« Si tu ne veux plus être une elfe, personne ne t'oblige à le rester ». Ces paroles résonnaient dans la tête d'Eleonara comme un unique son de cloche, grave et indéchiffrable. Comment pouvait-on lui retirer, par quelques simples manipulations, son identité, son héritage – un fardeau inscrit dans ses cellules ? Comment faire perdre à son sang ses propriétés de toxicité ?
Du menton, elle défia l'émir.
— Vous parlez de liberté, mais vous ne savez pas ce que c'est. Je ne serai libre que lorsque mon nom de courra plus sur les lèvres, lorsque mes cendres se seront dispersées au vent et que la mémoire des Hommes m'aura oubliée. Là, je goûterai à la vraie liberté. Vous ne pouvez pas me l'offrir.
— Être elfe ou ne pas l'être, chantonna Bezùkiel. Franchement, à ta place, j'aurais déjà fait mon choix : qui voudrait être un elfe dans un monde où l'on est persécuté parce qu'on n'a pas la bonne forme d'oreilles ?
Eleonara recula ; le jeune prince se tenait si près qu'elle pouvait frôler le bout de ses babouches scintillantes avec ses orteils.
— Ne la biaisez pas avec vos jugements personnels, Votre Grandeur, avertit Sebasha, les bras croisés sur sa robe marine lisérée de doré. Elle seule peut choisir.
Eleonara considéra le garçon puis la Chercheuse de Secrets. Ses alentours tournoyaient à la manière d'une girouette poussée par le zéphyr. Les meubles et les murs semblaient s'étirer, élastiques, tandis que leurs couleurs sales salivaient.
— Je ne savais pas que j'avais le choix.
Jusque-là, elle n'avait fait que courir, se cacher et s'échapper ; elle n'avait déployé ses racines nulle part. Le bilan de sa vie se résumait à une liste d'incarcérations, de fuites et de courses-poursuites à se donner le vertige. S'établir, bâtir une fortune, une famille : voilà ce que beaucoup d'humains se souhaitaient. Eleonara n'en avait jamais rêvé : ce genre d'avenir lui était dénié d'office. Son moteur vital, lui, reposait dans son insatiable soif de réponses et l'inassouvissable espoir de rallier Hêtrefoux. Ç'avait été un idéal brouillé où elle s'y était vue heureuse et épanouie. Depuis l'incident de la fleur jaune cependant, une curieuse certitude gagnait de la place dans son esprit : celle d'avoir passé son existence à fixer un plafond blanc, d'y avoir projeté ses fantasmes les plus fantaisistes, sans se rendre compte que le plafond en question se vermoulait. Les elfes de Hêtrefoux existaient, c'était un fait. Or qui garantissait qu'ils ressembleraient à ceux qu'elle sacralisait depuis l'enfance ?
Elle appuya un regard sévère sur le prince.
— Qu'entends-tu par ne plus être elfe ? Ton argent et ton influence ne peuvent pas changer ce que je suis. Tu ne peux pas m'affranchir de ma nature.
Bezùkiel montra toutes ses dents, grandes et aiguisées.
— Oh si, crois-moi, je le peux. Chaque elfe a le pouvoir d'altérer sa nature ou du moins, une partie. Je peux t'aider à procéder sur la tienne sans séquelles. (Il se mit à lui tourner autour, les mains jointes dans le dos.) Comme je disais, votre problème principal à vous, les elfes, ce sont vos oreilles. Hautement inesthétiques, peu à la mode, encombrantes, scandaleuses. Fais-les écourter et ton souhait de liberté deviendra réalité. Ne tire pas cette mine ; je t'ai dit sans séquelles. Ne t'imagine pas une boucherie à l'einhendrienne où un barbier balourd arrache des dents, opère et tond des touffes dans un atelier boueux. Je te parle de chirurgiens qualifiés, pionniers et fidèles au secret professionnel. Tu ne ressentiras aucune douleur et le résultat t'époustouflera. Bien sûr, l'opération aurait lieu après notre mission : tes oreilles pointues seront indispensables lors la rencontre de tes semblables. T'ai-je convaincue ?
Eleonara frissonna malgré la chaleur. La frayeur grimpait à ses bras et à ses jambes telles des fourmis de glace. Se débarrasser de ses oreilles. Elle n'y avait jamais pensé.
Ses appendices cartilagineux se contractèrent avec un craquement. Cette méthode rimait à la fois avec délivrance et obscénité. D'une part, l'indépendance promise séduisait ; de l'autre, Eleonara se demandait ce qu'elle en ferait, de cette indépendance. Elle aurait voulu fuir ce choix ; fuir était ce qui lui réussissait le mieux.
La dernière volonté de la Dame lui dictait d'incarner la discrétion même, ombre parmi les ombres, et de tout mettre en œuvre pour se réfugier à Hêtrefoux. Or la Dame n'avait parlé que du but et non du chemin. Elle lui avait dépeint la Forêt Maudite en trésor brillant mais flou, sans éclairer les sombres sacrifices qui l'y mèneraient. Eleonara se rendait compte que se déguiser en humaine ne suffisait plus. Rayer sa nature, la seule façon d'accomplir sa vieille promesse ?
Peut-être, mais peut-être pas. Si elle amputait ses oreilles, que deviendrait-elle alors ? Une humaine ? Pas vraiment. Il ne resterait d'elle qu'un corps entre-deux. Non, c'était plus compliqué, beaucoup plus compliqué que ça. Elle serait un mensonge, une farce, une erreur, le produit d'une expérimentation humaine. Était-ce donc ça, la réponse, la solution ? Arrêter de mentir pour devenir le mensonge ?
Le prince recula jusqu'à presser ses reins contre la table-mappemonde. La ligne de khôl sous ses yeux s'était aplatie.
— Alors, tu acceptes la mission ou pas ?
Sa question rencontra le silence. Devenir ambassadrice des elfes était l'occasion rêvée pour s’éclipser du périmètre arènien et ce, avec la bénédiction du prince. Mais comment embarquer Sgarlaad et sa lune-d’eau dans cette histoire ? Elle ne se sentait ni prête à dévoiler l’emplacement du Nordique, ni à expliquer à ce dernier son lien viscéral à Hêtrefoux.
— Pourquoi tardes-tu tant à te décider ? s’excita le prince. Tu n’as pas envie de vivre comme moi, à l'aise sur des traversins, de manger du riz blanc beurré et sucré, d'avoir un cheval rien qu'à toi ? Nom d'une bergamote, je ne te comprends pas.
— Qu’est-ce qui vous fait penser que je voudrai revenir de Hêtrefoux ? coupa Eleonara, en dévisageant Sebasha puis Bezùkiel.
Le garçon haussa les épaules.
— Qui dit que les elfes ne sont pas cannibales ?
Eleonara soupira.
— Il faut que je réfléchisse, pour le rôle d’ambassadrice. Je... j'ai eu beaucoup à assimiler dernièrement.
— Et pour tes oreilles, as-tu fait ton choix ?
Pour ça, elle n’eut pas à cogiter longtemps.
— Je les garde. Gardez vos sous et vos présents. Je garde mes oreilles ; sinon, toutes mes peines auront été en vain. Je suis trop impliquée maintenant pour choisir l'échappatoire facile et m'enfuir comme une lâche. Mes problèmes découlent du fait que mon apparence diffère à celle du peuple majoritaire. Me mutiler moi-même pour changer mon apparence et le laisser gagner, c'est la chose la plus dégoûtante et malsaine que j'aie jamais entendu.
Les coudes calés contre les coins de la carte géante, Bezùkiel balança son ballon de tête entre ses mains et expira fort. Souple, sa plume d'autruche se cambra dans un sens puis dans l'autre.
— Soit, déclama-t-il en se redressant soudainement. J'attendrai ta réponse finale, mais je te préviens, n'abuse pas de ma patience. Les elfes ne nous ont pas contactés pour nous faire visiter une collection de sifflets céramiques. Tu as deux jours. Deux jours. Passé ce délai, n'attends pas de moi de la merci ; je relâcherai mes rênes sur Arènes et tu ne seras plus sous ma protection. Si les Religiats te trouvent, ils feront ce qu'ils voudront de toi. J'ai pris assez de risques comme ça.
« Merci pour la belle preuve de chantage », maugréa l'elfe, renfrognée.
Sans même lever sa main griffue, Bezùkiel bâilla à se disloquer la mâchoire, visiblement impatient de siester. Juste avant que Sebasha ne s'inclinât pour demander congé, Eleonara éleva la voix.
— J'ai une question. Si j'accepte de devenir ambassadrice auprès des elfes, comment Sebasha et moi quitterons-nous Arènes sans être repérées par les Religiats ? Les huis de la cité sont clos pour une période de quarantaine indéfinie que ni même toi, prince, tu ne peux écourter. Les moines-soldats couvrent chaque rue, chaque recoin du port aux faubourgs. Pour peu que nous le sachions, cet état de crise pourrait stagner et se prolonger sur des mois !
— Tu vois ? répondit l'émir en ouvrant les bras. Attendre est futile. Tu veux la vérité ? La voici : je n'en ai pas la moindre idée. Mais je vais y réfléchir ; ou alors je payerai quelqu'un pour réfléchir à ma place. À froid comme ça, je proposerais de mettre à mort les Religiats gardant le port, mais ça risquerait de fâcher l'Einhendrie et d'énerver la plèbe, d'autant plus si elles découvrent les motifs derrière ma manœuvre. Ouais, je vais éviter ce style d'affront. Tant que les véritables assassins des Religiats ne sont pas nommés, les sergents me garderont à l’œil, ces rats, ces goules !
Il avait brandi son petit poing. Il se tut, déplia ses doigts et inspecta ses ongles noirs et crochus.
— Bon, au fond, je ne veux pas trop abîmer les Religiats, d'accord ? C'est qu'on s'y attache, à force. Ils ramènent les mamies à la maison la nuit et repêchent les étourdis qui tombent dans le bassin, c'est agréable.
— J'ai une autre question, l'interrompit Eleonara.
— Tonnerre, on se croirait à un entretien mysticophile.
— Aurais-je le droit d'emporter quelqu'un avec moi lors du voyage ?
En silence, la Chercheuse de Secrets secoua la tête, les avant-bras en croix sur sa poitrine. Bezùkiel renchérit :
— À part Sebasha et une poignée de mes hommes, non. Il s'agit d'une mission secrètissime. Nulle âme n'en a été avertie excepté moi, ma garde personnelle et les Mysticophiles. Et toi.
— Ça fait beaucoup de monde pour une mission secrètissime, fit remarquer l'elfe.
— Estime-toi heureuse que le reste de la population ne le sache pas. Et sincèrement, tu voudrais emporter qui ? Ce n’est pas un voyage de plaisance. Ne me dis pas que tu penses à Razelhanout, avec sa tour-turban et ses pantoufles !
Le jeune émir s'esclaffa et essuya ses postillons luisants sur le cadre foncé de la table. Eleonara ne savait plus où regarder.
— Je comptais emmener... un poney. Oui, c'est ça, je veux emmener un poney avec moi, balbutia-t-elle, soulagée de ne toujours pas avoir dénoncé Sgarlaad.
Sebasha se pencha au-dessus du petit régent avec une contenance fermée et un ton terre-à-terre, à croire qu'elle scellait un contrat entre entrepreneurs.
— Notre amie entretenait une amitié avec deux des trois Nordiques disparus. Elle a récupéré leur poney.
Les deux Opyriens, femme et garçon, échangèrent un hochement de menton.
— Désolé, hein, pour tes compagnons, dit Bezùkiel. Ce n'étaient pas les alliés les plus raffinés ou avantageux mais ils ne méritent pas leur sort. Si tu veux mon avis, soit ils sont passés à la trappe et leurs cadavres pourrissent je ne sais pas où, soit ils flottent vers le large, voire le prochain port. Deux Barbares et une elfe : il faut l'avouer, vous étiez assez dépareillés, tous les trois.
Eleonara se contenta d'articuler un « Je sais » absent. « Ni le prince, ni les Mysticophiles ne savent où se cachent les Nordiques », s'éberlua-t-elle. Ce n'était que naturel. Sgarlaad se terrait au fin fond du Bimaristan, lieu sacré où les Mysticophiles ne pouvaient pas travailler. Quant à Agnan, il avait, en quittant la terre ferme, échappé au terrain de chasse principal de ces curieux. Puisque que Bezùkiel dépendait des Mysticophiles pour s'informer, il ne pouvait pas être plus renseigné qu'eux.
À nouveau, Sebasha souffla dans l'oreille de Sa Grandeur, à l'instar d'un conseiller.
— Rappelez-vous qu'en plus de maîtriser l'einhendrien et l'ancien opyrien, la servante de Diutur domine l'idiome mikilldien, une faculté rarissime sur un continent à majorité illettrée et analphabète. Ça lui a permis de comprendre le hêtrusque, ai-je tort ? Sa relation privilégiée avec les Mikilldiens n'est pas à sous-estimer et est d'autant plus utile pour exercer la fonction d'ambassadrice.
L'Opyrienne lança un sourire complice à l'elfe qui ouvrit la bouche puis la referma. Sebasha voyait plus loin, elle voyait l’après. Le Mikilldys et l’Opyrie marchandaient ; la Chercheuse se félicitait-elle d’avoir déniché une nouvelle intermédiaire entre les deux peuples, utile pour plus tard ?
Malgré la possible bienveillance opyrienne à l'égard du Mikilldys, Eleonara tut à nouveau ce qu'elle savait à propos de Sgarlaad, jugeant plus sage de solliciter l'avis de ce dernier avant de divulguer sa cachette. Bien que l'Opyrienne et le Mikilldien avaient partagé la même fonction et avaient collaboré ensemble, l'elfe n'avait jamais pu s'assurer de l'authenticité de leur entente.
— On dirait que notre petit bavardage touche à son terme, annonça Bezùkiel en frappant un coup dans ses mains, semblables à des pattes d'aigle potelées. Cogite bien, elfe, et repointe-toi sur mon seuil d'ici deux jours. Entre-temps, Sebasha t'hébergera.
Eleonara se dépêcha d'affirmer sa position.
— Merci pour votre accueil, Madame Sebasha, mais je souhaiterais rentrer au Bimaristan le plus rapidement possible, c'est-à-dire, dès le départ des Religiats et la restauration du statut sacré du Bimaristan. J'ai des affaires à régler et... je sais que j'y serai en sécurité.
Bezùkiel grimaça. Avant qu'il n'eût émis la moindre plainte toutefois, la Chercheuse prit les devants.
— Le Bimaristan est toujours en cours d'inspection. Viens à mon refuge privé pour ce soir. Demain matin, je me renseignerai sur la situation de l'hôpital. Dès que les lieux se libèrent, je t'y escorterai moi-même.
Eleonara se mordilla la lèvre inférieure. L'idée que Sgarlaad sommeillait, enfermé sous terre dans un lieu infesté de Religiats lui écrasait l'estomac et la conscience. Mais que pouvait-elle faire ? Elle ne pourrait pas l'aider si elle se faisait arrêter.
— S'il est plus prudent pour moi de dormir chez vous ce soir, je vous suis, décida-t-elle finalement. Mais ensuite, je dois absolument retourner au Bimaristan.
Sebasha abaissa lentement ses paupières.
— Si tel est ce que tu désires et si le Bimaristan est libéré d'ici deux jours, soit, je t'assisterai.
L'elfe la regarda droit dans ses yeux sombres et profonds.
— Merci.
Après avoir quitté le somnolant Bezùkiel, Eleonara n'aurait pas su estimer combien de temps Sebasha et elle avaient marché à travers les appartements princiers. La Chevaucheuse de dunes l'avait guidée à travers des portes ornées, des cages d'escaliers, des arcades étroites et même par le balcon d'un courtisan absent. Elles n'avaient pas quitté le palais et pourtant l'elfe avait l'impression d'avoir parcouru des milles. Avec la distance, la décoration s'était faite plus simple, plus sobre. Par les fenêtres, Eleonara avait vu des monuments et des tours se dresser tout haut, surplombant les ruelles creusées tout bas. Ça n'aidait pas beaucoup pour se localiser.
La méfiance d'Eleonara envers Sebasha s'était évanouie comme un rideau de soie. À chaque fois que celle-ci s'adressait avec tiédeur ou un éclat protecteur dans les yeux, l'elfe réalisait sa chance de jouir d'une alliée aussi puissante et informée. Après l'incident de la Fête bovine, elle s'était crue seule face aux Troyaumes et aux humains. Or non. Sebasha savait, elle savait tout et pourtant, elle ne cherchait pas à l'attacher à un bûcher. Depuis quand l'Opyrienne avait-elle eu vent de son secret ? Les humains qui le savaient n'avaient jusqu'alors fait que hurler ou la manipuler – dans le cas de l'alchimiste.
Que ressentait-elle ? Du soulagement et de la légèreté, peut-être. Mais il y avait autre chose. Une ardeur tapie pour laquelle elle ne trouvait pas les mots. C'était orangé, ça crépitait et dans ses ondoiements, ça disait « merci » et « reste, s'il te plaît ».
La Chevaucheuse de dunes fit crisser une porte renforcée en figuier sycomore, les entraînant dans un espace sentant la fermentation, faiblement éclairé par des lampes à huile. Il s'agissait d'une grande cave où se conservaient diverses viandes et vins. D'immenses tonneaux ceinturés de cercles métalliques émergeaient des murs, couchés. Si l'un de ces barils venait à fuiter, la cave serait aussitôt inondée. D'autres tonneaux plus habituels en taille s'empilaient au fond de la salle. L'odeur âcre saisissait à la gorge comme du vinaigre bu d'une traite. Ça sentait la chair à vif, les boyaux et le sang à plein nez, avec un soupçon d'alcool et de champignon en arrière-plan. L'air froid piquait les narines ; la poussière collait sur la langue et les araignées tissaient un deuxième plafond. Eleonara se dépeignit Le Saint-Cellier. Décidément, les caves n'étaient pas sa tasse de thé.
Des serviteurs étaient occupés à saler des morceaux d'épaule ou de poitrine, à balayer, à dépoussiérer ou à déloger les intruses arachnéennes. Devant leurs mouvements, l'elfe se figea. Ce n'était pas exactement ce qu'elle appelait un refuge privé...
Blasés, les servants levèrent leurs regards de leurs balais et de leurs surfaces de travail ; ils adressèrent un signe de tête à Sebasha avant de se repencher sur leurs tâches.
L'Opyrienne passa entre les rangs de barils à moitié enterrés dans les parois. Elle se baissa devant le cinquième depuis la gauche et retira sa bonde. Eleonara, l’ayant suivie, se poussa de côté, s'attendant à un déluge de vin rouge, or il n'en fut rien. Sebasha fouilla dans une poche de sa longue robe bleue et en sortit une clef, qu'elle inséra dans le trou de bonde. Un « clic ». Quand le fond du tonneau géant se hissa à la manière d'un clapet, pas une goutte de liquide ne s'écoula.
Eleonara lorgna en direction des domestiques ; ils les ignoraient totalement.
Sebasha l'invita à pénétrer dans la cavité avant elle. Méfiante d'abord, puis intriguée, l'elfe courba l'échine et s'enfila dans le baril, assez large pour un adulte. Les effluves laissées par des litres et des litres de vin sur le vieux bois lui tordirent l'estomac. Dalisa Taberné lui avait une fois maintenu la tête dans un tonneau de bière pour essayer de la noyer.
Dans la pénombre du tonneau-tunnel, l'elfe frissonna et se cogna la tête avec un « aïe ! ».
— Attention, résonna la voix de Sebasha derrière elle, ou je te foncerai dedans.
Un doux rai de lumière luisait droit devant ; Eleonara se concentra pour le rejoindre. Une fois qu'elle l'eût fait, elle mit pied à terre – l'issue du baril se trouvait un peu en hauteur –, se redressa et promena ses yeux autour d'elle.
— Bienvenue chez moi.
La première chose qu'Eleonara aperçut fut le rideau de lames placardant le mur qui lui faisait face. Des dagues, des glaives, des sabres, des poignards, des coutelais, des poinçons et des clous. Un déjà-vu : ce n'était pas la première fois que l'elfe surprenait autant de fer, d'acier et d'objets tranchants réunis dans une seule pièce. Au Don'hill, Sebasha avait engrangé une quantité hallucinante d'armes blanches dans tous les recoins de sa cellule, même au plafond.
— Vous avez un bon petit nombre de lames, on dirait.
— Merci. Comme je t’ai dit, j'aime ce qui scintille et se termine en pointe. J'aurais une meilleure collection si je ne devais pas constamment me déplacer. Je dois tout revendre ou enterrer à chaque départ, c'est une vraie malédiction
— Au moins, en les revendant, vous récupérez une partie de votre argent.
— Je ne les ai pas achetées.
Eleonara leva les yeux avant de dépasser le seuil, juste pour être sûre que rien de coupant ne lui pleuvrait dessus.
Soutenue par des arches, la voûte du logement se rapprochait dangereusement de leurs sinciputs. Le temps avait mordu les pilastres au point de les rendre grossiers et difformes. Une seule fenêtre, minuscule et complimentée d'une grille, avait été découpée à fleur du plafond. La vue donnait sur le port et la mer Tapie d'Or.
Une vaste couchette à même le sol ; un burnous abandonné sur un tabouret ; une jarre d'eau, un gros placard ; des piles de gobelets en bois, une marmite sur un feu éteint, juste sous la fenêtre. Sebasha, l'ambitieuse Chercheuse de Secrets, logeait ici. Curieusement, il semblait que, dans son intimité, Sebasha était parfaitement ordinaire, mis à part sa collection de métal. Le placard avait dû coûter cher, aussi.
La lueur qui s'écoulait de la fenêtre comme du jus de pomme quadrillait la chambre, chaude et apaisante.
— Installe-toi, je vais bouillir du thé.
Eleonara s'agenouilla sur les dalles sableuses, suivant avec curiosité chaque geste de Sebasha, bien que la préparation du thé ne l'intéressât pas plus que ça.
— Je peux vous demander une faveur ?
— Parle.
— Quand vous sortirez vous renseigner sur l'état du Bimaristan, pourriez-vous faire parvenir cette liste aux marchands Kermès, s'il vous plaît ? Ils habitent dans le quartier est. L'adresse exacte est notée sur la liste.
Sebasha délaissa les gobelets qu'elle alignait et approcha l'inscription de son visage aux pommettes taillées.
— De la poix, vingt et un sacs de sable, une plaque de fer... Pourquoi as-tu besoin de ces choses-là ?
— Oh, euh, ce n'est pas pour moi mais pour une connaissance de là-bas, je dois lui rendre service. C'est plutôt important.
— Où la marchandise doit-elle être livrée ?
— Au Bimaristan.
— Le Bimaristan est vaste. Où au Bimaristan?
— À la Chambre des aveugles.
Les pupilles de Sebasha fixèrent le vide un instant, avant de rouler pour se braquer sur Eleonara.
— C'est donc là que tu te terrais. Jamais je ne jouerai à cache-cache contre toi.
— Je sais que garder les secrets, ce n'est pas votre truc, mais...
— Mes collègues le sauront, cela est inévitable. Le secret ne se vendra pas plus loin, toutefois. (Elle soupira.) D'accord, je le ferai. Avec les Religiats postés partout, ce sera corsé, mais pas impossible. Oui, je peux le faire. Je ferai livrer les matériaux séparément, par diverses entrées du Bimaristan. Ça attirera moins l'attention. Comment paieras-tu les Kermès ?
L'elfe se pinça la peau des talons.
— Je... je dois y réfléchir.
— Réfléchis et règle ta dette comme l'éclair alors. Les intérêts ne sont pas cléments.
Eleonara hocha la tête, troublée.
— Promis, je m'arrangerai. Euh, il y a autre chose que je voulais vous demander. Depuis quand savez-vous mon secret ?
Sebasha versa de l'eau dans une marmite. Ses pommettes s'étaient arrondies.
— Il y a peu de Mysticophiles en Einhendrie, mais l'un d'entre eux nous a informé de ton existence. Notre toile savait qu'une elfe vivait en Einhendrie dans un village du nom de Garlickham. Puis nous avons perdu ta trace. Nous l'avons retrouvée quelques mois plus tard à Terre-Semée. Comme je m'apprêtais à m'enrôler au Don'hill, on m'a confié la tâche de te garder à l’œil, or je ne te localisais nulle part. Comment l'aurais-je pu ? Je ne possédais qu'une vague description de toi. C'est lors de notre première conversation à l'abbaye que mes doutes sont nés. Une Einhendrienne qui tourne le dos aux Einhendriennes pour une Opyrienne, c'est inattendu. Je savais que l'elfe recherchée avait des cheveux de la couleur de flammes mourantes. Tu portais le voile, je ne voyais pas tes cheveux, mais tes sourcils, si. (Souriante, elle tapota les siens, épilés et redessinés.) Par la suite, j'ai eu vent de ton lien aux Nordiques. Et lorsque tes consœurs mouraient une à une, tu as imploré mon aide et là, j'ai su que j'avais raison. L'héritière égarée de Hêtrefoux, c'était toi.
Eleonara, qui s'amusait à gratter la poussière et les grains de sable collés sous la plante de ses pieds, sentit ses joues picoter. Il y avait quelque chose de légèrement embarrassant à entendre sa propre histoire sur les lèvres d'autrui. Et dire qu'à l'époque, elle ne soupçonnait rien du tout. Si elle avait su qu'une espionne écrivait des rapports sur ses mouvements, elle n'aurait jamais dormi. L'apprendre par après, cependant, lui apporta – paradoxalement – du réconfort. Comme si quelqu'un avait enfin relié deux questions par un pont comblant le vide.
— Je sais ce que les nonnes ont voulu te faire et ce qu'elles ont voulu me faire. Ça n'excuse pas tes actes, mais ça n'innocente pas les nonnes non plus.
— Si vous savez comment me guérir, dites-moi, parce que je n'arrive pas à m'en débarrasser, de ma mauvaise conscience. Je ne sais pas comment me repentir. Je ne peux pas tout balancer sur le dos d'une divinité et me laver de ma responsabilité.
— Personne ne peut te guérir. Tu es bien plus qu'une fille aux oreilles pointues, battue et mal fichue qui déteste tout et tout le monde. Tu es ton propre juge. Toi seule sait ce qui s'est passé ; toi seule connaît le contenu de ton cœur.
Elles se turent. L'eau dans la marmite ne tarda pas à gronder.
— Les Mysticophiles, l'Abbé, le prince Bezùkiel, les Nordiques, les elfes... La Couronne einhendrienne serait jalouse de vos contacts, dit Eleonara.
— Elle n'aurait pas tort, se flatta Sebasha. Mes relations sont mes ressources. L'or opyrien ne dort pas dans les pièces de monnaie ; à quoi bon l'argent si l'on ne connaît pas les bons marchands avec qui négocier ou si l'on n'a pas de proches avec qui partager nos bénéfices ? Notre or à nous ne peut se saisir ou être saisi ; il est aussi fin et élastique que la laine, se déroulant sur des lieues et des lieues, traversant mers et continents s'il le faut.
L'eau bouillonnait, créant des colonies de bulles à sa surface ainsi qu'une vapeur claire qui fuyait pas la grille de la fenêtre. Sebasha attendit, étouffa le feu et fit infuser trois pincées de feuilles.
— J'aime bien comme vous parlez, laissa échapper Eleonara. Du coup, si l'or des Opyriens est ce que vous avez indiqué, quel serait celui des elfes, selon vous ?
— Judicieuse question. À investiguer. Tu possèdes le flair, servante de Diutur. Tu aurais fait une bonne Mysticophile.
— Merci, fit l'elfe avec un petit étirement labial. On me l'a déjà dit, mais je ne sais pas si je suis bâtie pour ce genre de vie.
L'Opyrienne brassa le breuvage et le renifla.
— Pour quelle vie alors ?
Elle transféra le thé de la marmite à la théière, puis de la théière aux gobelets, tout cela avec des gestes gracieux quasi artistiques. La vapeur aromatisée les enveloppa et chatouilla leurs narines.
— Je n'en suis plus sûre.
Tel un saumon déterminé à remonter la rivière, une question jaillit des flots de ses pensées : « Pourquoi n'êtes-vous pas ma mère ? » Elle aurait voulu descendre d'un peuple grandiose et magnifique, de partager ses racines, ses cultures, ses tournures de phrases, sa perspective. Entre deux battements de coeur, l’elfe voulut que son vrai nom fût Ourébi, que sa peau fût de la couleur de l'écorce d'oranger et ses cheveux aussi foncées que l'aile du vautour, l'onyx et la nuit. Mais Eleonara était Eleonara et ne pouvait être personne d'autre. Secouée par cette ineptie, elle la repoussa dans sa pile de vœux honteux, frustrés ou inavoués. La pensée ne tarda pas à faire son retour, cependant. « Aurais-je été différente si vous aviez été ma mère ? Serais-je devenue comme vous ? Aurais-je moins souffert ? Aurais-je rejoint les Mysticophiles ? Aurais-je été belle, sûre de moi, impitoyable et bronzée ? Aurais-je plu à...? »
Là, Eleonara s'énerva ; elle sortit la pelle et catapulta le tout aux oubliettes. Elle se sentait incapable de plaire. Pas avec cette laideur qu'elle portait dans le cœur et sa culpabilité tartinée sur son visage. Elle ne le méritait pas.
— Ça va, ma fille ?
Avec un claquement de langue causé par la gêne, l'interpellée hocha la tête. « J'ai des pensées mal élevées ».
— Parle-moi de ton passé, la pressa doucement Sebasha en lui tendant une tassette. Je sais que tu as eu des heures sombres.
La gorge d'Eleonara était un puits gonflé ; ses joues et le bord de ses yeux, des fours. Son cœur, lui, était un galet calcinant, comme ceux que l'on trouvait dans le désert.
— Vous savez sans doute déjà tout ce qu'il y a à savoir sur moi. Vous vous ennuierez.
Sebasha d'Éméride décala son gobelet, ramena ses mollets musclés contre elle et cala son menton sur ses genoux.
— Je veux entendre ton histoire de ta bouche. C'est un rare délice pour moi d'écouter les récits de vie contés par ceux qui l'ont vécue et non pas ceux qui les envient, les haïssent ou les rapportent. Et tu es une elfe. Ta vie a dû être pleine de remous.
L'Opyrienne paraissait si désireuse de se changer en auditrice qu'Eleonara ne put que céder et se creuser la tête pour savoir où débuter. Aussitôt qu'elle eût commencé, elle sentit un poids quitter ses épaules et sa poitrine.
— Mes premiers souvenirs datent d'une prison, la prison des Onerres. Ce n'était pas gai là-bas, mais je n'étais pas seule. Il y avait une vieille dame dans la cellule voisine avec laquelle je m'entendais bien. Elle me parlait du monde, de la lumière, des animaux et des humains. Elle me relatait des fables et m'apprenait des chansons. Je l'aimais beaucoup, mais elle est décédée alors que j'avais six, sept ou peut-être huit ans. Je m'empêchais de manger dans l'espoir de pouvoir la rejoindre. Je n'ai pas réussi. Peu après sa mort, il s'est passé quelque chose d'étrange. Je dormais à poings fermés quand une voix lointaine, comme un murmure, s'est adressée à moi. Elle a dit « Suis les lumières » ou quelque chose de semblable. Je n'en suis pas sûre. Il se peut que je me trompe ; il se peut que je l'aie imaginé, j'étais très jeune. Pour tout vous dire, quelque chose cette nuit-là m'a réveillée et j'ai senti un objet froid contre mes chevilles. C'était les clefs de la prison. Grâce à elles, j'ai pu abandonner ma cellule et suivre les torches allumées qui, à cette heure-là, auraient dues être éteintes. C'est ainsi que je devais trouver mon chemin hors des cachots. Je n'ai pas pu aller très loin. Les autres prisonniers, tous humains, m'ont repérée. Ils ont poussé des hurlements de démon et mis les gardes à mes trousses. On m'a poursuivie, attrapée et réincarcérée.
Les lèvres sèches, Eleonara avala une gorgée de thé. Pondre des monolgues ne figurait pas parmi ses habitudes.
— Mais là ne s'arrête pas ton histoire, heureusement, commenta Sebasha. Tu n'as jamais rien su à propos des clefs ou sur comment elles sont arrivées dans ta cellule ? Et les torches restées embrasées ?
— Je crois que quelqu'un voulait m'aider ce soir-là sans être vu, mais je n'ai à ce jour jamais su qui. Je donnerais n'importe quoi pour en savoir plus. Avec le temps, je me suis convaincue qu'il devait s'agir d'un miracle et que l'esprit de la Dame, ma voisine décédée, devait y être pour quelque chose. Je ne vois pas d'autre explication. Je pense qu'elle veille sur moi, à sa manière.
Il y eut un silence, pendant lequel Sebasha souffla sur la vapeur de son thé et Eleonara tâtonna le bout de sa langue, brûlé.
— Qui que soit ton bienfaiteur ou ta bienfaitrice, avança l'Opyrienne, il ou elle devait posséder une âme bonne, capable de voir, à travers les barreaux de notre monde, la désolation d'une enfant. Tu as donc un ange gardien, Eleonara. Je t'envie.
Elles laissèrent un long silence s'écouler. Un silence au bout duquel Eleonara souffla :
— J'ai peur.
Sebasha se rapprocha.
— Je sais. Comme les plantes de la grêle, l'oiseau de la tempête, la fleur de la sécheresse et l'Homme de la mort.
— Les murs n'ont pas peur. Les murs ne peuvent pas avoir peur parce que ce sont des murs.
— Tu te trompes. Les murs ont peur des craquelures temps qui les rendent poussière. La matière la plus dure n’est la plus tenace. N'oublie pas que l'eau, par sa persistance, modèle la pierre. Ne crois pas non plus que tu peux me battre à ce jeu de métaphores ; je suis la meilleure.
Elles se sourirent.
— Ne perds pas espoir. Tu n'es plus seule.
Bien qu'aucune d'entre elles ne l'eût remarqué, le soleil avait grimpé dans le ciel, dessinant de petites fleurs et des mandalas clairs à travers la moucharabieh. L'Opyrienne et l'elfe tirèrent les rideaux et se couchèrent : la première sur un banc et la deuxième sur la couchette rembourrée de paille.
Eleonara s'endormit avec la curieuse impression d'incarner l'enfant de la maison, d'être entourée. C'était une conclusion farfelue, formulée dans l'ivresse du sommeil, quelques secondes avant de s'assoupir, mais mêlée à une débordante envie d'arriver au lendemain au plus vite pour rejoindre Sgarlaad.
J'ai l'impression qu'il y a une véritable bascule depuis les retrouvailles avec Sgarlaad : alors qu'on pensait que la découverte qu'Elé était une elfe allait parachever le désastre, elle provoque en fait un revirement des plus agréables : Elé découvre qu'elle a des alliés, voire des amis <3 C'est très réconfortant après toute la solitude qu'elle a traversée.
C'est comme si une espèce de famille se formait, petit à petit, c'est très beau ^^
Bon! Maintenant, il ne reste plus qu'à récupérer Sgarlaad (et à sortir d'Arènes, à aller jusqu'à Hêtrefoux, à trouver les Elfes...) :D
Alice
Je crois avoir lu une fois sur le fofo une plume qui disait qu'elle appréciait les histoires de personnages seuls qui, en rencontrant d'autres personnages seuls, se sentent moins seuls. Moi c'est pareil ^^ C'est vrai que pas mal de personnages se sont rapprochés dans ce tome :) J'ai beaucoup réfléchi à comment se passeraient ces "révélations" des oreilles d'Eleonara et ce n'était pas facile de trouver une solution qui semble naturelle, alors c'est super si tu as aimé le résultat !
En effet, Eleonara a encore du pain sur la planche !
Merci pour tes commentaires qui me font chaud au coeur <3
J'ai eu beau sentir que Sebasha était nettement de son côté, et même protectrice envers elle lors de l'entretien avec Bezuchiel, la bizarrerie (c'est un euphémisme) du petit émir les obligeait à taire beaucoup de choses. Mais une fois seules...
Et c'est tout à fait cohérent que pour la première fois, Elé ait envie de "s'appuyer" sur quelqu'un, d'être en confiance. Et aussi que ce sentiment soit si nouveau pour elle et si agréable qu'elle s'imagine ce qu'aurait été sa vie si Sebasha avait été sa mère (encore que je ne voyais pas leur différence d'âge aussi grande, mais je ne crois pas me rappeler l'âge d'Elé, 16 ans, peut-être ? 17 ? Ni connaître l'âge de Sebasha).
Quant au début : la question des oreilles est intéressante ! Bien sûr, je trouve qu'Elé a très bien fait de renoncer au "coupage d'oreilles" : au lieu de ne plus appartenir aux elfes pour appartenir aux humains, elle se serait retrouvée au milieu, à ne faire partie ni des uns, ni des autres.
Bref, on est toujours dans une phase où l'action est au ralenti, mais ce n'est pas du tout un problème. D'abord parce qu'il y a eu énormément d'action avant, et surtout parce que j'adore ce genre de chapitre, où on n'apprend pas forcément grand chose, mais on assiste à des petits moments magiques qui font évoluer les personnages et leurs relations.
Rien à dire sur ce chapitre (à part mes petits pinaillages habituels, bien sûr) : il est parfait !
Détails :
"Je ne serai libre que lorsque mon nom de courra plus sur les lèvres," : ne courra
"Ç'avait été un idéal brouillé où elle s'y était vue heureuse et épanouie." : où elle s'était vue
"celle d'avoir passé son existence à fixer un plafond blanc, d'y avoir projeté ses fantasmes les plus fantaisistes, sans se rendre compte que le plafond en question se vermoulait." : je ne savais même pas que le verbe "vermouler" existait ! Mais en effet, il existe :)
"Bien sûr, l'opération aurait lieu après notre mission : tes oreilles pointues seront indispensables lors la rencontre de tes semblables. " : "avec tes semblables" seraient mieux, il me semble
"Les huis de la cité sont clos pour une période de quarantaine indéfinie que ni même toi, prince, tu ne peux écourter." : que même toi, tu ne peux...
"Après avoir quitté le somnolant Bezùkiel, Eleonara n'aurait pas su estimer combien de temps Sebasha et elle avaient marché à travers les appartements princiers." : je pense que c'est "somnolent" (adjectif) et non "somnolant" (participe présent)
"À chaque fois que celle-ci s'adressait avec tiédeur ou un éclat protecteur dans les yeux, l'elfe réalisait sa chance de jouir d'une alliée aussi puissante et informée." : s'adressait à elle (transitif indirect obligatoire)
"Des dagues, des glaives, des sabres, des poignards, des coutelais, des poinçons et des clous." : coutelais ? ou coutelas ?
"Elle aurait voulu descendre d'un peuple grandiose et magnifique, de partager ses racines, ses cultures, ses tournures de phrases, sa perspective." : partager ses racines (le "de" est en trop)
"Les murs ont peur des craquelures temps qui les rendent poussière." : est-ce qu'il ne manque pas un mot ? des craquelures de/du temps ?
"La matière la plus dure n’est la plus tenace." : n'est pas la plus tenace
"Bien qu'aucune d'entre elles ne l'eût remarqué, le soleil avait grimpé dans le ciel, dessinant de petites fleurs et des mandalas clairs à travers la moucharabieh." : je crois que moucharabieh est masculin
Je m'en vais lire les aventures de Melvine, maintenant ;)
C'est vrai que Sebasha et Eleonara n'ont pas eu beaucoup d'occasions pour avoir des discussions plus personnelles; je suis très contente qu'elles t'aient semblé naturelles et que tu les aies appréciées :) Tu as bien vu; Sebasha se retient un peu devant Bezùkiel, il faut se rappeler que même s'ils ont des intérêts communs actuellement, les Mysticophiles ne travaillent pas pour le prince et ont leurs propres projets ^^
Je ne précise pas trop l'âge pour que le lecteur puisse "décider", mais à mon avis, Sebasha a autour des 35 ans et Eleonara a peut-être 18-19 ans (elle-même ne connaît pas son âge exact). Est-ce que tu penses que je devrais mettre plus d'indices par rapport à leur âge dans le texte ? Est-ce que tu penses que c'est étrange qu'Eleonara imagine Sebasha en tant que mère alors qu'elles n'ont qu'une quinzaine d'années de différence ?
Chouette que le petit moment philosophique sur les oreilles t'ait plu ! C'était une excuse pour parler d'identité en mode caché :D
Merci pour ce paquet d'enthousiasme que tu m'envoies pour ce chapitre !! J'aime beaucoup les scènes d'actions mais les scènes où les personnages se rapprochent n'ont pas de prix dans mon coeur xD
Et merci pour des pinaillages en or que j'adore et qui m'aident beaucoup !!