26 décembre 1940

Par deb3083

Cher journal,

Fêter Noël sans maman est toujours aussi compliqué pour moi. Cette année, ma douleur a quelque peu été adoucie par les fiançailles de Friedrich avec Emmy, une nièce d’Albert Speer, l’architecte du Reich et ami intime de notre Führer.

Si, dans un premier temps j’ai trouvé cet engagement bien rapide puisqu’ils se sont rencontrés lors de cette soirée au Deutsches Museum de Munich il y a trois mois, en discutant avec Emmy, j’ai pu constater qu’elle était la femme idéale pour mon cher petit frère. Elle travaille au sein du ministère de l’Aviation du Reich et je dois dire que ses parents l’ont parfaitement éduquée.

Cette bonne nouvelle m’a permis de me concentrer sur mon travail qui ne manque pas ici à Dachau.

Nous avons dû faire face à quelques protestations de la part de certains gardes et mon supérieur m’a autorisé à organiser une petite réunion afin de clarifier la situation. Nous avons reçu des instructions parfaitement justifiées, nous n’avons pas à réfléchir au bien-fondé de ces consignes mais à les appliquer consciencieusement.

Comme je leur ai rappelé, ils ne sont certainement pas en position de porter un jugement personnel sur la nécessité d’exterminer les Juifs et les ennemis du Reich.

Le Führer lui-même l’écrivait dans son excellent lire Mein Kampf.

Je t’en cite un extrait particulièrement limpide à ce sujet :

« C’est maintenant l’inexorable Juif cosmopolite qui combat pour la domination des autres peuples. Aucun d’eux ne peut écarter cette main [celle des Juifs] de sa gorge autrement que par le glaive. Seule, la force rassemblée et concentrée d’une passion nationale peut, d’un sursaut, braver les menées internationales qui tendent à réduire les peuples en esclavage. Mais un tel geste ne saurait aller sans effusion de sang ».

Même un membre chevronné du parti ne se poserait pas de telles questions au sujet des Juifs.

 

Au moins, mes supérieurs ont compris qu’ils pouvaient me faire entièrement confiance et à ce titre, je suis chargé de repérer les esprits méfiants dans chaque groupe de prisonniers qui arrivent au camp.

Ces hommes, que nous ne quittons pas des yeux un seul instant, nous les soupçonnons de fomenter des évasions ou des tentatives de révolte avant même d’être incarcérés à Dachau. Afin qu’ils ne sèment le trouble parmi les kommandos, dès que j’en repère un ou qu’un de mes camarades vint me faire part d’un doute au sujet d’un prisonnier, je l’emmène discrètement derrière un baraquement et je l’exécute avec une carabine de petit calibre afin que le bruit n’alerte personne dans le camp. Inutile de provoquer une révolte.

 

Il y a quelques jours, un homme a eu le cran de me regarder droit dans les yeux, il m’a dit que l’Allemagne paierait cher ses crimes. Je n’ai pas hésité à lui cracher à la figure puis il a eu droit à un traitement spécial de coups de bâtons avant d’être enfermé dans une cellule sans eau ni nourriture.

Comme je l’ai répété à mes hommes par la suite, lors de notre formation nous avons appris une chose très simple : pour qu’il y ait crime, il faut satisfaire à quatre conditions. Il faut un sujet, un objet, une action et une intention. S'il manque un seul des quatre éléments, alors nous n’avons pas affaire à un crime punissable.

Dans ce cas-ci, le sujet est le gouvernement, l’objet, le prisonnier Juif, l’action, son insolence envers moi et l’intention, refuser de se soumettre aux règles du camp en me manquant de respect.

C’est aussi simple que ça.

J’ose espérer que le message est passé et que nos hommes comprendront que tout cela, nous le faisons pour le Führer.

Et puis, se rendent-ils compte de ce qu'il pourrait arriver si les Juifs nous tenaient, nous ? Si un jour ils gouvernaient notre pays, notre monde ? Ces ordures ?

 

Ce matin, nous avons une nouvelle fois dû sévir. Et pour que le message passe bien auprès des prisonniers, nous avons choisi une dizaine d’hommes, parmi les plus robustes, et nous leur avons ordonné de se déshabiller sur la place d’appel. Ensuite nous les avons arrosés d’un jet d’eau glacée pendant environ dix minutes et nous avons exigé qu’ils restent immobiles jusqu’à ce que nous leur donnions l’ordre de rentrer dans leur baraque. Sauf que… ce n’était pas notre intention.

J’avoue que j’ai été très étonné de la résistance de certains.

Mais l’essentiel est là : ils sont tous morts sous les yeux de leurs compagnons.

C’est une technique qui nous a été indiquée par nos collègues du camp de Mauthausen-Gusen. Très intéressante et à renouveler naturellement.

Demain, Friedrich donnera sa première bastonnade. Il est temps qu’il s’endurcisse.

 

Werner 

 

 

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MélanieDeLune
Posté le 26/11/2020
Ce livre pourrait porter le titre : "Plongée dans la haine" ou quelque chose comme cela, après c'est peut être le but de l'auteur, mais j'ai du mal à saisir l'objectif derrière cette histoire, car il est IMPOSSIBLE de s'identifier à Werner
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