchand était tombé dans un piège à panthère creusé dans le sol. Une petite voix conseilla l'éleveur : « Grimpe sur le char du marchand, agite les rênes et fuis. Revends ses marchandises et tu deviendras plus riche que tu ne l'avais été. »

« L’éleveur n'obéit pas à la petite voix. Il fabriqua une corde à partir de sa tunique et, l'ayant attachée à son âne, parvint à hisser le marchand hors du fossé. Le rescapé le remercia, lui offrit une pièce et poursuivit son chemin.

« Sous l'olivier apparut alors un djinn.

« — Je suis le génie habitant cet arbre tordu, dit-il. C'est moi qui ai tendu ce piège à cet homme. En l'aidant, tu as faussé mes plans car il s'agissait de ton voisin envieux qui a mis le feu à ton étable et qui t'a privé du sens de la vue. Son char, son cheval et sa cargaison t'appartenaient tous et pourtant, tu as refusé de t'en emparer. Ton voisin t'a reconnu et pour ton noble service ne t'a offert qu'un ridicule sou. Ici, à cet emplacement même, je fonderai le premier caravansérail en ton honneur, où les voyageurs et leurs montures se reposeront saufs dans une enceinte gardée. Pour avoir sauvé l'homme qui t'a doublement offensé, je te donne un présent. À toi de choisir, parmi mes cadeaux, celui que tu souhaites car je ne peux t'en céder qu'un. »

« Trois objets se matérialisèrent devant le djinn, qu'il désigna tour à tour.

« — Lave-toi avec l'eau de ce bol et tu recouvreras la vue. Tue ton voisin avec cette sagaie et tu récupéreras ce qui t'appartiens. Chausse ces chaussures et ton voyage dans cette vie sera moins rude.

« L'aveugle choisit les chaussures.

« — La vue ne me sert à rien, car si j'avais vu mon voisin, la rancœur m'aurait aveuglé et je me serais enfui sans le secourir. Si je l'avais tué, ma mauvaise conscience serait devenue mon ombre. Je suis fier d'avoir sauvé mon ennemi. Lorsque je mourrai, je n'aurai aucun regret.

« Stupéfait par ce discours, le djinn lui intima de suivre le fleuve jusqu'à la mer, là où l'attendrait son bonheur. L'éleveur obéit. Arrivé à l'estuaire, il bâtit une humble cabane au cœur d'une nature flamboyante. Là, il se dédia aux soins des malades, accueillant nomades, mendiants, rois et pèlerins sous son toit. Un toit que l'on ne tarda pas à surnommer le Bimaristan.

Pendue à ses lèvres, Eleonara devait papillonner des cils pour remettre pied à terre.

— Ça crève la moustache, s'exclamait-elle à la fin de ses contes.

L'expression typiquement opyrienne arrachait un sourire à Sgarlaad, qui baissait humblement le front.

— Je te remercie.

Eleonara se contentait de l’observer tristement. Il irradiait une énergie âgée ; pas uniquement à cause de sa chevelure décolorée. Ses mouvements, mêmes les plus infimes, semblaient réalisés dans l’eau : lents, lourds, avec de la résistance. L'elfe ne savait pas ce qu’il était advenu d’Agnan, mais elle se souvenait de lui comme un plaisantin malicieux. Sgarlaad, lui, relevait de la statue de pierre, effigie d’un guerrier tombé au combat, d’un souffle qui s’était dissipé. Il avait toujours dégagé quelque chose de solennel – l'elfe commençait à en saisir la provenance –, mais aujourd’hui, cette solennité lui poussait autour comme une vigne de désolation.

Une vigne qui ne tarda pas à s’éprendre d’Eleonara.

 

— Ne fais pas ça, tu finiras comme moi, s'écria Sgarlaad.

Eleonara perçait ses boutons au-dessus de la Source. Se lavant régulièrement depuis son arrivée, elle s'était débarrassée de son maquillage foncé comme d'une peau morte, ce qui mettait davantage ses rougeurs en valeur.

L'intervention inattendue de Sgarlaad manqua de la faire verser dans le bassin. Elle se retourna sur le qui-vive, son visage couvert de pustules et de plaques plus cramoisies que d'habitude. Sgarlaad pointait vers ses joues à lui, trouées par ses cicatrices d'acné.

— Si tu les ignores, si tu les soignes, ça partira. Il faut juste les endurer.

Il ne le savait pas mais se planter les ongles dans la peau et se laisser des cicatrices était une sorte rituel punitif que Eleonara s'infligeait. Elle avait beau vouloir croire en la lune-d'eau, le doute la rongeait, se nourrissant de la maladie de Sgarlaad, des jours qui s'égrainaient et de leurs travaux avançant à un rythme d'escargot. Elle n’avait aucune nouvelle de ce qui se tramait à Arènes depuis que les voyous l’avaient découverte. Elle s’imaginait le pire. Termineraient-ils la barque avant qu’il ne fût trop tard ? En se terrant dans les méandres du Bimaristan, l'elfe avait aussi manqué l’opportunité de rejoindre Sebasha et de déchiffrer le restant des messages envoyés depuis Hêtrefoux. Plus elle y pensait, plus les plaques rouges sur son corps grattaient.

— J'ai déjà essayé plein de pommades et de lavages à la pharmacie ; ça ne marche pas. Je croyais que Diutur m’avait maudite, mais en fait, c’est juste dans ma tête.

Le Nordique fronça les sourcils.

— Pourquoi ton dieu te maudirait-il ?

— Parce que j'ai fait quelque chose de mal.

Il s'accroupit tandis qu'elle s'aspergeait et se séchait le visage avec un vieux linge.

— Tu t'en veux de t'être enfuie du Don'hill et d'être devenue apostate ? D'avoir attaqué Sœur Agniezska ? Il est humain de commettre des erreurs.

L'elfe rit. Un rire de triste ironie.

— C'est ce qu'on ne cesse pas de me dire.

Il ne peux pas t'aider. Personne ne peut t'aider. Ce n’est pas quelque chose que tu as fait, mais ce que tu es. Eleonara et son for intérieur n'étaient pas toujours d'accord, mais ils ne se disputeraient pas sur ce point.

— Ce qui est fait est fait, dit Sgarlaad. Je ne te tournerai pas le dos.

Elle le regarda droit dans les yeux, surprise.

Comme elle refusait toujours de se prononcer, il se releva.

— Le mieux que nous puissions faire est de ne pas répéter nos erreurs, de nous assurer que personne d’autre ne les commette et de nous réveiller un peu plus noble que le jour précédent. Je vais finir des clous ; tu viens ?

Eleonara acquiesça, le suivant du regard à mesure qu'il marchait vers le bout du tunnel où se dormait la lune-d'eau.

Elle aurait jugé que ses paroles transpiraient le vécu.

 

Eleonara n'eut toutefois pas l'occasion de vérifier son hypothèse. La même semaine, un terrible événement promit non seulement d'ébranler leur plans de fuite, mais également le sol inviolable de l'hôpital.

Monsieur Yousef apporta l'effrayante nouvelle à la Source des aveugles, si paniqué qu'il en perdit ses sandales dans les escaliers. Ce fut Eleonara qui le secourut : Sgarlaad était occupé à calfater la coque de sa barque. Il avait récemment obtenu de la chaux de la part du neveu du troisième mari de la cousine éloignée de l'ancien instituteur des fils de Yousef. Comme le fournisseur de chaux n'était pas particulièrement intéressé par des filets de pêche, Eleonara lui avait restauré l'enseigne de son négoce grâce à son savoir-faire en calligraphie et en miniatures. Elle avait fait attention à entourer le nom de l'entreprise d'arabesques et des motifs floraux afin de rendre sa création aussi opyrienne que possible.

— Ma fille, les Religiats ont obtenu l'autorisation de l'émir pour pénétrer le Bimaristan ! s'exclama Yousef alors qu'Eleonara lui donnait le bras pour descendre les marches de la Source. Vous avez entendu, n'est-ce pas, que la Fête bovine s'est interrompue en raison d'une alerte à l'elfe ? Depuis le Nouvel An, toutes les bouches assurent qu'une créature de Hêtrefoux a été vue dans notre cité. Elle aurait agressé des innocents et serait porteuse de la lèpre.

— La lèpre ?

Eleonara soupira. Qu'on la perçût comme une elfe, c'était un problème ; qu'on la vît comme une elfe lépreuse, c'était empirer le pire. Les voyous, en lui retirant son chèche, avaient vu, en plus de ses oreilles, les plaques de boutons qui lui recouvraient le visage. Elle savait que ce n'était pas très esthétique, mais de là à dire qu'elle avait la lèpre...

— Pardonnez-moi de ne pas en avoir parlé plus tôt ; je croyais dur comme fer que ce n'étaient que des rumeurs fabriquées dans le but de pimenter la nouvelle année ou d'effrayer les Religiats. Les Religiats et Sa Grandeur en personne ont interrogé les victimes. Elles auraient apporté des preuves. Deux garçons étaient en si mauvais état qu'ils ont dû être soignés ici même. Le verdict du prince Bezùkiel est le suivant : une abomination se promène réellement parmi nous. Les portes de la cité ont été fermées et Arènes a déclaré son état de quarantaine. Les bateaux ont l'interdiction de quitter le port et les citoyens vivant à l'intérieur des murs ont l'obligation de rationner leurs réserves jusqu'à nouvel ordre car les échanges avec les périphéries ont été suspendues, elles aussi. Nous sommes en état de crise. Depuis plusieurs jours, les Religiats procèdent à la fouille de chaque cave, chaque demeure, chaque monument. Ils ont tenu le prince sous pression pour qu'il déclare une dérogation et leur octroie les clefs du Bimaristan ; aujourd'hui, le prince a cédé. Où est Monsieur Sgarlaad ?

Monsieur Yousef avait raison de s’alarmer, car les Religiats, en s'invitant à la Source, découvriraient non pas seulement une elfe, mais un des Barbares soupçonnés d'homicide.

Le cœur d'Eleonara s'éboulait, pompant un liquide glacé. Incapable de répondre à Yousef par oral, l'elfe lui fit signe de le suivre.

Les Religiats. Au Bimaristan. Bientôt. Ils mettraient ce lieu de repos et de sérénité sens dessus dessous. « C'est trop tôt ! se désespéra-t-elle intérieurement. Nous avons à peine pu nous procurer de la chaux ; notre salut est encore en chantier ! »

Depuis l'entrée de l'entrepôt souterrain, l'aveugle appela, à l'adresse du Mikilldien :

— Monsieur Sgarlaad, mon frère, il vous faut partir. Les Religiats sont en chemin en ce moment même ! Ne les laissez pas vous trouver à cause de cette elfe qui nous infecte ! Dépêchez-vous !

Eleonara emboîta ses mâchoires. Elle espérait que Monsieur Yousef cesserait bien vite de la traiter d'abomination, de créature, d'infection et de monstre, car elle n'avait pas l'impression qu'il savait nager. Elle l'avait jusqu'alors apprécié, mais l'entendre s'exprimer comme un Taberné mettait ses nerfs à l'épreuve.

Sa gorge se fit douloureuse et les vaisseaux autour de ses yeux enflèrent. De la tristesse, vraiment ? À cause de cet humain qui l'insultait ?

— Je vais aller le trouver, annonça-t-elle avec raideur, comme Sgarlaad ne répondait pas.

Les plantes de pieds de côté, elle avança au bord de l'eau verte et accéda à la petite plate-forme surélevée où la barque de l'espérance attendait l'aube de son inauguration. Au milieu des sacs de jute, des outils, des copeaux de teck et de nuages de poussière, Sgarlaad dormait, couché sur le côté, son torse se levant avec peine puis chutant sans retenue. Un souci lui fronçait le front. Avait-il donc tant de peine à s'adapter aux cycles hypniques opyriens ?

— Sgarlaad ?

Le dénommé ne remua pas. Sans attendre, l'elfe lui tapa l'épaule, le pinça et le secoua. Rien n'y fit : il ne se réveillait pas.

Eleonara s'assit sur ses chevilles, les paumes levées au ciel, dans une position de « pourquoi ? » muet.

— Oh non... se lamenta Yousef, l'ayant suivie sur la plate-forme sans qu'elle en prît note. Une mort-sieste. Il s'était pourtant amélioré depuis votre arrivée.

Eleonara n'aurait jamais cru que « sieste » pût s'associer à un terme aussi fatidique.

— Une mort-sieste ?

— Ce n'était pas survenu à notre ami depuis des mois. Monsieur Sgarlaad s'endort et pendant une journée, rien, même l'appel le plus strident d'un coq, ne peut le tirer de son sommeil. Comme si Monsieur en était prisonnier. Comme si Monsieur était décédé. Je lui ai donné une myriade de remèdes et de sels pour le raviver, mais rien n'a fonctionné. Je lui ai recommandé de consulter à nouveau un médecin ; il a refusé. Ça n'y changerait rien, selon lui. Il n'a pas tort ; ce n'est pas une maladie du corps, mais de l'esprit. Ou d'un esprit. Je crains qu'il ait attiré la foudre du mauvais œil. Nous avons tous nos démons à affronter.

— Nous devons le cacher, somma Eleonara, déjà debout. Et vite. Non, attendez, j'ai une idée. Appelez du renfort.

Dans sa poitrine de moineau, les battements s'étaient accélérés. Dans son cerveau, toute trace d'émotion avait été balayée : il fallait agir. Avec l'aide des fils de Yousef, elle déplaça le grand corps inerte du Nordique de façon à l'étendre à l'intérieur de sa barque. L'équipe éloigna les objets tranchants et les planches appuyées contre le mur du dormeur. On déposa ses affaires, de la nourriture et des jarres d'eau fraîche autour de lui ; qui savait combien d'heures, voire jours les Religiats occuperaient les lieux ?

Juste avant de laisser le Nordique sommeiller dans son tombeau protecteur, Eleonara s'agenouilla à ses côtés. Elle lui glissa un mot dans la main, un billet détaillant la situation et lui demandant de ne pas s'angoisser à son réveil car on viendrait le chercher dès que la voie serait libre.

Elle jeta un œil par-dessus son épaule ; Monsieur Yousef et ses garçons l'attendaient à la Source.

Sa main compressait celle de Sgarlaad autour de son message. La relâcher lui parut soudain très difficile. Elle contempla sa paume calleuse, ses veines saillantes, ses jointures écorchées. Eleonara se baissa, porta la main tiède à ses lèvres et les y maintint pressées, les yeux fermés.

 

L'elfe, Monsieur Yousef et ses garçons abaissèrent les gradins-levis bouchant l'accès à la plate-forme secrète et dissimulèrent les chaînes dans l'eau mate.

Sgarlaad était enfermé dans son sommeil et sous-terre. « Diutur, aide-nous », murmura l'elfe à l'intérieur d'elle-même.

— Et toi, jeune fille ? s'enquit Yousef en séchant ses mains mouillées sur sa tunique. Tu es recherchée aussi ; que feras-tu ?

— Moi ? Ne pas mettre tous les œufs dans le même panier, je suppose.

Elle avait songé un instant de se faire enfermer avec Sgarlaad, une idée aussitôt expédiée de son esprit. Se claquemurer signifiait attendre et attendre signifiait passivité. La peur n'était plus une excuse pour réduire leurs chances de s'enfuir. Les bateaux opyriens étaient déjà immobilisés au port, bon sang ! En plus, si les Religiats découvraient l'entrepôt, ni Sgarlaad, ni Eleonara ne vivraient très longtemps et leur projet d'escapade tomberait à l'eau. L'elfe n'aimait pas non plus l'idée que sa libération dépendît du bon vouloir de Yousef...

Le Bimaristan entier était en proie à un état de nervosité et de remous. Dans la Chambre des aveugles, on se rongeait les ongles tant pour la sainteté de l'hôpital, pur depuis ses débuts, libre d'armes et d'abominations telles que les elfes. Enfin, c'était ce que tous croyaient.

Somme toute, il était fort considéré de la part des Religiats de déployer leurs forces afin de prémunir les infirmes contre la Bête, mais honnêtement, Eleonara les aurait préféré moins compatissants. Surtout que des ouï-dire mentionnaient des espions parmi les infirmiers et les patients.

Eleonara rangea son Œil de Diutur sous son corsage, vérifia son chèche – elle s'en était fabriqué un nouveau à partir de loques – et frôla la boucle de ceinture mikilldienne dans sa poche de sarouel comme pour se porter bonheur. Elle était prête ; elle avait même emballé un petit paquet de vivres qui lui permettraient de survivre aux obstacles des jours à venir.

Il ne restait plus qu'elle face au choix : attendre la mort dans son terrier ou risquer sa peau pour l'esquiver. Elle avait décidé et savait exactement où aller.

C'était sa dernière chance d'aller au mysticopolium.

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Aliceetlescrayons
Posté le 31/07/2021
Coucou,
ah la la! Le répit est toujours de courte durée pour Elé >< En tout cas, elle est toujours das une dynamique d'action qui fait plaisir. Elle ne se laisse pas abattre!
Personnellement, je n'ai pas eu de problème de transition dans ce chapitre. Si le rythme était un peu plus lent au début, je ne me suis pas ennuyée. Au contraire, je trouve que ça offre un contraste bienvenu avec les évènements qui se précipitent avec l'arrivée de M. Youssef.
Oh, et ce moment où Elé embrasse la main de Sgarlaad avant de partir T_T Adorable!
Je ne sais pas si aller chez les Mysticolphiles est une bonne idée mais ça ne peut que faire avancer les choses!
A très vite!
Alice
Jowie
Posté le 03/08/2021
Salut Alice !
Attends mais... 17 commentaires pratiquement d'un coup ?? Comment... comment est-ce possible? Bientôt c'est moi qui vais faire un arrêt cardiaque xD Quel marathon, je suis très impressionnée et très flattée par ta motivation à rejoindre la fin le plus vite possible!
Chouette si tu n'as pas eu de problèmes avec les transitions ! Je voulais justement donner une impression de "faux calme" avant d'accélérer le rythme :)
Ouii je me fais plaisir dans ce tome en saupoudrant des moments mignons :D j'assume, j'assume !
Oh là là, maintenant que tu as tout lu, je ne peux plus parler de spoiler, c'est terrible xD
Allez, je vais répondre à tous tes autres commentaires; à moi le marathon ^^
Sorryf
Posté le 28/05/2020
Et me voilà à jour !
quelques petites coquilles sur les derniers chapitres :
" - tu as vu un médecin ?
- Si mais on n'a rien trouvé" -> tu n'as pas vu un médecin
"merci de vous enquérir sur ma santé" -> enquérir de (à vérifier)
"Sous ses cheveux corbeaux ondulants et transpirés" -> Ondulés et transpirants non ? Cela dit j'ai beaucoup aimé cette variation, je sais pas si elle est exprès.

Et pour l'histoire : Sgarlaad SAIT que Elé est une elfe, j'en suis sure, il le sait depuis le tome 1 !!
Leur relation est super belle, ils sont tellement touchants dans ces derniers chapitres. La santé de Sgarlaad me fait mal au coeur :-(
Je ne les shippais pas du tout avant (différence d'âge... Sgarlaad déjà engagé...) mais tu es en train de m'avoir à l'usure xD !
Je me demande si Vouli va tenir sur le bateau ! ils vont pas le laisser là quand meme ! Enfin... cette histoire de bateau n'est plus trop la priorité vu ce qui se passe dans ce chapitre. J'adore comme Elé a elle toute seule a causé la mise en quarantaine de toute une ville ! elle est vraiment fracassante !!
C'est super risqué qu'elle retourne chez les mysticos, vu comme tout le monde la cherche, mais je pense qu'une simple apparition là bas et ils lui devront tous leurs secrets xD
Jowie
Posté le 30/05/2020
Comme t'as lu tout le dernier bout d'une traite xD
Oh, bien vu pour les coquilles, je vais changer ça tout de suite ! Pour transpirants, tu as bien raison, c'est moi qui me utilise "transpiré" de cette façon à l'oral mais je ne trouve rien qui ne confirme que ce mot s'utilise de cette façon-là, alors hop, je le vire!

Ton hypothèse par rapport à Sgarlaad est très intéressante mais je ne vais rien dire de compromettant en ce moment. Par contre, c'est un point qui sera abordé avec la fin du tome mais chuuuut ;)
Awww je suis trop contente que leur relation te fasse cet effet, surtout que tu ne les shippais pas à la base ! C'est vrai que dans le tome précédant, l'écart se sentait plus et c'est juste, Sgarlaad avait déjà une copine donc c'était nope, quoi. Mais je préparais déjà mon plan démoniaque muahahah
Tu t'inquiète pour Voulï ? Adorable ! Ce point sera aussi adressé par la suite ^^
Sgarlaad et Eleonara veulent s'enfuir en bateau le plus vite possible, mais il faut déjà la finir et... éviter de mourir xD Donc oui, les Religiats bousculent tous leurs plans ^^'
C'est vrai, la quarantaine, c'est 100% la faute à Elé xD elle fait vraiment n'importe quoi ! Ou alors c'est sa poisse, mystère !
Vu comme Elé est abonnée au désastres, tout risquer chez les Mysticophiles, c'est tout à fait dans son style :)

Merci pour tes commentaires qui me font toujours sourire ! ^^
Isapass
Posté le 22/05/2020
Oh la la, ça sent le roussis pour Elé et Sgarlaad !
Pas grand chose à dire sur ce chapitre : pour répondre à tes questions, j'ai trouvé le rythme bien géré et les transitions ne m'ont posé aucun souci.
On sent bien l'attachement qui se renforce entre les deux persos. Toujours cette impression qu'ils sont à la limite de se faire leurs confidences mais qu'ils hésitent encore à sauter le pas parce que leurs secrets sont très lourds. Pourtant, la perche tendue de Sgarlaad (je ne te jugerai pas) était si tentante ! En tout cas, cette mort-sieste et la sagesse de Sgarlaad renforcent mon hypothèse : je suis de plus en plus convaincue qu'il est très vieux. J'ai adoré la parabole de l'aveugle, au fait, je l'ai trouvée magnifique.
Ensuite, quand l'alerte est donnée, le rythme accélère mais c'est plutôt lié à la tension qu'à de l'action. Je ne doute pas que l'action sera pour les prochains chapitres ;) En attendant, la situation est d'autant plus préoccupante que leur projet d'évasion en lune d'eau s'est ébruité et qu'un grand nombre de personnes semblent savoir qu'ils se trouvent à la source.
J'ai bien repéré les indices que tu nous tends sur une ancienne culpabilité de Sgarlaad aussi. Aurait-il eu les mêmes symptômes qu'Elé ? Je me demandais justement où tu voulais nous emmener avec tout ça : les cicatrices de Sgarlaad (sur lesquelles tu reviens régulièrement) et les boutons/autopunition d'Elé... J'espère que ce sera un déclencheur qui les rapprochera encore !
Quant à la fin... Ouiiiiiiiiiii les mysticophiles ! J'adore ! Bon, je sens aussi que c'est une occasion parfaite pour que Elé en dise vraiment trop, cette fois... Ou alors... Oui, je sais : elle va tomber sur Sebasha ! Obligée, sinon pourquoi aurais-tu fait de Sebasha une mysticophile ? (Bon peut-être as-tu d'autres desseins pour après...)
Je t'avoue que j'ai maintenant hâte qu'ils quittent Arène. J'adore tellement quand tu nous fais découvrir de nouveaux décors !

"L'elfe ne savait pas ce qu’était advenu d’Agnan," : ce qu'il était advenu d'Agnan

"L'intervention inespérée de Sgarlaad manqua de la faire verser dans le bassin." : inattendue, plutôt, non ? Inespérée, ça laisse entendre qu'elle la souhaitait secrètement

"Eleonara acquiesça, le suivant du regard à mesure qu'il marchait vers du tunnel où se garait la lune-d'eau." : il manque "le bout (du tunnel)" + se garait la lune d'eau, ça laisse croire qu'elle le fait d'elle-même. Peut-être "là où stationnait la lune d'eau" ? ou plus simplement "là où attendait/se trouvait la lune d'eau" ?

"Les fils de Jarabe, en lui retirant son chèche, avaient vu, en plus de ses oreilles, les plaques de boutons qui lui recouvraient le visage. " : ah mais les sales mômes, c'étaient les filles de Madame Jarabe ? J'avais pas du tout compris ça. Pour moi c'étaient des petits voyous des rues.

"Les plantes de pieds de côté, elle coulissa sur le fin rebord au bord de l'eau verte" : pas fan de "coulissa" (ça s'applique plutôt aux objets), je dirais plutôt "glissa" + rebord/au bord : ça se répète ;)

"elle avait même emballé un petit paquet de vivres à emporter et avec quoi survivre les obstacles des jours à venir." : survivre aux obstacles + je pense que la fin de la phrase pourrait être amélioré (le "avec quoi" n'est pas très joli, je trouve). Peut-être "qui lui permettrait de survivre aux obstacles..." ?

Bon, ben, comme d'habitude : vivement la suite ! :)
Jowie
Posté le 30/05/2020
Hey Isa :)

Tout d'abord je voulais te dire merci pour tout l'amour que tu fais pleuvoir sur Hêtrefoux depuis le Discord, j'arrive souvent trop en retard pour pouvoir réagir là-bas mais ça me touche beaucoup <3

C'est vrai, Eleonara et Sgarlaad tournent un peu autour du peu et, même s'ils se rapprochent, ils ne dévoilent aucun gros secret trop compromettant!
Tes hypothèses sont toujours très intéressantes à suivre au fil des chapitres :D
Ravie que tu aimes la parabole du Bon aveugle (à chaque fois que je tape ça, j'ai une sensation de déjà-vu à cause de Bal aveugle c'est très étrange xD). J'avais peur que ça tombe comme un cheveu dans la soupe dans ce chapitre, mais ça à l'air d'être bon :)
J'avoue que ce chapitre parle pas mal de problèmes cutanés xD Tu es une lectrice perspicace, aucun détail ne t'échappe !
Ohh tu aimes bien les Mysticophiles? Cool ! Eh oui, ils auront de la visite dans le chapitre suivant ;)

C'est super si tu aimes différents décors, parce que chaque tome se passe dans un lieu différent ;) en tout cas, il reste quelques nouveaux lieux à découvrir à Arènes, je n'en dis pas plus ^^

Merci pour cette chasse aux coquilles et aux maladresses ! Concernant les voyous, j'ai hésité dans la version précédente à spécifier qu'ils étaient les fils de Jarabe. J'ai fini par changer d'avis (ce sont donc bien de "simples" voyous) mais je vois qu'un passage a échappé à mes recorrections !

Merci beaucoup pour tes commentaires toujours si enrichissants et détaillés :) J'espère que la suite te plaira !

à tout bientôt sur les PLs (2 chapitres <3!)
Vous lisez